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dimanche 28 juin 2015

GUERRE DE SUCCESSION AU SEIN DES CLANS PALESTINIENS


GUERRE DE SUCCESSION AU SEIN DES CLANS PALESTINIENS
Par Jacques BENILLOUCHE
copyright © Temps et Contretemps
      
Gouvernement palestinien

          La guerre de succession est lancée pour remplacer Mahmoud Abbas à la tête de l’Autorité palestinienne. Conscient que les appétits politiques s’exprimaient de plus en plus ouvertement, le président Mahmoud Abbas a décidé de prendre l’initiative politique. Il a dissous le cabinet palestinien, le 17 juin, sous le prétexte de former un nouveau gouvernement d’unité nationale capable de lancer les réformes attendues par la population. 
          Cette annonce confirme en fait le fiasco du gouvernement d’unité créé avec le Hamas en juin 2014, que nous avions prévu [1]. Depuis que les islamistes ont remporté les élections législatives de 2006, rien ne va plus entre le Fatah et le Hamas. La guerre de Gaza d’août 2014 a aggravé la situation puisque le calendrier d’élections générales a été remis en cause.



Signature de l'accord Fatah-Hamas

            Le chef du Hamas, Ismaël Haniyeh, a estimé que ce gouvernement avait failli en n’apportant aucun changement à la crise économique qui sévit à Gaza, en ne participant pas à la reconstruction de la ville et en ne versant pas les salaires aux fonctionnaires de Gaza. La visite dans la bande du premier ministre Hamdallah, prévue pour une semaine mais réduite à une journée, a été un échec qui a relancé le combat entre factions. Naïfs étaient ceux qui croyaient que l’entente allait être totale entre Fatah et Hamas alors que tout les sépare, tant l’idéologie que la stratégie politique. Le Hamas a d’ores et déjà rejeté les tentatives du comité exécutif de l’OLP de former un gouvernement de consensus parce qu’il estime que «l’OLP n’était pas la bonne structure pour former un gouvernement».

            Mahmoud Abbas a donc décidé de dissoudre le gouvernement pour prendre de vitesse ses adversaires, à l’extérieur comme à l’intérieur, qui songeaient déjà à faire cavaliers seuls. Le président de l’Autorité a eu vent des pourparlers indirects entre le Hamas et Israël pour raffermir le cessez-le feu établi en août après la guerre de Gaza dont nous en avions déjà parlé le 24 mai 2015 [2]. Le Hamas exige que toute constitution d’un nouveau gouvernement soit approuvée par le Conseil législatif palestinien où il dispose d’une grande influence. Mais l’initiative du président de l’Autorité vise surtout à contrecarrer l’alliance de fait entre Mohamed Dahlan, l’ancien chef de la sécurité de Yasser Arafat, et l’ancien premier ministre Salem Fayyad qui semblent conspirer pour le relever de ses fonctions.
Salam Fayyad

Le Procureur général palestinien, Abdel-Ghani al-Awewy, aux ordres de Mahmoud Abbas, a ainsi décidé le 21 juin de confisquer 1,6 million de dollars détenus par l’association Palestine Tomorrow for Social Development, la fondation pour nécessiteux dirigée par Salam Fayyad, sous prétexte d’actions subversives. L’Autorité soupçonne : «Fayyad d'exploiter sa fondation à des fins de blanchiment d'argent, et d’exploiter les dons reçus par la fondation pour ses fins politiques en coordination avec Mohammed Dahlan. Ces deux anciens dirigeants tentent de revenir sur la scène politique palestinienne en effectuant un coup d'État, sans effusion de sang, grâce à l'appui des acteurs régionaux et internationaux».
Dahlan et Abbas

Fayyad et Dahlan, dont les liens sont étroits, ne cachent pas qu’ils aspirent à remplacer le président actuel qui les accuse cependant d’être les hommes des États-Unis et même du Mossad. Fayyad a effectivement été imposé par les Américains en raison de son expertise économique pour mettre de l’ordre dans les finances palestiniennes. Quant à Dahlan, il a bénéficié de l’aide de la CIA et du Mossad pour constituer en Jordanie une milice prête à tout instant à reprendre le pouvoir à Gaza et à Ramallah, si l’opportunité se présentait.

