LE BEST-OF DES ARTICLES LES PLUS LUS DU SITE, cliquer sur l'image pour lire l'article


 

vendredi 22 novembre 2013

ISRAËL SCRUTE L’ACTION DES GROUPES TERRORISTES AU SINAÏ





ISRAËL SCRUTE L’ACTION DES GROUPES TERRORISTES AU SINAÏ

Par Jacques BENILLOUCHE
copyright © Temps et Contretemps

Bus, qui transportait des soldats égyptiens, calciné à El-Arish, le 20 novembre 2013

 L’Égypte a subi l’attaque la plus meurtrière dans la péninsule du Sinaï depuis l’arrivée du nouveau régime. Cela pose à la fois le problème de la présence des terroristes d’Al-Qaeda et des relations avec le Hamas à Gaza. Le bilan est lourd puisque onze soldats égyptiens ont été tués et 37 blessés dans un attentat à la voiture piégée près de la ville d'El-Arish alors que les soldats voyageaient dans un convoi sur la route qui mène à Rafah.

  Trois groupes de djihadistes, installés au Sinaï, agissent de manière autonome tout en faisant allégeance à Al-Qaeda. Ils appliquent la même idéologie faite d’actions violentes et sanguinaires. Ils se distinguent peu les uns des autres mais gardent une volonté de brouiller les pistes et d’accroitre leur efficacité. 



Takfir wal Hijra


Takfir wal-Hijra est le nom populaire donné à un groupe islamiste radical Jama'at al- Muslimin, fondé en 1971 par Shukri Mustafa sur la base du rejet des pratiques égyptiennes contemporaines et comme une émanation des Frères musulmans. Le groupe avait été pratiquement éradiqué par les forces de sécurité égyptiennes à la suite de l’assassinat de l’ancien ministre des Waqfs, Hussein Al-Zahabi. Shukri Mustafa fut d’ailleurs pendu en 1977.

Le groupe, qui est revenu à une doctrine violente et d’excommunication,  s’est progressivement reconstitué sous l’idéologie de Ben Laden et a revendiqué l’assaut en 2012 contre le poste-frontière ayant causé la mort de 16 gardes-frontières égyptiens. Son nouveau chef, Abdulfatah Hassan Hussein, considéré comme l'un des «plus grands chefs terroristes» d’Égypte avait été arrêté le 1er novembre au nord du Sinaï. Il a été arrêté avec 25 éléments takfiristes extrêmement dangereux dans une opération militaire qui a permis la découverte et la destruction de trois tunnels de contrebande.


Ansar Beit Al-Maqdis

Khairat Al-Chater


Ce groupe appelé également Ansar Jérusalem (partisans de Jérusalem) s’est créé pendant l'insurrection du Sinaï. Il a recruté des Bédouins, des Égyptiens et des mercenaires de différentes nationalités. Le groupe est financé par Khairat Al-Chater, professeur d'ingénierie, homme d'affaires, homme politique égyptien et premier adjoint du Guide suprême des Frères musulmans. Sa candidature à l'élection présidentielle de 2012 avait été invalidée par le Conseil suprême des forces armées. Il a été arrêté le 5 juillet 2013 par l'armée.

Ce groupe estimé à 2.000 personnes a bombardé plusieurs pipelines qui transportent le gaz de l'Égypte vers Israël. Il a monté une attaque contre les troupes israéliennes en septembre 2012. Un de ses membres, ancien officier de l'armée, était responsable de la tentative d'assassinat du général Mohamed Ibrahim Moustafa, ministre de l’intérieur, qui a eu lieu en Septembre 2013. 
Pipeline en feu au Sinaï

Inconnu avant janvier 2011, le groupe n’avait aucune intention politique mais cherchait à mener des opérations contre l’armée israélienne. Il est responsable de l’attaque du 16 août contre Eilat et du lancement de missiles Grad depuis le Sinaï qui ont tué huit Israéliens.

