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vendredi 9 décembre 2016

La démocratie en danger en Israël



LA DÉMOCRATIE EN DANGER EN ISRAËL

Par Jacques BENILLOUCHE

copyright © Temps et Contretemps

            
Amona

          Le pays, qui se vantait d’être le plus démocratique du Moyen-Orient, est en train de virer parce que le parti principal de droite, le Likoud, bascule dans l’anti libéralisme et dans l’autoritarisme jusqu’à bafouer les lois. Le parti de Menahem Begin perd son âme parce qu’un responsable a décidé d’exclure, temporairement certes, son fils de ses rangs. De formation juriste, Begin doit se retourner dans sa tombe lui qui, malgré ses positions nationalistes, a toujours respecté la démocratie en vigueur dans son pays.




            Le chef de la coalition et député du Likoud, David Bitan, a voulu faire preuve d’autorité en maintenant la discipline au sein de sa majorité mais il ne connaît pas la manière et se comporte comme un bulldozer pour mettre au pas les éventuels récalcitrants. Il se croit en terrain conquis au Likoud et manie plus le bâton que la carotte. Mais le nouveau venu à la tête des instances du parti se permet des libertés avec les militants historiques. Parce que Benny Begin avait voté contre le projet de loi de «régularisation» qui imposait des décisions  rétroactives appliquées aux implantations édifiées sur des terres privées palestiniennes, il a été exclu pour une durée de trois semaines de la commission des lois de la Knesset. Il s'était placé sur un plan purement juridique.
David Bitan

Ce projet bafouait ouvertement la primauté du droit ce qui, pour le fils du fondateur du Likoud, n’était pas acceptable ; il condamnait par ailleurs le virage à l’extrême-droite de son parti. Il a effectivement été le seul député du parti à voter contre le projet qui consistait en fait à reconnaître à postériori l’existence des avant-postes non autorisés par le gouvernement. L’interdiction des lois rétroactives est la base du fondement du droit international et par conséquent de la démocratie. En acceptant ces dérives, le Likoud a montré qu’il avait perdu les fondements du libéralisme originel.
Dan Meridor

            Le plus dramatique est l’absence de courage de ses collègues députés qui tiennent à aller à la soupe. Aucun ne s’est porté solidaire à ses côtés, au moins au titre de sa qualification de membre symbole du Likoud. Dan Meridor, ancien ministre de la justice, figure charismatique du Likoud et militant modéré, s’est élevé contre cette sanction : «Où en sommes - nous? Lorsque Benny Begin, qui représente le Likoud historique, est puni pour cela ? Ils légifèrent une loi honteuse. Une loi de vol, qui colore l'ensemble du projet de règlement, et aucun membre de la Knesset n’a conscience de cette réalité avec lui. Benny Begin est puni pour n’avoir pas accepté de légiférer des lois injustes. La honte est pour le gouvernement».
            Seul Gil Shmueli, président du cercle loyaliste Hérout, a pris sa défense : «Le renvoi de Benny Begin de la commission des lois constitue un croisement de toutes les lignes rouges dans un parti national, censé être démocratique et libre. Il s’agit de la suite de la destruction du bon Likoud, classique, libéral et officiel qui nous manque tant». C’est une condamnation claire et nette de David Bitan. Mais cette sanction a joué le rôle de réveil pour ceux des militants qui veulent un parti libéral qui ne soit pas inféodé à l’extrême-droite ni aux dirigeants des implantations. Ils se rendent compte que Bitan n’est pas seul dans ses excès et que les ministres Miri Regev et Zeev Elkin l’appuient, sans compter le soutien discret de Netanyahou. Les militants condamnent par ailleurs la rhétorique raciste qui sous-entend ces nouvelles prises de position.
Netanyahou et Benny Begin

            L’opinion israélienne n’a pas compris l’importance de ce projet de loi de «régularisation». Elle considère complexe cette loi de circonstance qui a pour unique but d’empêcher l’évacuation de l’avant-poste d’Amona. La Cour Suprême a déjà statué sur son inégalité mais les députés ont cherché un moyen de contourner la loi pour permettre de saisir des propriétés appartenant à des Palestiniens. Il ne s’agit pas d’une question de droite ou de gauche, mais du fondement même de la justice, l’un des piliers d’un État démocratique.
            Le procureur de l’État, nommé par Benjamin Netanyahou, a jugé la loi illégale et il a précisé qu’il ne la défendrait pas face à la Cour suprême. Le conseiller juridique de la Knesset, Eyal Yinon, est dans le même état d’esprit et a mis en garde le gouvernement contre l’éventuel inculpation de responsables israéliens devant la Cour Pénale internationale.

            Cette attitude vis-à-vis de Benny Begin est d’autant plus surprenante que c’est un fidèle de l’idéologie du Grand Israël ; mais, en bon juriste, il tient au respect des lois de l’État et à la nécessité de couvrir toutes les décisions gouvernementales sur des bases juridiques légales : «Il n’est pas sain de voter une loi puis d’attendre que la Cour suprême l’annule afin de qualifier les juges de gauchistes. Ce que nous avons ici est un très mauvais projet de loi pour l'État d'Israël». En fait le Likoud veut afficher par cette loi son soutien aux responsables des implantations en portant la responsabilité de sa non-application sur les juristes. L’image du gouvernement reste ainsi intacte auprès des nationalistes qui ne pourront pas l’accuser d’avoir été abandonnés.
Uri Ariel


            Il est certain que Begin paiera sa «rébellion» en n’étant pas désigné dans la liste des prochains candidats à l’élection législative. Dan Meridor et Michael Eitan avaient payé avant lui, en 2012, leur opposition à la reconnaissance de l’avant-poste de Migron.  Netanyahou fait ainsi le vide d’éventuels concurrents à la direction du parti. C’est de bonne guerre. Le drame est que la majorité des électeurs du Likoud sont des gens honnêtes et modérés et qu’ils sont abusés par les groupes extrémistes qui contrôlent toutes les institutions du parti pour bloquer l’ascension éventuelle de gêneurs ou de rebelles. Le drame encore est l’indiscipline de ministres face à la décision de la Cour Suprême. Pour Uri Ariel : «Je me joindrais à la résistance contre l’évacuation d’Amona». Venant d’un député et ministre, il est clair qu’il ne montre pas l’exemple et que la démocratie en Israël est en danger.

1 commentaire:

Patrick a dit…

Netanyahu , qui n'a d'autre objectif que de garder son fauteuil , sera aux yeux de l'histoire ,celui qui a détruit l'état des Juifs . d'ores et déjà les Arabes sont aussi nombreux que les juifs entre Jourdain et Méditerranée . Donc sans partage c'est la fin de l'état des juifs à très courte échéance !