LIEBERMAN SUPERSTAR APRÈS LE VOTE
DU BUDGET D’ISRAËL
Par Jacques BENILLOUCHE
Les bancs du gouvernement à la Knesset du 4 octobre 2021 |
Mais Netanyahou avait déjà douché ses militants en leur
affirmant le 22 octobre, à leur surprise générale : «Nous reviendrons
rapidement au pouvoir et nous réparerons. Cela pourrait prendre deux semaines
comme cela pourrait prendre trois ans et demi». Il a ainsi compris que les dés
étaient joués et que le gouvernement tiendra quelques mois encore. Il a pu
apprécier les gesticulations d’Ayelet Shaked qui lui est restée fidèle et qui a tout fait pour s’opposer à
la loi de Gideon Saar interdisant à un député inculpé de prendre la tête du
gouvernement, en vain. Bennett a mis de l’ordre dans son parti et a imposé une
discipline de vote, montrant qu’il avait, enfin, acquis ses galons de chef.
Commission des finances Yael Ron, Ghaida Rinawie Zoabi, Alex Kushnir, Nira Shpak, Vladimir Beliak et Meir Yitzhak Halevi |
Le vote de la commission a été obtenu après une séance
marathon qui s’est terminée dans la nuit de mercredi à jeudi 28 octobre, au
petit matin, malgré plus de 30.000 amendements déposés par l’opposition. Mais
bon joueur, le ministre des Finances a lâché du lest en acceptant la demande de
l’opposition d’augmenter le budget de 10 milliards de shekels (3,1 milliards$)
pour couvrir une éventuelle nouvelle vague du Covid.
Le déficit budgétaire (dépenses supérieures aux
recettes fiscales) qui était de 6,8% du PIB a été réduit à 5,7% en 2021 et 3,9%
en 2022 ce qui démontre une croissance rapide de l’économie prévue de 7% après
une contraction de 2,2% en 2020 en raison du covid. Naftali Bennett passe ainsi
son premier test politique avec succès alors qu’on ne donnait pas cher de la
durée de vie du gouvernement en cas d'échec planifié du vote du budget. L’an
passé le gouvernement Netanyahou avait payé son intransigeance en refusant
toute concession à Benny Gantz qui avait proposé un budget viable. Le Likoud n'avait pas approuvé le projet suite aux injonctions du leader.
Lieberman dans l'exercice du budget |
Le ministre des Finances, Avigdor Lieberman, qui a subi
les pressions de son camp et celles de l’opposition, a résisté puisque la
grande majorité de ses réformes seront appliquées sans dépasser ses dépenses
évaluées à 609 milliards de shekels (190 milliards$) pour 2021 et 573 milliards
de shekels (180 milliards$) en 2022.
Lieberman a qualifié «son budget de plus socialisé
de tous les temps» et pour cause puisqu’il accorde 700 millions de shekels
supplémentaires au ministère du Travail, des Affaires sociales et des Services
sociaux, 150 millions de shekels pour la réduction de la violence domestique, 1
milliard de shekels au ministère de l'Éducation, 1 milliard de shekels au
ministère de la Sécurité publique, 1.100 nouveaux policiers, 300 millions de
shekels pour une allocation annuelle pour les survivants de l'holocauste, 800
millions de shekels pour les handicapés, 1 milliard de shekels pour les
vétérans handicapés de Tsahal et 5 milliards de shekels pour la fortification
de la frontière nord. Il contient aussi des réformes agricoles, destinées à faire
baisser le prix élevé des fruits et légumes en Israël, en ouvrant le marché aux
importations. Comme il se doit, les députés de l'opposition ont refusé le budget
proposé car, selon eux, il est discriminatoire à l'égard des couches les plus
faibles de la société et des femmes qui voient repousser l'âge de leur retraite au départ à 67 ans puis ramené à 65.
Une fois voté, le budget sera soumis aux experts
politiques et financiers qui décortiqueront les mesures et pourront faire une
analyse dénuée de tout clanisme. Avigdor Lieberman est serein car il s’est
entouré de grands experts, quelques-uns américains, et il jubile déjà. Cependant,
il ne refuse pas la discussion et il a d’ailleurs imposé à son ministère d'accepter une
demande de l’opposition qui veut créer un filet de sécurité pour les femmes des
secteurs les plus faibles de la population, en particulier celles dont les
emplois sont les plus pénibles. Il s’est montré très à l’écoute de tous les
horizons politiques. Il est cependant conscient qu’au final, il s’agit de sa
victoire personnelle. Il a non seulement été à la pointe du combat contre
Netanyahou, mais il a réussi ce que les dirigeants n’ont pas voulu faire pendant
plus de trois ans alors que toutes les tentatives de bricoler un budget avaient
toutes échoué.
