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jeudi 22 août 2019

Le Hamas ne semble pas avoir changé de stratégie



Par Jacques BENILLOUCHE
Copyright © Temps et Contretemps

Matériel des terroristes du 10 août

Les services sécuritaires israéliens, en particulier le Centre Meir Amit, ITIC (Intelligence and Terrorisme Information Center), n’interprètent pas les nombreuses tentatives d’infiltration des terroristes armés depuis la bande de Gaza comme un changement de stratégie du Hamas bien que depuis le début du mois d’août 2019, des terroristes fortement armés aient tenté sans succès, à trois reprises, de pénétrer en Israël. Ils ont tous été interceptés et tués avant qu’ils ne foulent le sol israélien.


Armes des terroristes du 10 août

Ainsi, le 1er août 2019 dans la nuit, des soldats de Tsahal ont surpris un Palestinien franchissant la barrière de sécurité à l'est de Khan Younes. Après avoir blessé trois soldats israéliens, il a été abattu. Il s’agissait de Hani Hassan Abu Salah, 20 ans, membre de la branche armée du Hamas.
Le 10 août 2019, quatre hommes armés s’étaient approchés de la barrière de sécurité au centre de la bande de Gaza, à l'est du camp de réfugiés de Deir al-Balah. Deux d’entre eux avaient réussi à franchir la clôture et à lancer une grenade à main contre les forces de Tsahal qui ont riposté et les ont tués. Les quatre terroristes portaient des uniformes et étaient armés de fusils d'assaut Kalachnikov, d'un lanceur de RPG, de grenades et d'une trousse de premiers secours. Ils avaient du matériel pour couper la barrière de sécurité. Il semble qu’ils aient prévu de séjourner un certain temps sur le terrain car ils disposaient de nourriture, de barres énergétiques et de dattes. Les services de renseignements les ont identifiés comme étant des salafistes qui avaient été expulsés de l'aile militaire du Hamas trois mois auparavant : Abdallah al-Hamayda (Abou Moussab), Ahmed al-Adini, Rashad al-Badini et Abdallah al-Ghomri.
Abdallah Al Haymada et Ahmed Al-Adini

Enfin le 11 août 2019, les forces israéliennes ont intercepté un terroriste armé s'approchant de la barrière de sécurité dans le nord de la bande de Gaza. Il a réussi à tirer sur les soldats qui ont riposté en le tuant. Le terroriste s’appelait Marwan Khaled Abd al-Ghani Nasser, 26 ans, de Beit Hanoun, dans le nord de la bande de Gaza. Il était membre actif de l'aile militaire du Hamas comme son père, Khaled Nasser, qui avait trouvé la mort auparavant dans une opération.
Comme à l’accoutumée les réactions du Hamas ont varié selon les leaders. Yahya al-Sinwar, chef du Hamas, a qualifié ces actions «d’héroïques». Il ne pouvait pas moins réagir. Le porte-parole du Hamas s’est borné à critiquer Israël d’avoir tué les terroristes et a justifier leurs motivations, sans autre condamnation. Paradoxalement le Hamas n'a pas revendiqué la responsabilité des infiltrations ni confirmé qu’ils avaient agi selon ses directives. Il a seulement estimé qu’il s’agissait de «jeunes hommes en colère qui menaient des actions individuelles motivées par des décisions personnelles ne relevant pas de la branche armée du Hamas».
Marwan Nasser

Selon des informations sécuritaires, le Hamas serait intervenu en coulisses pour empêcher ces attaques en accroissant le déploiement de ses forces de sécurité près de la frontière et en arrêtant des Palestiniens qui avaient tenté de s'approcher de la clôture avec l'intention de s'infiltrer en territoire israélien. Il aurait même envoyé un message à l'Égypte pour l’assurer qu’il prendrait toutes les mesures contraignantes pour empêcher de telles actions contre Israël. Cependant les experts sont formels ; la fréquence croissante de terroristes armés tentant de traverser la frontière n'indique pas une évolution de la politique du Hamas.
Le Hamas n’a pas changé car déjà en mars 2018, il contrôlait la violence contre Israël au cours des «marches du retour» pour ne pas que les manifestants aillent trop loin. Il surveillait de près le lancement d'engins piégés et de grenades, le lancement de ballons incendiaires et le lancement de roquettes. En fait il faisait tout pour modérer l’attitude des émeutiers et c’est ce qui explique les représailles symboliques de Tsahal qui se bornait à «casser des pierres». 
Le Hamas pensait qu’il n’avait que ce seul moyen pour obtenir des concessions de la part d’Israël et même du monde arabe. Il souhaitait une levée partielle du siège et l’obtention d’une aide économique massive pour améliorer la vie quotidienne de la population de Gaza. Il réclame de l'électricité supplémentaire provenant d'Israël et de l'argent du QatarIl a eu partiellement satisfaction mais pas suffisamment pour régler la misère économique. Avigdor Lieberman avait été le seul à conseiller au gouvernement de débloquer 10.000 contrats de travail pour les Gazaouis, à étendre les limites de pêche et même à donner des facilités portuaires à Gaza. Pour lui, c'est le seul moyen de calmer les ardeurs belliqueuses de certains groupes.
Hani Abou Saleh en tenue militaire

Cependant le Hamas fait peu d’effort pour empêcher de manière préventive ces infiltrations. D’une part, ces terroristes bénéficient de la sympathie et du soutien de la population qui a tendance à critiquer le Hamas. D’autre part, les organisateurs des «marches de retour» sont à présent convaincus que les résultats attendus ont été faibles et qu’il fallait trouver d’autres moyens d’agir. En revanche on peut accuser le Hamas de limiter au strict minimum sa lutte contre les infiltrations au lieu, peut-être, de les coordonner lui-même, laissant trop de liberté à sa branche armée.
Le journal libanais al-Akhbar, affilié au Hezbollah, a confirmé que les trois infiltrations en Israël avaient eu lieu «sans instructions des dirigeants politiques ou militaires du Hamas et par des individus sans contrôle». Le journal a conseillé aux médiateurs égyptiens et onusiens «d'accélérer le transfert de fonds pour les familles dans le besoin et d'accélérer la mise en œuvre de projets électriques». Il confirme que le Hamas avait officiellement suspendu ses activités militaires contre Israël «pour faciliter les efforts de paix».

Un éditorial journal du Hamas Felesteen explique que le Hamas ne souhaitait ni n'encourageait les activités militaires individuelles. C’est d’ailleurs pourquoi il ne les revendique pas pour ne pas décevoir les négociateurs égyptiens qui persistent dans leurs efforts pour ramener une paix durable. Cependant certains chefs des brigades Ezzedine el Qassem voient d’un mauvais œil cette volonté d’accalmie. Alors, pour maintenir sa crédibilité vis-à-vis de l'Egypte, le Hamas doit montrer plus d'ardeur à combattre ses contestataires, quitte à utiliser les méthodes dissuasives qu'il connaît.  

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