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dimanche 25 octobre 2020

Dernière ligne droite difficile pour Trump

  

DERNIERE LIGNE DROITE DIFFICILE POUR TRUMP

Par Jacques BENILLOUCHE 

Copyright © Temps et Contretemps





         

          Le système électoral américain, très spécifique, n'a rien de comparable aux autres pays. Il a été conçu pour donner un poids adapté à la force de chaque État, en fonction du nombre d'habitants. Le président et le vice-président des États-Unis sont élus par un collège électoral ; il ne s'agit pas d'une élection au suffrage direct mais au suffrage indirect. Les électeurs ne votent pas directement pour un candidat à la présidentielle mais désignent des Grands électeurs, élus eux au suffrage universel dans chaque État. Ces Grands électeurs, à leur tour, désignent ensuite le président. Les Etats-Unis ont une structure politique d'une République constitutionnelle et fédérale à régime présidentiel et sont composés de 50 États. 


Nombre de Grands électeurs par Etat

          Les États-Unis étant une république fédérale, on ne décompte pas les voix au niveau national (comme c'est le cas en France), mais au niveau de chaque État fédéré qui a droit à autant de grands électeurs qu'il a de représentants au Congrès, à savoir 100 au titre du Sénat, 435 au titre de la Chambre des représentants, et 3 pour le district fédéral de Colombia, soit un total de 538 délégués 
          Mais il n'existe pas de proportionnelle dans ces élections. Le candidat arrivé en tête rafle tous les délégués de l'Etat même si la différence de voix est minime. Les votes du concurrent sont alors tout simplement ignorés. Cela implique que quelques dizaines de voix comptent et qu'elles peuvent faire la différence. Tous les États n’ont pas le même poids dans le collège des Grands électeurs : les voix de la Californie (55 votes) comptent plus que celles réunies des treize États les moins peuplés. Des États comme le Texas (38 votes), New York (29), la Floride (29) ou l’Illinois (20) pèsent particulièrement lourd dans le résultat. Le candidat qui obtient le soutien de 270 Grands électeurs est élu. Mais son élection "officielle" n'a lieu qu'en décembre et sa prise de fonction intervient le 20 janvier 2021. 


          Les électeurs américains décideront le 3 novembre si Donald Trump restera encore quatre ans à la Maison Blanche. Le président républicain sera face au candidat du Parti démocrate Joe Biden, mieux connu pour avoir été vice-président de Barack Obama. Mais Biden fait de la politique aux Etats-Unis depuis les années 1970. À l'approche du jour du scrutin, les instituts de sondage évaluent les intentions de vote des Américains. Mais compte tenu du système électoral du tout ou rien dans chaque Etat, certains écarts de voix minimes peuvent modifier le sens du vote. Les sondages n'ont donc qu'une valeur ponctuelle. 

          On se souvient de l'énorme surprise de l'élection du 2 novembre 1948 où Harry S. Truman était donné perdant contre Thomas Dewey. Il avait réussi à l'emporter à la surprise générale alors que le Chicago Tribune avait titré par avance le soir du 3 novembre, "Dewey defeats Truman" (Dewey écrase Truman). Par ailleurs en 2016, Hillary Clinton était en tête dans les sondages et a remporté près de trois millions de voix de plus que Donald Trump, mais elle n'a pas été élue en raison du système de collège électoral, qui ne favorise pas forcément celui qui obtient le plus de voix. 
          Le 23 octobre, Joe Biden est donné gagnant avec 51% des voix contre 43% à Trump. Mais il reste encore 10 jours de campagne donc la tendance ne peut être considérée comme un fait acquis bien que Trump n'arrive certainement en tête que dans deux Etats : l'Ohio et le Texas. Pour le moment, les sondages dans les États-pivots semblent favorables à Joe Biden, mais les choses évoluent très rapidement, en particulier avec un Donald Trump tonique en fin de campagne face à un Joe Biden plus discret. 
Trump déçu écoute Netanyahou

         Les sondages suggèrent que Biden a de grandes avancées dans le Michigan, la Pennsylvanie et le Wisconsin - trois États industriels que son rival républicain avait gagnés avec des marges de moins de 1% pour remporter la présidentielle de 2016. Un sondage national NBC News / Wall Street Journal est aussi favorable à Biden avec un écart de 14 points. Mais ce qui est plus inquiétant pour le président Trump, ce sont deux sondages dans les États-pivots, effectués pour le New York Times et le Siena College, qui donnent à Biden une avance de sept points en Pennsylvanie et de cinq points en Floride. 
          Il est certain que cette situation électorale préoccupe les autorités israéliennes qui se rendent compte qu'elles ont mis tous les œufs dans le même panier. L'élection de Biden serait une catastrophe pour le Likoud et pour son chef qui n'aurait plus les mains libres en Cisjordanie. C'est pourquoi Benny Gantz s'est empressé de se rendre à Washington pour obtenir des garanties écrites du secrétaire d'Etat américain à la défense pour assurer la supériorité militaire d'Israël dans le cadre de la vente de F-35 aux Emirats et pour fixer l'avenir en cas de changement de gouvernance américaine. 

