EMMANUEL MACRON ET ISRAËL
Par
Jacques BENILLOUCHE
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Netanyahou et Macron à Paris |
Les relations entre
Emmanuel Macron et Benjamin Netanyahou étaient parties sur de mauvaises bases.
En effet, lors de son voyage en Israël en septembre 2015 en tant que ministre
de l’économie, Macron n’avait rencontré que son homologue, Arie Dehry.
L’ambassadeur français de l’époque, Patrick Maisonnave, avait fait une demande
officielle auprès des services du premier ministre pour une entrevue avec son
ministre, au moins dans le cadre d’une visite protocolaire. Mais le conseiller
personnel de Netanyahou pour les affaires françaises, et accessoirement député
des Français de l’étranger à l’Assemblée nationale, Meyer Habib, avait
fortement déconseillé cette rencontre qui pouvait causer du tort à ses soutiens
Nicolas Sarkozy et François Fillon.
Macron au Lalaland (photo copyright Marco Sarabia) |
Bien
sûr, il ne savait pas que Macron allait être candidat à la présidentielle mais
il avait manqué de discernement en mettant en avant ses convictions
personnelles avant l’intérêt des binationaux franco-israéliens, toutes
tendances politiques confondues, qu’il était censé représenter. Emmanuel
Macron, qui avait bloqué sa soirée pour une éventuelle visite officielle, avait
été fortement déçu et ulcéré par ce manque de courtoisie à l’égard d’un
ministre de la France. En Marche n'existait pas encore mais les militants PS en Israël avaient alors vite
pris le relais et l’avaient invité au bord de la plage de Tel-Aviv, au
restaurant Lalaland, pour combler le trou de son emploi du temps. Bien que non encarté au PS, Macron avait été invité en tant que ministre du président socialiste François Hollande. Il avait auparavant rencontré les "intellectuels israéliens" Grossman, Amos Oz, AB Yéhoshua et Barnavi.
Durant
sa visite, Emmanuel Macron s’était rendu au Technion à Haïfa le 6 septembre
2015, pour y rencontrer les dirigeants de l’Université, les Professeurs et les
étudiants. À cette occasion a été signé un contrat entre les accélérateurs X-up
de l’École Polytechnique et T-factor du Technion par Jacques Biot, Président de
Polytechnique, et Peretz Lavie, Président du Technion.
Macron au technion en 2015 (à l'extrême-gauche l'ambassdeur Maisonnave) |
Par
la suite, lors du Forum Entreprises France-Israël, qui s’était tenu le 7
septembre à l’Université de Tel Aviv, Emmanuel Macron avait également rappelé
l’importance de la coopération scientifique et universitaire entre la France et
Israël, pays de la start-up, où les synergies entre éducation, recherche,
industrie et innovation sont particulièrement actives et fructueuses.
La
crise avec Israël s’est poursuivie en 2018 lorsque le président Macron avait
annulé sa visite prévue au printemps puis reportée en novembre sans fournir de
raison. Pourtant en 2017, il avait déclaré qu'il se rendrait en Israël et en
Palestine au printemps 2018 pour pousser au renouvellement des pourparlers de
paix israélo-palestiniens. L'annulation de la visite de Macron était intervenue
après que le Premier ministre Edouard Philippe a annulé sa propre visite en
Israël, en invoquant des questions de politique intérieure.
En
fait des questions purement politiques avaient conduit à cette décision. De
source israélienne, on avait prétendu que le Premier ministre français avait décidé
de ne pas venir en Israël «en raison des manifestations meurtrières à la
frontière de Gaza et de la façon dont le voyage pourrait être perçu par le
public français». Les problèmes de santé de Mahmoud Abbas avaient également
joué un rôle dans l’annulation. Dans la foulée, le président Réouven Rivlin avait
également annulé son voyage en France. Seul, pour tenter de réunir les liens
coupés, Benjamin Netanyahu s’était rendu à Paris en juin.
Hélène le Gal présentant ses lettres de créance |
Victime
de la politique insufflée par le Quai d’Orsay, dont elle était d’ailleurs
issue, l’ambassadrice Hélène le Gall n’a pas su inverser la lente dégradation
des relations franco-israéliennes. Elle manquait de poids dans des combats perdus
d’avance alors qu’elle cherchait souvent à défendre l’indéfendable. L’ambassadrice
était sur tous les fronts pour porter la bonne parole française mais
contrairement à ses deux prédécesseurs Christophe Bigot et Patrick Maisonnave,
elle s’était aventurée sur des terrains glissants, en communiquant trop
souvent.
