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dimanche 8 avril 2018

Le toilettage de la Halakha, la loi juive, est indispensable




LE TOILETTAGE DE LA HALAKHA, LA LOI JUIVE, EST INDISPENSABLE

Par Jacques BENILLOUCHE

                                           Copyright © Temps et Contretemps

           

         
          

          On a tendance à croire que la loi juive a été directement transmise au peuple juif par Dieu. En fait elle fut répercutée à travers les Grands Sages de l’époque du Temple, tels Hillel l’ancien (-70 env.-env. 10), le plus grand des sages de la période du second Temple ou à travers d'Akiva (50 env.-135), l’un des plus grands tannaïms, le sage le plus marquant de son temps qui exerça une influence décisive sur le développement de la Halakha. 



          La rédaction de la Loi juive est récente, elle est l’œuvre de quelques hommes à différentes époques. N’étant pas un grand exégète, encore moins, un lettré des textes sacrés, il n’en reste pas moins qu’il existe un principe de base, humain certes, prétendant que si une loi a été faite par les hommes, elle peut être défaite par d’autres hommes, si les circonstances l’exigent. Or, la loi juive, toujours appliquée encore aujourd’hui, a été rédigée par plusieurs rabbins faisant autorité mais n’ayant aucun pouvoir surnaturel, de simples mortels avec leurs défauts, leurs interprétations voire leurs erreurs.

         
Maïmonide
          L'une des plus importantes autorités rabbiniques du judaïsme, Moïse Maïmonide dit le «Rambam» a composé le Mishné Torah (Répétition de la Torah) qui représente le code de la loi juive, dans un ouvrage magistral compilé entre 1170 et 1180. Sa grande œuvre, composée de 14 livres, divisés en sections, chapitres et paragraphes, traite de tous les détails de l'observance du judaïsme, y compris des lois ne pouvant s'appliquer qu'à l'époque du Temple. Chaque loi regroupe les enseignements talmudiques, avec la volonté d’en retirer la substance halakhique.

            Ce monument de la halakha, a été maintes fois commenté et critiqué, prouvant que même le Rambam n’était pas infaillible. Il lui fut reproché de fixer la halakha selon sa seule opinion et il expliqua sa démarche : «Je me suis efforcé de réunir toutes les paroles dispersées dans ces compilations, depuis l'époque de notre saint Rabbi jusqu'aujourd'hui, en matière d'interdit et de permis, de pur et d'impur avec les autres jugements de la Torah, de les rédiger dans une langue claire et un style concis, afin que toute la Loi Orale se trouve réunie dans sa plénitude, sans difficulté». Cet ouvrage a eu l’avantage d’inspirer par la suite d’autres rabbins qui ont structuré autrement les lois juives. 

         
Yaakov Ben Asher
         
Ainsi le rabbin Yaakov ben Asher (1270-1340), près de cent ans après Maïmonide, a apporté sa pierre à la Loi juive, Arba Tourim (les 4 colonnes). 
Il servit de base au Choulhan Aroukh, qui emprunta notamment sa structure en quatre sections :

            1. Orah Haïm : le comportement quotidien de l'homme - prières, Tsitsit, Tefillines, Chabbat et Fêtes
            2. Yoré Déa : Lois des interdits alimentaires, (abattage rituel, lois alimentaires, périodes d'impureté de la femme, ablutions, vœux, conversions, Sefer Torah, etc.)
            3. Even HaEzer : Lois de la Famille. Lois du mariage et du divorce.
            4. Hoshen Mishpat : Code juridique. Lois sur la finance. Dommages. Lois des tribunaux rabbiniques.
            L’originalité de Arba Tourim réside dans le fait que les règles étaient inspirées de l’époque en cours et non de celle du Temple de Jérusalem, une façon de moderniser certains chapitres. Les lois sont présentées dans la langue d'origine dont elles ont été tirées. Dans plusieurs livres du Rambam, il était fait mention des divergences d'opinions de ceux qui décidaient des lois. Le Rabbin Yaakov ben Asher était l'un de ceux qui déterminaient l'ensemble des prescriptions, coutumes et traditions, sur la base des délibérations des Sages de France, d'Europe de l'Est et d'Espagne.
Joseph Caro

