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lundi 15 juillet 2013

SALE TEMPS POUR LE HEZBOLLAH AU LIBAN



SALE TEMPS POUR LE HEZBOLLAH AU LIBAN

Par Jacques BENILLOUCHE
copyright © Temps et Contretemps


Les motivations de l’implication profonde des militants du Hezbollah dans la guerre de Syrie restent une inconnue. A priori rien ne prédestinait le mouvement islamiste chiite libanais à trouver des liens de parenté idéologique avec le mouvement alaouite du président Bachar Al-Assad. Et pourtant Hassan Nasrallah s’est paré de l’uniforme de chargé de mission au Moyen-Orient pour s’impliquer dans une stratégie régionale. 




Anticiper l’action d’extrémistes


Au sein même de la milice, le débat a été ouvert mais l’explication du secrétaire général a convaincu les élites du Hezbollah. Il estime que plutôt que d’attendre les extrémistes islamistes venir le combattre aux portes du Liban, il avait été décidé de choisir le moment et le lieu de cette confrontation. Mais les objectifs militaires à atteindre ne sont pas très clairs et le retour des combattants au Liban risque d’être problématique. 
L’implication du Hezbollah en Syrie reste encore une source d’inquiétude pour la base populaire car aucune explication n’a été donnée par son chef Nasrallah. La base risque de mal interpréter le coût humain versé qui se chiffre à plusieurs centaines de morts tandis que l’alibi de la défense du sanctuaire chiite de Sayyida Zaynab semble être une explication insuffisante pour justifier la mort de jeunes au combat. 



Les miliciens étaient jusqu’alors concentrés sur le combat contre Israël, qui était une cause facile à expliquer et qui rehaussait le prestige de combattants face à Tsahal. Derrière les défaites militaires, ils avaient de quoi s’enorgueillir des quelques victoires limitées contre des objectifs militaires israéliens.  Or cette aventure syrienne déroute la base sociale du Hezbollah qui n’y voit aucun intérêt et qui craint que la défense de Bachar Al-Assad n’exige une présence en Syrie de plusieurs années, plombant ainsi le combat aux côtés du peuple palestinien. Le Hezbollah est conscient qu’il n’a pas les moyens d’agir sur deux fronts simultanés, celui des opérations contre Israël et celui de la logistique des approvisionnements en armes du corps expéditionnaire.



Stratégie globale d’alliance


Bogdanov et Nasrallah


En fait la véritable motivation de l’implication du Hezbollah en Syrie s’explique par une stratégie globale d’alliance avec la Syrie, la Russie, l’Iran et l’Irak. La milice prend alors une stature régionale, qui augmente ses capacités défensives et qui accroit sa crédibilité auprès des pays arabes.  Cette hypothèse est étayée par la visite du vice-ministre russe des affaires étrangères, Mikhaïl Bogdanov, à Téhéran puis au Liban avec la certitude qu’il venait coordonner la participation du Hezbollah aux côtés de Bachar Al-Assad. Il a alors expliqué qu’il venait jeter les bases d'un rôle de la Russie nouvelle et active au Liban et dans la région en précisant que les Russes ne sont pas des invités transitoires au Liban. Il a pour ainsi dire cautionné l’action de Nasrallah en précisant que l’Iran, qui tire les ficelles en Syrie par Hezbollah interposé, faisait maintenant partie de l'équilibre régional des forces. 


Mais si le Hezbollah, grâce à son leader, se retrouve rehaussé au rang d’interlocuteur international, les miliciens en revanche n’ont pas d’objectifs militaires précis au bout desquels leur retour au Liban pourrait être planifié. Ils dépendent totalement des décisions syriennes et russes de lever leur camp en Syrie. Ils attendent que leur leader apparaisse sur les écrans de télévision pour avoir les réponses aux questions  qu’ils se posent sur l'avenir de la milice en Syrie.



Loin du théâtre libanais

Mikati embrasse Nasrallah


Mais certaines élites du Hezbollah jugent que la guerre en Syrie a éloigné leur mouvement du théâtre libanais. Il était fortement impliqué dans le gouvernement de Najib Mikati constitué en juin 2011 alors qu'avec l'allié chrétien Michel Aoun, ils dominaient le gouvernement libanais. C’était le temps où aucun gouvernement ne pouvait être constitué sans la participation du Hezbollah et où toutes les tentatives pour le faire sortir de l'équation politique étaient  vouées à l'échec.

