LAPID, VÉRITABLE HOMME FORT
DU GOUVERNEMENT
Par Jacques BENILLOUCHE
Il est très heureux au poste de
ministre des Affaires étrangères qui lui va comme un gant parce qu’il adore les
voyages, les invitations dans les chancelleries et les rencontres avec les
Grands de ce monde. Les Occidentaux, qui sont nombreux à vouloir le rencontrer,
le considèrent déjà comme le premier ministre putatif. D’ailleurs il se suffit à ce poste et l'on se demande
s’il ne renoncera pas à la rotation du premier ministre pour verrouiller Naftali
Bennett au sein de la coalition et l’empêcher de composer avec la Droite une
fois libéré de sa tâche suprême. Naftali Bennett semble déjà remisé à la
fonction «d’inaugurer les chrysanthèmes».
Linda Thomas-Greenfield et Lapid |
Il a ainsi rencontré à Jérusalem
l’envoyée américaine à l’ONU, Linda Thomas-Greenfield qui est «une véritable
amie qui se bat côte à côte avec nous dans l'une des arènes les plus complexes
de la communauté internationale. Notre amitié est basée non seulement sur des intérêts
mutuels, mais sur des valeurs partagées et une vision du monde partagée». Il
a ensuite pris au téléphone la Canadienne Mélanie Joly : «Hier soir,
j'ai parlé avec le nouveau ministre des Affaires étrangères du Canada. Je l'ai
félicitée pour son nouveau rôle et je l'ai invitée à visiter Israël. Nous avons
discuté de l'importance de l'égalité des sexes au gouvernement et avons convenu
de continuer à renforcer la coopération entre Israël et le Canada». Avec
ces deux femmes, il a parlé de haute politique et des intérêts stratégiques
d’Israël.
Si après les élections
législatives de 2013, Netanyahou avait joué le jeu et lui avait offert le poste
que Lapid avait réclamé, au lieu de l’envoyer au charbon au ministère des Finances
alors qu’il y était totalement néophyte, il n’aurait pas quitté le gouvernement
et l’histoire de Netanyahou aurait connu un tournant différent dans la
collaboration avec le Centre. Il était fait pour ce poste car, ancien
journaliste, il connait parfaitement la diplomatie d’Israël pour en être un expert.
Il est pragmatique et il sait
effacer les mauvais moments quand en mars 2020, Benny Gantz avait rompu son
alliance avec lui pour rejoindre un gouvernement Netanyahou afin d’éviter de
nouvelles élections. Il avait attendu son heure et avait préféré s’isoler dans
l’opposition, très réduite à l’époque, au point que certains avaient considéré sa
position comme un suicide politique. C’est pourquoi, des militants de Yesh
Atid, à l’instar d’Ofer Shelah, avaient cru que le moment était venu pour l’envoyer
à la retraite. La manœuvre avait échoué car le parti était légitimiste et avait
tenu à apporter son soutien au fondateur de Yesh Atid. Dans l'opération Ofer Shelah a tout perdu, même son poste de député.
Ofer Shelah |
Bien sûr, Lapid convoite le poste
suprême qu’il devrait occuper le 27 août 2023. Cependant des changements
majeurs et des décisions imprévues peuvent annuler cette rotation. Il tient cependant la
situation en main. Sur le papier, il deviendra le prochain Premier ministre de
l'État d'Israël à la date prévue ou, en cas de dissolution anticipée de la
Knesset, situation improbable car les partis font bloc derrière la nouvelle
gouvernance. Mais la coalition sait que Netanyahou n’a pas désarmé et qu’en cas
de nouvelles élections, il peut prendre sa revanche. Il existe donc une colle
invisible qui soude les ministres d’un gouvernement de bric et de broc. De
toute façon, Lapid envisage le pire, à savoir le jour où il devra affronter
Netanyahou en tête à tête pour la première fois.
Il doit sa réussite au
quatuor solide qu’il forme avec Lieberman, Gantz et Saar, les piliers de la
coalition avec Naftali Bennett. Mais le premier ministre est contesté dans son
parti par la moitié de ses effectifs qui veut faire sécession pour rejoindre la
«vraie droite». Son avenir politique tient d’ailleurs à un fil et il ne
doit son salut qu’a la solidité de la coalition.
Lapid a eu raison de ne pas
s’engouffrer trop vite à la tête du gouvernement car il avait besoin de
parfaire son expérience et de peaufiner sa stature internationale tout en étant
libre de ses jugements. Ainsi lors d'un briefing avec les correspondants
étrangers le 1er septembre, il avait surpris tout le monde avec sa critique
ouverte contre le retrait américain d'Afghanistan : «Je pense que le
monde entier était concerné, et avant tout les Américains eux-mêmes de la
manière dont le retrait s'est déroulé. Ça ne s'est pas passé comme ça devait se
passer. … C'était probablement la bonne décision qui n'a peut-être pas été
prise de la bonne manière».
Depuis son entrée au ministère
des Affaires étrangères, Lapid a prouvé qu'il était un ministre
particulièrement vigoureux. Il veut créer son propre programme, qui combine sa
vision libérale et progressiste du monde avec le nationalisme et le patriotisme
israéliens. Mais son manque d’expérience au sommet lui a fait utiliser un
langage peu diplomatique. Il veut prouver qu'il est un ministre des Affaires
étrangères à l'esprit indépendant, confiant dans ses capacités et intéressé à
se forger une réputation d'homme d'État en voyageant à travers le monde et en
accueillant les ambassadeurs et les hommes d’État. Par ailleurs, il ne
craint pas la concurrence car Bennett et Saar n’ont pas atteint sa popularité.
