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mardi 7 août 2012

GAZA : UN CASUS BELLI ENTRE ISRAËL ET L’IRAN


GAZA : UN CASUS BELLI ENTRE ISRAËL ET L’IRAN

Par Jacques BENILLOUCHE
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Le chef d'Etat-Major observe les dégâts
       Le grave incident qui a eu lieu au passage de Kérem Shalom risque de dégénérer en tirs de roquettes avec représailles à la clef dans un nouveau cycle de violence. Les israéliens sont obligés de prendre la situation au sérieux et, comme d’habitude, ils décideront de frapper fort, au sommet, pour enrayer le cycle infernal.


Discrétion du Hamas

Certes les terroristes, qui ont décidé de reprendre l’offensive, ne semblent pas faire partie du Hamas mais appartiennent au Djihad islamique soutenu par l’Iran. Téhéran confirme ainsi sa volonté de réchauffer la frontière de Gaza pour lancer un message à l’opinion internationale. N’acceptant pas les sanctions imposées par l’Union Européenne et l’ingérence occidentale en Syrie, l’Iran veut montrer sa capacité de nuisance, par alliés interposés.
L’armée israélienne n’a pas été surprise par cette flambée de violence puisqu’elle avait lancé une "alerte rouge" le 4 août. Le gouvernement avait été informé que de nombreuses armes, en particulier des lanceurs et des fusées Grad montés sur véhicules, avaient été convoyés en novembre 2011 en provenance de Libye jusqu’aux tunnels de contrebande de Gaza. Ces armes avaient été déjà vues sur le champ de bataille libyen lors des combats contre les troupes de Kadhafi. Cinquante mercenaires libyens étaient venus renforcer les troupes du Djihad à Gaza avec l’objectif de les former au maniement de ces nouvelles armes.

Djihad islamique
Salafistes à Gaza

           Les dirigeants militaires israéliens s’attendaient à une extension des attaques qui avaient pour but de détourner l’attention de la Syrie. Ils sont persuadés du rôle sournois de l’Iran qui agit via le Djihad islamique, son bras armé à Gaza. Ils sont convaincus que le Hamas a été volontairement laissé à l’écart de ces décisions qui viennent directement du haut commandement iranien. 
      D'ailleurs, le Hamas tente de mettre fin à cette nouvelle spirale de violence à Gaza dans laquelle il a tout à perdre. En effet il craint que ces troubles n'entrainent de nouvelles destructions alors qu’il a lancé un programme de restructuration de la ville. D’ailleurs, le Djihad islamique critique le manque de coopération du Hamas. Dans une interview accordée à une chaîne de télévision palestinienne, un haut responsable du Djihad islamique, Ahmad Almoudlal, avait déploré que «son organisme et les Comités de résistance  sont les seuls à combattre contre l’ennemi sioniste» et a critiqué le Hamas pour son «immobilisme» dans le présent conflit.
Les tunnels à Gaza
       Les services de renseignements israéliens avaient mis plusieurs fois en garde les autorités politiques sur le danger que faisait courir le Djihad islamique avec les 10.000 missiles qu’il avait reçus à travers la contrebande des tunnels. La reprise du terrorisme et des tirs de missiles ont aussi pour but de s’opposer à toute velléité du président Mahmoud Abbas de reprendre langue avec les occidentaux. L’Iran ne serait pas opposé à semer les graines d’une déflagration militaire dans la région pour soulager la pression occidentale qui commence à porter ses effets négatifs sur le régime iranien ainsi que celle qui s’exerce contre son allié syrien.

