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vendredi 30 novembre 2012

LES ÉTATS-UNIS À L’ORIGINE DU PROGRAMME NUCLÉAIRE IRANIEN


LES ÉTATS-UNIS À L’ORIGINE DU PROGRAMME NUCLÉAIRE IRANIEN  

Par Jacques BENILLOUCHE
copyright© Temps et Contretemps

            Des services de renseignements occidentaux révèlent que l’Iran serait sur le point de planifier une bombe nucléaire d’une puissance supérieure à celle de Hiroshima. La nouvelle n’étonne pas en Israël car le nucléaire iranien a pris de l’ampleur depuis les années 2000 à la suite d’une maladresse de la CIA. Dès 1953 le programme américain «Atome pour la paix» avait pour objectif d’exporter les techniques nucléaires vers les alliés.


           L’Iran avait fait l’acquisition, en 1959, d’un réacteur nucléaire de recherche, de fabrication américaine. Washington avait promis par ailleurs au Shah d’Iran, en 1970, un programme nucléaire avec la collaboration de sociétés israéliennes, françaises, allemandes et américaines. Les mollahs ont longtemps fait croire qu’ils avaient abandonné ce projet, jamais stoppé, car ils voulaient contrer les armes chimiques que Saddam Hussein comptait utiliser durant la guerre Irak-Iran de 1980 à 1988. 

Gaffe de la CIA

            La CIA avait fait une gaffe qui a eu des conséquences que l’occident paie encore aujourd’hui. La centrale avait fait parvenir involontairement des informations nucléaires à l’Iran. En effet une erreur de transmission de messages avait entrainé, en 2000, la découverte et le démantèlement d’une cellule américaine d’espionnage en Iran. Un fonctionnaire américain zélé, basé au quartier général de la CIA, avait adressé des données confidentielles à un correspondant iranien à Téhéran qui était en fait un agent double, manipulé par les services iraniens. Les correspondants du réseau d’espionnage, démasqués à Téhéran, furent tous arrêtés, certains éliminés, entrainant du même coup la rupture de la seule source d’informations sur le programme nucléaire iranien et son état d’avancement.
Pour essayer de compenser l’échec de ses services, la CIA avait cherché à retarder le programme nucléaire iranien par une opération clandestine américaine, l’opération Merlin, autorisée sous la présidence de Bill Clinton dans le cadre d’une action d’intoxication. Il s’agissait de transmettre à l'Iran des plans sabotés d'une bombe nucléaire pour orienter les savants iraniens vers une impasse technique. Le but étant bien sûr de forcer les iraniens à réviser leur processus de fabrication nucléaire avec l’espoir de laisser le temps à la CIA de reconstituer son réseau d’espionnage.
Les services secrets américains avaient décidé d’utiliser les compétences d’un savant nucléaire russe qui avait fait défection à l’ouest. A des fins d’intoxication, ils l’avaient chargé de remettre aux iraniens un plan de bombe atomique, préalablement retouché par les scientifiques de l’armée américaine pour la rendre inopérante. Ils estimaient qu’un ingénieur  atomiste de niveau moyen aurait des difficultés à détecter les erreurs volontairement introduites dans le plan. 

