ISRAËL CONFIRME SA DOCTRINE VIS-À-VIS DU
HEZBOLLAH
Par Jacques BENILLOUCHE
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Il n’est pas dans les habitudes de Tsahal, et encore moins du gouvernement
israélien, de confirmer ou de démentir les actions de l’aviation militaire
contre des cibles ennemies. Le flou est la stratégie toujours utilisée pour
rester à l’abri des réactions des chancelleries étrangères, toujours promptes à
condamner Israël même lorsque des terroristes sont ciblés. Il semble que les
Israéliens aient fait exception, le 25 février 2014, en accréditant, par la
voix d’un haut responsable sécuritaire, l'idée de leur responsabilité dans l’attaque
aérienne israélienne qui a eu lieu vers 22h30 à la frontière entre la Syrie et
le Liban.
Neutre vis-à-vis de la Syrie
Israël applique ainsi sa doctrine
consistant à ne pas s’en prendre directement à Bachar Al-Assad et à frapper en
dehors du territoire syrien. Il tient à rester neutre dans la guerre civile qui
ravage la Syrie. Il veut aussi éviter de provoquer les forces du Hezbollah, déjà
acculées dans leur lutte contre les rebelles syriens. La doctrine d’Israël a
été maintes fois affirmée. Il ne permettra jamais que du matériel sensible de haute
technologie ne parvienne aux mains des miliciens du Hezbollah. C’est pourquoi,
les convois d’armes sont systématiquement détruits dès qu’ils traversent la
frontière du Liban, pour éviter une dissémination d'armes en provenance du
régime de Bachar el-Assad.
Ce n’est pas la première fois que les
transferts d’armes sont visés. L'attaque du 30 janvier 2013 s’était inscrite dans
la volonté d’Israël d'éviter que le conflit syrien déborde sur les villes du
Golan, donnant ainsi l'occasion à l'Iran et au régime syrien de faire
diversion. L'attaque par l'aviation israélienne d'un convoi d'armes se
dirigeant du territoire syrien vers le Liban ne peut donc pas être vraiment une
surprise.
Aviv Kohavi |
Les mises en garde d’officiels israéliens ont été nombreuses tandis
que les voyages impromptus à Washington et à Moscou de responsables militaires
israéliens ne sont pas passés inaperçus. Aviv Kohavi, chef des renseignements
militaires, s’était ainsi rendu à Washington pour une rencontre inopinée et
secrète avec le chef d'Etat-major des armées, le général Dempsey Martin. Par
ailleurs le chef du Conseil de sécurité auprès du premier ministre, Yaakov
Amidror, avait rencontré les dirigeants russes à Moscou dans le cadre d’une «visite
d’urgence». Enfin le commandant des forces aériennes israéliennes, le
général Amir Eshel, avait émis à plusieurs reprises des mises en garde.
Amir Eshel |
Convoi détruit
En janvier 2013 le convoi détruit
contenait des missiles anti-aérien SA-17 de fabrication russe, transmis par la
Syrie. Ce chargement risquait de modifier la donne dans la région en équipant
le Hezbollah de matériel sensible et perfectionné pouvant limiter les missions
de l’aviation israélienne au-dessus du Liban.
Missiles SA-17 |
Des informateurs infiltrés parmi
les rebelles syriens et des commandos de Tsahal, qui organisent des opérations
ponctuelles de repérage à terre, ont permis aux Israéliens d’identifier les
sites de stockage des armes. Par ailleurs, les militaires assurent que, grâce à
leurs satellites, ils maintiennent une surveillance permanente des mouvements
autour des zones de stockage. Israël craint que la proximité des combats n’entraîne
un débordement sur les villes israéliennes du Golan et ne donne ainsi
l'occasion à l'Iran et au régime syrien de faire diversion en faisant déborder
le conflit contre Israël.
Israël ne craint pas de représailles de la part des Libanais car l’armée
libanaise ne se lancera pas dans une aventure où elle a tout à perdre. Les
Israéliens lui ont déjà transmis la liste des cibles militaires et
industrielles qui seraient rasées si une action était entreprise contre Israël.
La Syrie n’a aucun intérêt pour l’instant à réagir, trop occupée à frapper les
rebelles. Les Israéliens ont par ailleurs informé leurs parrains russes pour
les rassurer sur leur volonté de ne cibler que le Hezbollah qui est trop empêtré
en Syrie pour songer à se lancer dans un conflit de grande ampleur et ouvrir un
nouveau front. D’ailleurs Nasrallah minimise l’opération dès lors où il estime
n’avoir pas été touché dans son sanctuaire.
Arsenal sensible
Ainsi Israël fera tout pour empêcher le
Hezbollah de se doter d’un arsenal puissant pouvant mettre en danger sa
sécurité. Le petit armement n’est pas visé mais uniquement trois types de missiles.
1/ Les systèmes avancés de défense
aérienne comme les batteries de SA-17 qui mettent en danger les vols israéliens
de reconnaissance au-dessus du Liban.
Fateh-110 |
2/ Les missiles sol-sol de fabrication iranienne,
les Fateh-110, d’une portée de 300 kms avec une précision de 200 mètres,
capables de toucher des objectifs civils et militaires à l’intérieur d’Israël.
Missile Yakhont |
3/ Les missiles antinavires sol-mer,
Yakhont, d’origine russe, qui dépassent la vitesse du son et qui menaceraient
les vedettes maritimes israéliennes et les plates-formes off-shore de gaz
naturel.
4/ Les armes chimiques ne sont pas exclues de cette liste sachant qu’un
certain nombre d’entre elles ont échappé à la vigilance des troupes régulières
syriennes pour passer aux mains des terroristes.
Benjamin Netanyahou a
confirmé la stratégie d’Israël : «Notre politique est claire. Je ne
commente pas ce que nous avons fait ou pas fait, mais nous ferons ce qui est
nécessaire pour assurer la sécurité d’Israël.» En évitant de reconnaitre
implicitement sa responsabilité dans cette frappe, il ménage la susceptibilité
des Syriens et du Hezbollah qui, de ce fait, ne se sentent plus contraints
de riposter. D’ailleurs le flou est volontairement entretenu sur le lieu précis
de l’attaque, en territoire syrien ou libanais. Israël se bornant à préciser
que sa préoccupation est de choisir le lieu de l’attaque pour éviter des
dommages collatéraux contre les civils.
Hezbollah |
Le journal libanais «The Daily Star» a révélé que des avions de
combat israéliens ont attaqué des cibles dans les bastions du Hezbollah à
proximité du village d'Al-Nabi Shayth. D’autres sources ont affirmé que les
explosions ont été entendues dans la région de la Bequaa après quatre attaques
menées sur le village d'Al-Nabi Shayth du côté syrien. Cette région est connue pour être un bastion
du Hezbollah dans lequel s’effectuent le recrutement et la formation des
nouveaux membres.
Malgré la précision de ces révélations, Israël n’a donné aucune
confirmation de ces faits tandis que la menace continue à peser aux dessus du
Hezbollah. Mais Israël et le Hezbollah ont, les deux, intérêt à entretenir le mystère sur
le raid aérien à la frontière syrienne
1 commentaire:
Le comble...les rebelles salafistes qui renseignent Israël sur les positions du Hezbollah.Ah c'est pas simple le MO.
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