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samedi 6 juin 2015

RECOMPOSITION DU MOYEN-ORIENT EN ÉTATS NATIONS



RECOMPOSITION DU MOYEN-ORIENT EN ÉTATS NATIONS
Par Jacques BENILLOUCHE
copyright © Temps et Contretemps 


Le chaos qui règne au Moyen-Orient est en train de détruire les structures étatiques actuelles en favorisant l’émergence de nouveaux États nations. La recomposition est en marche pour les Kurdes et pour les Druzes qui se révoltent depuis longtemps pour une autonomie au sein de pays opposés à leur émancipation. Devant la situation dramatique du camp Assad, les Alaouites se contenteraient aussi d’une autonomie pour recréer leur État.




Les conflits locaux étaient prévisibles depuis la création artificielle de structures étatiques par les puissances occidentales, au lendemain de la première Guerre Mondiale à la suite du démembrement de l’Empire Ottoman. Le chaos général qui règne dans la région favorise aujourd’hui le démembrement des États et la formation de petits États nations, l’État kurde, l’État druze ou l’État alaouite, qui pourraient songer à entretenir des relations économiques et diplomatiques. Israël y voit son intérêt car le morcellement d’États ennemis, en plusieurs entités moins menaçantes, réduit les risques et satisfait sa stratégie dans la région. Paradoxalement, Israël se sent plus en sécurité depuis que le Moyen-Orient est à feu et à sang.
L'État des Druzes avait déjà existé sous forme d’un ancien territoire autonome créé en 1921 par la France dans le cadre du mandat français en Syrie. Il a été démantelé en 1936 lorsque le gouvernement français avait décidé de l’indépendance de la Syrie. L'État des Druzes avait alors été intégré à la Syrie mandataire le 2 décembre 1936 en même temps que l'État des Alaouites.
La bonne nouvelle est que le président a finalement décidé de renvoyer les troupes hors d'Irak

Israël n’est pas impliqué dans ces conflits qui déchirent le monde arabe et qui entraînent une mutation dans l’équilibre régional. Et pourtant, sous prétexte de la persistance du conflit israélo palestinien, il est courant d’attribuer à Israël l’origine des troubles de la région. Ses liens privilégiés avec les États-Unis le rendent responsable de la stratégie américaine qui laisse démembrer les structures étatiques du Moyen-Orient pour mieux les contrôler et pour mieux assurer la sécurité américaine. Le monde en général veut ignorer le fait que les conflits dans la région ont éclaté à la suite de rivalités internes au sein du monde arabe et surtout de l’émergence d’un islam radical et qu’Israël n’a rien fait pour les susciter.
Mais, on ne prête qu’aux riches. Les pays de la région imputent à Israël la responsabilité du conflit israélo palestinien, de la guerre ouverte avec l’Iran et de la guerre civile en Syrie sans pour autant pointer avec précision la réalité de son implication. Israël est accusé d’avoir suscité la radicalisation des mouvements au Moyen-Orient en raison des guerres à Gaza, de l’isolement du Hamas, de la politique de construction dans les implantations et de la stagnation du processus de paix avec les Palestiniens.
L'Etat islamique

Sous ces motifs discutables, un boulevard a été ouvert aux mouvements terroristes extrémistes incluant les groupes de l’État islamique. Ils viennent d'obtenir un appui indirect de la part du secrétaire d'État américain, John Kerry, déçu par la réélection de Benjamin Netanyahou. Il a condamné la montée en puissance du leader des sionistes religieux, Naftali Bennett,  et surtout ses propos qui ont mis de l’eau au moulin des Arabes : «Les terroristes, on doit les tuer, pas les libérer. Je me suis battu toute ma vie pour défendre les deux propositions contenues dans cette phrase».
John Kerry a ignoré le fait qu’Israël a bénéficié d’un renfort allié en la personne du général égyptien Al-Sissi qui l’a rejoint dans le même combat contre le terrorisme islamique. L’Égypte a aussi déclaré la guerre au Hamas, considéré comme une branche des Frères musulmans égyptiens. Cela explique que les tunnels de contrebande entre l’Égypte et Gaza aient tous été détruits et qu’une zone tampon de sécurité ait été instituée, entraînant un arrêt de l’approvisionnement en produits alimentaires, en pétrole et en armement militaire.

Les Israéliens sont intéressés à une recomposition au Moyen-Orient pour contrer l’Iran qui constitue une menace existentielle. Ils l’accusent de financer et d’armer ses ennemis, Hezbollah, Hamas et djihad islamique et de menacer leur pays de disparition. L’accord entre l’Iran et les pays 5+1 inquiète l’État juif qui refuse de faire confiance à un Iran nucléaire et de permettre la levée des sanctions qui bloquent l’expansion des Mollahs. Dans ce conflit, Israël a obtenu l’appui d’un nouvel allié inattendu, l’Arabie saoudite.
Mais les occidentaux ne semblent pas convaincus que la Syrie reste l’épicentre des conflits qui se développent dans la région et qui peuvent influencer la situation israélienne. Deux axes dirigés contre Israël crée la menace existentielle. D’une part les djihadistes maintiennent leur objectif d’éradiquer Israël. D’autre part l’axe Syrie, Hezbollah, Iran constitue un front dangereux. Israël s’est refusé à prendre position dans le conflit syrien, a fortiori d’intervenir directement. Il préfère le pacte tacite de non-agression qui permet de maintenir le calme au Golan et à la frontière libanaise. Les frappes de convois d’armement à destination du Hezbollah ne sont pas considérées comme une ingérence israélienne mais comme des mesures ponctuelles.
Enterrement d'un membre du Hezbollah en Syrie

