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jeudi 12 janvier 2023

Papa, je suis condamné à mort, ne le dis pas à maman

 

PAPA, JE SUIS CONDAMNÉ À MORT, NE LE DIS PAS À MAMAN


Par Jacques BENILLOUCHE

copyright © Temps et Contretemps

Mehdi Karami a été exécuté le 7 janvier 2023

      «Papa, ils ont prononcé les peines, je suis condamné à mort… mais ne le dis pas à maman». C’est par ses mots dramatiques qu’un jeune iranien Mehdi Karami a annoncé son exécution le 7 janvier 2023, pour juguler la panique en Iran. Quand un gouvernement exécute ses propres citoyens, pour des raisons souvent obscures, il démontre ainsi sa faiblesse mais aussi la panique qui s’empare de ses dirigeants. Effectivement le malheur, qui s’abat tous les jours en Iran, touche surtout la jeunesse et quelques cadres suspectés de collaborer avec Israël. Tous ceux qui ont une certaine responsabilité technique ou qui contestent dans le pays deviennent suspects. L'Iran a ainsi exécuté au moins 8.000 personnes en 20 ans. Les tribunaux iraniens ont déjà confirmé ces derniers jours deux peines d'exécution pour des manifestants, des dissidents ou des pseudos espions. L'utilisation de l'exécution comme moyen de supprimer la dissidence a une longue histoire en Iran.




Les responsables iraniens semblent n'avoir qu'une seule méthode pour régler leurs problèmes internes, la pendaison comme solution et comme mesure préventive. Pour eux : «C'est une politique ferme du pouvoir judiciaire d'être décisif et d'enseigner aux gens une leçon en cette période de changement». Le pouvoir judiciaire a subi un changement depuis que le Guide suprême, Ali Khamenei, avait nommé en février 2018 Ebrahim Raïssi, futur président, au poste de chef du pouvoir judiciaire. Au cours des 18 mois où il a été en poste, sa principale mission officielle a été de faire campagne contre la corruption financière. Mais la publication d'un grand nombre d'ordres d'exécution au cours de cette période indique que la mission de Raïssi a surtout été de réprimer la dissidence par des exécutions. Les rapports d'Amnesty International et de l'Organisation iranienne des droits de l'homme révèlent que 8.071 exécutions ont eu lieu en public ou derrière les murs des prisons entre les années 2000 et 2019.



L'année 2015 a été une année exceptionnelle avec près de 1.000 exécutions, cette même année où l'Iran venait de signer l'accord nucléaire avec les puissances mondiales. Ces chiffres ont placé l'Iran en tête de liste des pays ayant enregistré le plus grand nombre d'exécutions au cours des deux dernières décennies. Le gouvernement iranien avait décidé, le 14 juillet 2020, de pendre trois jeunes hommes arrêtés pendant et après la campagne nationale de protestation anti-régime en novembre 2019. Mais devant le tollé général, il a décidé de surseoir à l'exécution. Le régime iranien est responsable de plus d'un tiers de toutes les exécutions dans le monde et se classe deuxième après la Chine. Malgré cela, le nombre réel d'exécutions en Iran est supérieur aux chiffres annoncés par le gouvernement.



            Si la plupart des exécutions concernent le trafic de drogue, les pendaisons sont aussi utilisées en Iran comme moyen de supprimer la dissidence ou de réprimer les pseudos espions, pour l’exemple. Selon l'Organisation des droits de l'homme de Hangaw, 25 militants kurdes ont été exécutés dans des prisons. La panique s’empare des autorités qui voient des espions partout. Punir, sans éventuellement attendre d’échanger un espion contre un des leurs arrêtés à l’étranger, est le signe que les Iraniens emprisonnés n’ont aucune valeur humaine. Il s’agit pour le pouvoir d’intimider ceux qui sont prêts à monnayer leurs services. Mais à présent, les mollahs cherchent surtout à justifier les catastrophes qui touchent le pays chaque jour et dont ils feignent d'ignorer les origines.

L’Iran cherche des boucs émissaires. En 2016, les Mollahs avait exécuté un scientifique nucléaire accusé d'espionnage au profit des États-Unis. En juin 2020, ils avaient pendu un espion présumé. Jalal Hajizavar, ancien expert contractuel de l'Organisation aérospatiale du ministère de la Défense. Il avait selon le Tribunal été payé pour espionner pour le compte de la CIA. Les autorités auraient confisqué du matériel d'espionnage dans sa résidence. Sa femme a été condamnée à 15 ans de prison pour complicité. L'Iran a exécuté un ancien expert du ministère de la Défense, Reza Asgari, suspecté d'espionnage au nom de la CIA. Mahmoud Mousavi Majd, accusé lui-aussi d'espionnage au profit des États-Unis et Israël, ayant entraîné l’élimination du général Kassem Soleimani, via une frappe aérienne en Irak a été pendu. Il avait «espionné les forces armées de la République islamique, en particulier la Force Qods, pour dévoiler le lieu et les mouvements du martyr général Kassem Soleimani».

