LES ÉTATS-UNIS ONT
PERDU PIED AU MOYEN-ORIENT
Par Jacques
BENILLOUCHE
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Memorial day 2015 |
Il pense avoir bien agi car il est convaincu que les
Américains sont las des guerres et ne sont plus qualifiés pour sortir l’Irak et
la Syrie du chaos lié au conflit entre sunnites et chiites. C’est pourquoi d’ailleurs
il se désintéresse totalement de la guerre civile qui se développe en Libye et
au Yémen. Il en résulte, pour les
monarchies arabes, l’impression d’avoir été abandonnées sur l’autel de la pax
americana avec le risque d’une expansion de l’influence étrangère dans plusieurs pays du Moyen-Orient.
En fait, les Américains ne se remettent pas de l’échec et
des conséquences de l’invasion de l’Irak en 2003. Ils n’ont pas vu venir les printemps
arabes de 2011 et n’ont pas pu les canaliser à leur profit. Leur entêtement
à vouloir absolument soutenir les Frères musulmans leur ont fait perdre leur alliance
historique avec l’Égypte, qui a retrouvé la dictature militaire, et avec l’Arabie
saoudite qui craint la nucléarisation de l’Iran. Ils assistent passifs à la
déstabilisation du Liban et de la Jordanie qui sont envahis par un flot de
réfugiés qu’ils ont du mal à canaliser et à intégrer.
Camp de réfugiés en Jordanie |
Nul n’est capable d’expliquer la stratégie débridée de Barack
Obama qui a l’air d’agir au coup par coup, en fonction du sens du vent, sans
vision à long terme et sans respect des alliances historiques. Les Républicains
en campagne ont beau jeu de critiquer une politique qui éloigne les vrais amis
et qui accentue la faiblesse des États-Unis. Loin est le temps où le seul son
de la voix d’un président américain suffisait à inspirer la crainte ou le
respect. Ses adversaires l’accusent, par excès de pacifisme, d’avoir déserté le
Moyen-Orient au profit de l’Asie centrale où la situation est moins tendue et
moins complexe comme s’il préférait la lâcheté à l’ingérence.
Obama au Caire en 2009 |
Pour ne pas être traité d’isolationniste, il ordonne des
opérations militaires a minima, par drones interposés. Son discours du Caire en
2009 est loin car on n’entrevoit pas les mesures concrètes qu’il aurait pu
imposer. Il s’est laissé déborder par les Anglais et les Français en Libye
alors qu’il aurait dû aider les rebelles à créer une gouvernance stable. De même
en Syrie, il a montré peu d’empressement à aider la rébellion contre Bachar
Al-Assad alors que le dictateur a pu librement assassiner au gaz sarin à Ghouta
plus de 1.000 civils en 2003. Cette passivité a effondré la crédibilité
diplomatique des États-Unis.
Dans son récent discours à l’ONU il avait effectivement résumé les
conditions pour lesquelles il était prêt à agir, seul s’il le fallait, pour «déployer
tous les éléments de notre puissance, y compris la force militaire» : la
protection des alliés contre toute «agression extérieure», la garantie
de la libre circulation du pétrole et du gaz, la prévention des attaques
terroristes contre les États-Unis et
l'arrêt de la prolifération des armes de destruction massive. Donc exit la
guerre et place à la diplomatie. Obama veut donc axer sa diplomatie sur les
négociations israélo-palestiniennes et sur l’accord nucléaire avec l’Iran. Il a
baissé les bras dans le conflit syrien car il est à présent convaincu qu’il ne
pouvait plus être résolu par la force.
Mais il a ainsi permis aux djihadistes d’envahir
l’est de la Syrie, le nord et l’ouest de l’Irak, Mossoul et de concrétiser la
création de leur califat. Par passivité américaine, des villes sont tombées,
Ramadi la capitale de la province d’Anbar et Palmyre, en laissant le champ
libre aux troupes iraniennes des Gardiens de la révolution, les seuls à se
battre contre Daesh.
Obama mise sur un accord à tout prix avec l’Iran sur la
base d’une réduction de ses capacités d’enrichir de l’uranium et de produire du
plutonium. Il est convaincu de l’efficacité des mesures de surveillance des
usines nucléaires en échange d’une levée des sanctions. Cet accord entre dans
sa stratégie de freiner la fabrication d’armes de destruction massive. Mais il
ne tient pas compte des réserves de ses alliés. Les relations entre Obama et
Netanyahou ont atteint le point de non-retour entraînant une augmentation des
constructions dans les implantations et le gel des discussions avec les
Palestiniens sur fond de menace de la levée du veto américain à l’ONU. Les
monarchies arabes ne croient pas à la volonté des Américains de les défendre
contre une éventuelle attaque iranienne. Elles craignent surtout un
rapprochement plus approfondi des Américains avec l’Iran qui risque de créer un
déséquilibre, ou un nouvel équilibre, dans la région.