Ansar Al-Djihad



Ansar al Djihad a été formé le 20 décembre 2011 pour «accomplir le serment d’Oussama ben Laden, leader d’Al-Qaeda». Ce groupe avait pour objectif annoncé «de faire de notre mieux pour lutter contre le régime corrompu et ses acolytes parmi les Juifs, les Américains et ceux qui les entourent».  Il y a une difficulté à le distinguer du groupe Ansar Jérusalem. Ses combattants font cependant allégeance au dirigeant d’Al-Qaeda, Ayman Al-Zawahiri. 
Ses membres sont d’anciens djihadistes libérés par le ministère de l’Intérieur après avoir renoncé à la violence mais après leur sortie de prison, ils sont retournés à leur combat, formant ce groupuscule dans le Sinaï. Ils se seraient entraînés dans la bande de Gaza à l’utilisation de mortiers et de toutes sortes d’armes ainsi qu'au montage et au démontage d’explosifs.



Insurrection islamiste



Israël craint que ces trois groupes puissent susciter une insurrection islamiste qui prendrait son essor depuis le Sinaï pour se répandre à travers toute l’Égypte. Des combattants ont été repérés aux abords d’Ismaïlia, à l’ouest du Canal de Suez. D’ailleurs ils seraient responsables de l’attentat à la voiture piégé en octobre à proximité du bâtiment des services de renseignements militaires.

Les Égyptiens prennent au sérieux le danger de ces réseaux terroristes et c’est pourquoi ils ont procédé à l’arrestation de trois chefs influents : Adel Habbara, affilé à Al-Qaeda, Abou-Fayçal, le fondateur du tribunal de la charia à Al-Arich, et Abdelfattah Salem, secrétaire du mouvement «Takfir wal Hijra».

Les services de renseignements israéliens estiment que 22 organisations terroristes opèrent au Sinaï avec 15.000 membres. Certains de ces groupes forment des cellules d’une dizaine de personnes, inconnues de la police égyptienne mais déterminées à mourir pour la cause. Mais devant la pression de l’armée, ces groupes terroristes se seraient installés dans des fermes sur la route du Caire-Ismaïlia qu’ils transforment en dépôt d’armes et en base de repli depuis le Sinaï. 

Mohamed Dahlan

L’Égypte est à la recherche de toutes les solutions pour endiguer le mal du Sinaï. L’ancien homme fort de Gaza, Mohamed Dahlan, vient d’être invité au Caire pour consultations.  Les responsables du Fatah veulent profiter de la situation économique critique à Gaza pour tenter de renverser le régime islamiste. Nombreux sont ceux qui, avec Dahlan, proposent d’organiser, avec le soutien égyptien, une brigade palestinienne à El-Arish pour marcher sur la bande de Gaza.

Par ailleurs, après sa visite au Caire, le président Mahmoud Abbas a été convaincu par les services égyptiens de renseignements, chargés du dialogue inter palestinien,  qu’il n’avait aucun intérêt à une réconciliation avec le Hamas. Effectivement le nouveau régime égyptien a pratiquement rompu avec le Hamas, à la fois sur le plan politique et sur le plan économique.  Al-Sissi maintient le blocage des tunnels qui coûte tous les mois 230 millions de dollars à la bande de Gaza alors que son taux de chômage frôle les 43%.  



Paradoxe israélien




La position d’Israël semble paradoxale vis-à-vis des islamistes. Face au blocus strict égyptien, il estime qu’il n’a aucun intérêt à asphyxier une population qui risque alors de virer vers l’extrémisme. Alors il calme le jeu et permet l’approvisionnement via le terminal de  Kerem Shalom. Il a trouvé ce moyen pour amadouer le Hamas, contraint de faire la police auprès des organisations terroristes pour empêcher les tirs de missiles sur le sud. Ainsi Israël y trouve son compte dans un calme, même précaire.  
Général Sami Turgeman

