INQUIÉTUDE SUR LES NOUVEAUX TERRORISTES PALESTINIENS
Par Jacques BENILLOUCHE
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Lion's Dem |
Deux clans seulement occupaient
l’espace palestinien, le Hamas et le Fatah. Ils ont été dépassés par deux
nouveaux groupes de jeunes radicaux Lion’s Den et les brigades de
Djénine qui ont en commun d’être totalement indépendants et
incontrôlables. Ces jeunes qui dénient toute légitimité à l’Autorité
palestinienne ont décidé de choisir un nouveau modèle d’action violente en
Cisjordanie avec de sanglants affrontements face aux forces israéliennes. Ils
ont décidé de choisir une autre forme d’action parce qu’ils trouvent leurs organisations
existantes trop modérées et faisant peu d'effort pour engager la lutte armée
palestinienne.
Brigade de Djénine |
La situation a couvé
pendant plusieurs années et remonte à 2005 lorsque les factions palestiniennes
avaient annoncé un accord de trêve avec les Israéliens lors d’une réunion tenue
au Caire en présence du président palestinien Mahmoud Abbas. Mais cet accord,
qui devait ouvrir la voie à l’intégration de l’opposition palestinienne dans
les institutions du système politique palestinien issu d’Oslo, n’a pas
satisfait les groupes armés affiliés au Djihad islamique en Cisjordanie qui ont
alors lancé des opérations terroristes.
Le groupe Al-Sharawiya,
comme on l’appelait, s’était montré actif dans la région de Tulkarem et de Djénine,
menant des opérations qui ont poussé Israël à éliminer ou arrêter la plupart de
ses membres. Mais cela n’avait pas mis fin à son existence et le camp de Djénine
s’était transformé en un bastion important pour la branche militaire du
mouvement avec les visages connus de l’époque Husam Jaradat, Ashraf al-Saadi et
le chef Walid al-Obeidi, tous mis hors d’état de nuire. Les terroristes se sont
alors déplacés vers la ville de Qabatiya près de Jénine, devenue un bastion
important pour le Djihad islamique qui a subi de lourdes pertes qui ne lui ont
pas permis d’influencer les actions militaires des factions en Cisjordanie.
Husam Jaradat |
Après 2009, le phénomène
des grands groupes a pris fin, et l’action terroriste est passée au stade de
groupes autogérés n’appartenant à aucune hiérarchie, dans le cadre d’opérations
individuelles. Les factions palestiniennes sont parvenues à la conviction que
l’action militaire en Cisjordanie ne devrait pas être centralisée. Mais l’un des points négatifs de ces groupes est l’absence de zones
semi-fortifiées vers lesquelles se replier. Les groupes étaient vite découverts et donc facilement arrêtés.
En mai 2021, un groupe
d’hommes armés dirigés par Jamil al-Amouri a décidé de ne pas tirer en l’air et
d’attaquer les habitants des implantations, a attaqué les civils dans les rues.
L’AP n’a pas voulu qu’il soit une source d’inspiration pour la jeunesse, et l’a
donc assassiné en juin 2021. Aussitôt un groupe appelé «Le groupe Martyr
Jamil Al-Amouri» s’est constitué pour former la Brigade de Jénine, opérant
dans le cadre des Brigades Al-Quds, la branche militaire du Djihad islamique.
Jamil Al-Amouri, Adham Aliwi and Taysir Issa éliminés |
Mais les choses n’en sont
pas restées à la Brigade de Jénine, car des groupes se sont formés, avec des membres
du Fatah. Ils sont devenus efficaces pour affronter les forces israéliennes et
se sont alliés avec des éléments du Djihad islamique. Le Shabak a alors décidé
de frapper fort avec des incursions quotidiennes, le déploiement de tireurs
d’élite et l’arrestation de plusieurs membres. L’Autorité palestinienne a tenté
de contrôler l’action de la Brigade de Jénine avec peu de bonne volonté donc
peu de résultats. Face à cet échec, elle a proposé de cesser les poursuites en
échange de la remise de leurs armes et une amnistie face à Israël.
Dans l’immédiat la seule
option de Tsahal contre ces groupuscules serait une opération à grande échelle avec le risque
d’expansion des troubles et une nouvelle Intifada. Mais pour l’instant Israël
s’en tient à l’option des opérations éclair. L'Autorité palestinienne ne prône pas l’action armée
et préfère soutenir des gestes symboliques pour plaire au Fatah. Elle sait
qu’elle est contestée ce qui explique l'annulation des élections sous prétexte
qu'Israël refusait le droit de vote aux Palestiniens de Jérusalem. C’est ce
contexte qui a poussé à la création des Brigades de Djénine et des Lion’s
Den, en quelques mois, qui ont prôné les affrontements directs contre les forces israéliennes.
Ces groupes ont confirmé qu'ils ne représentaient aucune faction et pourtant,
ils ont reçu le soutien du FPLP (Front populaire de libération de la Palestine)
et des financements du Hamas et du Djihad islamique. Cependant, contrairement
au Hamas, ces groupes n’affrontent pas directement l’AP qui est pourtant plus faible que
jamais et qui a créé un vide politique que les nouveaux terroristes veulent
combler.
Cependant étant donné que ces
groupes agissent de manière sporadique dans différents endroits, une véritable
Intifada pourra être difficilement concrétisée. Depuis la mort
de Yasser Arafat en 2004, les conditions nécessaires à un soulèvement global,
un objectif et un programme centraux, n'ont pas été réunies. Les actions
spontanées des brigades sont toutes locales et souvent défensives puisqu’elles
se limitent à résister aux raids, aux incursions et aux arrestations.
Lion's dem à Naplouse |
Pour l’instant, la lacune de ces
groupes et la chance d’Israël résident dans le fait qu’ils n’ont ni idéologie
convaincante et ni organisation opérationnelle, dans le cadre d’une action
décentralisée, sans leader charismatique. Beaucoup sont vite éliminés à
l’instar de Fathi Khazem, Raad et Abderrahmane Khazem ou alors s’enfuient
lorsqu’Israël attaquent leurs bastions, Naplouse en particulier. Le combat
jusqu’à la mort n’est pas encore dans leur conception. Pour l’instant les
Brigades de Djénine et Lion’s Den n’ont pas acquis de soutien national. Il leur
manque des structures politiques, publiques, dirigeantes, organisationnelles
capables de les protéger et d'assurer leur pérennité. Ils ne peuvent pas
remporter de victoire décisive mais ils maintiennent vivant le terrorisme. Ils
souffrent surtout d’une division des Palestiniens, d’une absence de leadership unifié
et d’institutions nationales non renouvelées.
Fathi Khazem |
Cependant leur capacité de nuisance est importante.
Elle ne met pas en danger la sécurité d’Israël car leur action est circonscrite
à la Cisjordanie mais cela force Tsahal à agir en permanence pour les
désorganiser. D’ailleurs Tamer Al-Kilani, ancien du FPLP et haut responsable de
Lion’s Dem impliqué dans plusieurs fusillades et tentatives d'attentats
terroristes, vient d’être tué dans une explosion à Naplouse sans savoir si
l’explosion était accidentelle ou volontaire. L’explosion aurait eu lieu par
une bombe placée sur sa moto. L'armée israélienne et le Shin Bet n'ont pas
commenté l'incident. Tamer al-Kilani avait passé huit ans dans une prison
israélienne.
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