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lundi 17 décembre 2018

Surenchère chez les Palestiniens



SURENCHÈRE CHEZ LES PALESTINIENS

Par Jacques BENILLOUCHE
Copyright ©  Temps et Contretemps
            

          Jusqu’à présent le Fatah de Cisjordanie se distinguait du Hamas de Gaza par une stratégie indépendante plutôt modérée. La collaboration étroite entre services sécuritaires de l’Autorité et d’Israël permettait de réduire la tension car étaient en jeu les 100.000 autorisations de travail distribuées aux ouvriers arabes pour travailler en Israël de manière quotidienne. Des centaines de milliers de familles subviennent ainsi largement à leurs besoins. Mais c’était sans compter sur les rivalités entre les deux clans qui poussent les extrémistes à agir contre les instructions de leurs dirigeants.



Tsahal à Guivat Asaf

            Pour ne pas être en reste, des militants du Fatah ont décidé de se joindre aux opérations terroristes avec le risque de modifier le statu quo dans la région. Les cellules du Hamas en Cisjordanie ont réussi à convaincre les Tanzim, branche armée du Fatah, à reprendre du service pour apporter leur soutien dans les attaques qui ont coûté la vie à cinq israéliens et blessé 12 personnes. Cela explique pourquoi le criminel de Barkan, qui a assassiné deux Israéliens, a trouvé refuge et protection dans le camp de réfugiés Askar de Naplouse pendant de nombreux jours. Les Tanzim ont aidé les réseaux clandestins du Hamas à assassiner à l’arme automatique deux soldats au carrefour Asaf Hill près de Bethel. Les Palestiniens se défendent en prétendant que le groupe des Tanzim n’est pas entièrement impliqué mais que seule une petite faction activiste a fait scission en prenant le nom de «Brigades du martyr Amoudi», constituées de vétérans de l’Intifada.
Assassin de Barkan

            Les services israéliens de sécurité sont à présent convaincus qu’il y a collusion entre le Hamas et le Fatah qui agit en toute impunité, au centre de Ramallah, avec la protection de l’Autorité. Les méthodes ont changé puisqu’il s’agit véritablement de techniques militaires avancées avec des terroristes qui utilisent des armes automatiques et des véhicules pour assurer leur fuite rapide. Cette méthode avait déjà été utilisée le 9 janvier lors de l’assassinat du rabbin Raziel Shevah devant chez lui.  Les Tanzim sont chez eux dans une région qu’ils connaissent parfaitement ; ils peuvent à la fois fournir des cachettes sûres et assurer une complicité de la population, ce qui explique le temps qui a été mis à découvrir l’assassin de Barkan. Ils ont organisé avec le Hamas des émeutes populaires pour créer des d’obstacles sur les routes afin de gêner ou bloquer la progression de l’armée.

            Pour ne pas perdre la main, Mahmoud Abbas s’est senti obligé de suivre le mouvement en réduisant la coopération entre ses services sécuritaires et ceux d’Israël pour donner libre cours aux terroristes. En fait il hésite toujours pour choisir sa stratégie. Ainsi il a laissé les Tanzim appeler la population palestinienne, le 14 décembre, à soutenir les terroristes qualifiés de «héros palestiniens», mais par ailleurs, il interdit les rassemblements similaires à ceux de Gaza pour éviter tout risque sérieux de débordement.
            Cependant, cette collusion Fatah-Hamas à des origines politiques. Le vice-président de l'Autorité palestinienne et membre du comité central du Fatah depuis 2009, Mahmoud Al-Aloul, se positionne en successeur putatif de Mahmoud Abbas dès son départ à la retraite. Pour réussir, il veut rassembler toute la population palestinienne, sans distinction, en envisageant même une troisième Intifada, la seule à pouvoir réunir les frères ennemis.
Mahmoud Al-Aloul

            Pour l’instant rien n’est prévu par Israël pour contrecarrer les troubles dans toute la Cisjordanie. Netanyahou poursuit son objectif de briser l’élan commun en modérant ses actions contre le Hamas et en tentant une paix séparée avec lui, sous l’égide de l’Égypte, pour empêcher l’avènement d’un État palestinien englobant la Cisjordanie et Gaza. Encore faut-il que la terreur en Cisjordanie ne vienne pas s’opposer au projet de Netanyahou. Les attentats prouvent que cette stratégie est défaillante. Ramallah et Gaza ne font désormais plus qu'un, ce qui a poussé Tsahal a agir avec force pour éliminer les terroristes palestiniens. Israël veut éviter l’ouverture d’un troisième front de combat, et de loin le plus dangereux, car il faut agir au  cœur même des villes des territoires.
Si la Cisjordanie se «militarise», alors Israël sera contraint de faire intervenir l'armée de manière plus intense, les unités d’élite en particulier. Le jeudi 13 décembre, l’OLP et le mouvement Fatah ont demandé aux Palestiniens de donner des réponses plus fermes aux attaques des militaires israéliens en Cisjordanie. Le vendredi 14 décembre 2018, diverses villes dont Ramallah, al-Bireh et Jérusalem, étaient le théâtre de forts affrontements entre les forces israéliennes et palestiniennes.
Le comité exécutif de l’OLP se montre lui-aussi plus actif pour faire de la surenchère. Ainsi il a condamné «les crimes d’Israël, dont la tuerie des citoyens palestiniens, les irruptions des forces de sécurité israéliennes dans les villes et les villages palestiniens et leurs offensives en Cisjordanie ainsi que l’arrestation des civils et les punitions collectives des Palestiniens notamment en Cisjordanie». Mais pour la première fois depuis plusieurs mois, l’OLP a appelé les habitants des territoires à se lancer dans le combat. En écho, le comité palestinien a demandé aux pays arabes de revenir sur leur décision de normalisation des relations bilatérales avec Israël. Mahmoud Abbas tient en mains les cartes de l'avenir des Palestiniens.

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