Israël élections avril 2019
EN ISRAËL, FI DES
PROGRAMMES ET FI DE L’IDÉOLOGIE
Par Jacques
BENILLOUCHE
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C’est la première fois depuis les premières
élections du 28 janvier 2003, suivies de celles du 28 mars 2006, puis du 10
février 2009, du 22 janvier 2013 et enfin du 17 mars 2015 auxquelles j’ai
participé en tant que citoyen israélien, que des élections ont lieu sans aucun
intérêt national de la part des électeurs. Les Israéliens
ignorent la politique et votent uniquement pour des hommes. On ne discute plus
de programmes et l’on ne débat pas sur les différentes idéologies. Les Israéliens n’écoutent plus ou ne
font aucun effort pour écouter. Deux clans se sont organisés : le clan des
Tout sauf Bibi et celui de Bibi roi d’Israël.
Que
le premier ministre soit inculpé ou non, on garde les œillères sur sa réussite économique ou diplomatique face à des juges, une armée et une police qualifiés honteusement de gauchistes parce qu'on touche au tout puissant. Que les chancelleries européennes soient closes
pour les dirigeants israéliens cela est négligeable puisqu’elles ont été
remplacées par celles de l’Est, souvent aux mains de dictateurs patentés. Que
deux millions de pauvres israéliens attendent de meilleurs jours pour
bénéficier de la Nation Startup, cela n’est pas d’actualité car ils n’avaient
pas besoin d’être pauvres. Israël a perdu sa tradition de solidarité héritée du temps du sionisme historique. Par ailleurs la présence très symbolique des femmes dans la liste Likoud ne semble gêner personne comme si les dirigeants ont voulu offrir une preuve de bonne volonté à leurs alliés orthodoxes.
Parce qu’Israël a été classé pour la troisième année
consécutive au huitième rang des pays les plus puissants au monde, par US
news & World Report, alors les critiques de la politique
gouvernementale sont accusés de vouloir discréditer Netanyahou
«par tous les moyens même les plus vils». On doit camoufler sous le
tapis l’augmentation anormale du coût de la vie et de la construction qui
freinent l’arrivée des nouveaux immigrants d’Europe, censés être en situation
de danger sécuritaire. La gouvernance n’aborde pas ces questions fondamentales
et préfère débattre sur des fake news construites pour l’occasion ou les
déclarations périmées d’un autre âge, telle cette ignoble affiche électorale.
En haut les gauchistes extrémistes, en bas les vrais sionistes |
On a perdu le sens de la mesure. À quatre
semaines des élections, on ne se pose la question de savoir si Netanyahou est
encore apte à la fonction de premier ministre. Les politiques ne voient pas
d’autres sujets de préoccupation ni d'autre enjeu. Les questions sécuritaires ont
été éludées par le Likoud car il sait qu'il peut difficilement rivaliser avec trois anciens
chefs d’État-major alors que les questions de défense ont toujours été
fondamentales dans un pays en guerre permanente. Même le budget militaire n’est
pas abordé face à des experts qui ont réponse à tout. Le problème de l’Iran est même oublié car ce serait mettre des concurrents à la lumière .
Netanyahou et ses soutiens kahanistes |
Le parti de
Gantz et Lapid, Bleu et Blanc, a publié son programme économique et social
ainsi que ses choix vis-à-vis de la religion mais il n’a semblé intéresser
aucune presse qui cherche plutôt «le sang». Quelques bribes ont été extraites mais seul le sort de Netanyahou
les intéresse. Tous les
partis de la coalition sont vent debout pour soutenir le premier ministre et
parmi eux un chef de parti orthodoxe délinquant et un ancien chef de la coalition qui
vient d’être inculpé par la justice. C’est à croire qu’il existe une
association de défense des anciens inculpés pour corruption et fraudes ayant eu
affaire au Procureur de l’État, nommé par Netanyahou lui-même, mais
à présent accusé de gauchisme.
David Bitan devant l'immeuble de l'unité de police 433 |
Les dirigeants
orthodoxes censés défendre la droiture et la morale, ne trouvent rien à redire
dès lors que le financement de leurs écoles talmudiques est assuré et que la
loi sur la conscription obligatoire des élèves des yeshivot est mise aux
oubliettes. Seule les préoccupe la situation qui perdure et qui fait plier les
laïcs, ces bons à rien qui ne respectent pas les textes sacrés. Avec eux, il ne
peut pas y avoir de liberté si les hommes ne portent pas la kippa et si
les femmes ne restent pas cloîtrées chez elles.
