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jeudi 20 mai 2021

Victoire stratégique mitigée du Hamas

 


VICTOIRE STRATÉGIQUE MITIGÉE DU HAMAS


Par Jacques BENILLOUCHE

Copyright © Temps et Contretemps

           

Lynchage à Bat-Yam

          Pour la prière à la mosquée Al-Aqsa, lors de la plus importante journée du Ramadan, la police avait installé des barrières métalliques puis avait interdit aux jeunes arabes israéliens de s’installer sur les gradins de l’amphithéâtre de la porte de Damas, près du Mont du Temple. Cette décision contestable était la première prise depuis des dizaines d’années, entrainant ainsi la mauvaise humeur de ceux qui se sentaient brimés. La décision a été prise au sommet du gouvernement dans une sorte de provocation pour bloquer la création imminente d’un gouvernement d’opposition avec le concours du parti arabe islamiste Raam en le disqualifiant. Pour augmenter le malaise, des jeunes extrémistes d’extrême-droite du parti d’Itamar Ben Gvir, associés à l’organisation Leava et La Familia ont été encouragés à s’en prendre à la population arabe israélienne.




Dans le cadre d’une affaire israélo-israélienne, le Hamas s’est engouffré dans la brèche pour soutenir les Arabes israéliens en lançant des centaines de missiles sur les villes situées autour de Gaza mais surtout sur Tel Aviv et ses environs grâce aux nouvelles fusées qu’il a obtenues d’Iran. Israël n’a pas eu d’autre choix que de procéder à des représailles en bombardant les sites de lancement, les usines de fabrication de missiles, les locaux sécuritaires du Hamas et du Djihad islamique.

Le Hamas, qui dispose de nombreuses cellules dormantes, a fomenté des émeutes chez les Arabes israéliens dans les villes mixtes de Jaffa, de Lod, de Bat-Yam, et de Saint Jean d’Acre. En Cisjordanie, les Arabes ne disposent pas de la citoyenneté israélienne et vivent sous juridiction de l’Autorité palestinienne. Paradoxalement ils n’ont pas bougé pour ne pas hypothéquer l’avenir des 150.000 d’entre eux qui traversent tous les jours la frontière pour travailler dans les chantiers en Israël avec des salaires quatre fois supérieurs aux leurs. Ils craignaient que la Cisjordanie ne soit fermée et qu’ils soient immédiatement remplacés par des ouvriers chinois plus pacifiques.

Kobi Shabtai


            Selon le chef de la police, les responsabilités sont claires. Kobi Shabtaï, a accusé nommément le député Itamar Ben Gvir «d'avoir mis de l'huile sur le feu à Jérusalem et d'être en partie responsable des violentes manifestations qui ont rallumé les mèches du conflit israélo-palestinien». Il n’a pas mâché ses mots face au Premier ministre qui, dans le fond, approuvait l’action de ces illuminés qui lui permettaient de reprendre la main sur le plan gouvernemental. Il a ajouté que les provocations du député de l’ultradroite et de ses partisans ont attisé la colère des Palestiniens et provoqué les violents affrontements qui ont secoué Jérusalem. Parmi les coups d’éclat du député Ben Gvir, l’installation d’un bureau en plein centre de Cheikh Jarrah, ce quartier de Jérusalem-Est devenu le symbole de la colonisation israélienne. Cet idéologue proche du rabbin Meir Kahane prône l’instauration d’un État théocratique après avoir expulsé tous les Arabes d’Israël. Un rêve naïf. Après trois échecs pour entrer à la Knesset, il n’a dû son salut qu’à Netanyahou qui l’a remis en selle pour contrecarrer l'ambition de Naftali Bennett, chantre de la droite religieuse sioniste.

Des manifestants arabes brandissent des drapeaux durant un rassemblement près de la porte de Damas à Jérusalem, le 25 avril 2021


            Le Hamas est sorti vainqueur ; c’est une réalité non discutable car il a annihilé toutes les tentatives d’insérer les partis arabes dans le jeu démocratique israélien. Des effroyables scènes de lynchage, impliquant à la fois des extrémistes arabes et israéliens, ont mis fin au projet de création d’un gouvernement d’opposition incluant le député arabe du parti Raam, Mansour Abbas. Toutes les villes mixtes d’Israël, Lod, Jaffa, Akko ont connu de violentes manifestations hypothéquant la cohabitation arabo-juive. Le Hamas a gagné puisque les efforts de Yaïr Lapid ont été saccagés donnant l’impression que les terroristes de Gaza étaient des complices de la droite israélienne. 

          Avigdor Lieberman ne s’est pas trompé. Le président du parti Israël Beitenou, a lancé le 15 mai une attaque cinglante contre Netanyahou car pour lui, le premier ministre mène la campagne militaire à Gaza sur la base de considérations politiques : «Tant que le mandat de Lapid n’est pas arrivé à échéance, Netanyahou continuera l'opération militaire pour changer l'opinion publique en Israël. Il est le collaborateur du Hamas, ils ont le même intérêt. Le gagnant de cette opération est le Hamas, il a pris le contrôle de la rue en Israël. Machiavel peut prendre des leçons privées auprès de Netanyahou».

