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mardi 13 août 2013

ISRAËL PRIS DANS L’ÉTAU DU NOUVEL AXE NORD-SUD





LE REGARD DE JACQUES BENILLOUCHE POUR TRIBUNEJUIVE.INFO

ISRAËL PRIS DANS L’ÉTAU DU NOUVEL AXE NORD-SUD



          

          Ce n’était pas faute d’avoir prévenu les Occidentaux mais les Israéliens sont arrivés à la conclusion que se met en place un nouvel axe dirigé contre lui par Al-Qaeda au Sinaï et le Hezbollah libanais. Plusieurs signes annonciateurs avaient été détectés en 2012 mais ils ne prenaient pas encore les allures d’un véritable étau islamiste qui cerne Israël au nord et au sud, à travers des forces ennemies surarmées.



                                   AQPA 
          
          Le nouveau danger pour la planète s’appelle Al-Qaeda que les Américains croyaient avoir vaincu en éliminant son chef Ben Laden. Les terroristes sont partout actifs en Syrie où ils appuient la rébellion, au Yémen où ils cherchent à s’emparer de villes et d’installations pétrolières et au Sinaï où ils veulent aider les Frères musulmans à reprendre le pouvoir en Égypte. Depuis sa création, Al-Qaeda s’est étendu sur plusieurs pays et a réussi à fédérer autour de lui de nombreuses autres composantes islamistes comme en Irak. 
Anwar Al-Awlaki responsable Aqpa Yémen
    
          Al-Qaeda bénéficie en fait de l’échec des révolutions arabes en Libye et en Égypte qui a entrainé des déceptions et des frustrations chez les islamistes. Il agrège autour de lui l’aigreur de certains activistes du Hamas qui acceptent mal la rupture avec l’Égypte des Frères musulmans. Le pendant d’Aqmi au Maghreb, Aqpa (Al-Qaeda dans la péninsule arabique) a pris de l’ampleur devant le boulevard qui lui a été ouvert avec le désengagement des États-Unis du Yémen et d’Irak. D’ailleurs le chef d’Aqpa, Nasser Al-Whaychi, a été nommé numéro-2 de l’organisation tandis que les États-Unis faisaient beaucoup de bruit pour rien pour la sécurité de leurs ambassades alors que la scène se jouait au Sinaï.
Nasser Al-Whaychi

          Les Israéliens avaient déjà anticipé le danger à la frontière sud puisqu’ils avaient créé, en décembre 2012, une nouvelle brigade opérationnelle dans la région d’Eilat pour assurer la sécurité avec l’Égypte. Le commandant de la division Edom, le général de brigade Nadav Padan, qui inclue cette brigade avait alors déclaré : «Les bouleversements régionaux, l'influence de Gaza et des organisations terroristes locales posent de nouveaux défis opérationnels. Cette réalité nous force à changer notre manière d'opérer. La création de la brigade d'Eilat est la preuve de notre adaptation aux menaces grandissantes pour permettre aux civils de la région de mener une vie normale».
Général Nadav Padav et colonel Roei Beeri

           Hosni Moubarak avait été laxiste avec les mouvements salafistes au Sinaï qui avaient squatté la totalité de la péninsule en organisant, avec l’aide des Bédouins, des trafics d’armement en provenance de Libye et en constituant de nombreuses caches pour leur arsenal. Mohammed Morsi était trop occupé à consolider son régime pour s’intéresser aux djihadistes qu’il voulait d’ailleurs intégrer à son gouvernement. Quant aux militaires égyptiens, ils jouaient la carte du pourrissement de la situation avec l’espoir, réalisé, de revenir au pouvoir en sauveurs.
                        Opérations militaires au Sinaï 

Al-Qaeda au Sinaï
            
          Le nouveau régime a mesuré le danger de l’expansion salafiste au Sinaï et a décidé de prendre les mesures militaires pour éradiquer le mal à sa racine. Le traité de paix de 1979 limitant la présence militaire égyptienne au Sinaï, il a obtenu d’Israël le droit d’organiser une base d'hélicoptères Apache, à l'aéroport d'El Arish. Cet accord témoigne de la coopération israélo-égyptienne active pour atteindre les cellules implantées dans la montagne d’Al-Halal Jabal. En effet, l’audace des salafistes les a poussés à attaquer des barrages de l’armée égyptienne avec des véhicules lance-roquettes tuant un officier égyptien et faisant plusieurs blessés. Cet incident prouvait le niveau important atteint par l’arsenal des djihadistes.     
          Leur audace n’avait plus de limite puisque, le 10 juillet, le général égyptien Ahmad Wasfi, chargé de l’offensive contre les terroristes au Sinaï, a échappé de peu à un attentat qui a coûté la vie à ses gardes du corps alors qu’il venait à peine d’arriver dans la région. Ce proche collaborateur du général Al-Sissi avait participé au coup d’État contre Morsi. La cible représentait donc un symbole militaire de haut niveau du nouveau régime. Trente islamistes avaient tendu une embuscade au convoi qui traversait Sheikh Zuwayed, au sud d’El-Arish. Avec des roquettes antichars, des engins explosifs, des mitrailleuses lourdes, montés sur des véhicules ornés du portrait de Mohamed Morsi, les terroristes ont piégé les troupes égyptiennes.
QG égyptien au Sinaï


