UN CESSEZ-LE-FEU
SANS CONSENSUS GÉNÉRAL
Par Jacques BENILLOUCHE
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Le cessez-le-feu, entré en vigueur le 26 août à
19 heures, est l’œuvre de Benjamin Netanyahou et de ses proches collaborateurs. Jamais le pouvoir personnel n’aura été aussi mieux
illustré qu’à l’occasion de ces négociations. Selon le ministre Naftali Bennett, le Cabinet
de sécurité a été mis à l’écart et informé, partiellement et uniquement par téléphone, de l’état d’avancement
des pourparlers, sans pouvoir en débattre démocratiquement. Une certaine grogne
se fait ouvertement sentir au sein du gouvernement condamné à jouer les
potiches parce que la délégation israélienne au Caire a été humiliée selon eux.
Certains membres du gouvernement estiment que le gouvernement a
sous-estimé la puissance politique de Khaled Mechaal qui tirait les véritables
ficelles depuis son exil au Qatar et qui, par son intransigeance, a entraîné la
mort de plus de 2.000 Palestiniens et la réduction de l’arsenal du Hamas, les
tunnels et les fusées. Mais il a réussi à mettre en première ligne politique un Hamas qui avait été complètement affaibli. C'est pourquoi des Israéliens n’ont pas hésité à demander la mise sur
liste noire de Khaled Mechaal, ouvrant ainsi la porte à une élimination ciblée.
Un Cabinet divisé
Cabinet de sécurité |
Le
premier ministre israélien savait qu’il n’arriverait pas à obtenir l’unanimité
des membres du Cabinet dès lors où une fracture nette a éclaté au grand jour. Quatre ministres sur huit, et non des moindres,
ont ouvertement affiché leur opposition : Avigdor Lieberman, ministre des
affaires étrangères, Yitzhak Aharonovich, ministre de l’intérieur, Naftali
Bennet, ministre de l’économie et Gilad
Erdan ministre de la communication. En revanche Moshe Yaalon, l'ancien faucon et ministre de la
défense, Tsipi Livni, ministre de la justice et Yaïr Lapid, ministre des finances
ont appuyé le principe du cessez-le-feu. Cependant en l’absence de réunion, on
ignore la position des autres membres du Cabinet de sécurité. C’est pour éviter
ce vote, qui pouvait le mettre en
minorité, que Netanyahou a décidé de faire cavalier seul.
La
gêne du gouvernement était tellement flagrante
que le cessez-le-feu n’a pas fait l’objet d’une déclaration commune, Mahmoud
Abbas et le Hamas l’ont d'abord annoncé en claironnant ce qu’ils considèrent comme une
victoire de leur camp. Les ministres israéliens étaient aux abonnés absents. Les
Israéliens ont attendu l’entrée en vigueur du cessez-le-feu pour annoncer discrètement
qu'ils avaient accepté «la proposition
égyptienne d'un cessez-le-feu sans condition et illimité dans le temps».
Le gouvernement israélien n’a
pas cru devoir diffuser les termes précis de l’accord, laissant les Égyptiens se
glorifier de la concrétisation d’un accord signé sous leur égide. L’hypothèse
la plus probable concerne l’ouverture des frontières avec Gaza pour le passage
de l’aide humanitaire et des matériaux de construction sans que l’on sache les moyens
de contrôle. Les autres clauses ou promesses, qui doivent certainement exister, n’ont fait l’objet ni de
délibération et ni de publication.
Une opposition ferme
Zaava Gal-On |
L’extrême-gauche
Meretz ne se réjouit pas de cet arrêt
des combats qui a vu émerger le Hamas en vainqueur. Son leader Zahava Gal-On a
estimé que «le cessez-le feu arrive trop
tard. L’opération est un échec stratégique pour Netanyahou qui s’est aventuré dans
une guerre sans but, en donnant une victoire au Hamas sur le dos des habitants
du sud. Un gouvernement irresponsable a infligé une douleur au peuple d'Israël».