Des personnes protestent à l'ONU contre les exécutions en Iran


Selon les autorités, trois hommes, Amir-Hossein Moradi, Mohammad Rajabi et Saeed Tamjidi, auraient été impliqués l’an dernier en tant que «chefs d’émeutes» lors des manifestations anti-gouvernementales de masse qui ont secoué l'Iran après la décision du gouvernement d’augmenter le prix du carburant. La répression avait fait 200 morts mais cela n’a pas suffi aux autorités. Il fallait marquer l’exemple par une action spectaculaire médiatique. Il va sans dire que toutes ces exécutions ont été commandées après un procès inéquitable, sans défense sérieuse et à la suite d’aveux extorqués sous la torture.

Durant ces dernières semaines, Mohammad Mehdi Karami (22 ans) et Seyed Mohammad Hosseini (39 ans) ont été exécutés par pendaison après avoir été arrêtés en marge des manifestations. L’annonce de leur pendaison porte à quatre le nombre d’exécutions en lien avec les manifestations. Depuis le début du mouvement de contestation, la justice a condamné à mort 14 personnes selon un décompte de l’AFP. 

Catherine Colonna, ministre française des A.E


Le ministère français des Affaires étrangères s’est borné à juger «révoltantes» les exécutions et exhorté Téhéran «à entendre les aspirations légitimes du peuple iranien. L’exécution de manifestants ne peut tenir lieu de réponse aux aspirations légitimes de liberté du peuple iranien». En fait le Quai d’Orsay a publié juste quelques mots pour condamner «ces exécutions, révoltantes, qui s’ajoutent aux nombreuses autres violations graves et inacceptables des droits et libertés fondamentales commises par les autorités iraniennes». Des paroles mais peu d'actes pour protéger les intérêts financiers. 

Je serai le président de tous


Les dirigeants iraniens creusent leur propre tombe en sacrifiant leurs citoyens. La justice passera aussi un jour pour eux. La contre-révolution est en marche. Israël la prépare à sa façon pour libérer les citoyens iraniens soumis à l’esclavage des mollahs. Les partisans de la peine de mort en Israël, quelles que soient leurs motivations, devraient réfléchir aux dégâts qu'une telle décision pourrait causer. 

3 commentaires:

Georges Kabi a dit…

Et ce n'est seulement que depuis l'an 2000! Des l'arrivee au pouvoir de Khomeiny, il y eu une vague de pendaisons pour supprimer lespartis d'opposion, Mujjahin Khalk et Tumeh. Ce dernier parti a cesse d'exister, mais les Mojjahin Khalak, selon meme les autirutes iraniennes existtent touujours. C'est peut etre pour justifier les pendaisons.
Mais meme du temps du Shah, le sang iranien coulait a flot grace a la redoutable police politique iranienne, la Sawak entrainee pAr les Israeliens. Sawak - Shabak, drole de coincidence!

Yaakov NEEMAN a dit…

Il faudrait envoyer cet article à tous les journaux gauchistes (ou mainstream) francophones qui refusent de voir (et de donner à voir) la vérité en face. Leur envoyer l'article ne suffirait pas. Il faudrait leur faire signer un accusé de réception. Et même ça, ça ne suffirait pas : il faudrait qu'ils signent un accusé de lecture ! On pourrait alors recevoir des trucs du genre : Je soussigné Jean Daniel (paix à son âme) reconnaît m'être lourdement trompé sur tout ce que j'ai écrit concernant le conflit... Je soussigné Jean d'Ormesson (paix à son âme) regrette d'avoir écrit que... etc. Je comprends mieux désormais le sens de cette bénédiction (pokéakh yvrim) que nous récitons chaque matin dans la Amida sans trop la comprendre : Béni sois-Tu Hachem qui ouvres les yeux des aveugles. Il n'est pas de pire aveugle que celui qui ne veut pas voir !

Véronique ALLOUCHE a dit…

Excellent article qui dénonce la tyrannie abjecte de ces dirigeants.
Quand je pense à l’Iran je pense aux femmes iraniennes. Ces femmes dont on a ôté toute féminité, emprisonnées derrière leurs voiles noirs. Ce voile noir qui cache ce sourire que personne ne voit et parfois ce rire que personne n’entend parce que le rire en Iran ne se fait plus entendre depuis si longtemps.
Courageuses femmes qui descendent dans la rue au risque de leur vie parce que l’une des leurs a perdu la sienne pour avoir osé retirer le symbole de son enfermement vestimentaire.
Courageuses femmes avec pour seules armes leurs sourires et leurs rires enfin retrouvés et qui fait vaciller ce pouvoir suranné.