                    Renforts des radicaux du Hamas 


              L’inquiétude de l’État-major égyptien tenait au fait que le calendrier et l’itinéraire du convoi du général Wasfi avait été tenus secret. Ce secret éventé donne à penser que l’armée égyptienne est infiltrée par des partisans d’Al-Qaeda. Cet incident grave a conduit les Israéliens à prendre des mesures supplémentaires à la frontière égyptienne pour parer à toute nouvelle éventualité. 
Brigades Ezzedine Al-Qassam

          Par ailleurs, il semble bien que des combattants radicaux du Hamas aient rejoint Al-Qaeda devant l’attitude non coopérative du nouveau régime à l’égard de la bande de Gaza avec notamment la destruction de nombreux tunnels de contrebande. Selon un haut responsable égyptien, 150 membres de la banche armée du Hamas, les brigades Azzedine Al-Qassam, ont renforcé les rangs des salafistes au Sinaï. Selon cette source, plus d’une trentaine de ces membres ont trouvé la mort dans les accrochages tandis que soixante personnes ont été tuées par des militants qui ont attaqué des points de contrôle de sécurité depuis l'éviction de Mohamed Morsi. 
          L’Agence officielle égyptienne MENA avait annoncé le 9 août qu’une forte explosion avait détruit un lanceur de missiles mis en place à Ajarah, près de la frontière israélienne, pour attaquer la ville d’Eilat dont l’aéroport avait été fermé pendant quelques heures. Cinq militants islamistes ont été tués. Ce lanceur était capable de tirer quatre missiles iraniens Fajr-5, de 75 kms de portée, fournis par des extrémistes du Hamas aux salafistes du Sinaï, bien avant la fermeture des tunnels. 
Frappe au Sinaï

          Les autorités égyptiennes nient toute implication israélienne dans cette attaque tandis que le porte-parole de Tsahal refuse de la commenter. Certaines informations faisaient en effet état d’une attaque par un drone israélien. De toute façons, que ce soit un hélicoptère Apache égyptien ou un drone israélien, l’opération démontre une interconnexion efficace des services sécuritaires des deux pays qui ont déjoué une attaque contre Eilat le 8 août.                Israël ne prend pas à la légère cette attaque avortée qui démontre qu’Al-Qaeda a les moyens militaires d’enflammer le front égyptien. Il s’attend à de nouvelles tentatives d’attentats contre la ville balnéaire d’Eilat, poumon économique du Néguev, pour porter un coup au tourisme de masse et démoraliser une population qui se trouve en première ligne. Mais il estime surtout qu’il peut y avoir concomitance avec des actions au nord du pays.

                                Menaces du Hezbollah 



Défilé du Hezbollah

          Effectivement, le danger pour Israël ne vient pas seulement du sud. Il craint que le Hezbollah ne cherche à présent à embraser la frontière libanaise dans une action concertée avec les terroristes du Sinaï. Depuis de nombreux mois, Israël prépare son armée à une confrontation d’un nouveau type avec le Hezbollah bien que, depuis la guerre du Liban de 2006, le calme règne à l’exception de quelques escarmouches non planifiées. Les troupes du Hezbollah se sont aguerries dans les combats en Syrie et ont amélioré leur capacité militaire. Elles pourraient chercher sur le terrain une revanche à la guerre de 2006. 
          Le secrétaire général du Hezbollah, Hassan Nasrallah, s’est imposé auprès des forces islamiques radicales. Dans son dernier discours, il s’est présenté en personne face à ses militants pour montrer qu’il ne craignait plus les drones israéliens qui cherchent à l’éliminer. Il a évolué dans sa dialectique, moins fanfaronne, pour donner plus de poids à son combat militaire. Il semble convaincu en effet que la confrontation viendra tôt ou tard, sans qu’il soit besoin d’user d’un langage belliqueux stérile. Il sait que ses parrains iraniens n’avaient pas apprécié, d’une part qu’il soit à l’origine de la guerre de 2006 et d’autre part, qu’il ne l’ait pas franchement gagnée en laissant un goût amer de défaite. Ils l’avaient armé abondamment parce qu’il avait pour mission de riposter par représailles à une attaque éventuelle israélienne contre l’Iran. 
Exercice de Tsahal contre bunker