            Enfin plus proche de notre époque, Joseph Caro compila un code de Loi juive au XVIème siècle, le Choulhan Aroukh Beit Yossef (Maison de Joseph) qui fut conçu comme un commentaire de l’Arba Tourim de Jacob ben Asher en ne traitant que les aspects pratiques de la vie juive fondés sur la littérature rabbinique à l’époque de sa rédaction. Élaboré sur plus de vingt ans, le Choulhan Aroukh est considéré jusqu’à nos jours comme la principale référence en matière de Loi juive.
            Joseph Caro entreprit la rédaction du Beit Yossef à Andrinople en 1522, à l’âge de trente-quatre ans et l’acheva à Safed vingt ans plus tard. Il avait expliqué qu’il entendait répondre d’une part, au désarroi des Juifs expulsés d’Espagne contraints de se confronter aux us de communautés d’accueil dirigées par des hommes souvent moins instruits et d’autre part, aux dangers posés par l’industrie naissante de l’imprimerie qui dote tout un chacun des ouvrages pour se faire sa propre religion en matière de Loi sans en avoir les connaissances. Il a donc voulu toucher le public le plus vaste possible, ce qui rendit son ouvrage moins complet que le Mishné Torah de Maïmonide. Cependant il eut l’avantage que son texte et son autorité furent acceptés aussi bien par les décisionnaires séfarades qu’ashkénazes.
Grand rabbin Sirat

            La question reste de savoir pourquoi, depuis cette période, aucune sommité rabbinique n’a estimé devoir amender des lois statiques, sinon périmées. Une voix vient de s’exprimer officiellement, celle de l’ancien Grand rabbin de France, René-Samuel Sirat, qui propose ouvertement que «les rabbins tranchent la halakha en fonction de l’époque» en faveur d’un judaïsme respectueux de la loi, inclusif, et humaniste. Il prône rien de moins qu’une révision de la Halakha conçue par des hommes pour coller au mieux à la civilisation moderne : «Nous, notre conception rabbinique, c’est qu’une personne, même si elle ne respecte pas le Shabbat, est un juif et un fidèle pour qui nous avons la même affection. Ce n’est pas tout à fait le cas de la conception rabbinique qu’on rencontre ici».
            Certes il ne se rapproche pas tout à fait des Juifs libéraux qui se sont trop éloignés des principes orthodoxes mais il estime que le judaïsme moderne nécessite des réformes, ne serait-ce que pour gommer les différences de doctrine entre ashkénazes et séfarades. Sur certains points, il pense que la religion est rétrograde, vis-à-vis des femmes en particulier : « Aujourd’hui, grâce à Dieu, nous avons des femmes qui sont ministres, présidents de la Cour suprême. On ne peut pas vivre dans la situation sociologique d’il y a 100 ans. Lorsque les femmes du Kotel vont prier, pourquoi cela est-il perçu comme une provocation ? Elles vont prier Dieu et il faudrait être enthousiasmé par ce regain de religiosité».
            Effectivement durant sa mandature, il n’avait pas été suivi par les rabbins séfarades, qui étaient et qui le sont toujours, sous l’influence des orthodoxes des pays de l’Est et de ceux de Shass en Israël. Il songeait plutôt à la refondation du judaïsme français, avec Emmanuel Levinas, Léon Ashkénazi (Manitou), André Neher, et le fils d’Abraham Kook. Il ose dire ouvertement qu’il faut adapter de la loi juive pour rendre la religion plus attractive : «Ce qu’il faut comprendre, c’est que la halakha est par définition dynamique. Elle n’est pas statique. Sa racine même signifie marcher. Il ne s’agit pas, comme le prônent certains rabbins libéraux extrémistes, de supprimer purement et simplement certains textes ou coutumes. Il s’agit de demander à nos maîtres de se mettre au travail afin d’adapter la halakha à l’époque. C’est pour cela que la halakha suit la dernière opinion, car seuls les rabbins d’aujourd’hui peuvent trancher la halakha en fonction de l’époque».

