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lundi 23 janvier 2023

Des terroristes libérés accueillis en héros dans leur village

 

DES TERRORISTES LIBÉRÉS ACCUEILLIS EN HÉROS DANS LEUR VILLAGE


Par Jacques BENILLOUCHE

Copyright © Temps et Contretemps

Maher Younis, aux côtés de son cousin Karim Younis sortis de prsison

        Deux terroristes ont été libérés après 40 ans de prison dans les geôles israéliennes et ils sont accueillis en héros dans leur village comme s’ils avaient réussi un haut fait d’armes. Maher et Karim Younis, deux cousins, avaient tué en 1980 le jeune caporal de Tsahal Avraham Bromberg sur les hauteurs du Golan. Leur seule gloire aura été d’avoir assassiné un soldat isolé. Condamnés à la prison à perpétuité, ils doivent leur élargissement au président Shimon Peres qui a commué en 2012 leur peine à 40 ans de prison.


Maher et Karim Younis jeunes


En 1983, Younis avait été reconnu coupable avec son cousin Karim Younis du meurtre d’Avraham Bromberg qui faisait de l’auto-stop vers Hadera alors qu’il servait dans le Golan. Ces Arabes israéliens avaient offert au soldat, qui rentrait chez lui depuis sa base militaire, de le ramener en voiture, avant de le maîtriser, de lui tirer à froide une balle dans la tête et de lui voler son arme.

Arrêtés par les forces de l’ordre, ls ont été laissés en vie car l’éthique de l’armée exige qu’on n‘abatte pas un terroriste sans menace. C’est l’honneur d’une armée populaire que de se comporter avec humanité et non en bête assoiffée de sang. La justice est passée. Mais il y a une certaine indécence à fêter leur libération alors que les parents Bromberg sont encore dans la peine. Leur fils est mort et ses assassins sont encore en vie. À cette occasion, le sujet de la peine de mort, le châtiment suprême, revient sur le tapis. Certains se posent la question de comprendre pourquoi les assassins sont encore en vie.

Avraham Bromberg


Israël a aboli en 1954 la peine de mort qui ne peut plus s’appliquer que dans le cadre d’un «génocide, de crime contre l’humanité, de crime de masse, de trahison ou de crime contre le peuple juif».  Depuis la création de l’État, elle n’a été appliquée qu’une seule fois contre le criminel nazi Adolf Eichmann, exécuté à Jérusalem le 31 mai 1962. Mais, avant la création de l'État, Israël garde en mémoire l’erreur judiciaire en la personne de Meir Tobiansky dont le cas fut le plus grave et le plus scandaleux puisqu’il a été soupçonné à tort de trahison. Il avait subi le feu d’un peloton d'exécution après un procès bâclé, pendant la guerre d’Indépendance en 1948. Il a fallu plusieurs années pour que son innocence soit reconnue et son nom réhabilité.

L’État juif adopte ainsi une position ambivalente alors que les considérations sécuritaires sont fondamentales dans le pays. Israël a confirmé sa position en votant pour la résolution de l’ONU du 18 décembre 2008, impliquant un moratoire mondial sur les exécutions. Mais les pays étrangers refusent de placer Israël parmi les pays abolitionnistes puisqu’il existe encore, dans la loi israélienne, des cas d’application de la peine de mort.

Les nationalistes israéliens veulent d’ailleurs s’appuyer sur les cas précis soulevés pour exiger la peine de mort pour les terroristes. Ils n’ont pas besoin d’un nouveau texte législatif puisque l’interprétation est libre. Ils évitent cependant d’analyser les raisons de la loi de 1954, fondée sur la violence insensée et sur les crimes en rapport avec la Shoah. Mettre sur un même pied d’égalité les crimes de droit commun, voire la violence terroriste, risque en effet de banaliser les crimes nazis pour lesquels la loi a été votée. Il existe des niveaux de responsabilité qui ne peuvent pas être comparés.

Maher Younes est accueilli par des amis


Il ne semble pas que la classe politique israélienne soit en faveur de la peine de mort et on soupçonne sa réticence. L’assemblée plénière de la Knesset du 17 juin 2015 avait rejeté en lecture préliminaire une proposition de loi qui instituait la peine de mort pour les terroristes condamnés. Ce texte aurait rendu plus facile aux tribunaux militaires et aux districts de condamner à mort les personnes reconnues coupables d’assassinat avec des motifs nationalistes. Une grande majorité de la Knesset s’est opposée à ce projet puisque seuls 6 députés ont voté en sa faveur alors que 94 autres, présents, ont voté contre.