L’échec
est d’autant plus grand que c’est la première fois dans l’histoire d’Israël que
des localités frontalières sont entièrement évacuées par une population civile
désespérée. Au plus fort de la Guerre des Six-Jours, durant laquelle Israël s’est
trouvé encerclé par les États arabes, les habitants des kibboutzim de la ligne verte avaient maintenu sur place tous
leurs membres.
Les maires de la région d’Eshkol
ne s’expliquent pas la passivité du gouvernement face aux centaines de tirs de
roquettes qui ont terrorisé et désorganisé le sud et instillé une peur dont jamais
les civils n’ont eu à souffrir jusqu’à présent. Ils s’étonnent d’avoir été
abandonnés à leur sort soulignant qu’aucune personnalité ministérielle, en particulier
le chef d’État-major ou le ministre de la défense, n’a eu le courage de rendre visite à ces populations
excédées, comme l’avaient en leur temps Ben-Gourion et Sharon.
Face à cette grogne, l’approche
de la rentrée scolaire aurait poussé Netanyahou à accepter un accord même
bancal pour éviter aux enfants les risques des tirs de roquettes. Il avait aussi les
yeux fixés sur la situation économique
du pays avec une industrie touristique paralysée et des dépenses militaires en
forte hausse. Il se sentait obligé d’enrager la baisse de sa côte de
popularité.
Absence dans les médias
Manifestation de joie à Gaza |
L’absence
du gouvernement dans les médias a laissé libre cours au Hamas pour célébrer dans
les rues de Gaza une victoire dans la liesse, avec des tirs de joie en se
glorifiant qu’il avait infligé à Israël ses plus lourdes pertes, 64 soldats
tués, depuis la guerre du Liban. Il a
par ailleurs assuré «avoir défait la légende de l'armée israélienne qui se dit invincible». Les dirigeants du Hamas et du djihad
islamique sont sortis de leur blockhaus pour défiler en public, pour narguer
Israël et pour reprendre leurs propos insolents.
Al-Hindi et Zahar |
Mahmoud Zahar, haut dirigeant
du Hamas, et Mohammad al-Hindi, leader du djihad islamique, ont fait des
promesses qui révèlent quelques dessous cachés des négociations : «Nous allons construire notre port et notre
aéroport. L’avenir est à nous et se poursuivront l'armement et le développement des capacités
de la résistance». Il n’a pas prôné l’unification du mouvement palestinien
avec le Fatah mais au contraire avec d’autres mouvements extrémistes : «Nous voulons renforcer notre union avec le Djihad
islamique et tous les mouvements de la résistance pour libérer toute la
Palestine». Toujours la même dialectique de destruction d'Israël.
Les
Américains qui avaient été exclus de la négociation par l’Égypte, ont pris le train
en marche en affirmant «soutenir
totalement cet accord qui permettra aussi la poursuite des négociations
indirectes au Caire entre les deux parties sur les autres sujets dans un délai
d'un mois après le début du cessez-le-feu».
Mahmoud Abbas, revigoré après
avoir dirigé seul la délégation palestinienne au Caire, reprend du poil de la bête
et exige à présent que la communauté internationale «fixe une date butoir pour la fin de l'occupation israélienne des
territoires palestiniens» en menaçant d’adhérer à la Cour pénale
internationale (CPI) pour poursuivre des responsables israéliens sur le
déroulement des opérations dans la bande de Gaza.
Cet
accord laissera des traces en Israël. Il n’est pas certain que le gouvernement
survive jusqu’au terme de son mandat. Certains dirigeants israéliens, pensant que le temps est venu de jouer leur
propre jeu, vont faire preuve d’une velléité d’indépendance face à l’affaiblissement
de Benjamin Netanyahou. La contestation s’affirme de jour en jour dans
les rangs de sa propre majorité. Selon l’ancien ambassadeur Arie Avidor :
«Quelle que soit la forme de la sortie du
présent conflit à Gaza, les jours de ce gouvernement sont comptés, parce que ce
gouvernement, le plus à droite de l'histoire d'Israël, reposait essentiellement
sur l'immobilisme, dont il se prévalait au demeurant, le dénommant stabilité». Des élections anticipées ne régleront pas le problème car l’on ne voit pas émerger un dirigeant charismatique, à droite comme à gauche, capable de reprendre le flambeau.