            Il ne s'agit pas pour lui de dénaturer la religion. Mais au XXIème siècle on ne peut pas appliquer des préceptes périmés d’une époque où l’électricité n’existait pas, où la télévision n’était pas encore inventée, où les voitures ne permettaient pas le déplacement des fidèles vers les synagogues lointaines, où Internet ne régissait pas le monde d’aujourd’hui. Rien n'a été fait depuis le XVème siècle ; en revanche l'on critique l'émancipation des Juifs allemands d'avant-guerre qui avaient estimé, les premiers, qu'ils devaient s'éloigner du fanatisme. La Halakha faite par des hommes doit être amendée par les hommes si l’on veut que les fidèles ne soient pas intoxiqués et fanatisés ou pire, incultes religieusement  et si l'on ne veut pas que les Juifs fuient l’anachronisme de certaines traditions au risque de les voir fuir le judaïsme. 

7 commentaires:

Gilbert BRAMI a dit…

Le Soul'han Aroukh fut conteté par les rabbanistes Ashkénazes. Il date depuis plusieurs siècles. L'humanité évolue et lacondition juive aussi. Plusieurs éminent rabbins demande un toilettage des traditions de la Halakah. Le parti rabbinique devrait, enfin se rendre contre que nous, les Juifs, nous ne sommes plus enDiapora, Et ce grace aux moyens de communications et de la télévision La réintégration du Patriarcat, Abraham, Isaac et Jacob, est aujourd'hui le socle de l'expansionisme de la nataité juive ! Il faut que le rabbinat se rend compte, également que plus de la moyen des personnes qui porte un NOM à concenane juive, ne le sont pas parce leur père a épousé une non-juive ! Ce qui crée des frustations avec des déviations antisémitisme !

Jacques BUSSEUIL a dit…

Bien sûr, il y a dans la torah des passages à supprimer. Lapidation par ci et par là, assassinat des homos, des femmes adultères, de ceux qui ne respectent pas le shabat... oui, un toilettage s’impose

Marianne ARNAUD a dit…

Cher monsieur Benillouche,

Si vous me le permettez, j'ajouterais que "le toilettage de la loi juive" a été entrepris dès le début de notre ère, avec le succès que l'on sait, par un certain Jésus de Nazareth qui professait déjà :
"Tout royaume divisé contre lui-même se détruit. Toute ville ou maison divisée contre elle-même ne subsiste pas."
Matthieu XII-25

Très cordialement.

The Old Dreamer a dit…

Vous avez entièrement raison et il n'est jamais trop tard pour se mettre au travail .

Véronique ALLOUCHE a dit…

@marianne Arnaud
Sans vouloir porter de jugement sur Jésus, les juifs ont été persécutés , massacrés et dispersés non par lui mais par ses apôtres qui firent d’eux des apostats au regard du second testament. La théorie du complot largement utilisée contre les juifs comme « peuple déicide » remonte au 1er siècle de notre ère pour se terminer (enfin...) au Concil Vatican II.

Ces deux terribles mots sont à la source de l’antisémitisme et de notre histoire jonchée de pogromes et persécutions en tous genres.

Si « royaume » il y a, alors on peut parler de « miracle » si le peuple juif est encore vivant et prouve par là même que ce peuple est loin de s’autodétruire.
Bien cordialement
Véronique Allouche

Israël-Anderhuber Ingrid a dit…

A Marianne ARNAUD : Exact, une fois pour toutes, Dieu l’a fait par son Fils, le Messie Jésus, jusqu’au retour de ce dernier. Et lorsque Jésus reviendra dans sa gloire pour délivrer Israël en combattant les nations (Apocalypse chap. 19, v. 11 à chap. 20, v. 6), le Temple messianique sera construit, le pays partagé entre les Juifs, et des règles cultuelles et culturelles établies pendant cette nouvelle aire (1000 ans) pour Israël ainsi que des règles de conduite spécifiques pour les nations, notamment l’obligation de faire un pèlerinage annuel à Jérusalem sous peine de sanction divine (sécheresse) : Voir, entre autres, Ezéchiel, chap. 40 à 48 ; Zacharie, chap. 16, v. 16 à 19.