Intoxication ratée 
Plan de bombe atomique

Le savant russe devait se faire passer pour un scientifique attiré par l’appât du gain, prêt à brader le système de détonation de l’arme nucléaire. Mais il n’avait pas été mis dans le secret de l’opération d’intoxication dans laquelle il était impliqué. Il détecta bien sûr les erreurs qui truffaient des plans mal falsifiés alors qu’il était envoyé en Autriche pour l’échange avec les iraniens. En fait l’opération aurait pu réussir si le choix d’un transfuge russe compétent n’avait pas fait échouer l’opération.
Le savant russe paniqua à l’idée de se trouver en présence de correspondants iraniens capables de découvrir la supercherie. Il craignait que leurs services impitoyables ne lui fassent payer cette manipulation dans une capitale où il se sentait isolé et mal protégé et où les russes pouvaient le retrouver. N’étant pas au courant de la finalité de sa mission, il se demanda s’il n’était pas en fait une «chèvre» envoyée par les occidentaux pour prouver l’intention iranienne d’acquérir l’arme nucléaire militaire. Il décida de ne pas se rendre au rendez-vous avec ses correspondants à Vienne mais il prit l’initiative de transmettre les plans de la bombe par courrier, accompagné d’une note personnelle précisant l’existence d’erreurs. Il proposa même ses services pour les corriger dans le but de se racheter aux yeux des russes et de se protéger vis-à-vis des iraniens.
La CIA avait mésestimé ses adversaires en misant sur l’incompétence des ingénieurs atomistes iraniens sans se douter que la plupart d’entre eux avaient été formés à l’époque du Shah, dans les universités américaines et en particulier au MIT (Massachussetts Institute of Technology). Les américains ne tirèrent aucun bénéfice de cette manipulation mais ce ne fut pas le cas de l’Iran. En effet, les iraniens réussirent à exploiter des plans falsifiés en extrayant la partie des techniques exactes. Ils n’eurent aucun mal à identifier les erreurs grossières insérées par la CIA en recoupant les données avec les plans partiels qu’ils avaient acquis  par ailleurs auprès du père de la bombe pakistanaise, Abdul Qadir Khan. Les iraniens avaient en fait bénéficié des données fournies par la CIA pour préparer leur bombe nucléaire à Neyshapour. 

Un test dès 2004 

Iran: traces d'essais nucléaires détectées depuis l'espace (AIEA)

Le 18 Février 2004 à 4 heures du matin, un train de marchandises avait explosé près de Neyshapour, faisant des centaines de morts. Un film tourné par l’opposition iranienne avait été diffusé par la télévision française. Les autorités avaient parlé d’une réaction chimique due à la proximité du coton et du goudron comme étant à l’origine de l’explosion. En fait il ne s’agissait pas d’une explosion suivie immédiatement d’un incendie mais, d’un incendie suivi d’une explosion. Cette explosion a mis en lumière que Neyshapour abritait une usine souterraine d’enrichissement nucléaire fabriquée par les Russes. Le film montrait des cadavres déchiquetés et des corps dénudés avec les vêtements brûlés, dans un cratère de plus de 60m de diamètre. Les visages des morts étaient méconnaissables en raison de la forte chaleur qui avait cuit les corps. Les services de renseignements avaient établi que le train transportait des déchets nucléaires vers la Russie et que l’incendie aurait déclenché une explosion de cette matière nucléaire.
La ville de Neyshapour refait parler d’elle à nouveau car Ahmadinejad y a lancé la construction d’une usine secrète capable de recevoir 155.000 centrifugeuses pour produire de l’uranium suffisant pour fabriquer trois à cinq bombes par an. Ce projet se réalise tandis que  l’usine de Natanz joue le rôle de leurre vis-à-vis des occidentaux. Cette nouvelle usine, à 600 kms au nord-est de Téhéran, construite à 150 mètres de profondeur et recouverte par une ferme, est surveillée par un détachement d’élite des Gardiens de la Révolution.
Des dizaines d’ingénieurs y travaillent sous le contrôle de conseillers étrangers. En particulier les russes qui ont établi les plans de l’usine en 2003 et lancé la construction en 2004. Les centrifugeuses ont été transportées depuis la Biélorussie et l’Ukraine tandis que 46 experts biélorusses et 23 ingénieurs russes ont pour mission de rendre les centrifugeuses opérationnelles. Avec les 155.000 centrifugeuses de la nouvelle usine de Neyshapour, les mollahs seront en mesure de produire de 30 à 50 bombes nucléaires par an, voire encore plus s'ils possèdent d'autres usines de même nature en Iran.
Les services israéliens prennent au sérieux ces informations qui modifient la donne du programme nucléaire iranien. D’ailleurs des services de renseignements ont diffusé par l’Associated Press un diagramme qui démontre que les simulations exécutées sur ordinateur concernent une arme nucléaire d’une puissance supérieure à trois fois la bombe d’Hiroshima dont les plans sont inspirés des projets américains. Le risque du programme nucléaire iranien est relancé tandis que les israéliens sont à présent persuadés que les tirs de missiles de Gaza n’avaient pour but que de détourner l’attention des occidentaux sur la Syrie certes, mais surtout sur l’état d’avancement du nucléaire militaire en Iran. La neutralisation de l’Iran redevient d’actualité.   

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