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jeudi 21 janvier 2016

Levée des sanctions contre l'Iran, et maintenant ...



LEVÉE DES SANCTIONS CONTRE L’IRAN, ET MAINTENANT…

Par Jacques BENILLOUCHE
copyright © Temps et Contretemps

            
Le ministre des affaires étrangères iranien, Javad Zarif, et son homologue de l'Union européenne, Federica Mogherini,
          Selon l’Agence internationale de l’énergie atomique, l’Iran a respecté ses engagements de freiner son programme nucléaire. Les États-Unis n’ont donc aucune raison à maintenir les sanctions. Barack Obama a donc gagné son pari de ne pas s’enliser, à l’instar de ses prédécesseurs, dans une guerre stérile. Dans son discours, le président américain s’est lancé des fleurs en estimant qu’il «avait eu une approche plus intelligente dans le cadre d’une stratégie patiente et disciplinée après avoir mobilisé le monde pour travailler avec nous».



            L’Iran a commencé à réduire ses centrifugeuses d’enrichissement pour parvenir de plus de 15.000 à exactement 6.104 unités. Il a retiré le noyau de son réacteur à eau lourde et a expédié à l’étranger tous ses stocks d’uranium faiblement enrichi. Les détracteurs de l’accord semblent à présent sans argument. Le président Hassan Rohani n’avait pas le choix s’il voulait récupérer les 100 milliards de dollars d’actifs gelés, avant les élections législatives du mois prochain où il joue gros contre les Conservateurs extrémistes. Il a obtenu cependant l’accord tacite du Guide suprême Ali Khamenei.
            Rohani est en fait un pragmatique qui a misé sur l’économie de son pays en renonçant, provisoirement peut-être, à la bombe. Il va pouvoir à nouveau développer le commerce et rouvrir les usines étrangères fermées. Les Conservateurs ne désarment pas et ils continueront à mentir sur la réalité du programme nucléaire développé à échelle industrielle. Quoi qu’il en soit, Rohani et Obama auront évité une guerre dans la dizaine d’années à venir. Cet accord  consolidera les forces modérées d’Iran qui pourraient obtenir des réformes mêmes limitées.
Evolution du prix du baril de pétrole

            Il faut s’attendre à des perturbations économiques dans la région et en Occident car l’Iran va utiliser les ressources de son sous-sol pour relancer son économie qui dépend uniquement du pétrole. Or le marché du pétrole est déjà en crise et pléthorique et la levée des sanctions entraînera certainement d’autres baisses du cours du pétrole. L’Iran a déjà signé de nouveaux contrats avec les compagnies pétrolières qui se sont empressées de négocier les exportations du brut. Le groupe français Total, l’italien ENI et le néerlandais Shell ont doublé rapidement les Américains qui avaient rompu leurs relations diplomatiques le 7 avril 1980.

            Les Occidentaux redoutent une abondance de l’offre dans un marché déprimé. Le baril cotait 110 dollars il y a un an pour atteindre aujourd’hui moins de 30 dollars. Il risque de descendre encore si l’Iran exporte ses quatrièmes réserves de pétrole au monde et ses deuxièmes réserves de gaz. D’ailleurs l’impact ne s’est pas fait attendre chez les monarchies pétrolières dont les bourses ont perdu 20% depuis le début de l’année. En quinze jours, les marchés du Golfe ont vu partir en fumée plus de 130 milliards d’euros. 