En fait, la confrontation entre les différents clans est lancée pour la lutte du pouvoir. De nombreux militants estiment que le Fatah n’est plus qu’une officine au profit d’intérêts particuliers, totalement intégré au sein de l’Autorité alors que ce parti ne devrait être qu’une parmi plusieurs composantes. Lancée par Mohamed Dahlan, l’accusation concerne surtout l’Autorité qui est devenue une pompe à fric pour satisfaire les besoins d’une poignée de hauts dirigeants du Fatah. 
Mahmoud Abbas a tranché. Il s’est attaqué à Fayyad et ensuite à Dahlan en ne payant pas les salaires de ceux qui lui sont restés fidèles en Cisjordanie et à Gaza. Mais l’unité palestinienne ne pourra pas se faire car le président de l’Autorité pose comme condition le maintien de l’exil de Dahlan et son élimination du comité central du Fatah d’où il avait été exclu en juin 2011. En fait le Fatah souffre de l’absence d’un leader charismatique non contesté [3] ce qui entraîne des dissensions internes permanentes.
Olmert, Dahlan et Mofaz

Les leaders arabes sont conscients du vide palestinien, et songent de plus en plus à Mohamed Dahlan. Le conflit interne s’est propagé jusque dans les camps palestiniens du Liban où les courants s’affrontent violemment. Le directeur libanais de la sécurité, le général Abbas Ibrahim, s’est donc déplacé à Abou Dhabi pour rencontrer Dahlan en mars afin de tenter une médiation avec Mahmoud Abbas qui a refusé tout processus de réconciliation aussi bien avec Dahlan qu’avec le Hamas.  Les Occidentaux, qui financent l’Autorité palestinienne, s’inquiètent du blocage de la situation politique. La question du remplacement de Mahmoud Abbas est, pour eux, redevenue d’actualité.
Une réunion tripartite, États-Unis, Égypte et Israël, a eu lieu au Caire en juin pour aborder ce sujet sensible. Les candidats palestiniens ne sont pas légions sachant que certains ont d’office été frappés du veto d’Israël, à l’instar du détenu Marwan Barghouti et de Jibril Radjoub. Les trois pays ont retenu Mohamed Dahlan comme candidat commun parce qu’il a été l’homme fort de Gaza et qu’il compte encore beaucoup de fidèles dans la région. Il entretient des relations étroites avec l’égyptien Al-Sissi et avec les pays du Golfe qui aspirent à une stabilisation du conflit palestinien. Le chef des services de renseignements palestiniens, Majid Faraj, est aussi sur la liste parce qu’il coordonne la sécurité de la Cisjordanie avec Israël mais il est peu connu.
Majid Faraj

Aucune décision n’a été prise à l’occasion de cette réunion secrète mais la guérilla entre les clans palestiniens va s’intensifier. Le problème n’est pas politique mais financier car des grosses sommes d’argent sont en jeu et créent la convoitise parmi les Palestiniens. Le sort des populations de Gaza et de Cisjordanie est le dernier des soucis des leaders installés à Ramallah.





2 commentaires:

Véronique ALLOUCHE a dit…

Dans ces conditions et dans l'hypothèse d'une paix avec les palestiniens, quel serait l'interlocuteur fiable d'Israël?
Véronique Allouche

Benjamin a dit…

dans les personnalités Palestiniennes j'ai toujours apprécié monsieur Fayyad, homme de modération et qui presente bien.
monsieur Dahlan avait participé activement avec les forces de polices israeliennes avant l'election palestinienne de 2006 et la rupture. il represente le partenariat sécuritaire entre Israel et la Palestine. ce point est loin d'etre neutre.
ces deux figures palestiniennes sont les meilleurs atouts, dans l'immediat, des personnalités politiques de Palestine. maintenant il y a aussi les nouvelles generations qui peuvent apporter une nouvelle vision, à la politique Palestinienne.