ISRAËL ET L’ILLUSION D’UN ACCORD AVEC LES PALESTINIENS
Par Jacques BENILLOUCHE
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Tsipi Livni, John Kerry et Saeb Erakat |
Tandis que Tsipi Livni participe aux discussions secrètes avec Mahmoud Abbas pour résoudre le conflit israélo-palestinien, les manœuvres vont bon train dans le camp de la droite pour torpiller ces négociations, quitte à entrainer un casus belli au sein de la coalition gouvernementale.
Pression américaine
Les nationalistes veulent décrire l’image de ce que
serait la Cisjordanie selon leur credo afin de mettre en évidence la vacuité
des négociations. Les deux camps, palestinien et israélien, restent sous la
pression permanente de John Kerry qui les force à aborder de front les
questions qui fâchent. Il en va de son engagement personnel parce qu’il est
convaincu que seule une solution au conflit palestinien redorerait le blason
des États-Unis au Moyen-Orient et auprès des pays musulmans. Il compte d’ailleurs consacrer
le temps du mandat restant à Obama pour imposer une décision à tout prix.
Des Palestiniens attendent l'arrivée du bus transportant des prisonniers libérés par Israël, au point de passage d'Erez le 13 août 2013 |
Certes des gestes tangibles ont montré la bonne
volonté israélienne. 26 prisonniers palestiniens,
faisant partie d’une première tranche, ont été libérés le 14 août 2013. Israël devrait libérer un second groupe de 30
prisonniers palestiniens, le 29 octobre 2013, dans le cadre des pourparlers. L'annonce cet été par le gouvernement de la création de logements à Jérusalem-Est et en Cisjordanie fait pendant à la
libération des prisonniers avec le but de convaincre les opposants de
calmer leurs réticences. Ces nouvelles constructions ont suscité le mécontentement des Palestiniens car
elles constituent un frein pour la solution du tracé des frontières, de
l’avenir des implantations et du statut de Jérusalem.
Cependant Benjamin Netanyahou est confronté à une
grande majorité de ses ministres qui refusent la solution à deux États et qui
surfent sur la division des Palestiniens pour maintenir le statu quo. Certes le
premier ministre refuse le retour aux frontières de 1967 et veut garder la
totalité des grandes implantations de Cisjordanie ainsi que 40% des
territoires. Mais il doit faire face au sein de sa coalition à une opposition
de plus en plus déterminée.
Israël Katz |
Israël Katz, ministre Likoud des transports, considère
que «tout comme personne ne songerait à céder des territoires à Bachar
Al-Assad dans la situation actuelle, personne ne songe sérieusement à céder des
territoires à Mahmoud Abbas alors qu’il ne gouverne qu’une partie de la
population palestinienne». Il fait écho au discours du Hamas à Gaza qui «rejette
les négociations parce que le président de l’Autorité n’a aucune légitimité
pour négocier au nom du peuple palestinien sur des questions fondamentales». L’impasse
entre palestiniens est donc totale.
Un État unique
La question souvent soumise aux partisans d’un seul État
englobant Israël et la Cisjordanie est la façon dont ils envisagent le statut
des Arabes vivant dans les territoires. Le ministre du
logement et de la Construction Uri Ariel, membre du parti religieux sioniste Habayit Hayehudi
de Naftali Bennett, préconise tout simplement d’annexer la Cisjordanie parce
qu’il n’est pas inquiet par la menace démographique arabe. Il s’appuie sur le
statut des 300.000 Arabes vivant dans la partie Est de Jérusalem, dont seuls
10.000 sont citoyens israéliens. Le reste est constitué de résidents ne
disposant que du droit de vote aux élections locales.Il ne s'agit donc pas de donner aux habitants des territoires le même statut que celui des Arabes israéliens qui disposent de tous les droits.
D’ailleurs aux
élections locales du 22 octobre 2013, seuls 3.000 arabes se sont déplacés pour
voter et à peine deux candidats arabes figuraient sur les listes de Jérusalem.
Selon le projet d’Uri Ariel, les habitants de Cisjordanie qui seront annexés pourraient
obtenir la nationalité pleine et entière sous réserve de parler et d’écrire
l’hébreu. Ils doivent par ailleurs prouver leur loyauté envers l’État d’Israël en faisant une déclaration officielle d’allégeance, à l’instar du serment
que prêtent les Américains.
Blocages
juridiques
Tandis que la négociation se poursuit, Netanyahou met
en œuvre des blocages juridiques pour contrer une éventuelle évolution positive. Le gouvernement israélien vient d’adopter un
projet de loi prévoyant un référendum pour valider tout accord de paix avec les
Palestiniens. Mais étant donné que la plupart des décisions de cet accord
resteront secrètes, on ignore sur quoi pourrait porter le référendum.
Pour verrouiller encore plus les éventuelles
concessions accordées par Tsipi Livni, un autre projet de loi israélien prévoit
qu'aucune négociation sur le statut de Jérusalem ne pourra se tenir avant un
vote préalable des deux tiers de la Knesset, soit 80 députés. Ce chiffre ne
pourra jamais être atteint compte tenu de l’opposition systématique des
nationalistes et d’une partie du Likoud à un accord avec les Palestiniens. On
ne comprend plus l’intérêt de continuer à négocier si déjà de nombreux
obstacles sont imposés par le gouvernement lui-même.
Le statut de Jérusalem a toujours été la pierre
d’achoppement de toutes les négociations antérieures. En créant des blocages,
les Israéliens montrent leur opposition à diviser la capitale même s’il s’agit
d’attribuer quelques quartiers arabes non fréquentés par les Juifs, hormis bien sûr les Lieux saints de la vieille ville. Selon Jamal
Mheissen, responsable du Fatah : «Ce gouvernement extrémiste tente de
faire échouer les négociations depuis qu'elles ont commencé. Ce n'est qu'un
obstacle de plus».
Selon les médias, le premier ministre serait opposé à ce projet de loi mais il n’a fait aucune déclaration officielle à ce sujet pour rassurer la négociatrice Tsipi Livni dont les discussions seraient alors sans effet. Mais malgré le black-out imposé par les Américains, des indiscrétions du quotidien israélien Maariv font déjà état de «pourparlers au bord de l’effondrement en raison de positions inconciliables sur les frontières».
De jeunes Palestiniens se heurtent aux forces de l'ordre israéliennes à Jérusalem-Est, le 27 septembre |
Selon les médias, le premier ministre serait opposé à ce projet de loi mais il n’a fait aucune déclaration officielle à ce sujet pour rassurer la négociatrice Tsipi Livni dont les discussions seraient alors sans effet. Mais malgré le black-out imposé par les Américains, des indiscrétions du quotidien israélien Maariv font déjà état de «pourparlers au bord de l’effondrement en raison de positions inconciliables sur les frontières».
Les déclarations intempestives des ministres du
gouvernement et de nouvelles lois ne faciliteront pas la solution au conflit
palestinien. Certains au sein du gouvernement en sont à se demander quel
intérêt il y aurait à poursuivre des négociations, sinon pour maintenir l’illusion d’un
dialogue.
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