          Nul ne peut prédire jusqu’où pourra baisser le prix du baril. Le conflit entre l’Iran et l’Arabie saoudite empêchera tout accord pour limiter la production de brut. La guerre pétrolière entre ces deux pays risque d’être sans-merci, même si les morts économiques se compteront en dollars et non en humains. L’Arabie produit 10 millions de barils par jour alors que l’Iran n’en était qu’à 3 millions avant la levée des sanctions. Les Iraniens envisagent porter la production à  4 millions au cours de cette année.
            Cela fait l’affaire d’Hassan Rohani qui a déjà anticipé la croissance de son pays à 8% qui ne pourront être atteints qu’avec une manne pétrolière d’au moins 32 milliards de dollars sur la base d’un prix du baril à 40 dollars. Pour cela il veut faire faire un cadeau aux compagnies étrangères en les intégrant dans toutes les phases d’exploration et de production pour les motiver dans le cadre de structures de joint-venture où les Iraniens détiendront 51% des parts. Airbus est par ailleurs sur les rangs pour vendre 114 avions civils au nez et à la barbe de Boeing.
Eizenkot et Netanyahou

            Le nouveau chef d’État-major israélien semble être dans la lignée de ses prédécesseurs en n’étant pas alarmiste sur l’Iran. Lors d’un congrès ce 18 janvier, le général Eizenkot a vu une occasion dans cette levée des sanctions : «L'allègement des sanctions et l'accord nucléaire avec l'Iran représentent un changement stratégique que l'armée israélienne devra affronter au cours de la prochaine décennie. Il y a beaucoup de risques mais aussi des opportunités. Nous sommes en train de réévaluer ce changement mais l'Iran reste en tête des pays à surveiller. Il gère une guerre contre nous par le biais d’une procuration au profit du Hezbollah, qui représente aujourd'hui la plus grave menace pour Israël».

            Il n’a donc pas utilisé de langage guerrier contre l’Iran. Il craint seulement que l’amélioration de la situation économique de l’Iran ne dégage des ressources pour «influencer les Arabes israéliens et ceux de Gaza». Il a toutefois précisé que Tsahal envisage «l'éventualité d'une guerre contre un ennemi non-étatique, comme le Hamas, le Hezbollah ou État islamique, soit dans un  engagement militaire complet soit restreint par le biais de frappes contre l'ennemi». Il estime cependant que l’échelon politique exigeait des frappes limitées contre l'ennemi sans pour autant l’accabler. Pendant les dix années que durera l’accord avec l’Iran, il semble que les Iraniens sortiront du viseur de Tsahal.


2 commentaires:

andre a dit…

Un article optimiste qui change des torrents de propos alarmistes publiés .
Cela signifierait que le Président Obama a fait du bon travail et que la pression de Natanyahu a été utile pour contraindre les iraniens à accepter ce qu'ils avaient toujours refusé .
On a même l'impression que le Premier ministre et le Président s'étaient répartis les rôles, le méchant flic et le policier compréhensif , pour amener l'Iran à composition.

Georges KABI a dit…

Ces accords confirment que les Iraniens sont les meilleurs negociateurs au monde, roulant le monde entier dans la farine, presidents de la Russie et des USA en tete.
L'amelioration economique du peuple iranien n'est possible que si le prix du brut se maintient autour de $ 40 le baril. Or nous arrivons au seuil des 30, sans que les reserves iraniennes ne recommencent a se deverser sur le marche.
En consequence de quoi, et dans l'impossibilite de proceder a l'amelioration des conditions de vie iraniennes, il ne peut y avoir qu'une fuite en avant, c'est-a-dire la construction acceleree d'un arsenal nucleaire et son utilisation contre des ennemis reels ou imaginaires.
Les Chiites , qui ont toujours ete une infime minorite dans l'Islam ont developpe une arme redoutable, la takiya, la dissimulation. Les nouveaux accords sont une illustration parfaite de cette arme.
Pas tous les Chiites sont belliqueux comme l'est le chiisme duodecimain repandu en Iran, au sud-Liban, au sud-Irak, au Pakistan et au Cachemire. En fait, le chiisme s'est dechire en une multitude de tendances, voire meme de religions syncretiques qui se sont eloignees de l'Islam, le Bahaisme par exemple, ou les Ahmedites.
Tout cela ne predit pas un avenir tres radieux au Proche et Moyen-Orient, un avenir plutot radiant.