L’IRAN N’A TOUJOURS PAS RENONCÉ AU TERRORISME
Par Jacques BENILLOUCHE
copyright © Temps et Contretemps
L’Iran
continue à soutenir des milices étrangères partout dans le monde, en
particulier au Liban, au Yémen, en Syrie, en Irak et même chez les Palestiniens.
C’est un moyen d’influer sur la politique de ces pays. Cette
ingérence dans les affaires internes s’explique par la rivalité existante entre
l’Arabie saoudite, l’ennemi héréditaire, qui défend avec vigueur le wahhabisme,
l’idéologie ultra-orthodoxe et conservatrice de l’islam sunnite et l’Iran,
leader du monde chiite. Le conflit, au moins idéologique, perdure entre ces
deux pays.
Hezbollan outil d'expansion |
Mais
si les Saoudiens n’ont pas besoin de ce conflit pour exister, l’Iran en a besoin pour garantir sa survie et sa légitimité et il
doit donc être présent sur tous les théâtres d’opérations s’il veut insuffler
sa dynamique terroriste. Il y parvient d’ailleurs avec succès. Il étend sa
mainmise là où il avait une longue histoire derrière lui, comme au Liban, mais
il réussit à s’engager dans de nouvelles régions déstabilisées où il trouve un
terreau facile pour son idéologie. Mais une constante lui permet de marquer des
points, une cause lointaine qu’il s’est appropriée à défaut d’une autre plus
crédible ; la cause palestinienne et sa lutte contre Israël lui assurent
une base pour souder le régime théocratique.
Leader de Najbaa à Alep |
Face
à la passivité occidentale, des villes qui ont fait les beaux jours du califat
sunnite, Damas et Bagdad, sont tombées sous sa coupe. Depuis la révolution
islamique de 1979, l’Iran soutient des milices non étatiques comme le mouvement
chiite irakien Najbaa qui a fait allégeance en envoyant son chef à Téhéran. Il
se justifie en expliquant «qu’il a un devoir religieux d’exporter sa
révolution islamique et d’engager, par quelque moyen que ce soit, une lutte
constante contre les États perçus comme étant oppressifs». Un doute
subsiste cependant sur la finalité de ce soutien, idéologie ou intérêt national ?
Mais
les observateurs politiques sont convaincus que l’Iran n’agit pas par zèle
idéologique ou par volonté d’exporter ses idéaux révolutionnaires mais à des
fins de politique de sécurité nationale de son pays. Cela explique d’ailleurs le
soutien au régime alaouite d’Assad qui n’a rien de chiite. Sa technique est
éprouvée puisqu’il recrute les chiites les plus pauvres dans les régions qu’il
veut investir, la Côte d’Ivoire, le Yémen, l’Afghanistan et le Pakistan. Des
pauvres misérables, encadrés par les Gardiens de la Révolution islamique,
combattent alors en son nom.
Nasrallah et le général Aoun |
Mais
le ralliement des chiites n’est pas automatique. Le Hezbollah avait eu une
controverse interne pour s’impliquer en Syrie parce qu’il était réticent à
combattre aux côtés des ennemis de Dieu, s’agissant des Russes en particulier.
Hassan Nasrallah n’avait donné son accord qu’après avoir eu un entretien
téléphoné personnel avec le guide suprême Khamenei. On a tort de croire que le
Hezbollah est uniquement une marionnette de l’Iran sous prétexte qu’il dépend
de lui pour son financement. Il fait montre d’une certaine autonomie en
poursuivant ses propres objectifs à l’intérieur du Liban pour accumuler des
succès. Il a été de ceux qui ont «fait» l’élection du
général Aoun comme président du Liban.
L’Iran
a de l’influence et de l’argent, mais il lui arrive de perdre le contrôle des
monstres qu’il a engendrés. C’est ainsi le cas du Hamas qui avait été inféodé à
l’Iran et à la Syrie et qui avait décidé de rompre unilatéralement en 2012 lorsque
ses chefs ont quitté Damas avec comme conséquence immédiate une réduction des
aides. L’Iran avait alors trouvé la parade en réorientant les financements vers
d’autres groupes terroristes comme le djihad islamique.
