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dimanche 9 novembre 2014

LE MONT DU TEMPLE : LA PRIÈRE OU LA GUERRE


LE MONT DU TEMPLE : LA PRIÈRE OU LA GUERRE

Par Jacques BENILLOUCHE
copyright © Temps et Contretemps


Le droit à la prière juive sur le Mont du Temple mérite-t-il une guerre ? De manière cyclique, ce problème revient au-devant de l’actualité, au gré des revendications des nationalistes israéliens. Le Mont du Temple est gravé dans l’inconscient juif depuis la destruction du temple par les Romains, en 70 avant notre ère, et il est même sculpté sur l’Arc de Titus à Rome représentant des légionnaires emportant la Menora du temple. Et depuis, les Juifs prient pour sa reconstruction tandis que d’autres en portent le deuil en s’habillant de noir, de la tête aux pieds.






Attente du Messie

Cependant la situation risque d’être bloquée car les orthodoxes n’envisagent sa reconstruction qu’avec l’avènement du Messie ce qui risque d’être long au train où vont les conditions mal remplies de sa venue. En attendant la grande majorité des Juifs prie au Kotel, le Mur des lamentations, au pied de la montagne où était érigé le temple.
Méron en 1880. L'architrave de la porte principale est brisée et repose en équilibre précaire, menaçant de s'effondrer. Il existe une tradition comme quoi l'effondrement de cette pierre coïncidera avec la venue du Messie

        Mais la montée du nationalisme israélien pousse de plus en plus de groupes à chercher à modifier le statu quo en surfant sur la faiblesse du premier ministre empêtré sur le plan intérieur. Les gouvernements précédents ont pourtant compris la nécessité de faire preuve de retenue. Quand Israël a repris le Kotel en 1967 au terme de la Guerre de Six-jours, il a annexé Jérusalem-Est en assurant aux musulmans le droit exclusif de prier. Moshé Dayan, le ministre de la défense de l'époque, avait signé un décret permanent prévoyant que les Juifs prieraient au Mur Occidental et les Musulmans à la mosquée Al-Aqsa. Moshe Dayan, avait jugé que les Juifs devaient faire preuve de tolérance à cet égard.


Les Rabbins avaient confirmé l’interdiction pour les Juifs de souiller le sol du Mont du Temple, impur à leurs yeux en raison de l’impossibilité de fixer avec précision le lieu du sanctuaire du  Saint des Saints. Le grand rabbin séfarade Yitzhak Yossef vient de condamner sévèrement les Juifs qui incitent et autorisent leurs ouailles à aller sur le site saint. Il a réitéré l’interdiction faite à tout Juif de monter au Mont du Temple, dans la plus forte déclaration publique faite par une haute autorité religieuse. Mais ces derniers temps, plusieurs rabbins d’extrême-droite ont rendu des décisions halakhiques qui permettent aux Juifs de prier sur le Mont du Temple, et qui les encouragent à y aller. Les nationalistes juifs se sentent donc dans leur droit d'exiger de prier avec une intention cachée, à terme, de raser la mosquée Al-Aqsa de l’esplanade. 

Émeutiers palestiniens
 
Tombeau des Patriarches
En fait la prière juive n’est plus vue comme un acte de dévotion mais comme la volonté de marquer son territoire et comme un signe de propriété. Certains voudraient s’inspirer du statut réservé au Caveau des Patriarches à Hébron. En effet, le 25 février 1994, Baruch Goldstein, habitant une implantation et membre du parti nationaliste-religieux Kach, avait tué 29 Palestiniens de la ville d'Hébron alors qu'ils priaient un vendredi du mois sacré de ramadan. Le site avait été alors divisé en deux zones de prière, juive et musulmane.
Yehouda Glick

Mais ces gesticulations ont fini par entraîner le réveil des émeutiers palestiniens qui ont décidé de défendre Al-Aqsa. La tentative d’assassinat de Yehouda Glick le 29 octobre est venue compliquer une situation déjà tendue. Les mesures de sécurité israéliennes, imposant l'exclusion systématique des musulmans âgés de moins de 50 ont eu pour effet de modifier le statu quo de 1967. 
Les Palestiniens voient s’effondrer l'espoir d'une paix négociée induisant la création d'un État palestinien avec Jérusalem-Est comme capitale. Ils ne reçoivent plus de soutien des pays arabes ; l’Irak et la Syrie sont déchirés par des guerres tandis que les djihadistes sont occupés à tuer des Arabes plutôt que des Israéliens. Cette situation pousse les Palestiniens au radicalisme. Les Lieux Saints de Jérusalem deviennent le catalyseur  d’une explosion de violence dont on ne sait pas où elle peut mener. Il s’agit d’un alibi pour entretenir de nouvelles revendications.

En décidant, pour la première fois depuis 1967, de fermer l’enceinte d’Al-Aqsa aux fidèles arabes, le gouvernement a pris le risque de raviver les tensions. La révolte de la jeunesse à Jérusalem pourrait conduire à un soulèvement plus grave pour le seul motif, condamné d’ailleurs par les hautes autorités religieuses juives, de permettre aux Juifs de prier. Jérusalem a contaminé les autres villes arabes ; les manifestations ont eu lieu ainsi à Hébron, le 31 octobre 2014, durant lesquelles des palestiniens ont manifesté contre les restrictions d’accès à la Mosquée Al-Aqsa. Après une fermeture totale, la mosquée a été rouverte pour les Arabes de plus de 50 ans.

