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jeudi 30 juillet 2015

LA TUNISIE AU BAN DES ÉTATS-UNIS


La Tunisie au ban des états-Unis
par Jacques BENILLOUCHE

copyright © Temps et Contretemps


Malgré tous les efforts déployés par le nouveau gouvernement, la Tunisie reste suspecte aux yeux des Américains. La rédaction du journal américain New York Times a critiqué ouvertement le président de la République, Caïd Essebsi, pour avoir engagé son pays sur une voie non démocratique en décrétant «l’état d’urgence» qui lui donnerait le pouvoir de limiter «beaucoup de libertés pour lesquelles les Tunisiens avaient combattu Zine al-Abidine Ben Ali». 



Le journal estime «qu’il n’est pas clair comment cet état d’urgence peut aider la Tunisie à combattre les attaques terroristes». Il accuse enfin le président «de vouloir limiter le droit de grève et les réunions publiques» et freiner l’émergence de toute opposition démocratique.
Le journal est connu pour exprimer le point de vue de l’administration américaine qui semble décidée à mettre fin à la lune de miel avec la Tunisie. Caïd Essebsi n’est plus dans les bonnes grâces des Américains qui craignent, de sa part, une atteinte sérieuse aux libertés et aux droits de l’homme. En fait le président est suspecté de jouer un double jeu en collaborant avec les islamistes dont il a réellement peur. En les intégrant au gouvernement, il croyait les neutraliser mais il est devenu en fait leur otage.

Pour un pays jadis qualifié de modéré, ses positions de pointe pour soutenir le combat des Palestiniens indispose les éléments pro-israéliens du Congrès. Le persistance à interdire aux titulaires d’un passeport israélien d’entrer en Tunisie est mal perçu par ceux qui voudraient que la Tunisie adopte une position plus pragmatique au lieu de succomber aux sirènes des salafistes qui ont investi de nombreux pans de l’administration tunisienne. Les Américains n’approuvent pas l’indulgence du président tunisien vis-à-vis des salafistes qui lient les mains d’un pouvoir affaibli et qui dictent une partie de la politique suivie par le pays.

Le Congrès américain a émis un jugement sans appel. Sa commission pour les affaires étrangères s’est réunie le 14 juillet pour discuter de la «fragile transition démocratique en Tunisie». La présidente de la commission, Ileana Ros-Lehtinen, n’a pas ménagé les mises en garde : «l’avenir de la Tunisie est loin d’être certain, mais il demeure, pour l’intérêt national US que ce pays d’Afrique du Nord arrive à compléter sa transition vers la démocratie et de faire face adéquatement à la menace provenant des radicaux et des extrémistes comme l’État islamique et autres groupes».
Ileana Ros-Lehtinen

Les États-Unis sont très sensibles aux mesures sécuritaires prises par les pays qui souhaitent être leurs alliés. C’est pourquoi Beji Caïd Essebsi a été un invité spécial au sommet G7, des 7 et 8 juin 2015 au château d’Elmau en Bavière, pour mobiliser un soutien effectif en faveur de la Tunisie. Groupe informel de discussion et de partenariat économique, le G7, qui  réunit les États-Unis, le Japon, la France, l’Allemagne, le Royaume uni, l’Italie et le Canada, a planché sur les défis majeurs mondiaux. Le sommet 2015 devait permettre aux chefs d’État et de gouvernement participants «d’élaborer des positions communes à l'égard de problématiques politiques mondiales, notamment dans les domaines de l'économie mondiale, de la politique étrangère et de sécurité, du développement, de la santé et du climat».
G7 en Bavière avec Essebsi (3ème à gauche)

Les autorités tunisiennes ont sollicité l’aide de certains pays occidentaux pour lutter contre le terrorisme et ses conséquences sur l’économie. Mais selon le New York Times, les Américains ont émis un diagnostic sévère : «la Tunisie continue à drainer un manque de coordination entre les services, un bas niveau de capacité au niveau des bas échelons de la police et un manque d’expériences sur comment enquêter et sévir contre les terroristes dans le cadre de la loi». Le président Essebsi a préféré, de son côté, reporter la faute sur les Européens, et sur la France en particulier, accusés d’être à l’origine du «manque de soutien militaire à la Tunisie en matière de lutte contre le terrorisme».

La sanction est immédiatement tombée le 24 juillet de la part du Sénat américain qui a bloqué les 2/3 de l’aide des États-Unis à la Tunisie. Les Tunisiens vont encore accuser le lobby juif d’être à l’origine de cette décision. Alors que le Département d’État et la commission des affaires étrangères de la chambre de représentants avaient opté pour le doublement de l’aide économique et militaire à la Tunisie, le Sénat américain a décidé de ramener l’aide de 134 millions de dollars promis par Obama à seulement 50 millions de dollars.  Les Sénateurs ont estimé que le Département d’État ne les avait pas suffisamment convaincus.

Loin est le temps où la Tunisie était désignée comme «alliée stratégique des USA, en dehors de l’OTAN» ce qui avait d’une part froissé les Algériens et d’autre part, indisposé les Français. La surprise sur la décision américaine a été de taille et elle ne favorisera pas l’amélioration de la situation financière de la Tunisie. Elle est mise face au défi d’écarter les islamistes de la gouvernance tunisienne et de redevenir le «pays modéré» qu’elle était du temps de Bourguiba et de Ben Ali qui n’avaient jamais envisagé d’inclure dans la Constitution une clause interdisant toute relation diplomatique avec Israël. 
Gouvernement tunisien

Il est temps pour la Tunisie, si elle veut entrer dans les bonnes grâces américaines, de montrer sa volonté de combattre le terrorisme djihadiste international en éliminant les islamistes de son gouvernement et en rejoignant l’alliance informelle de la Jordanie, de l’Arabie saoudite et de l’Égypte avec Israël contre Daesh.


3 commentaires:

Claude a dit…

Comme disait Nasser (je crois), la nation est au bord du gouffre, mais nous avons fait depuis un grand pas en avant...
Je pense que la Tunisie est en train de franchir ce fameux pas en avant !!!
La faute à qui ? Cherchez le ou les coupables !!
Bourguiba doit se retourner dans sa tombe !!
Claude

Véronique ALLOUCHE a dit…

La nouvelle loi anti-terroriste à la tunisienne sera prétexte à une répression et une entrave aux libertés loin des effets escomptés par les États-Unis. La peine de mort est rétablie.... Pour les seuls terroristes présumés? J'en doute.
Bourguiba a tenté une incursion vers la démocratie, parenthèse heureuse dans l'histoire de la Tunisie.
Mais ce n'est qu'un beau souvenir, aujourd'hui mort et enterré.
J'espère que les juifs en prendront conscience et éviteront à l'avenir de passer leurs vacances dans ce pays qui n'est plus le leur depuis bien longtemps bien que beaucoup s'en prévalent encore.
Bien à toi
Véronique Allouche

Anonyme a dit…

Les mensonges et le double langage des tunisiens ne trompent plus que les débiles profonds.
La Tunisie voudrait recevoir des touristes juifs mais humilie les quelques israéliens embarqués dans une croisière avec escale à Tunis .Parler de révolution du jasmin alors qu'il ne s'agit que d'une soumission à l'islamisme faite en plusieurs temps, voilà ce que les Etats-Unis ont analysé et pourquoi ils ont réduit leur aide.
L'hypocrisie est vite décelée !