Ben Gourion à la Knesset |
Les sondages
montrent ouvertement que le pays est divisé en deux, non pas pour des questions
de programmes mais pour des rivalités de personnes ce qui n’a jamais été le cas
durant toute son existence. Même du temps de David ben Gourion et de Menahem
Begin, deux conceptions du sionisme s'opposaient mais la guerre des personnes
n’était pas arrivée à ce point de non-retour. L’intérêt suprême du pays était
en jeu et rien ne pouvait le diviser.
Les sondages, auxquels on y croit peu, car ils reflètent plutôt les intentions de ceux qui les
commandent et les payent, ne départagent pas les deux clans. C’est pourquoi de
sérieuses surprises ne sont pas impossibles avec l’émergence de leaders
toniques mais ignorés par les sondeurs. Le parti Zehut de Moshé Feiglin, un pur
des purs de l’extrême-droite peut récolter les déçus du Likoud qui n’approuvent
pas sa mollesse ni la corruption mise au rang de méthode de gouvernement. À
l’autre bord, Orly Levy-Abecassis qui semble vouloir déserter la droite dure afin de proposer ses solutions économiques et sociales pour réduire la pauvreté,
pour améliorer la prise en charge de la santé des citoyens, et pour donner un
toit décent à tout le monde. Ces deux micros-partis pourraient arbitrer le résultat
des élections que l’on estime déjà pliées à tort.
Il est certain
que les résultats des élections seront serrés dans un sens ou dans l’autre et
qu’aucun clan n’aura la majorité car ils se neutralisent. Mais l’on sent au fil du temps le transfert progressif d’électeurs de droite vers l’extrême ou alors vers le parti des généraux. Les dirigeants du Likoud sentent la situation leur échapper car ils utilisent à
présent des expédients politiques qui ne sont pas à leur honneur. Certes dans l’immédiat, Benny Gantz ne serait pas en mesure de constituer un gouvernement
majoritaire mais un gouvernement minoritaire avec la neutralité des partis
arabes qui n’entreraient pas dans la coalition en échange de quelques faveurs
politiques comme, de son temps, Yitzhak Rabin avec son gouvernement de 1992 qui
avait réussi à gouverner normalement.
Bibi et l'Aipac |
Gantz n’a rien
à attendre des orthodoxes, tandis que Yaïr Lapid les déteste suffisamment pour
ne pas accepter de les voir siéger à ses côtés. Leurs électeurs font fidèles à
leurs gourous qui les financent au moyen de fonds publics. Le parti Bleu et Blanc est tout neuf et il
vient à peine de se faire connaître. Il n’a aucune implantation locale ni aucun appareil électoral digne d’un vrai parti. Mais il a une volonté à toute épreuve. Le Likoud compte sur cette faiblesse d'implantation pour remonter dans les sondages et coiffer sur le poteau Gantz qui n'a pas de réserves à
gauche car les travaillistes sont laminés et que le parti Meretz risque de ne
pas passer le seul électoral de 3,25% des voix puisque ses militants semblent avoir décidé de voter utile pour assurer la défaite de Netanyahou.
On n’a jamais
été dans une telle incertitude et génie serait celui qui donnera la physionomie
du paysage politique le 10 avril 2019. Il ne faudrait pas que les électeurs votent sans conviction ou s'abstiennent et que les lendemains d'élections génèrent des gilets bleus.
3 commentaires:
Hola, Mr Benillouche, les photos restent blanches...(?)
@ Denis Sabrié
C'est un problème déjà soulevé. Nos images sont lourdes et parfois elles n'arrivent pas à être chargées sur des petits téléphones ou des ordinateurs peu puissants. Mais la majorité arrive à les charger. Essayez sur un autre support SVP
avec votre réponse, ça c'est débloquée, j'ai les images...bon c'est vrai, suis en bas débit dans ma cambrouse...pourtant la fibre optique a soit disant était installée...et j'ai un ordinateur portable qui commence à "ramer"..ceci, explique peu -t-être cela..
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