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jeudi 26 mai 2016

La France et la Gauche : le gâchis



LA FRANCE ET LA GAUCHE : LE GÂCHIS

Par Jacques BENILLOUCHE
Copyright © Temps et Contretemps

      

          La Gauche n’arrive jamais à mieux se révéler que lorsqu’elle est dans l’opposition. Elle peut alors réfléchir sans avoir besoin d’agir ; elle peut conceptualiser sans nécessaire pragmatisme ; mais lorsqu’elle est au pouvoir, la France va à la dérive. C’est une constatation terrible, dramatique et triste. L’expérience prouve qu’elle peut tenir à peine deux années pendant lesquelles elle distribue les cadeaux sans planification sérieuse. Au-delà de cette période, les querelles de clochers, la guerre des clans et les rivalités personnelles prennent le dessus sur l’intérêt national.





Hollande et ses énarques

            La Gauche a été dans l’opposition pendant plus de dix ans  en étant entourée par une escouade de théoriciens, de diplômés, d’énarques et d’experts, tous censés la guider dans des projets innovants. On pensait qu’elle avait pris le temps de réfléchir à des réformes et à des mesures immédiates applicables dès son entrée au pouvoir pendant le délai de grâce accordé à tous les nouveaux gouvernements. On pensait que les lois et les décrets d’application étaient dans les tuyaux.  Rien de tout cela n’est arrivé ; les ministres n’étaient pas prêts et pensaient déjà à leur prochain point de chute comme tous les carriéristes. Ce fut donc un gouvernement de l’improvisation et des mesurettes au coup par coup, souvent par clientélisme et non pas par idéologie, alors que le pays avait besoin de réformes structurelles.
            On pensait que les économistes avaient planché pour une réforme fiscale profonde ; on pensait que les spécialistes avaient préparé une vraie réforme de l’enseignement pour que les universités ne fabriquent plus de chômeurs. On pensait que les lois sur les entreprises et sur le travail allaient mener à plus de flexibilité pour accroître les créations d’emplois. On pensait qu’on allait mettre fin à la fuite des cerveaux qui ont préféré s’exiler en Grande-Bretagne, aux États-Unis et au Canada. Au bout de deux ans à peine de fonctionnement, la catastrophe n’a pas été évitée et, comme sous Mitterrand, on a fait payer le prix au premier ministre qui a été éjecté pour avoir appliqué ce que son président avait exigé de lui.

            La Gauche n’a aucune excuse recevable puisqu’elle détenait tous les leviers du pouvoir ; le général de Gaulle lui-même ne les possédait pas. L’Élysée, l’Assemblée nationale, le Sénat, les régions, les départements, les fonctionnaires et les services publics étaient aux mains exclusives de la Gauche, pour un résultat décevant. Au lieu de créer le dynamisme, au lieu de mettre le pays au travail, on a créé un peuple d’assistés et de râleurs incapables de se remettre en cause.

            On assiste au désordre qui préfigure déjà le chaos parce que, malgré tous ses leviers, le pouvoir est paradoxalement faible dans sa structure forte. D’ailleurs la déroute électorale était chaque fois au rendez-vous mais les dirigeants de l’Élysée et de Matignon «gardaient le cap et tenaient bon». Les syndicats ont exploité la carte du pire; abandonnés par leurs troupes qui ne croient plus en eux, ils ont joué leur va-tout en s’opposant à tout ce que proposaient les ministres de gauche, en lançant des grèves stériles dans tous les secteurs. S’ils voulaient hâter l’arrivée de l’extrême-droite au pouvoir, ils ne se seraient pas pris autrement. Et le gouvernement terrorisé et tétanisé n’a rien trouvé de mieux que de laisser pourrir les grèves. Il joue sur la lassitude qui ne peut mener qu’à l’explosion et à la délocalisation à l'étranger des meilleures entreprises.
            Or il y a des moments où un gouvernement doit savoir montrer sa présence pour prouver qui dirige et qui décide. Le gouvernement gouverne et le peuple vote mais on ne laisse pas quelques illuminés prendre la population en otage. Après le blocage de l’essence qui paralyse les transports face à des salariés victimes, les aiguilleurs du ciel vont se lancer dans la danse pour bloquer les relations avec l’étranger. Même le saint des saints, les centrales nucléaires sont touchées. 
Chars AMX contre les routiers de 1992

