LE TURC ERDOGAN, AGITÉ DU BOCAL
Par Jacques BENILLOUCHE
Il s’agit
d’une fausse entente avec l’Iran car existent toujours de fortes divergences. En
effet, la mauvaise humeur iranienne est grande face aux actions militaires de
la Turquie contre le Parti des travailleurs du Kurdistan (PKK) interdit sur le
territoire irakien, les attaques contre la base turque de Bashiqa par des
milices soutenues par l'Iran et leur soutien aux forces yézidies liées au PKK à
Sinjar.
construction d'un mur en béton à la frontière syrienne dans le sud de la Turquie |
La question
de l’exportation de gaz kurde irakien via la Turquie crée une inquiétude en
Iran qui craint que de nouveaux corridors de transport recherchés par
l'Azerbaïdjan et la Turquie à la suite de la guerre du Haut-Karabakh de 2020 ne
coupent sa liaison terrestre avec l'Arménie. Un autre aspect irritant est la
construction par la Turquie d'un mur à la frontière, couplée aux critiques
selon lesquelles l'Iran laisse les réfugiés afghans entrer en Turquie sans
contrôle. En résumé, il s’agit d’une fausse alliance de circonstance.
Les tensions avec l’Iran se sont aggravées à la
suite du rapprochement d’Erdogan avec l’axe israélo-arabe et de la coopération
des services de renseignement turco-israéliens. Les pourparlers tripartites sur
la Syrie n’ont rien donné. Erdogan n'a pas réussi à obtenir ce qu'il voulait,
ni à progresser sur les problèmes en suspens. Le renouvellement du contrat
d'achat de gaz de la Turquie avec l'Iran, qui expire en 2025 mettra beaucoup de
temps à se conclure. En raison de l'attitude dissuasive de Téhéran vis-à-vis
des entreprises turques, l’objectif de porter le commerce bilatéral de 7,5
milliards de dollars à 30 milliards ne sera pas atteint.
Drone iranien |
Alors que la Turquie cherche à promouvoir ses drones
armés Bayraktar, l’Iran a doublé la Turquie sur ce terrain en fournissant des centaines de
drones à la Russie. La volonté d’Erdogan de développer un partenariat plus
étroit avec l’Iran reste un vœu pieux. Quelques jours avant la réunion au
sommet, la compagnie pétrolière nationale iranienne et le géant gazier russe
Gazprom ont signé un protocole d'accord d'environ 40 milliards de dollars
tandis que les Russes aideront à développer les champs gaziers de Kish et North
Pars ainsi que six champs pétroliers en Iran. Erdogan se voit écarté des marchés juteux.
L’Iran refuse de cautionner toute nouvelle opération militaire dans le nord de la Syrie, ciblant Tel Rifaat
et Manbij, tenus par les Kurdes, Khamenei a prévenu Erdogan qu’une opération
militaire en Syrie serait préjudiciable à la région. D’abord parce que Téhéran ne
supporte pas que les décisions majeures sur la Syrie soient de plus en plus prises
dans le cadre du dialogue russo-turc. Par ailleurs, l'Iran estime que la Russie
a fait des concessions à la Turquie en Syrie au nom de ses intérêts
stratégiques plus larges et n'est plus disposée à laisser les décisions au
donnant-donnant entre Ankara et Moscou. En conséquence, les Iraniens ont
recherché une coopération plus étroite avec Damas, démontrant leur
détermination à prendre l'initiative en accueillant le président syrien Bachar
al-Assad à Téhéran en mai.
voyage du président syrien à Téhéran mai 2022 |
Erdogan a dû se
contenter d’une déclaration commune à minima. Les parties ont réitéré
leur engagement à lutter contre «le terrorisme sous toutes ses formes»
et à souligner «leur grave préoccupation concernant les groupes terroristes
à Idlib». Par ailleurs, selon Khamenei, la sécurité et la
stabilité dans le nord de la Syrie «ne peuvent être obtenues que sur la base
de la préservation de la souveraineté et de l'intégrité territoriale du pays», une
façon de bloquer Erdogan dans ses velléités d’opération militaire contre les
Kurdes.
La saison des méduses est là et une nouvelle espèce fait son apparition dans le Golfe persique |
Dans ce sommet, Erdogan a donné l’impression d’être un figurant plutôt
qu’un décideur. Khamenei lui a confirmé que tout comme l'Iran considère la
sécurité de la Turquie comme la sienne, Ankara devrait également considérer la
sécurité de la Syrie comme la sienne. Le guide suprême iranien a en outre
exhorté Erdogan à régler ses problèmes avec la Syrie «par des négociations».
La réunion trilatérale a été éclipsée par d'autres événements mondiaux, au
premier rang desquels l'invasion de l'Ukraine par la Russie. L'opposition farouche de Khamenei à une incursion turque dans le nord de la
Syrie pourrait ouvrir la voie à une escalade, si Ankara mettait sa menace à
exécution. Bref Erdogan s'agite beaucoup mais fait illusion car il s'attendait à être le clou de la réunion. Il doit choisir enfin le camp auquel il veut s'intégrer.
2 commentaires:
très bonne analyse d'autant que le "agité du bocal" psychopathe essaie de se rendre aussi "sympathique" alors qu'il prépare la shariah pour 2023 (automne) selon ses précédentes déclarations
commentaire très juste
Takouhi
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