Attitude des dirigeants palestiniens


L’attitude des dirigeants palestiniens, au moins dans leurs prises de position officielle, n’est pas ambiguë. Mahmoud Abbas a réitéré à la télévision israélienne son opposition au déclenchement d’un soulèvement à Jérusalem mais il ne peut pas grand-chose. Les manifestations actuelles sont conduites par des jeunes âgés entre 14 et 20 ans qui utilisent tous les moyens violents pour s’opposer à la police malgré les menaces pour leur ville et pour leur avenir. De l’avis d’experts, ces protestations sont spontanées et ne sont pas coordonnées au sommet, ce qui rend difficile leur contrôle. Le manque de leadership crée l’incertitude dans ces événements. Il n’y a aucune comparaison possible avec la première Intifada où existait un commandement politique et militaire unifié. Certains militants se plaignent d’ailleurs que l’Autorité palestinienne soit en train de manœuvrer pour mettre un terme au soulèvement dans la ville de Jérusalem.
Quartier arabe de Jérusalem-Est

La situation est prise au sérieux par les Israéliens. Le journal Yediot Aharonot a écrit dans son édition du 31 octobre que «les affrontements et heurts que vit Jérusalem ont pris les proportions d’un conflit religieux qui risquerait de se propager dans tout le Moyen-Orient.» Benjamin Netanyahou a été à plusieurs reprises mis en garde contre les dangers sur le Mont du Temple. Ses services de renseignements lui conseillent la prudence. Ils lui ont expliqué que l’attaque du tramway est symbolique car cette nouveauté dans la ville personnifie l’unification de la Capitale grâce à son parcours à l’est et à l’ouest. Ils ont soulevé l’augmentation de la pauvreté à l’Est et l’abandon des quartiers arabes de Jérusalem par les services municipaux. Ils ont attiré son attention sur l’augmentation anormale des visites de personnalités juives sur le mont du Temple, en particulier la député Shouli Moualem de Bayit Hayehoudi, ce qui est interprété comme une provocation. La poursuite des violences à Jérusalem est susceptible selon eux de renverser les alliances stratégiques forgées avec certains pays arabes modérés.

Mais la contagion peut s’étendre aussi aux villes israéliennes pour n’importe quel motif. Ainsi l’arrestation pour fait de droit commun d’un Arabe israélien, le 8 novembre, et sa mort ont dégénéré en barricades dans la ville de Kfar Kana au nord d’Israël. La solidarité avec les Arabes de Jérusalem risque de faire tâche.
La bataille de Jérusalem devient un symbole pour les Palestiniens qui la considèrent comme le premier combat à mener. Les Israéliens pourraient voir leurs plans stratégiques chamboulés même si les mesures décidées par le gouvernement ont reçu l’aval de tous les partis de la coalition. Mais ces affrontements sont susceptibles de se transformer, à n’importe quel moment, en un soulèvement dont on est incapable aujourd’hui d’en prévoir la portée et les conséquences. La police est convaincue que la seule force ne suffira pas à calmer l’escalade actuelle. Elle prône une action politique, en particulier des mesures économiques pour les quartiers arabes en difficulté. Mais il s’agit avant tout de savoir si la prière juive sur le Mont du Temple, contestée par les rabbins, mérite une guerre. 

5 commentaires:

AMMONRUSQ a dit…

Je n'ai pas eu d'éducation religieuse,mais il me semble que les uns et les autres oublient les décisions des premiers responsables politique pour un bien vivre côte à côte.
Pour ma part je pense que l'internationalisation du conflit depuis 67 et les prises de positions des européens en supplément des pays arabes,n'arrange pas une évolution des mentalités,bien au contraire et on assiste à une guerre de religion qui ne veut pas dire son nom !

Anonyme a dit…

Une chose à rectifier:le soulèvement à Jérusalem-est MrAbbas y est pour quelque chose,quand m^eme directement ou indirectement personne ne peut le nier.Natanyaou doit clarifier sa position.la ville est une et indivisible.Il doit développer la partie Est , c.est une des conditions de l.unification de la ville.Tout doit être fait pour contrer la division voulue par Abbas!!!!!

Marianne ARNAUD a dit…

"Lorsque vous étendez vos mains vers moi, je détourne mes yeux de vous; et lorsque vous multipliez vos prières, je ne veux point vous écouter, parce que vos mains sont pleines de sang."

Le Livre d'Isaïe (chapitre I - 15)

Michel LEVY a dit…

Sur le fond, je suis d'accord, les nationalistes poussent à la violence qui entraîne des meurtre, et je rejoint la position du Grand Rabbin d'Israël, mais les illustrations de l'articles me laissent rêveur, il y a des quartiers très propres à Jérusalem Est, et la photo du leader nationalistes avec un musulman n'est pas représentative des sentiments.

Jean Smia a dit…

Seuls les idolâtres ont besoin de s'adresser à une icône ou à un totem pour prier.
Je n'ai pas souvenir d'avoir lu que Dieu avait institué un parloir dans lequel il recevrait les doléances des humains.
La différence essentielle entre un religieux et un croyant, c'est que l'un s'enferme dans la liturgie de sa religion alors que l'autre a foi en l’immatérialité et l'omniprésence de Dieu.
Tout objet matériel que l'on considère comme sacré est, par définition, une idole. Icône indispensable aux adorateurs du veau d'or pour justifier leur prétention à s'instituer en porte parole de Dieu.
Ce qui conduit tous ces barbus, avec ou sans papillotes et de quelque croyance que ce soit, à se conduire en suppôts de Satan.
C'est ainsi qu'ils en oublient de respecter la seule icône réalisée par Dieu et à l'image de Dieu : l'homme.