Houthis au Yémen |
L’Iran
profite des nouveaux conflits pour s’insérer dans un pays, souvent en
décomposition. C’est le cas de la force iranienne Al-Qods qui arme les Houthis au Yémen depuis 2012. D’ailleurs un bateau avait été intercepté en 2013, rempli d’armes, d’explosifs et de missiles anti-aériens venus
d’Iran. Il est vrai que l’implication de l’Iran en Irak découle de la guerre
sanglante menée pendant huit ans par l’Iran contre l’Irak de Saddam Hussein.
Mais l’Iran sait y faire puisque la chute de Bagdad étant
imminente en 2014, il a proposé son aide au gouvernement central irakien.
La
montée en puissance de Daesh, violemment anti-chiite, a contribué à accroître
la popularité nationale des Gardiens de la révolution considérés comme une
protection contre Daesh. Ces Gardiens sont une force
économique, une force politique et une force idéologique. L’Iran a été ajouté, par le département d’État le 19 janvier
1984, comme un État commanditaire du terrorisme en même temps que le Soudan et
la Syrie. On estime que les dépenses iraniennes au profit des milices se
situent entre 20 et 80 milliards de dollars. Ces sommes, extraites du budget
public, ont été octroyées au chef des Gardiens de la Révolution pour lui permettre d’organiser de nombreux attentats dans les pays arabes contre des
intérêts occidentaux. Ils s’en sont aussi pris à l’Azerbaïdjan, le voisin laïc,
qui a fait immédiatement appel à Israël pour sa défense.
Président d'Azerbaïdjan |
L’Iran n’a
cessé ses activités terroristes. En 2011, l’ambassadeur saoudien aux
États-Unis, Adel al-Joubeir, avait survécu à une tentative d’assassinat, attribuée
par Riyad aux agents iraniens de la force Al-Qods. Il a été aussi prouvé que huit
des dix pirates de l’air du 11 septembre 2001 étaient passés par l’Iran. Ils n’avaient pas été détectés
car le gouvernement iranien avait conclu un accord avec les membres d’Al-Qaeda selon
lequel leurs passeports ne seraient pas tamponnés en Iran. D’ailleurs le leader d’Al-Qaeda en Irak, – Abou Moussab
al-Zarqaoui, s’était réfugié en Iran en 2001 tandis que Téhéran avait refusé de
l’extrader vers la Jordanie. Le Trésor américain avait imposé des sanctions
contre trois hauts membres d’Al-Qaeda, installés en Iran. Faysal al-Khalidi,
pourvoyeur d’armes, Yisra Bayumi, spécialiste des transferts de fonds et Abu
Bakr Ghumayn, leader d’Al-Qaeda en Iran.
Leaders al-Qaeda |
La
levée des sanctions financières avait permis à Barack Obama d’envoyer 400
millions de dollars en espèces à l’Iran en septembre 2016. Ces fonds libérés ont
accru les dépenses militaires et le soutien financier apporté aux milices
alliées : Hezbollah, Hamas, djihad islamique palestinien et milices
houthies au Yémen. Obama avait été persuadé que cet argent devait financer des
projets d’investissement locaux pour réduire le chômage, promouvoir la
croissance de l’emploi et aborder les questions liées à l’inflation. Il s'est lourdement trompé.
La
politique de l’Iran est d’avoir un pied dans le monde arabe en attendant de le
déstabiliser alors qu'on lui donne l'intention de travailler pour un éveil islamique. Le Hezbollah et l’Iran sont devenus des forces militaires
soutenant les chiites dans la région. La nouvelle stratégie de l'Iran consiste dorénavant à soutenir les chiites arabes et non
perses. Cela démontre que l’idéologie religieuse n’est plus de mise et que l'Iran ne cherche plus à répandre son islam mais à créer volontairement une rivalité avec ses voisins pour entretenir sa survie et sa légitimité. Encore
faut-il que l’Occident soit conscient de la réalité de l’usage qui est fait du
terrorisme par les Iraniens.
1 commentaire:
Jacques, votre conclusion n'est pas contradictoire. La main-mise chiite sur le monde arabe sunnite assurerait a l'Iran une richesse demesuree et un succes du chiisme sur le sunnisme. D'autres pays n'ont pas ete cites, la Somalie, l'Erythree, la Libye, l'Afghanistan, le Pakistan, l'Inde (oui, oui!!), le Bangla-Desh, les Philippines. Dans tous ces pays, les groupes armees chiites sont en plein travail.
Enregistrer un commentaire