Gantz à Washington


     Tardivement certes, Netanyahou tente de corriger le tir sachant que la situation est désespérée comme le démontre un épisode peu glorieux à la Maison Blanche. Trump attendait un soutien ferme mais il a reçu une réponse maladroite. En effet, pour exploiter la normalisation historique des relations entre Israël et le Soudan, sous l'égide des Américains, le président avait invité de manière urgente et inattendue la presse dans le bureau ovale afin qu'elle soit témoin de sa conversation téléphonique avec le premier ministre israélien. 
Conversation avec Netanyahou

          Mais il n'a pas entendu ce qu'il voulait entendre. Vers la fin de la conversation, Trump avait insisté pour préciser le but de l'appel : 
"Pensez-vous que Sleepy Joe aurait pu conclure cet accord, Bibi ? Sleepy Joe ? Pensez-vous qu'il aurait conclu cet accord d'une manière ou d'une autre ? Je ne pense pas".
      Mais après un moment de silence et une respiration très profonde, Netanyahou avait singulièrement échoué à donner la réponse que Trump espérait en hésitant et en bafouillant : 
"Heuh, eh bien ... Monsieur le Président, une chose que je peux vous dire est ... heuh, heuh, nous apprécions l'aide à la paix de quiconque en Amérique. Et nous apprécions énormément ce que vous avez fait."
          La vidéo fait foi. Le président Trump a eu tort de vouloir forcer la main de Netanyahou. Avec un regard visiblement déçu sur son visage, il s'est borné à un "Ouais" réprobateur à une réponse en langue de bois, peu enthousiaste. Il y avait une certaine vision dramatique quand Netanyahou a esquivé le piège en n'attaquant pas Biden pour ne pas hypothéquer l'avenir. Enfin Trump ne pouvait s’attendre à ce que Bibi attaque Biden en pleine campagne et face à la presse. S’immiscer dans le processus aurait été condamné de toutes parts. Bibi peut soutenir Trump mais ne peut pas attaquer Biden. Il est prêt à lâcher en pleine campagne son ami qui avait su l'aider lors des élections législatives en Israël durant lesquelles Trump n'avait pas fait l'économie d'un soutien direct. Le Roi est mort, vive le Roi. Les dirigeants politiques sont toujours opportunistes. C'est le côté noir de l'engagement politique. La morale s'applique dans un autre monde.

5 commentaires:

Henri OLTUSKI a dit…

Très bonne analyse en oubliant que Biden a fait une énorme bourde sur les industries pétrolières en Pennsylvanie et le Texas et le fin Donald est entré dans cette brèche

Yaakov NEEMAN a dit…

... Bienvenue, la carte avec le nombre de grands électeurs !
Rien n'est vraiement joué car, comme l'écrit Maya Kandel : "Le plus frappant au terme du premier mandat Trump, lorsque l’on regarde l’opinion américaine, c’est non seulement la polarisation extrême, mais aussi l’extrême stabilité de son soutien : quoi qu’il fasse ou dise, Trump conserve un socle de 40 % d’opinion favorables ; sa popularité au sein de l’électorat républicain a atteint jusqu’à 90 %, même si elle pâtit en 2020 de sa gestion de la pandémie. Ce socle électoral du trumpisme ne disparaîtra pas, même s’il perd l’élection. Il impose de s’interroger sur ce qu’il dit du trumpisme, de sa vision du monde en particulier, et de son poids dans les redéfinitions à venir du parti républicain."

Avraham NATAF a dit…

Trump est un homme d'affaires redoutable, sans scrupules; il a révisé des accords commerciaux qui désavantageaient les USA. Sa faiblesse de one man show a empêché la constitution d'une bonne équipe d'administrateurs. Son adversaire a une carriers de politician/fonctionnaires.

La plaisanterie, dans les années 60 disait, Roosevelt a été président a vie, Truman " n'importe qui pouvait prendre la charge de Président; avec Eseinhower, les USA m'avaient pas besoin de Président et avec Kennedy il était dangereux d'avoir et d'être Président.

Yaakov NEEMAN a dit…

Pour une lecture juive de l'Histoire : s'il est vrai que le Créateur est également le Maître des événements qui nous affectent, alors il faudra comprendre l'élection de Biden comme signifiant : "Mes enfants, vous avez cru que c'était Trump qui vous protégait ? Eh bien non ! Je vais faire entrer à la Maison-Blanche un type plutôt critique à l'égard d'Israël pour vous apprendre que c'est Moi qui vous protège, et personne d'autre..."
Naturellement, on ne manquera pas d'être surpris par une telle lecture de l'actualité. Mais on a le droit d'anticiper, non ? Et de vouloir chercher du sens là où d'autres se contentent d'annoncer une "alternance". Non ?

ingrid Israël-Anderhuber a dit…

Allons ! Allons ! Yaakov Neeman, à vous lire, vous allez bientôt nous faire croire que c’est Dieu, que vous dites « MAÎTRE des événements », qui nous pousse à pécher (transgresser ses lois) ! Que faites-vous donc de la responsabilité humaine ?