          Les grèves sont une nécessité dans un pays démocratique mais il faut savoir les terminer si l'on ne veut pas mener le pays à la dérive. Il y a des moments où le gouvernement doit savoir trancher, sévir même. L’armée, et c’est son rôle, défend les frontières contre l’ennemi extérieur mais aussi contre l'ennemi intérieur. Elle doit mobiliser ses tanks pour détruire les barrages et laisser le libre arbitre à ceux des salariés qui exigent de travailler. En 1992 les chars AMX ont éliminé les barrages des routiers en grève. Il faut réquisitionner par la force publique tous les postes sensibles. Il faut punir durement les casseurs, ces faux grévistes qui se nourrissent du désordre. Il faut embastiller ceux qui ne respectent pas la démocratie et la liberté.
            La droite n’est pas exempte de critiques ; elle ne se comporte pas mieux même si elle n’est pas aux affaires. Elle croit pouvoir se nourrir des lacunes et des échecs de la Gauche alors que, par sa passivité, elle risque d’être sanctionnée par les électeurs qui choisiront les extrêmes.  On ne l’a pas entendue parce qu’elle pense à tort que le pouvoir est au bout du tunnel. En restant spectatrice, elle risque de récupérer un pays en lambeaux avec de fortes chances de ne plus pouvoir redresser la situation.

            On ne fait pas travailler les cerveaux qui piaffent d’impatience et qui veulent remettre en cause certaines décisions techniques et stratégiques. On ne se pose pas la question de savoir pourquoi le TGV ne se vend pas à l’étranger, aux États-Unis par exemple où l’on met huit heures pour faire en train 500 kms entre New-York et Montréal alors que trois heures à peine suffisent pour faire le trajet Paris-Marseille long de 700 kms.  L’on sait pourtant qu’il faut réviser les techniques du TGV qui ne peut rouler qu’en terrain plat, une restriction technique qui lui coûte de nouveaux clients. C’est la raison pour laquelle il n’a pas été choisi pour relier Eilat à Tel-Aviv.  Mais par conservatisme et fierté, TGV restera ce qu’il est. Le Rafale n’a pas été vendu parce que ses spécifications techniques n’étaient plus en adéquation avec les conflits nouveaux et que l’on hésitait à engager les ingénieurs et l’argent pour le rendre au goût des clients. Que de contrats perdus et d’emplois gâchés !  

            Sur le plan politique, on laisse prospérer le Front National sur des terres ouvrières alors qu’il s’agit du parti qui est le moins social et le plus égoïste par son idéologie. Il n’a rien d’un parti ouvrier avec tous ces énarques qui l’ont rejoint et qui ont acquis les défauts de tous les dirigeants français. C’est un parti qui rêve encore, comme jadis le communisme a fait rêver. On laisse se répandre l’antisémitisme à mesure que l’islam se développe. La France  est débordée par les mouvements islamistes qui ont instillé la peur et qui imposent leurs lois. La France souffre, la France se meurt mais on l’observe comme on assiste à l’agonie d’un mourant. On se borne à laisser couler quelques larmes, à émettre quelques regrets et à prendre quelques résolutions dignes d’engagements d’ivrogne.         
            Il est certes difficile d’appréhender de loin une situation inextricable mais, de tout ce qui rapporté, il ressort une véritable incompréhension. Aucune réforme ne peut être appliquée en France sans susciter des remous et des blocages. C’est à croire que les syndicats ont pour mission, non plus de défendre les intérêts des salariés, mais de détruire toute chance de voir leurs amis au pouvoir. Eux aussi se sentent efficaces dans la seule contestation. C’est un véritable suicide politique. Parce que le parlement est faible, sans pouvoir réel, la question de l’intérêt de cette institution est posée. Les décisions ne  se négocient plus dans l’hémicycle ou dans les ministères mais dans la rue. 
Syndicats à l'oeuvre

          Pourtant le pays, comme dans toutes les démocraties, a besoin de réformes pour éviter d’accumuler un retard qui ne cesse de se creuser, au fil des années, à coups de passivité, de reculade, d’inertie et de stagnation. La France est un pays riche ingouvernable et la Gauche creuse sa tombe pour gagner au moins une dizaine d’années d’opposition. Elle ne se sent bien que de l’autre côté de la barrière. Mais les syndicats veulent nous ramener aux années 1960 du temps de la lutte des classes, la seule période où ils ont prospéré.
            Les universités, à qui on interdit la sélection à l’entrée, cumulent les échecs de trente pour cent d’étudiants dès la première année. La liberté d’accès est offerte à tous les détenteurs d’un bac dévalué parce qu’il a été décidé, au nom des bonnes statistiques, de l’offrir à tous les jeunes qui n’en feront rien d’ailleurs. Les diplômés d’un doctorat scientifiques sont payés au smic et fuient vers les laboratoires outre-Atlantique. Les Grandes Écoles génèrent une élite qui choisit elle aussi l’étranger car la valeur personnelle y est mieux rémunérée et l’ascension plus rapide. L’université forme des chômeurs et des jeunes n’ayant aucun débouché concret sur le marché du travail.
Grévistes en 2016