Seul Gantz peut lui faire de l’ombre mais les deux n’ont aucun intérêt à rompre le consensus. Gantz sait que le moment n'est pas encore venu pour lui et qu'il doit composer en attendant d'être un recours.
David Amsalem |
Netanyahou a d’ailleurs modifié
sa stratégie en ciblant dorénavant Lapid et non pas Bennett car il sait qu’en
cas d’élections il aura à l’affronter violemment. Alors, comme d’habitude, il a
délégué à ses fidèles irréductibles le soin d’attaquer ce concurrent devenu dangereux.
Avec ses gros sabots et sa démarche d’éléphant, David Amsalem du Likoud, a
cherché à porter l’estocade dans une attaque dénuée de délicatesse. Il a qualifié
de «tricheurs, menteurs et escrocs» à la fois Yaïr Lapid et le président
de la Knesset Miki Levy. Pour Amsalem «La gauche est le peuple le plus
violent, le plus menteur et le plus corrompu de l'État d'Israël». Il a
ajouté que Lapid était une «usine de poison radioactif». L’argument que
les centristes sont des gauchistes est périmé et ne tient plus la route.
Avec
des attaques politiques de ce niveau, Lapid est à l’abri. Quel que soit l’avenir
du gouvernement, il a acquis le statut de chef du camp politique israélien de
centre-gauche, sachant que pour l’instant aucune autre personnalité n’est en
mesure de lui ravir sa place.
3 commentaires:
Je ne pense pas que Lapid soit un jour Premier Ministre, il y a trop de requins autour de lui. y compris dans son propre parti. Et Bibi est entrin de concocter un processus qui ferait demissionner Bennett et ainsi demolir la coalition actuelle.
Et puis, aucun journaliste n'a jamais ete un bon politicienn et encore moins un bon historien (cf EZ en France)
Lapid homme fort du gouvernement, mais homme faible concernant la politique israélienne. Avant hier, mardi 16 novembre, la principale chaine de TV israélienne a ouvert son journal sur la situation dans le Negev et à Beersheva, la grande ville du Negev. Elle est est devenue une sorte de Far West sauvage où aucun des accessoires habituels ne manquent, ni le désert, ni les armes, ni les gangs…On pourrait rajouter la ville de Jérusalem, notamment dans le secteur de la vieille ville, où les mots d’ordre du Hamas font l’actualité. A Beersheva, les habitants n’osent plus sortir. Ils manifestent ici et là sans conviction du fait du désabusement devant l’absence de l’Etat et de la police. Cet état de faits a pris beaucoup d’ampleur depuis la dernière opération militaire contre Gaza, « Gardien des murailles ». Par ailleurs, le Hamas s’est institué le défenseur des Arabes d’Israël et surtout de la mosquée d’El Aqsa au point de tirer, pour la première fois ors de l’opération « Gardien des Murailles »des missiles sur Jérusalem. Il avait alors aussi fomenté des troubles de concert avec ses sympathisants arabes israéliens. Ce qui est beaucoup plus grave c’est la déclaration d’un ancien officier de renseignements de Tsahal qui a récemment fait état de son inquiétude, à savoir que dans la prochaine opération militaire, Israël se verra confronté à une nouvelle donne stratégique: un Front intérieur qui s’enflammera en même temps qu’il devra se battre sur le front extérieur. Oui, la haine gratuite contre Bibi (« Rak lo Bibi, disaient-ils), est à l’origine de ce gouvernement hétéroclite NON DÉMOCRATIQUEMENT ÉLU –- est-il normal que Benett dont le parti a obtenue 4 siège soit premier ministre ?--- soumis au chantage du parti Ram qui n’a qu’un but politique : mettre fin à cet Etat d’Israël servant de refuge aux victimes de l’antisémitisme exponentiel qui sévit actuellement partout dans le monde. Shabat shalom
Pas 4 sieges, mais 6. Mais le probleme des minorites en Israel n'est pas nouveau. Il ne date pas ni de Bennett, ni meme de Bibi, ou d'Olmert ou d'Ariel Sharon, ni meme de Rabin ou de Peres. Il depend d'une conception erronee de la souverainete d'Israel et des Israeliens, Ben Gourion voulait nettoyer tout le pays en 1948. Les cheds de Tsahal de l'epoque et les petits partis de gauche s'y opposerent.
Et depuis Juin 1967, le probleme s'est aggrave. Il y a eu un choix, on annexerait les Territoires aux depens de la Galilee et du Neguev peuples deja majoritairement d'Arabes. Tout le monde s'y mit, la droite comme la gauche (termes completement mal utilises). Depuis toujours, la Gauche represente les sionistes-"socialistes" (la majorite des kibboutsim et des moshavim ont ete batis sur les ruines de villages arabes) La Droite (depuis 1977) est soutenue aveuglement par les petites gens, les incompris, les defavorises.
Vous pouvez ne pas aimer la coalition actuelle, mais vos arguments ne sont pas adequats. Dans le Neguev, Bibi n'aurait pas fait mieux. D'ailleurs il chercha une alliance avec Mansour Abbas, car Bibi n'en a rien a faire de la Gauche ou de la Droite, une seule chose l'interesse, son propre avenir.
Il n'est pas le premier politicien a agir ainsi, presque tous l'ont fait, a gauche comme a droite, mais cela est fait de facon si maladroite que chaque fois que je lis ou j'entends ses arguments, je sais qu'il nous prends pour des demeures mentaux, vous et moi y compris.
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