Israël n’a pas choisi la voie abolitionniste pour des raisons juridiques mais par tradition et sur la base d’une interprétation religieuse. Il est vrai que la loi religieuse reconnaît la peine de mort comme une punition juste et indispensable mais il s’avère à l’usage que l’application de la loi dans le cadre religieux est limitative. Selon la tradition rabbinique, Maïmonide au 12ème siècle avait écrit : «il est préférable d’acquitter mille personnes coupables que de mettre un innocent à mort». C’est pourquoi les règles religieuses sont très strictes ; deux personnes au moins doivent témoigner du meurtre ; les proches de la victime sont exclus des témoins admissibles ; enfin les témoins doivent avoir prévenu l’auteur du crime de leur responsabilité et de la possibilité d’exécution. Maimonide craignait que la mort relève uniquement du «caprice des juges».

Ainsi, le rabbin Yossef Edelstein de l'Université George Washington, a exprimé son opinion : «théoriquement, la Torah peut être interprétée comme étant en faveur de la peine de mort. Il n’est pas moralement impossible de mettre quelqu’un à mort. Cependant, les perspectives changent quand on s’intéresse à la mise en pratique d’une législation qui semble dure. Vous n’êtes pas sans savoir qu’il est difficile en pratique d’exécuter un être humain dans la société juive. Je crois qu’à la lumière de la jurisprudence juive, la peine capitale telle qu’elle est présentée dans la Torah et appliquée par les plus grands Sages de notre religion, symboles même d’humilité et d’humanité, ne ressemble en rien à celle qui est mise en œuvre de nos jours en Amérique. Elle fut pratiquée en Israël ancienne une fois tous les sept ans, et non 135 fois en cinq ans et demi». On en déduit que la tradition rabbinique confirme les positions abolitionnistes de l’État juif et de la diaspora juive. Les termes de la loi de 1954 sur la peine capitale reflètent en fait l’héritage de ces coutumes.

Karim Younis


Si Israël voulait recourir à la peine de mort, la tradition juive et la loi de 1954 ne seraient pas un obstacle car seules les considérations sécuritaires priment sur les considérations morales. En effet, comme dans toutes les lois, on peut interpréter à sa façon les textes et les expressions «crime contre le peuple juif» et «trahison» qui couvrent tous les horizons du terrorisme.  Il est vrai que face au développement des actes terroristes sanglants contre des femmes et des enfants, les appels pour le rétablissement de la peine de mort se multiplient car certains sont convaincus que l’échafaud pourrait avoir un effet dissuasif. Mais cela est valable pour des personnes raisonnables, normalement constituées, et non pour des candidats au suicide. Les jeunes terroristes savent qu’avec Israël, la mort est certaine au bout du chemin, à de rares exceptions près, et pourtant la mort n’est pas dissuasive.

En revanche, les services israéliens de sécurité intérieure (Shabak) sont intéressés à capturer un assassin vivant car ils peuvent alors obtenir de précieuses informations sur le réseau, le commanditaire, les caches d’armes et les attentats planifiés. En le laissant en vie, la récolte d'informations peut sauver de nouvelles vies. La théorie du loup solitaire est surfaite ; les terroristes sont guidés par des gourous et c’est eux qu’il faut rechercher et même éliminer. La mort pour un assassin pourrait paraître une solution douce alors que quarante ans de prison sont un calvaire physique et psychologique. Et cela pour des terroristes qui se voient en prison alors que leurs chefs profitent de la vie dans la luxure. A terme, ils se rendent compte que leur sacrifice ne vaut pas la peine car rien n’a changé et qu’ils ont été les seuls à payer de leurs corps. Il est probable, que passée l’euphorie de la libération, ils se mettent à mieux réfléchir et surtout à convaincre les jeunes ardents terroristes que leur sacrifice restera stérile et que l’on ne gâche pas 40 années de sa vie pour des dirigeants qui n’en valent pas la peine. 

