Israël élections avril 2019
LES FRANCOPHONES ISRAÉLIENS À LA PEINE
Par Jacques BENILLOUCHE
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Menahem Begin |
Yerouham au Néguev |
Ainsi, ils ont été utilisés volontairement comme main d’œuvre à bon marché,
souvent parce que dans les nouveaux villages, Yerucham par exemple, on n’a pas
créé de lycée afin de forcer les Marocains à entrer rapidement dans la vie
active comme ouvriers. Cette discrimination sociale a été à l’origine du
mouvement israélien des Black Panthers, créé en 1971, pour protester contre
le statut inférieur des Juifs orientaux en général. Ses fondateurs Charlie
Biton, Saadia Marciano et Réouven Abergel n’avaient pas réussi à concrétiser
leur action et ont été marginalisés par le pouvoir travailliste sous l’accusation
de terroristes.
Black panthers |
Mais Menahem Begin, leader nationaliste du Hérout, qui représentait la
principale alternative au parti travailliste dominant à la Knesset, avait le
premier compris qu’il avait une carte à jouer. Son engagement a eu un écho
particulier auprès des citoyens défavorisés et notamment des nouveaux
immigrants d'origine séfarade, plutôt religieux dans leur ensemble, qui avaient
fui les pays arabes en gardant une certaine rancune à leur égard. Ils étaient
pleins de ressentiment envers l'élite israélienne ashkénaze hautaine,
majoritairement athée et politiquement souvent proche du communisme soviétique.
Cette base populaire accorda à Begin systématiquement ses voix aux élections pour
le porter au pouvoir en mai 1977. Il sut d'ailleurs se montrer reconnaissant et il
nomma un marocain David Levy au poste de ministre des affaires étrangères et Yéhouda
Lancry comme ambassadeur en France puis à l’Onu. De nombreux séfarades
sortirent alors de l’ombre et occupèrent, enfin, de hautes fonctions.
David Levy |
Le Likoud était donc devenu naturellement le parti des séfarades et les
Francophones l’ont suivi, presque aveuglément. Mais il ne peut plus se taguer d'être le parti des Séfarades car aux élections primaires du 5
février 2019, ces derniers ont été, sinon oubliés des places éligibles, au
moins relégués très loin dans la liste alors qu'ils étaient pour la plupart des inconditionnels de Netanyahou, le rempart contre les Arabes. À part Miri Regev à la sixième place, David
Amsalem est 18° et David Bitan, ancien chef de la coalition, est 25°. On est
loin du parti de Begin de 1977 qui avait fait la part belle aux Marocains.
Mais les Francophones en Israël ont toujours tout faux puisque c’est une réalité
qui se vérifie à chaque élection locale ou législative. Ils sont à la pointe du
combat nationaliste au point que la communauté française a basculé
majoritairement à l’extrême-droite. Ils se démènent à la télévision, dans les
radios, dans les réseaux sociaux pour répandre leur bonne parole du Likoud mais
en revanche ils ne sont pas payés de retour. Ils restent de la piétaille. Ils n’ont pas le droit à une place
réservée par le premier ministre aux immigrants d’Afrique du Nord. Aux
élections locales toutes les listes ont bu un bouillon au point de n’avoir pas de représentant au conseil de certaines villes, Ashdod, Ra’ananna, Netanya et
Tel-Aviv.
Lobby francophone |
Aux primaires du Likoud, ceux qui estiment
représenter les Francophones ou le lobby francophone à la Knesset n’ont
eu droit à aucun égard. Pire l’un d’entre eux de Tel-Aviv a lancé une véritable
«fatwa» contre son «ami» de Jérusalem au point de le discréditer
aux yeux des électeurs sans faire preuve d’aucune solidarité communautaire.
Mais le comble persiste car tous les
candidats ont du culot, comme Yoav Galant qui avait fait les mêmes promesses
chez Koulanou, en estimant dans sa profession de foi qu’il «a longuement
travaillé à des solutions pour les olim francophones dont nous espérons voir la
réalisation lors du prochain gouvernement». Pendant quatre ans il a fait de la figuration tandis que le nombre d’immigrants
francophones s’est réduit en peau de chagrin, à peine 2.600 personnes en 2018,
et nous tairons le nombre de retours lui-aussi croissant par pure bonté israélienne.
Le
parti travailliste n’a pas encore finalisé sa liste définitive mais peu d’espoir
anime le parti face à une poignée de candidats rescapés, s’il parvient d'ailleurs à dépasser le
seuil électoral. Yaïr Lapid et Naftali Bennett usent du «fait
du prince», l’acte arbitraire auquel les militants doivent se soumettre. Ils décident des bons élèves qui peuvent être députés. Enfin Benny Gantz peaufine sa liste qui, en raison d’accusation de gauchisme
martelée par le Likoud, ne risque pas de compter des Francophones qui lorgnent
tous à présent vers l’extrême-droite et les partis religieux. Le seul qui sauve
l’honneur est le parti orthodoxe Shass, c’est sa vocation, à condition d’accepter
l’anachronisme et de retourner au temps du Moyen-âge.
1 commentaire:
Si je comprend votre équation: juif francophone = religieux = SHAAS.
N'êtes vs pas un peu sectaire?
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