            La sécurité sociale augmente tous les ans son déficit abyssal parce qu’aucune solution ne peut être envisagée sans que les médecins rouspètent pour leurs honoraires, sans que les mutuelles ne se rebellent contre la baisse de leur profit ou sans que les salariés et les entreprises ne s’opposent aux hausses des cotisations. La France reste ingouvernable.
            La fonction essentielle du bulletin de vote est de choisir des dirigeants pour cinq années puis d’attendre les résultats en les sanctionnant le cas échéant au scrutin suivant. Cette attitude peut être taxée d’angélique mais elle dénote plutôt une certaine maturité politique. Or nous assistons à un théâtre d’ombres. Les Français élisent leur président avec une majorité confortable, désignent une Assemblée ultra-majoritaire mais ils empêchent le gouvernement, qui en est issu, de réaliser le programme pour lequel il a été élu. La France est ingouvernable.
Congrès de Versailles 2016

            Mais le paradoxe tient au fait que souvent les électeurs ont peur du changement, même si leur pouvoir de contestation est intact. Alors ils râlent et ils manifestent dans la rue et dans les entreprises mais dans l’isoloir ils reviennent à leurs fondamentaux. Comment peut-on faire pour que la France soit gouvernable ?
           Il est temps que les énergies se rassemblent pour transcender les sensibilités politiques. De nouveaux dirigeants doivent comprendre que le pays ne peut pas être coupé en trois, que les extrêmes doivent être neutralisés et que les autres doivent gouverner ensemble dans l’intérêt de la France et des Français. Mais pour cela, il faut oublier la politique politicienne. On se demande si le socialisme n'est pas périmé et s'il ne faudrait pas s'orienter vers un social-libéralisme à la française.

6 commentaires:

Georges KABI a dit…

La gauche francaise est entachee avec sa naissance: sa specifite est la dispute ideologique qui couvre les interets politiques personnels. Elle n'a rien a voir avec la gauche britannique, scandinave et allemande. Elle n'a jamais su s'adapter, assouplir son discours, devenir aussi plus opportuniste. Sans cela, on ne peut gouverner veritablement. Et ca se reflete aussi bien dans les partis qui la representent (pourqui des partis et pas un seul seulement?) et pire dans le syndicalisme qui, meme au sommet de sa puissance, n'a jamais encadre plus de 30% des salaries. Cette absence de representativite et son emiettement ont barre toute possibilite au syndicalisme de vriament gerer l'economie avec les patrons( non moins organise d'ailleurs, mais qui ont l'avantage de controler les ressources financieres).
Et cette situation bien francaise a des repercussions dans le comportement quotidien des habitants de la France et meme de ses expatries. L'individualisme est la caracteristique la plus visible du Francais avec tous les inconvenients qui l'accompagnent.

Elizabeth GARREAULT a dit…

Quand je m'observe, je me désole, quand je me compare, je me console.
Il suffit de lire le programme que la droite nous concocte pour 2017 (programme Filion et consorts) pour se dire que très bientôt nous allons avoir d'excellentes raisons de geindre.
Quant à la politique de la France dans la région, je conseille aux amnésiques de se souvenir des basses oeuvres de l'ami Juppé quand il était ministre des affaires étrangères.

andre a dit…

La gauche a toujours échoué parce que son programme est contraire au fonctionnement du capitalisme et le marché reprend toujours le dessus . Il ne faut pas rêver . La gauche réussit quand elle respecte les mécanismes de l'économie et qui' elle arrive à faire croire que ses électeurs n'ont pas été dupés. ON VOUS L'AVAIT BIEN DIT EN 2012!!

Véronique ALLOUCHE a dit…

Ce même gouvernement qui a réussi l'exploit de créer dans ces propres troupes une sévère opposition.....la gauche a tenu parole, fiasco réussi au-delà de toute attente.
Cordialement
Véronique Allouche

Daphna Poznanski a dit…

Et si la France était ingouvernable à cause des lobbys? Contrairement à une opinion répandue, les socialistes ne sont pas arrivés au pouvoir en 2012 sans programme et sans équipes
. Mais à peine arrivés, ils se sont heurtés à la dure réalité : impossible de réformer quoi que ce soit sans se trouver confrontés aux puissants lobbys qui ont toujours le dernier mot, quel que soit le parti au pouvoir.

邓大平 עמנואל דובשק Emmanuel Doubchak a dit…

Pays médiéval corporatiste...?