Au
lieu de tenter de remédier aux critiques, justifiées ou non, qui étaient faites
à la France, elle n’hésitait pas exclure tout journaliste impétueux qui osait
publier des «contre-vérités» selon elle. Elle avait pointé du doigt une
publication de Slate.fr qui avait mentionné que «depuis les votes
négatifs à l’Unesco et après le vote de la France en faveur de la résolution
condamnant la décision américaine de transférer son ambassade à Jérusalem, les
relations entre Israël et la France sont –c’est un euphémisme– très froides».
Pourtant
les faits étaient têtus. Sans remonter
trop loin dans les votes négatifs contre Israël devant les instances
internationales, le France avait seule décidé de se distinguer du monde
occidental, et de l’Europe en particulier, en mêlant sa voix à des pays qui ne
sont pas réputés pour être de véritables démocraties. Bien sûr, la France a sa
propre politique internationale, mais en prenant une position négative sans jamais
s’abstenir, elle a perdu son rôle d’arbitre et Israël l’a accusée de s’être rangée
du côté de ses ennemis irréductibles.
Le Conseil de sécurité a dû prendre position sur des résolutions qui
abordaient sous des angles différents, le conflit entre Israël et la Palestine.
Mais les textes étaient partiaux car ils rejetaient toujours la
responsabilité sur Israël en l’absence de toute référence au «groupe
terroriste Hamas». Le Conseil de
sécurité de l'ONU avait même rejeté un projet de résolution américain
rendant responsable le Hamas palestinien des violences dans la bande
de Gaza. Les Etats-Unis ont été les seuls à voter pour leur texte. Onze pays se
sont abstenus tandis que la France a voté contre. Le projet américain contenait
des injonctions dirigées vers «les organisations terroristes telles que le
Hamas» et proposait au Conseil de condamner les tirs de roquettes aveugles, effectués par des milices palestiniennes basées à Gaza en direction de villages
israéliens.
La France n'avait pas voté le projet et par la voix de son représentant François Delattre, avait fait observer que la responsabilité du Conseil de sécurité est de répondre à la crise de Gaza dans sa globalité, «ce qui n’est pas fait dans ce texte» et avait déploré ce «lourd silence du Conseil qui est de plus en plus assourdissant. Un silence qui n’est ni acceptable, ni compréhensible. Si ce Conseil abdique aujourd’hui ses responsabilités, qui donc les assumera?»
La France n'avait pas voté le projet et par la voix de son représentant François Delattre, avait fait observer que la responsabilité du Conseil de sécurité est de répondre à la crise de Gaza dans sa globalité, «ce qui n’est pas fait dans ce texte» et avait déploré ce «lourd silence du Conseil qui est de plus en plus assourdissant. Un silence qui n’est ni acceptable, ni compréhensible. Si ce Conseil abdique aujourd’hui ses responsabilités, qui donc les assumera?»
Michael Oren |
Mais
la position de la France avait entraîné une réaction forte de l’ancien
ambassadeur d’Israël aux Etats-Unis (2009 à 2013), Michael Oren, qui dans un
tweet s’en est pris à la France : «Louange aux États-Unis pour avoir mis
leur veto à la résolution du Conseil de sécurité sur Gaza qui ne mentionne pas
le Hamas et a condamné Tsahal pour avoir défendu Israël. Honte à la France de
l'avoir soutenue. Le gouvernement français ne peut pas dire que c'est contre
l'antisémitisme et voter pour cette résolution antisémite».
La réaction d’Hélène le Gal a été immédiate : «Honte à vous M. Oren
d'avoir insulté la France à la veille de la visite de votre Premier ministre à
Paris. Vous n'avez pas lu la résolution. Ce n'était pas parfait mais elle
condamnait toute la violence contre Israël. La France soutient résolument la
sécurité d'Israël». Il n’est pas sûr qu’il lui appartenait de réagir en
tant qu’ambassadrice chargée d’arrondir les angles plutôt de mettre de l’huile
sur le feu. En fait, le bilan diplomatique a été négatif durant son mandat.