D’ailleurs le général israélien commandant la région sud, Sami Turgeman, abonde publiquement dans ce sens : «Ce que nous voulons, c'est le calme et la sécurité dans la bande de Gaza. Le Hamas, actuellement au pouvoir souverain sur le territoire, a les moyens et le savoir-faire. Je ne vois pas d'alternative au contrôle exercé par le Hamas.» Israël n’a donc aucun intérêt  à favoriser l’effondrement du Hamas et il ouvre ses frontières sachant que le  Fatah n’est pas encore en position de prendre la relève face à des djihadistes déterminés qui, en plus, contestent la mainmise de l’Égypte sur le Sinaï. Il veut se prémunir contre un embrasement général de la région avec tous les risques inhérents à l’existence des groupuscules terroristes. 
Tank égyptien au Sinaï

L’Égypte favorise de son côté ce qui peut s’assimiler à une collaboration masquée entre Israël et  les islamistes de Gaza car le calme régnant dans la bande  lui laissera les mains libres pour éradiquer le danger du Sinaï. C’est pourquoi Israël, contrairement aux accords de Camp David, a accepté l’entrée d’avions et d’hélicoptères de combat au Sinaï pour consolider l’armée régulière égyptienne. Il lui transmet toutes les informations sécuritaires et satellitaires qu’il détient.  La progression des terroristes vers la région du canal de Suez met en danger la sécurité de l’Égypte et par conséquence, celle d’Israël.


3 commentaires:

guy sitbon a dit…

Outre les infos nouvelles sur les insurgés du Sinaï, cet article m'apprend l'existence du général Sami Torjman. Wiki ajoute que le général est né à Marrakech en 1964. Ses nom et prénom sont parfaitement arabo-musulmans. Torjman (ou Turgeman) signifie en arabe interprète. Le patronyme est répandu chez nous parmi les juifs aussi bien que les musulmans. Turgeman est-il le Maghrébin le plus élevé dans l'ordre militaire israélien? J'ai repéré un Irakien, un Iranien au rang de chef d'Etat Major, mais pas de nord-africains. Inutile d'ajouter que la prouesse de cette carrière nous va droit au coeur. Elle atteste qu'elle est bien malveillante la calomnie selon laquelle nous serions tous rien que des sauvages et des crétins.

Jacques BENILLOUCHE a dit…

Les nord-africains peuvent se prévaloir de nombreuses réussites dans l’armée et dans le monde des affaires. C’est à l’armée que les discriminations se sont faites le moins sentir car seule comptait la compétence des armes.

Ils commencent à présent à émerger alors qu’ils étaient discrets jusqu’alors. Ainsi, un tunisien, aujourd’hui à la retraite, est arrivé au poste de n° 2 du Mossad. Son nom est interdit à la publication mais la plupart le connaissent car son père avait la plus grande chocolaterie de Tunisie.

Je connais par ailleurs au moins deux généraux nord-africains.

Certains ont changé leur nom pour le « désarabiser » ou pour éviter d’être l’objet de discrimination car il faut l’avouer qu’elle existait en Israël.
Il existe donc des nord-africains "cachés".

D’ailleurs une petite anecdote qui date de quelques semaines. Je patientais dans les couloirs de la télé avant l’enregistrement d’une émission avec Dany Ayalon, ancien ambassadeur aux États-Unis, ancien vice-ministre des affaires étrangères qui s’était distingué par une réception controversée de l’ambassadeur de Turquie.

Je cherchais un mot en hébreu et j’ai demandé à mon entourage la traduction. C’est lui qui me l’a donnée. Étonné de ses connaissances en français, il m’a avoué qu’il était né à Oran de parents qui ont immigré en 1962 et qui s’appelaient Sellam. Lui, avait préféré changer de nom pour ne pas nuire à la promotion de sa carrière. D'ailleurs Wiki ne mentionne pas ce détail.

Krief a dit…

Je trouve qu'il faut cesser de parler des Nord africains ou autres.Quand un israélien immigré en Israël,pour moi,il veut accompagner et partager le destin de ce peuple.Peu importe son origine.Que cet homme ou cette femme soit originaire d'Afrique du Nord,ça peut faire plaisir aux personnes originaires du Maghreb,mais surtout la carrière et la vie de cette homme dépend de son courage et sa persévérance à vouloir s'intégrer dans ce pays.