Pendant que se prépare une recomposition du Moyen-Orient, Israël reste attaché au maintien du statu quo. Sa neutralité lui a permis de transférer à d’autres pays le soin de débarrasser la Syrie de ses armes chimiques. Elle a surtout permis au Hezbollah et à l’Iran de mobiliser leurs troupes sur d’autres théâtres d’opération. Plus de 7.000 combattants irakiens et iraniens viennent d’arriver en Syrie pour défendre Damas tandis que l’armée syrienne perd plusieurs bastions. L’armée s’affaiblit et avec elle les miliciens du Hezbollah qui sont décimés, ce qui n’est pas sans déplaire à Israël qui voit s’éloigner, dans l’immédiat, le risque d’un engagement militaire avec la milice libanaise.
le leader kurde Barzani et Shimon Péres

Israël agira de manière discrète pour favorise l’émergence de ces nouveaux États nations. Il entretient déjà d’excellentes relations militaires et économiques avec les Kurdes qui combattent les Irakiens et les Turcs. Il utilise les intermédiaires druzes israéliens pour consolider un futur État druze en Syrie avec le soutien des druzes libanais. Enfin il favorisera la reconstitution d’un réduit alaouite qui regroupera les résidus de l’armée syrienne et les inconditionnels de Bachar Al-Assad loin des frontières israéliennes.

            Pour l’instant, le problème de Daesh paraît secondaire à Israël. Les faits sur le terrain et les déclarations publiques prouvent que Daesh et Israël évitent d'entrer en confrontation directe ou indirecte. Constitué d’anciens militaires et policiers de Saddam Hussein, licenciés et démobilisés par les Américains, Daesh a un compte à régler avec la gouvernance irakienne pour reprendre le pouvoir dans son pays. C’est une tâche déjà trop lourde pour se permettre d’ouvrir un autre front connaissant la force militaire de Tsahal. Les discours politiques et les écrits religieux de l'Etat islamique ne comportent aucun appel à combattre Israël ni même à libérer Jérusalem.

L'organisation terroriste justifie au contraire son indifférence totale vis-à-vis du conflit israélo-palestinien. Elle se réfère au Coran pour prétendre que le Livre Saint a ordonné de combattre, en priorité, l'«ennemi proche». Lors de la dernière guerre de Gaza, Daesh avait affirmé  qu'il ne comptait pas combattre Israël, malgré les bombardements de l’aviation israélienne. Il est vrai aussi que sont rares les déclarations des dirigeants israéliens contre Daesh qui n’est pas considéré comme un danger imminent ou existentiel. En réalité Israël reste braqué sur l'Iran, le Hezbollah et les autres mouvements djihadistes. Des indiscrétions font même état des centaines de rebelles, dont des membres de Daesh, qui ont été soignés dans les hôpitaux israéliens. L’artillerie israélienne intervient peu au Golan sauf en cas de représailles. Pour l’instant Daesh répond à l’intérêt stratégique d'Israél puisqu’il se charge de décimer ses ennemis les plus déterminés. 

2 commentaires:

Fernand COHEN-TANNOUDJI a dit…

Je ne comprends pas comment les occidentaux ne comprennent pas que ce sont tous les mêmes...quelque soit le nom qu ils portent. ils changent juste de nom tous les ans...leurs kalchnikoff sont les mêmes, leurs barbes sont les mêmes, ils sont issus des mêmes rangs de leurs armées ou milices ou centre de formation, ils sont armes par tous...OBAMA-POUTINE-HOLLANDE-EU....ils ne font juste que prendre leurs armes..(pendant que leurs freres politiques leur prennent leur subventions....)...et ils crient tous Alah Ou Akabar....

Max SEMORY a dit…

Ce qui me frappe c'est que contrairement au mandat sur la Mesopotamie, créé il y a près de 100 ans et immédiatement avorté par la création de la Syrie, le mandat sur la Palestine, originellement attribue aux Juifs, reste quand même très stable: une Jordanie, une entité arabe aujourd'hui palestinienne et l'Etat d'Israël.Ne serait-ce pas parce qu'Israël reste un facteur centripète et de stabilité dans l'ex mandat sur la Palestine,alors que dans l'ex mandat sur la Mésopotamie, les forces sont toutes centrifuges?
Par ailleurs, pour compléter l'intéressante contribution de Jacques, je dirais que la carte du mandat de 1922 sur la Mésopotamie semble curieusement refléter la situation actuelle sur le terrain où les Alaouites ne contrôlent plus que 25% de la Syrie, les Kurdes et les Druzes se sont forgés des territoires autonomes et les groupes chiites prennent lentement mais surement le reste.
L'histoire se repète parfois!