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dimanche 25 août 2019

Députés arabes : citoyens ou cinquième colonne


DÉPUTÉS ARABES : CITOYENS OU CINQUIÈME COLONNE

Par Jacques BENILLOUCHE
Copyright © Temps et Contretemps

Ayman Odeh

  La déclaration du président de la liste commune arabe, Ayman Odeh, selon laquelle il serait prêt à siéger, sous certaines conditions, dans une coalition de centre-gauche a relancé le débat sur la place des Arabes en Israël. Pour certains, ce sont des citoyens à part entière et pour d’autres, des éléments antisionistes d’une cinquième colonne. Cette déclaration a suscité des remous dans la classe politique sachant qu’Ayman Odeh n’a pas exclu de recommander Benny Gantz comme premier ministre auprès du président de l’État. Le parti Bleu-Blanc est prudent d’une part parce qu’il pourrait s’agir d’une manipulation électorale au profit du Likoud et d’autre part pour ne pas décourager les éventuels dirigeants arabes qui font un effort de s’intégrer.


Yoaz Hendel

Le député Yoaz Hendel, a tenu à faire une mise au point précise : «Bleu-Blanc veut mettre en place un vaste gouvernement d'union nationale et nationale. Nous respectons les citoyens israéliens arabes et les considérons comme des citoyens ayant droit à tous les droits, sauf ceux parmi les partis arabes qui nient fondamentalement l'existence d'Israël en tant qu'État juif».
 Il n’y a pas d’unanimité au sein de la liste arabe qui comprend quatre partis. Le président du parti Balad, Antas Shahada, a déclaré : «Je pense que la déclaration d’Ayman Odeh est une déclaration misérable qui ne représente pas la position de la liste commune. Nous ne l’acceptons pas. Cette position représente probablement sa position et peut-être celle de Hadash. En aucun cas la liste commune pourrait faire partie de la coalition soutenant Gantz». Ahmed Tibi de Hadash est lui-aussi réticent : «Bleu-blanc et Gantz ne sont pas notre tasse de thé, ils sont loin de répondre à nos exigences et ils s’efforcent en général de former un gouvernement d’union avec le Likoud».
Le camp démocratique est le seul à avoir eu une réaction positive et encourageante : «Ayman Odeh comprend que la perception doit changer: dans la démocratie véritable, tous les citoyens ont leur place à la table, même à la Knesset, même au gouvernement. C’est le moyen de garder Israël à la fois sioniste, équitable et démocratique. Pour le dire clairement après 70 ans et commencer à aller de l'avant, c'est du courage».
En fait il faut savoir si les Arabes sont qualifiés pour participer à la gestion du pays car, dans le cas contraire, il faudrait purement et simplement interdire leurs partis et les forcer à se présenter uniquement au sein des partis «sionistes».
Pourtant en 1992 Yitzhak Rabin avait négocié avec les Arabes leur neutralité pour son gouvernement minoritaire en échange d’avantages économiques spéciaux. Aujourd’hui ils ont à nouveau des revendications qu’ils pourraient facilement obtenir. Ils souhaitent créer une nouvelle ville, un hôpital et une université arabes. Ils voudraient obtenir une augmentation de l'emploi arabe dans le secteur public, sans exiger forcément un ministère.
Les militants du Likoud lancent des cris d’orfraies à l’idée que les Arabes puissent entrer dans un gouvernement de coalition. Pourtant, les statistiques officielles ont établi qu’aux dernières élections, les électeurs arabes dans leurs villages ont voté à 35% pour le Likoud. On n’a pas entendu le Likoud rejeter ces voix car elles lui ont permis d’arriver au sommet. C’est un fait avéré mais aussi un paradoxe qui s’explique soit par la mauvaise humeur de l’électorat arabe qui n’a pas accepté la scission de la liste unique en deux entités concurrentes, soit par la volonté de maintenir un statu quo qui convient bien à la communauté arabe.
Bien qu’ils représentent 20% du corps électoral, les Arabes sont délaissés par les partis politiques, à l’exception de Meretz, le seul qui place dans sa liste un Arabe en position éligible. Ils sont considérés comme des citoyens à part sous prétexte qu’ils ont de la sympathie pour leurs familles de Cisjordanie, voire de Gaza. Pourtant, ils sont de plus en plus impliqués dans la vie économique du pays puisqu’un Arabe, Samer Haj-Yehia, vient en effet de prendre la présidence de la plus grande banque israélienne, la Bank Leumi. 
Cependant ni Bleu-Blanc et ni le Likoud ne leur ont laissé une place éligible dans leurs listes ; certains craignent un conflit avec leurs éléments nationalistes juifs.
Il est difficile d’ignorer une liste de députés qui pèse entre 11 et 12 sièges, voire plus si les Arabes se déplacent cette fois en masse dans les bureaux de vote. Netanyahou n’est pas étranger à cette mise à l’écart d’une communauté qui est systématiquement vouée aux gémonies. Il a érigé son slogan «Bibi ou Tibi» en épouvantail contre «les Arabes qui se rendent aux urnes en hordes. Les organisations gauchistes les amènent en bus !». Certains médias participent à la campagne contre Benny Gantz en publiant des sondages où trois clans sont définis, le Likoud, Lieberman et le «clan arabe de gauche» incluant Benny Gantz pour bien montrer que voter pour Gantz était synonyme d’un vote pour les Arabes.
            Nombreux sont les Arabes qui sont convaincus d’être les laissés pour compte de la société israélienne en raison de la prolongation du conflit israélo-palestinien qui ne fait qu’aggraver une hostilité réciproque. Les nationalistes juifs considèrent les Arabes restés dans les frontières de l’État juif comme des Palestiniens faisant partie du monde arabe, voire une cinquième colonne en puissance.
Diplômés arabes israéliens 

         Malgré cela, sur la base de critères mesurables (revenu, éducation, infrastructures, emploi, justice, services sociaux), les Arabes israéliens ont comblé une grande partie du retard par rapport à leurs concitoyens juifs bien qu’ils soient exclus des centres de pouvoir et fortement sous-représentés au sein des institutions gouvernementales. Cependant les Israéliens assimilent tous les Arabes à des terroristes. Mais il existe une certitude, quel que soit le nombre de députés arabes élus, ils influeront de manière notable sur les possibilités de coalition gouvernementale et seront les faiseurs de roi. Si Benny Gantz arrive en tête, il pourrait constituer un gouvernement minoritaire avec la neutralité des Arabes en attendant que quelques éléments de droite le rejoignent. Sinon la situation restera bloquée.

1 commentaire:

Elizabeth GARREAULT a dit…

Tu remets les pendules à l'heure dans un article bourré d'informations.
J'avoue que j'ai du mal avec le racisme en général alors je n'arrive pas à comprendre qu'on puisse généraliser et considérer que tous les citoyens arabes d'Israël doivent être considérés différemment (sauf ceux qui votent Likoud :D et dont les mêmes qui les rejettent, se gardent bien de jeter le bout de papier qui fait office de bulletin de vote et s'empressent de le comptabiliser).
Heureuse cependant de voter pour le seul parti qui met un arabe en position éligible :)