L’EMBRASEMENT
Par Gérard AKOUN
Judaïques FM
Sommes-nous en train d’assister à
l’émergence d’un nouvel État au Proche-Orient sur les décombres de l’Irak
de Saddam Hussein: le Djihadistan ou
encore le Sunnistan. En quelques mois, quelques semaines, les Djihadistes de
l’Etat islamique en Irak et au Levant, alliés à des tribus sunnites, à des
cadres en déshérence de l’armée irakienne, après sa dissolution par les
américains, ont conquis un certain nombre de villes importantes du nord de
l’Irak, comme Fallouja, Mossoul ou Tikrīt. Ils ont littéralement balayé les
forces de la nouvelle armée irakienne, composées de chiites qui se sont enfuis,
en abandonnant armes et bagages.
Combattants sanguinaires
Ces Djihadistes, sont encore plus extrémistes,
plus fanatiques, plus sanguinaires qu’El
Quaida, dont ils refusent la tutelle et qu’ils combattent, tout autant que
Bachar Al Assad en Syrie. Ils récusent sa politique, ils veulent instituer le
Califat, tout de suite, à partir du vaste territoire qu’ils occupent depuis
leur offensive et se livrer à une véritable guerre de conquête purificatrice.
Elle est commencée, ils se trouvent déjà à moins d’une centaine de kilomètres
de Bagdad. Ils possèdent un armement sophistiqué, de l’argent
provenant de l’Arabie Saoudite et du Qatar, mais aussi des rançons que leurs rapportent les prises
d’otages et des braquages de banques, ce qui leur permet de payer leurs
troupes. Dans les coffres de la banque centrale de Mossoul, par exemple, ils
ont fait main basse sur 495 millions de
dollars.
Comment a-t-on pu en arriver là ? On pouvait croire la situation relativement
stabilisée, bien que les attentats suicides en Irak n’aient pas cessé sauf dans
le Kurdistan irakien qui est la seule région pacifiée, mais sous autorité kurde.
Des élections démocratiques ont eu lieu ont été gagnées par la majorité chiite. En 2011 les Américains
ont commencé l’évacuation de leurs troupes d’Irak, après avoir dépensé des
dizaines de milliards pour former une nouvelle armée, dotée d’un matériel ultramoderne. Le premier ministre
élu et réélu, Nouri Al Maliki, un chiite, a gouverné sans laisser de place à la
minorité sunnite, sans respecter ses droits, ce qui explique que beaucoup de
ses membres ont pris fait et cause pour les Djihadistes, des sunnites comme eux.
Tous les yeux étaient braqués sur la Syrie, sur l’Ukraine et quasiment personne, dans les services de
renseignements, particulièrement américains, n’a vu venir cette offensive.
Passivité de l’UE
Que faire maintenant ? Il faut
absolument les arrêter dans leur guerre de conquête, d’autant qu’ils sont
rejoints par de très nombreux combattants étrangers originaires d’Europe dont
on a déjà pu mesurer la nuisance à leur retour dans leur pays. L’Union
européenne ne bouge pas, alors que la guerre se rapproche de son territoire. Les
États-Unis se refusent à envoyer à nouveau des troupes au sol en Irak. Ils sont
prêts, par contre à fournir des avions, des blindés, des missiles et même des
drones au gouvernement irakien. On assiste à un retournement spectaculaire sur
le plan politique et militaire, les ennemis d’hier deviendraient presque les
amis d’aujourd’hui.
L’Iran a proposé d’aider les États-Unis
dans leur soutien au président Maliki, comme vont le faire, sans le dire
officiellement, Bachar al-Assad et le Hezbollah libanais, toujours qualifié
d’organisation terroriste par les Américains. C’est vraiment une ironie de
l’histoire. Les alliés traditionnels des États-Unis comme l’Arabie Saoudite,
les pays du golfe, et notre ami le Qatar
sont très inquiets de ce rapprochement des États-Unis et de l’Iran, qui risque
de se faire à leurs dépens. Pour son aide l’Iran exigera certainement des compensations.
Retournement
Ce retournement auquel on assiste dans les
rapports États-Unis Iran n’est peut être pas dénué de conséquences pour Israël. Les relations entre les
Israéliens et les Américains se sont encore refroidies après l’échec des
négociations avec les Palestiniens sous l’égide de John Kerry et Barack Obama
n’est pas loin de considérer que Benyamin Netanyahou en est le principal
responsable. Ne va-t-il pas assouplir sa politique vis-à-vis de l’Iran en
accélérant, par exemple, la levée des sanctions économiques tout en restant
ferme dans son refus de permettre à l’Iran de se doter de l’arme nucléaire ? La
question reste posée.
La dislocation de l’Irak et de la Syrie,
les guerres fratricides qui s’y déroulent mettent Israël à l’abri d’une guerre
conventionnelle. La guerre entre les sunnites et les chiites ne concerne pas, a
priori, Israël mais l’éradication des Djihadistes de l’Etat Islamique en Irak
et au Levant est une nécessité, aussi, pour Israël dans la mesure où ces
extrémistes rejettent les frontières de 1916 et ont ajouté, à leur sigle, la
Palestine. La création d’un État palestinien en paix avec Israël en devient
plus urgente.
Mes pensées vont bien sûr à ces trois
adolescents kidnappés, dont on est sans nouvelles et à leurs familles en
souhaitant leur retour à la maison.
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