Haniyeh - Deif- Al Azhar


            Les villes symboles de la coexistence ont choisi la violence alors qu’elles avaient connu des signes positifs d’intégration dans la vie publique israélienne. Il faudra plusieurs années pour réparer cette situation. En revanche, le Hamas a installé ses pions pour s’emparer de la Cisjordanie dont le leader de 86 ans ne veut pas quitter le pouvoir. Les Islamistes se sont sentis enhardis au point d’avoir le culot d’envoyer un ultimatum à Israël, le sommant d’évacuer dans l’heure ses policiers installés sur le mont du Temple sous peine de recevoir des missiles. Le commandant du Hamas, Mohammed Deif, a pris le risque de subir les foudres de Tsahal, mais plus l’affaire s’envenimait et plus cela servait ses intérêts car il se présentait comme la seule organisation à défendre les Arabes israéliens et les Palestiniens. Il a réussi à faire de Cheikh Jarrah le symbole du combat contre les Juifs. Le Hamas n’attendait pas l’occasion pour attaquer Israël mais il l’a reçue sur un plateau d’argent.

            Le Hamas s’est présenté auprès des Arabes comme le vrai défenseur de Jérusalem, comme le vrai représentant des Palestiniens et comme la vraie organisation capable de gérer les affaires de Gaza et de la Cisjordanie. Il était sur le point de le prouver dans les urnes si les élections législatives avaient eu lieu en juillet. 

Les tunnels de Gaza

            Mais à présent, Tsahal doit s’adapter aux nouvelles conditions imposées par le Hamas parce qu’Israël ne doit pas accepter que sa population vive dans des abris selon le bon vouloir des terroristes. Netanyahou a de tout temps ménagé le Hamas parce qu’il lui permettait de neutraliser Mahmoud Abbas, d’empêcher une réunification et donc d’éviter la création d’un État palestinien. Il les a laissés s’organiser, se fournir en missiles de plus en plus perfectionnés, capables d’atteindre Tel-Aviv et demain Haïfa, créer de nombreux souterrains pour les stocker. Ce serait faire injure aux services israéliens de renseignement que de faire croire qu’ils n’avaient rien vu ni entendu. Il manquait la volonté politique alors que le Hamas a prospéré pendant les années Netanyahou. Il n’existait presque plus du temps d’Ariel Sharon en 2005.

D’ailleurs Yaïr Lapid a été clair : «Si nous avions eu un gouvernement, le système d'information israélien n'aurait pas échoué comme ça. Au lieu d'un bureau ridicule pour les questions stratégiques et d'un étrange bureau du renseignement, il s'agissait simplement d'un bureau étranger fort et budgétisé, avec un système d'information numérique sans précédent, avec de brillants jeunes de 24 ans assis devant des écrans et prenant le contrôle des réseaux sociaux». À entendre à la télévision les généraux réservistes, Tsahal n’a pas eu les mains libres de la part du gouvernement. Il est temps que l’armée gère à leurs justes mesures les moyens pour certes laisser vivre les Gazaouis mais empêcher les terroristes de porter atteinte à notre sécurité. Elle donne l’impression de n’avoir jamais été prête pour réagir aux barrages de missiles. En fait, elle est au service du pouvoir civil et avec discipline, elle applique les décisions du gouvernement qui a agi en fonction de ses intérêts politiques et non pas dans l’intérêt de la population civile.

Leaders du Hamas éliminés


            Ces derniers jours ont montré que le Hamas ne pouvait plus se glorifier d’avoir mis en difficulté la plus grande armée du Moyen-Orient. Les militaires se sont remis au travail et le Hamas a subi de nombreuses destructions dans son infrastructure et perdu ses meilleurs spécialistes militaires. Il a payé un lourd tribut mais l’objectif aujourd’hui reste de détruire ses stocks de missiles, de réduire à néant ses blockhaus bourrés de munitions, de neutraliser ses dirigeants vantards, et de répondre à ses provocations de manière dure. 

        Mais l’incertitude politique et l’absence de gouvernement risquent de remettre à plus tard les mesures sécuritaires indispensables au pays. Il faut que Netanyahou ne soit plus préoccupé par son procès. Il faut briser le système central de commandement du Hamas et les moyens de communications car de cette réussite dépendra la capacité de dissuasion vis-à-vis du Hezbollah et de l’Iran. Envoyer des troupes au sol à Gaza n’est pas la bonne solution car nous laisserons sur le tapis quelques jeunes soldats. Le génie militaire israélien a d’autres recettes dans son tiroir.  

3 commentaires:

Unknown a dit…

Votre analyse de la situation me paraît pertinente. Combien de temps allons nous subir le machiavélisme de ce politicien corrompu qui place ces intérêts avant ceux de l'État et des communautés juives dans le monde ? Laissez faire l'armée de défense d'Israël.... Il aura obtenu de renforcer le hamas

frenkel david a dit…

Décidément vous faites des procès d'intention à Netanyahou, et je vous cite, tout en étant un exemple parmi d'autres: "Netanyahou a de tout temps ménagé le Hamas parce qu’il lui permettait de neutraliser Mahmoud Abbas," SANS CORROBORER votre affirmation PAR DES FAITS. Décidément le journalisme actuel consiste à faire profession de foi dans des valeurs qui siéent à celui qui les professe. Chag Sameach

Unknown a dit…

Vous êtes bien naïf. Bibi n'a rien à faire du peuple ni de l'État. Seuls ses intérêts et ceux de sa femme l'importe...