            Mais une grande partie de son arsenal est parti en fumée en 2006 entrainant un certain désenchantement dans ses rangs. De nombreux bunkers du sud-Liban avaient été détruits. Plusieurs centaines de ses militants sont tombés sur le champ de bataille syrien. Alors, pour éviter d’autres déconvenues, le Hezbollah est en train de mieux se préparer pour une véritable confrontation avec Israël en évitant toute provocation à la frontière libanaise. Mais Tsahal veille en testant les capacités militaires du Hezbollah. Des commandos du célèbre régiment Golani sont chargés d’opérer au-delà des lignes ennemies en rencontrant parfois, comme le 8 août, une opposition puisque quelques soldats israéliens ont été blessés par une mine. 
Les leçons de 2006

          
          Tsahal a beaucoup appris des conclusions de la commission Winograd qui avait enquêté sur la guerre de 2006 et sur la manière dont elle avait été menée. Malgré les critiques, le résultat a été probant puisqu’il a donné lieu à sept années de silence et de calme aux frontières grâce à une armée libanaise déployée aux côtés des forces de l’Onu à la frontière. Par ailleurs, sauf à jouer la politique de la terre brûlée, le Hezbollah a assimilé la politique dissuasive d’Israël qui a menacé le Liban de la destruction de toutes ses infrastructures si les tirs de missiles reprenaient contre le territoire israélien. 
Tsahal exercice-bunker
          Cependant Israël croit à une prochaine guerre au nord et prépare ses soldats au combat souterrain car il est persuadé que Nasrallah a décidé de changer de tactique. En effet, le Hezbollah a compris qu’il n’est pas en mesure d’affronter impunément les tanks et l’aviation israélienne. Il a acquis par ailleurs une expertise dans les combats de rues en Syrie. Alors plutôt que d’envoyer des missiles sur Israël avec le risque d’entrainer des représailles contre le Liban, sa stratégie a été modifiée pour planifier des opérations commandos, à travers des tunnels, afin de frapper psychologiquement les esprits. 
          Depuis 2006, le Hezbollah n'a pas cesser de reconstruire au sud-Liban de nombreux blockhaus souterrains, reliés par des tunnels, inaccessibles par l'avion de Tsahal. Selon un général israélien nombreux sont les tunnels qui sont au bord de la frontière près à être complétés jusqu'à l'intérieur d'Israël. Alors, le Hezbollah pourrait décider, dans une opération coup de poing, d’attaquer un kibboutz ou une petite ville proche de la ligne de démarcation pour pointer les faiblesses d’Israël et pour créer le désordre. 
              L'armée israélienne a compris que le Hezbollah a amélioré sa technique au sol et qu’il est capable de se comporter sur le terrain comme une armée professionnelle et non pas comme une milice désordonnée. Nasrallah sait qu’il représente une antenne des Gardiens iraniens de la Révolution chargée d’envoyer un déluge de feu si l’Iran était attaqué. Israël craint donc une action concertée du nord et du sud qui risque de porter le feu au sein même de la population civile israélienne.

http://www.tribunejuive.info/non-classe/israel-pris-dans-letau-du-nouvel-axe-nord-sud


2 commentaires:

Jean-Luc MORDOH a dit…

Je ne suis pas d'accord avec votre analyse. Al Quaida dans le Sinaï sera anéantie par l'Egypte. Ce pays ne laissera pas un espace de liberté à ces dingues. Les égyptiens ne rigolent pas et c'est bon pour nous. Le Herzbollah ? Tant que le conflit syrien dure, il ne se passera rien. Si Bachar tombe, ils tombent aussi. Si Bachar reste, ils restent aussi mais seront marginalisés au Liban à cause de leur engagement non partagé par l'ensemble de la population. Donc, le Herzbollah est en mauvaise posture quoiqu'il arrive. Le Hamas ? Eux, c'est facile, à part Gaza, ils ne sont nulle part. Le Hamas fait peur à l'Egypte et ils savent que Plomb Durci peut recommencer une deuxième fois. En plus, si les négos se passent correctement avec Abbas, ils perdront de leur influence. Dans tous les cas, ils sont à porté de Uzi. En résumé : la situation est extrèmement changeante et mérite un ajustement de notre vision de la région. mais qui s'auto-détruit autour d'Israël ? Les ennemis d'Israêl. Voilà pourquoi je suis, contrairement à vous, optimiste (et je n'aborde pas le côté économique).

Marianne ARNAUD a dit…


Cher monsieur Benillouche,

Al Qaida bénéficie de l'échec des révolutions arabes. C'est vrai. Mais ce qui est non moins vrai c'est que grâce à ces révolutions en Egypte, en Syrie, en Libye et ailleurs, on ne pourra plus faire croire à la planète entière, comme on l'a fait pendant des décennies, que l'instabilité du Proche-Orient et du Moyen-Orient n'est due qu'au conflit israélo-palestinien.
D'autre part, les populations de ces régions commencent à comprendre que ce n'est pas Israël qui est entièrement la cause de tous leurs malheurs mais qu'ils les doivent aussi au fanatisme religieux, à la dictature et à la corruption.
Voilà déjà deux raisons d'être optimistes.

Très cordialement.