Israël-Anderhuber Ingrid a dit…

A Véronique ALLOUCHE :

- Vous dites : « Sans vouloir porter de jugement sur Jésus, les Juifs ont été persécutés, massacrées et dispersés non par lui mais par ses apôtres qui firent d’eux des apostats au regard du second testament. »
Or aucun passage dans ce sens n’existe dans la Nouvelle Alliance (ou « Nouveau Testament »). Par contre, il y est question de la persécution des apôtres et des disciples de Jésus PAR nombre de religieux juifs qui ne supportaient pas le message messianique. Cette persécution a abouti d’une part à leurs lapidations, massacres… et d’autre part à leur dispersion. C’est ainsi qu’ils ont commencé à annoncer le salut en Jésus aux non-Juifs : Ça a été le début de l’ère de « l’évangélisation » des nations… Voir Livre des Actes.

- Vous dites : « La théorie du complot largement utilisée contre les Juifs comme « peuple déicide » remonte au 1er siècle de notre ère pour se terminer (enfin…) au Concil Vatican II. Ces deux terribles mots sont à la source de l’antisémitisme et de notre histoire joncée de pogroms et persécutions en tous genres. »
Or il faut savoir que, tout comme l’article de J. B. nous le montre, il s’est passé la même chose concernant la Nouvelle Alliance : Des hommes ont jugé bon de reformuler l’ouvrage, estimant que Dieu avait besoin d’être interprété ! Par conséquent, à l’instar du Judaïsme, il y a eu des ajouts aux textes : dogmes et doctrines qui ont modifié au fur et à mesure du temps fondamentalement le message originel. En effet, dans la Bible, le salut se trouve en Jésus et est GRATUIT, le verset-clé : « Car Dieu a tant aimé le monde qu’il a donné son Fils unique afin que quiconque croit en lui ne périsse point mais qu’il ait la vie éternelle » (Yohanan-Jean, chap. 3, v.16). Or le salut va devoir se mériter, se gagner au moyen d’oeuvres : prières, mortifications, indulgences… Du salut gratuit dans le message original on en est arrivé au salut par les œuvres. C’est comme cela qu’est né le Catholicisme qui a donné lieu effectivement à des enseignements antisémites avec incitation à la haine et au meurtre DE LA PART DES CATHOLIQUES. Ne pas se tromper. Je répète, dans la Nouvelle Alliance, vous ne trouverez aucun passage relatif à un appel à la haine contre les Juifs, ou au meurtre. AUCUN. Le Concil Vatican II, CATHOLIQUE, a eu le mérite de reconnaître toutes ses horreurs commises au cours du temps contre les Juifs et a retiré de ses écrits personnels tout ce qui avait trait à l’antisémitisme.

Pour ce qui concerne le « peuple déicide » :

Il faut savoir que Jésus, tout en étant effectivement Dieu, n’est pas l’incarnation de Dieu mais l’incarnation de la Parole de Dieu. C’est une nuance à relever. En effet, voici ce qu’il est écrit : « Au commencement était la Parole, et la Parole était avec Dieu, et la Parole était Dieu. (…) Tout a été fait par elle, et rien de ce qui a été fait n’a été fait sans elle. (…) La Parole a été faite CHAIR (INCARNATION) et elle a habité parmi nous (…) et nous avons contemplé sa gloire comme celle du Fils unique venu de la part du Père. (…) Personne n’a jamais vu Dieu ; Dieu, le Fils unique, qui était dans le sein du Père, lui, l’a fait connaître. » (Yohanan-Jean, chap. 1) Cette « décomposition » de la personne divine est un peu à l’image de la « décomposition » d’Adam et de sa côte qui, retirée puis entourée de CHAIR (ou INCARNEE), est devenue Eve.

Le terme « déicide » au départ a été employé par des gens ignorants, analphabètes souvent manipulés par les autorités religieuses. En fait, le sacrifice du Messie à Golgotha, en tant que bouc-émissaire et victime expiatoire (à l’image du bouc de Lév. 16, v. 5), était la condition absolue au salut d’Israël, et de toute l’humanité. En effet, selon la loi : « la vie de la chair est dans le sang. Je vous ai donné le sang sur l’autel afin qu’il serve d’expiation pour votre vie car c’est le sang qui fait l’expiation pour la vie» (Lév. 17, 11). Sans effusion de sang pas de pardon. C’est pourquoi Jésus devait mourir. Pas de peuple déicide mais uniquement le dessein divin de toute éternité...