Bien sûr dans le feu de la joie d’avoir été libéré, la parole est libre. Karim Younis s’est rendu sur la tombe de sa mère : «Je suis prêt à sacrifier encore 40 ans pour la liberté de notre peuple. Ma consolation est qu'aujourd'hui les prisonniers sont unis contre la barbarie de l'occupation». Il n’est pas certain qu’à la réflexion, il avalise encore ces paroles que lui ont été dictés par ses chefs qui étaient bien planqués pendant que lui gâchait sa vie en prison. Peut-être que cette foi la leçon servira à mettre du plomb dans le cerveau des jeunes tueurs qui risquent d'entrer en prison en tant qu'adolescents et d'en sortir en vieillards usés.


5 commentaires:

Véronique ALLOUCHE a dit…

« Utiliser contre les terroristes la peine de mort, c’est, pour une démocratie, faire sienne les valeurs de ces derniers».Robert Badinter
Israël doit rester ce qu’il est : un pays adulte dont l’exception à la peine de mort se référent à la loi de 1954 est tenue à demeurer afin de ne pas affaiblir sa portée.

Avraham NATAF a dit…

La prison semble bien conserver, être nourri, soigné, blanchi, en pleine forme et avoir la possibilité de continuer à étudier loin des soucis quotidiens, des dettes

Anonyme a dit…

Le problème est que l'assassin soit accueilli comme un héro.
Il avait tué un jeune homme sans méfiance, qui n'était pas un combattant ennemi mais un compatriote qui faisait du stop.
La libération au bout de 40 ans, peine effectuée est légitime. Mais la fierté de ceux qui ont fêté la libération du détenu prouve qu'ils ne sont pas des citoyens loyaux mais des ennemis de la nation.
Ce constat est un échec flagrant pour Israël qui n'a pas réussi à faire des arabes des citoyens comme les autres. Ce constat justifie la méfiance contre une minorité qui approuvé les assassinats, et participe à expliquer le triomphe de la droite nationaliste juive.
Ces villageois causent un grand tort à la minorité arabe.

Georges Kabi a dit…

Pour "Anonyme": les Arabes israeliens ou non sont restes coinces en 1948. Ils ont sans cesse chercher a laver cette defaite dans le sang. Neanmoins, de plus en plus d'Arabes ont compris que ce n'etait pas le meilleur moyen d'eliminer Israel, qu'il etait preferable de s'integrer socialement a l'aide d'etudes universitaires pourr prendre le controle le plus possible des institutions et des secteurs economiqques d'Israel, bref d'introduire le ver dans le fruit.
Ainsi, l'industrie du batiment, l'industrie des transports, y compris les transports publics,
le vol incessant des machines et es produits agricoles, la mise sous "protection" les entreprises israeliennes sont les premiers signes de leur reussite. Mais il y aussi plus grave: la tres grande minorite des medecins, des pharmacciens, des dentistes, des expert-comptables, des avocats, des agents d'assurance sont arabes. Deja Tsahal a fait son deuil sur tous les hopitaux du nord du pays et hospitalisent ses soldats et officiers blesses dans les hopitaux du centre.
Meme l'industrie de la high tech voit des entreprises arabes se monter. Or il faut savoir qu'un Arabe n'engagera jamais un travailleur juif, aussi qualiffie qu'il soit ce qui n'est pas le cas du contraire, auf dans les industries liees a la Defense.
Une firme de bio-tech israelienne vient de mettre au point un systeme pour changer le sexe d'un poussin dans l'oeuf meme. Ses fondateurs sont une savante juive et un savant arabe.

Yaakov NEEMAN a dit…

L'islam est soluble dans le judaïsme, mais pas l'inverse.
C'est sûr qu'on est allé trop loin dans la sous-traitance.
Tant qu'on idôlatrera la démocratie, système qui légitime toutes les déviances et gomme les différences entre individus, on peut s'attendre au pire.
Il faut leur expliquer que les fils d'Abraham/ibrahim sont à nouveau réunis autour de leur père fondateur. Ychmaël cherchera-t-il à nouveau à tuer Its'hak ? Le maître de l'Histoire leur donne une nouvelle chance. Certains l'ont compris. Mais c'est sûr qu'il faut rester vigilant. La duplicité est inscrite dans le caractère de l'être humain.