Marine Le Pen a jugé, dimanche
dernier, dans l’émission «le Grand Jury RTL-Le Figaro-LCI»
que la France n’était pas «responsable»
de la rafle du Vel d’hiv à Paris en 1942. A ses yeux, les seuls responsables en
sont Pétain et Laval. En allant à l’encontre des déclarations de Jacques Chirac,
le 16 juillet 1995 : «Ce
jour là, la France accomplissait l’irréparable», de François Hollande
le 22 juillet 2012 : «Ce
crime a été commis en France, par la France», Marine Le Pen, démontre
qu’elle ne se démarque pas des fondamentaux du Front National.
Certains ont pu croire que Marine Le
Pen avait rompu avec la face sombre de son parti : elle s’était éloignée
de son père, elle avait condamné ses propos antisémites, négationnistes, elle
l’avait même exclu du Front National. Elle s’était débarrassée des antisémites
patentés, des nostalgiques du nazisme. Il lui fallait se débarrasser de ce
soupçon d’antisémitisme, qui lui collait à la peau, en essayant de rencontrer
officiellement des responsables communautaires ou en s’affichant avec des
responsables israéliens, lors d’un voyage en Israël.
Elle avait réussi à dédiaboliser le
Front National, à en faire, sous sa houlette, en quelques années un parti
présentable, dont les scores électoraux n’ont cessé de grimper, élection après élection.
Elle mobilise contre l’immigration, entendez contre les Arabes, contre l’Europe,
contre la mondialisation, contre les élites, pour le protectionnisme, pour le
retour à une monnaie nationale, un très grand nombre de Français, parmi
lesquels on compte des Juifs. Le Front
National est devenu le parti des patriotes, dit-elle. Elle est en tête, dans
les sondages, à égalité avec Emmanuel Macron, elle est assurée d’être présente,
au second de tour de l’élection présidentielle. Comment donc expliquer ce
dérapage, qui n’est pas accidentel, dû à la fatigue, par exemple, mais bien
volontaire ?
Cette élection présente un caractère
particulier. C’est la première fois que quatre candidats se retrouvent au coude
à coude, à dix jours du premier tour et chacun d’entre eux a la possibilité
d’arriver premier ou second. Certes, Marine Le Pen et Emmanuel Macron devancent
de trois ou quatre points, dans les sondages, François Fillon et Jean-Luc
Mélenchon mais cet écart n’est pas significatif. Jean-Luc Mélenchon a effectué une forte
remontée et François Fillon progresse légèrement. Tous les instituts de sondage
décrivent une stagnation et même une baisse des intentions de vote pour Marine
Le Pen, comme d’ailleurs pour Emmanuel Macron. La candidate du Front National
doit bloquer cette baisse mais aussi la progression de François Fillon. Elle
doit mordre sur l’électorat qui lui est resté fidèle en dépit des affaires.
En déclarant que la France n’est pas
«responsable» de la rafle
du Vel d’hiv, qui a entraîné l’arrestation de 13.000 Juifs dont 4.000 enfants
qui furent envoyés ensuite à la mort, elle s’adresse aux catholiques,
conservateurs, traditionalistes plus ou moins antisémites qui ne supportent
pas la repentance de la France ou de l’Église à l’égard des Juifs. Ils constituent
le socle de l’électorat de François Fillon mais elle ratisse plus large, en
direction des abstentionnistes de droite, en se réclamant du Général de Gaulle
pour justifier son jugement sur la rafle du Vel d’Hiv, accablant par là même
Jacques Chirac et surtout François Hollande.
La candidate du Front National veut
renforcer l’unité de la nation par la promotion du roman national et le refus
des repentances. Elle veut défendre une «France malmenée, dans laquelle, on a appris à nos enfants qu’ils
avaient toutes les raisons de la critiquer, de n’en voir, peut-être, que les
aspects historiques les plus sombres ; je veux qu’ils soient, à nouveau,
fiers d’être français». Peu importe que ce soit au mépris de vérités
dérangeantes.
Le masque est tombé, chassez le
naturel, il revient au galop, la fille n’est pas vraiment différente du père. J’espère
que les Juifs qui ont été sensibles, surtout au discours anti-arabe de
Marine Le Pen, au point de vouloir voter pour elle, auront compris que le
racisme est rarement, pour ne pas dire jamais, sélectif.
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