Troupes américaines au Moyen-Orient |
Les États-Unis ne dépendent plus autant du pétrole du
Golfe dont le prix ne génère plus de crises dans la région. Une alliance de
fait avec les Iraniens permettrait de réduire encore plus la présence militaire
américaine dans le Golfe dès lors où il n’y aurait plus de risque contre la
circulation maritime. Mais les Américains ne se rendent pas compte que les
Iraniens étendent leur influence en Irak et en Syrie, et à présent au Yémen par
Houthis interposés, avec une volonté affichée de s’en prendre aux troupes
saoudiennes. Ils ne se rendent surtout pas compte que, devant le danger
iranien, les Saoudiens songent à présent réellement à se doter de l’arme
nucléaire ce qui entraînera une prolifération nucléaire à laquelle les États-Unis
voulaient pourtant s’opposer.
Houthis |
La seule conséquence positive de la diplomatie américaine
est l’établissement de relations ouvertes entre Israël et l’Arabie saoudite qui
compte à présent sur l’État juif pour sa sécurité. D'ailleurs une rencontre exceptionnelle a eu
lieu le 4 juin 2015 entre le directeur général du ministère israélien des Affaires
étrangères, Dore Gold, et un haut responsable saoudien, le colonel à la retraite
Anwar Ashqi.
Le successeur d’Obama, quel
qu’il soit, ne pourra pas éluder ces questions d’ingérence et surtout les
conséquences de l’expansionnisme russe, chinois et iranien. Devant ces échecs
latents, il sera contraint d’évaluer autrement la politique américaine qui ne
peut pas se passer du soutien israélien même s’il devra fermer les yeux sur les
constructions dans les implantations. Il devra autoriser les forces spéciales
installées en Irak à s’interposer dans les combats terrestres en Irak pour
compléter les attaques aériennes. Il devra favoriser la création d’une force
syrienne d’opposition modérée capable de se substituer au régime de Bachar Al
Assad. Bref il faut que les États-Unis redeviennent les gendarmes du monde, quitte à subir les critiques internationales.
Dore Gold et Anwae Ashqi |
4 commentaires:
Pendant longtemps un adage a prévalu:ce qui est bon pour les USA est bon pour le monde. La vision d'Obama semble être: le pourrissement du reste du monde est bénéfique pour sa vision des USA.
Ca fait sourire, car quand ils interviennent on les accuse d ingérence et quand ils ne font rien on les accuse de laxisme. Il a surtout envie de laisser les boys à la maison et ça coute bien moins cher à l économie américaine.
Il est vrai qu'en langage diplomatique, il est préférable d'employer la litote « Perdre pied » plutôt que « Tourner lâchement casaque ».
Il est vrai que la gouvernance Iranienne s'est beaucoup civilisée depuis la prise d'otages de l'ambassade américaine et qu'il n'y a pas les mêmes sortes d'Ayatollahs ni les mêmes gardiens de la révolution aux manettes.
Il est vrai que les plates excuses de cette nouvelle gouvernance ont lavé l'honneur de l'Amérique insultée.
Il est vrai que l'Arabie Saoudite n'a aucune raison de se sentir « cocue » par le comportement quelque peu volage de ce « fidèle ami ».
Il est vrai que tous les pays de la région ne cherchent pas d'autres sources d'approvisionnement en armements à présent que sont évaluées à leur juste valeur la parole et les garanties des Américains.
Il est vrai que John Wayne est mort, depuis longtemps. L'oncle Sam, aussi. Et qu'il ne faut pas compter sur un Obama pour reprendre le flambeau.
Les Etats-Unis ont suivi une courbe qui leur est imposée par les événements socio-économiques du moment ! Ils n'ont pas pour autant "perdu pied" bien que vous souhaitiez qu'on adopte ce point de vue. Le double mandat de GW Bush Jr a été la catastrophe pour cette région du monde et Obama a dû en tirer les leçons ! Le reste cad le marché pétrolier et du gaz nat ont remodelé le jeu d'échecs au Moyen Orient et conduit Obama à déclencher une période de ressourcement mais les USA ont toujours leurs deux pieds implantés là où ils l'estiment nécessaire, et cette fois c'est moins au Proche Orient qu'en Asie continentale. Si vous pensez comme Mao que les Etats-Unis sont un tigre en papier il y en a heureusement bien d'autres qui ne le pensent pas y compris un certain Poutine et un ayatollah perse....sans compter la Chine ! Prendre une carte géopolitique du monde et regardez l'implantation américaine, ça aide à formuler des opinions fondées sur le réel !
Cordialement votre
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