Arie Avidor |
Sauf
si les politiques, et son aile droite en particulier, ne lui laissent pas le
temps, Netanyahou va reprendre le flambeau de sa guerre personnelle pour
améliorer sa côte qui a chuté le 25 août à 38% contre 82% il y a quelques
semaines, avant la guerre de Gaza.
4 commentaires:
... Bravo Bibi !
Tu viens d'instaurer une nouvelle victoire dans les rangs de nos ennemis de toujours ! Cette date sera marquée à Gaza et ailleurs par une fête dont ils ont raison de se réjouir !!
... Nous avons baissé nos pantalons, mais ils nous fourniront des djellabas et des masques pour cacher la honte du gouvernement auprès de ces populations du sud qui ont été et seront encore touchées par les tirs de roquettes.
La trêve..Les faux prétextes, comme celui de la rentrée des classes !! Quelle mascarade ! L'entrée de matériaux pour la "reconstruction"...des tunnels ! Ne nous leurrons pas. Et ça recommencera bientôt !!!
Encore une fois, bravo monsieur Bibi !!
Israël n'a jamais été aussi affaibli avec une telle gouvernance !! Nous sommes déjà la risée de quelques uns....
Les Israéliens ne sont pas d'accord avec Netanyahu et leur laissent un goût amer. Bien que la victoire revient au Tsahal , cette affaire se terminant en queue de poisson donne à croire au Hamas qu'ils ont gagné . Mauvais ! Il fallait aller jusqu'au bout pour ne pas avoir à recommencer d'ici peu.
Finalement on ne voit pas beaucoup de gain pour Israèl dans cette situation nouvelle. Je lis que sur le plan militaire il fallait aller plus loin et sur le plan politique c'est plutôt négatif.
Bon, on y est donc! C'est enfin le moment de vérité tant attendu: On s'est fait avoir en beauté!
Bravo donc à cette "opération" dont il faudra un jour que l'on m'explique quel en était le véritable enjeu car j'ai beau y avoir réfléchi, je n'ai toujours pas compris.
C'est vrai que mes livres de chevets ne sont pas ceux de Clausewitz ou Sun Tzu.
Pourtant avec quelques citations de base de ce dernier, on n'a presque plus besoin de faire une analyse très poussée de ce qui vient de se passer:
- « L'art de la guerre, c'est de soumettre l'ennemi sans combat. »
Politique étrangère et diplomatie israélienne = 0. Avigdor Liberman ne sert à rien.
- « Qui connaît son ennemi comme il se connaît, en cent combats ne sera point défait. Qui se connaît mais ne connaît pas l'ennemi sera victorieux une fois sur deux. Qui ne connaît ni son ennemi ni lui-même est toujours en danger. »
Pas besoin d'en rajouter il me semble
- « Ne laissez pas vos ennemis s'unir. » Ah dommage, ça vient de se réaliser aujourd'hui à Gaza
- « « Il n'y a pas de forteresses imprenables, il n'y a que des mauvais attaquants. »
Non Bibi, je ne te vise pas...y a la rentée des classes et pis tout ça, tout ça... En plus faut faire plaisir à Barack et Sissi être solidaire des copains quoi!
Ah? tu me dis que tu avais une tactique Bibi, prise chez Sun Tzu justement?
"En tuer un pour en terrifier un millier. »
Tu en as tué plus de mille et tu n'a terrifié personne.
Quand on n'est pas prêt à accepter le prix d'une guerre, on se fait petit.
Israël est aujourd'hui très petit.
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