D’ailleurs
le très prudent Yigal Palmor, directeur de la communication à l’Agence juive et
ancien porte-parole du ministère israélien des affaires étrangères, est sorti
de sa réserve : «Cependant, Madame l'Ambassadeur, et avec tout mon respect
sincère, comment se fait-il que la France n'ait pas voté comme le Royaume-Uni,
la Hollande, la Pologne et l'Éthiopie mais plutôt avec le Koweït, la Russie, la
Chine, la Bolivie ? Vous savez que nous attendons plus de la France».
C’est
dans cette atmosphère tendue que va avoir lieu la visite d’Emmanuel Macron les 22 et
23 janvier en Israël, en compagnie de Donald Trump, pour marquer les 75 ans de
la libération d'Auschwitz. L’évènement est organisé par Yad Vashem en présence
d’un certain nombre de dirigeants mondiaux, dont la chancelière allemande
Angela Merkel, le Premier ministre britannique et le Premier ministre canadien
Justin Trudeau. Il n’est pas encore sûr que le président russe Vladimir Poutine
soit impliqué car il a décidé d’organiser ses propres commémorations à Moscou en mai
prochain.
Eric Danon et Hélène le Gal |
Il
ne s’agit pas d’une visite politique pour Emmanuel Macron qui sera pour la
première fois en Israël en tant que président. Mais ce sera une bonne occasion pour mettre les choses au point en présence du nouvel ambassadeur français, Éric
Danon, qui vient de prendre ses fonctions et qui n’aura pas la tâche facile. Bien sûr, la politique de Netanyahou n'est pas exempte de critiques mais les décisions françaises n'ont pas aidé à la faire évoluer.
5 commentaires:
C'est un peu méconnaître la politique française que de parler de politique du Quai d'Orsay. Quand l'ambassadeur de France en Hongrie a "dérapé", Macron l'a fait degager en 72 heures. S'il veut, il peut. Mais Macron ne veut pas changer cette politique pro musulmane de la France-dernier exemple en date le soutien aveugle de l'Iran.....
Shalom,
ISRAEL se doit d'être méfiante envers la France, toujours dans le déni de son passé de collaboration avec les nazis et d'avoir tournée la page très rapidement, comme s'il ne s'était rien passé...les spoliations sont toujours sur le "tapis" et les enfants cachés avec !
Alors la France change son ambassadeur Eric Danon (Eric qui dit non), c'est mal barré, mais bon, il y aura des rencontres, des "sourires", des petits fours, de la coopération pour ne pas faire le voyage pour rien, comme d'habitude..
Et puis une fois que Mr Macron sera rentré à la maison, son ambassadeur à l'O.N.U. nous plantera le "couteau dans le dos"
Alors la France...: Turlututu...
La politique internationale de la France est pro-arabe......Depuis longtemps....L'image de la France est écornée depuis longtemps au sein de l'opinion israélienne.....C'est une tendance très difficile à changer.....Le soutien de la France aux résolutions anti-israéliennes à l'ONU ne font rien pour améliorer cette situation......Malgré tout, la France est un partenaire commercial important pour Israel....Alors,soyons en Israel plus malins et comme dans la fable de Lafontaine,le corbeau et le renard....Soyons le Renard.....
Cher monsieur Benillouche,
Il n'est pas impossible que, comme beaucoup de Français, le Président Macron ait à l'esprit ce que le journaliste-écrivain René Naba disait déjà en 2017 :
"Le retour sur investissement de la politique arabe du tandem philo sioniste atlantiste Sarkozy-Hollande a eu pour nom Mohammed Merah, les Frères Kouachi, Hédi Nemmouche, Si Ahmed Glam, Salah Abdel Salam, Charlie Hebdo, Paris Bataclan, Nice etc.. Un bain de sang qui déshonore les stratèges en chambre du nouveau cours de la diplomatie française."
Très cordialement.
Le tropisme est un phénomène d'orientation systématique dans une direction donnée, vers le bas ou vers la lumière.
Comme d'habitude, à un article d'information équilibré et factuel, répondent ici des commentaires que leur fond partisan et leur forme caricaturale n'orientent pas vers la lumière
Jonathan
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