Le budget a toujours été le déclencheur de la chute
des gouvernements précédents. En fait, Lieberman avait planifié de longue date ce
moment, lorsqu’il avait démissionné en novembre 2018 de son poste de ministre
de la Défense. Quelques heures seulement
avant l’adoption par la Commission, il avait tweeté : «Alors que je traverse
la Knesset, j'ai l'impression d'être en vacances. L'adoption d'un budget
devrait être une question de routine, mais le fait est que cela ne s'est pas
passé comme ça aux 21e, 22e et 23e Knesset. Au lieu de cela, il y avait une
impasse prolongée. C'est pourquoi nous sommes si excités aujourd'hui. Je ne
m'excuserai pas de ce que je ressens. Bonne journée budgétaire !».
Le gouvernement Bennett-Lapid apporte aujourd’hui un
sentiment de stabilité à l'économie puisque sa durée de vie a été étendue. C'est la preuve qu'une coalition
comprenant à la fois un parti arabe Raam et des partis d'extrême-droite peut
fonctionner quand on ne surfe pas sur les egos. Il a acquis la maturité nécessaire
pour combler les différences idéologiques entre ses composants, aussi différentes
soient-elles. De l'autre côté de l’espace politique, l'opposition est à présent
convaincue qu'elle pourrait difficilement débaucher quelques frondeurs issus de
la coalition pour s'opposer au vote du budget.
Netanyahou a eu
du mal à digérer son échec. A la Knesset, il s'est assis tout seul, entouré de
sièges vide alors qu’il était toujours très entouré. Il portait un masque noir
et lisait l'autobiographie de David Cameron, l'ancien Premier ministre
britannique comme s’il voulait ignorer le débat. Entre la lecture de son livre
et la manipulation de son téléphone, il ne pouvait pas cacher le désarroi imposé
par sa défaite mais aucun de ses fidèles n’a osé lui déconseiller de donner une
telle image négative de lui. Les photographes s’en donnaient à cœur joie pour
diffuser des images d’une tristesse terrible. Son discours de chef de
l’opposition a été d’une violence rare, se bornant à qualifier la coalition de «gouvernement
des échecs» ; un argument peu convaincant.
Il avait perdu l’habitude des discours d'opposition,
mais dans des termes violents et discourtois à l’égard de Bennett, il n’a fait
aucune nouvelle proposition ni détaillé sa vision d’avenir. Il a donné
l’impression de manquer d’arguments solides et d’attendre le prochain test du
gouvernement en espérant un événement extérieur capable de créer un choc
définitif au gouvernement. La seule satisfaction lui vient des sondages
auxquels il veut croire car ils le placent en pole position avec 30 à 35 sièges
pour le Likoud. Mais ces sondages sont d’une relative valeur car aucune élection ne
se profile à l'horizon et il sait que l'opinion publique est volatile. Pendant
ce temps, son ennemi intime, Avigdor Lieberman, qu’il avait un peu trop vite
enterré et qui l'a dépossédé de son poste, joue aujourd’hui le rôle de superstar.
2 commentaires:
Jacques, je ne sais trop sur quels chiffres tu te bases pour confirmer les dires "sociaux" de L:iebermann.. Comme d'habitude, et comme partout dans le monde, ce sont les pauvres qui paient et les riches qui encaissent. Le transport public urbain a double son prix, personne n'a rien dit. On a propose une taxe sur les riches (commen France la taxe sur la richesse). Toute la Knesset s'y est opposee, coalition et opposition ensemble.
On a voulu imposer les possesseurs de 2 appartements. Cette proposition a ete balayee.
Et pourtant, cela aurait ouvert des milliers de logements vides. Mais le gouvernement gagne tellement sur la construction qu'il n'allait pas scer la branche sur laquelle il est assis.
Israel est parmi les pays les plus polluants de la planete. Aucune mesure n'a ete proposee,
on continue a utiliser le charbon et le gaz pour produire de l'electricite. La moitie du par autobile est constituee de "SUV", vehicules les plus polluants car consommant le plus de carburant sur lequel le gouvernement rammasse 63% du prix dun litre d'essence.
Mon cher Jacques , si j'en crois Yael Ifrah , les agriculteurs israéliens ont réussi justement à empêcher l'ouverture de frontières aux fruits et légumes , contrant ainsi la volonté de changement d'Avigdor Lieberman .
bien triste .
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