Le Hezbollah avait pourtant négocié un tournant. Longtemps cantonné dans l’opposition avant de participer avec une minorité de blocage au gouvernement, le Hezbollah avait presque réussi un «coup d’État» grâce à une habile manœuvre politique. En soutenant un autre sunnite, Najib Mikati, pour diriger un nouveau gouvernement, le Parti de Dieu, créé en 1982 par des religieux inspirés par l’ayatollah Khomeiny, avait accentué son emprise sur le Pays du Cèdre. Son habileté a été de le faire dans les règles démocratiques et constitutionnelles libanaises.
Ahmadinejad et le général Aoun


Mais aujourd’hui les dirigeants libanais se rebiffent et ils n’hésitent plus à fustiger l’existence même de la milice en tant qu’entité indépendante de l’armée dont l’implication en Syrie risque d’entrainer la guerre au Liban. Le président libanais, Michel Sleimane a demandé au Hezbollah de prendre ses distances avec le conflit syrien : «J'ai dit que protéger le Hezbollah était quelque chose qui m'est cher, mais je veux aussi les protéger contre eux-mêmes. Le Liban prône officiellement une politique de neutralité face au conflit en Syrie, mais celle-ci est mise à mal en raison de la profonde division du pays entre partisans et adversaires du régime de Damas».



Perte d’aura




De plus en plus de voix s’élèvent au Liban contre les milices du Hezbollah. Des jeunes Libanais se sont rassemblés, 12 mai 2013, devant la Chambre de commerce et d’industrie de Tripoli, pour protester contre la visite d’une délégation commerciale iranienne, présidée par l’ambassadeur d’Iran, Ghadanfar Rokon Abadi.  Les manifestants, qui ont voulu dénoncer le soutien iranien au régime syrien, l’ont fait savoir en brûlant le drapeau du Hezbollah devant la Chambre. Clamant qu’ «ils ne cèderont pas aux chiens de Hassan Nasrallah». Il est loin le temps où aucune critique ne pouvait être prononcée en public.

Le Hezbollah a perdu pied au Liban alors qu’en septembre 2011,  61% des Libanais étaient en faveur du maintien de l’armement du Hezbollah. Les temps ont changé. Le chef du Courant du Futur, Saad Hariri, a accusé le Hezbollah de placer le Liban devant un tournant dangereux et de servir le projet stratégique de l’Iran au Levant afin de dessiner de nouvelles cartes au Liban, en Syrie, en Jordanie et en Irak : «Le Hezbollah n’est plus apte à défendre le Liban ni les Chiites, mais à défendre Assad et les intérêts de l’Iran ainsi que son programme nucléaire. Le Hezbollah est une menace existentielle pour le Liban». 
Convoi attaqué à Zahlé

Le Hezbollah a perdu de son aura puisque certaines forces libanaises n’hésitent plus à le contrer ouvertement, avec violence même. Ainsi deux charges explosives ont visé, le 28 juin 2013, à Zahlé dans la plaine de la Békaa, un «convoi sécuritaire» du Hezbollah composé de quatre véhicules tout terrain sur la route internationale reliant Baalbeck à Chtaura. Il est critiqué parce qu’il participe à un conflit en Syrie qui, selon le secrétaire de l’ONU Ban Ki-Moon, «continue de peser gravement sur la sécurité et la stabilité du Liban, et cela de manière plus apparente. Les tensions, l’incertitude politique et les préoccupations humanitaires sont de plus en plus étroitement liées»

Le Hezbollah génère une violence inacceptable dans certaines régions du Liban, notamment à Tripoli. Les Libanais acceptent mal le fait que des miliciens, échappant au contrôle de l’État, détiennent des armes et menacent la souveraineté et la stabilité du Liban. Ils appellent aussi au désarmement des groupes non libanais  et au démantèlement des bases militaires du FPLP-commandement général.  
Bref, sale temps pour le Hezbollah au Liban.

2 commentaires:

Azer AZER a dit…

i am meslum but i hate hizbolah

(Je suis musulman mais je hais le Hezbollah)

Avraham NATAF a dit…

Il ne faudrait pas sous-estimer la capacité au mal des Hezbollah et Hamas; c'est leurs seules raisons d'exister