Tsahal prêt à l’action

            La solution du problème est entre les mains du cabinet restreint qui doit statuer sur les mesures à prendre. Tous les moyens ont été envisagés pour éradiquer l’action des cellules d’Al-Qaeda et des groupes islamiques radicaux dans le Sinaï qui prêtent main forte aux militants de Gaza.
Haniyeh et Morsi
  
Mais il ne semble pas qu’une action d’envergure, terrestre, soit d’actualité alors que Tsahal s’y prépare depuis longtemps. Il ne s’agit pas de brusquer le président Morsi qui fait preuve d’une certaine retenue et qui ne remet pas en cause le traité de paix de 1979. Alors que son arrivée au pouvoir s’était accompagnée d’une grande espérance à Gaza qui voyait déjà la frontière avec l’Égypte s’ouvrir, accompagnée du développement des échanges commerciaux, en particulier de carburants pour rendre la bande de Gaza totalement indépendante des fournitures israéliennes.
Poste-frontière entre Gaza et l'Egypte

Mais la déception a été grande et elle a été l’occasion  donnée aux groupes terroristes pour s’attaquer à l’armée et à la police égyptienne, symboles du nouveau régime. Mais il est probable que les 15 morts égyptiens resteront un contentieux difficile à solder.

Hésitation du gouvernement
       
Le gouvernement israélien donne l’impression d'hésiter sur la stratégie à utiliser. Il est conscient qu’une action de grande envergure pourrait entrainer une guerre régionale et surtout la rupture avec l’Égypte. Il paie donc le prix de sa passivité devant le réarmement de Gaza où sont stockés des milliers d’armes sophistiquées à la frontière d’Israël. Il n’ignore pas non plus le risque planifié du réchauffement de la frontière nord avec le Hezbollah, qui n’attend que les ordres de Téhéran pour lancer ses troupes ultra équipées contre Tsahal. 
Combattants du Hezbollah
Mais Israël et l’Égypte divergent sur les responsables du massacre des soldats. Les égyptiens accusent le Hamas pour se disculper de leur laxisme à contrôler le Sinaï. D’ailleurs les dirigeants du Hamas ont tenu à être disculpés puisqu’ils ont immédiatement condamné l’attaque et ont, dès l’annonce des combats, bloqué les tunnels de contrebande pour empêcher les salafistes de quitter le Sinaï pour se réfugier à Gaza. 
Le chef du bureau politique du Hamas, Khaled Mechaal, a téléphoné au président égyptien Mohamed Morsi pour faire part de ses condoléances aux égyptiens et aux familles des 16 gardes-frontières tués dans l'attaque du Sinaï. Il a vivement condamné ce ''crime'' et souligné que le Hamas et les palestiniens se préoccupent de la stabilité de l'Egypte et s'opposent à toute atteinte à sa sécurité. Parallèlement, le premier ministre palestinien Salam Fayyad a envoyé une lettre de condoléances à son homologue égyptien Hisham Kandil, dans laquelle il déplore la mort des 16 policiers égyptiens.  
Israël penche plutôt pour les salafistes du Djihad islamique qui sont les maitres du Sinaï avec leur arsenal militaire et qui misent sur une déflagration locale pour faire avancer leurs idées. Le chaos est leur credo.  
Une autre analyse penche sur la volonté de l’Iran d’impliquer les cellules d’Al-Qaeda dans l’opération dans une sorte de vengeance contre la présence de cette organisation parmi les rebelles qui combattent le régime d’Assad. L'Iran cherche à en faire la cible des autorités militaires égyptiennes.
Combattants Al-Qaeda en Syrie

Controverses

Selon l’Égypte, les dix hommes du commando, lourdement armés, ont traversé les tunnels de contrebande depuis Gaza et se sont déguisés en bédouins du Sinaï. Mais la thèse israélienne est opposée. 
Tsahal a des preuves que les hommes armés faisaient partie d’un groupe de salafistes bédouins liés à Al-Qaeda et basés au Sinaï, et que le Hamas ne serait pas impliqué. Les services de sécurité avaient des informations sur l’attaque qui se préparait à Kérem Shalom dont le but était de capturer des soldats israéliens. L’aviation était sur le pied de guerre tandis qu’à terre, l’armée avait renforcé ses effectifs pour mettre en échec le projet. C’est pourquoi les deux véhicules blindés égyptiens, qui ont cherché à entrer en Israël, ont été immédiatement neutralisés et leurs occupants éliminés.  
La mise en garde des israéliens contre les ambitions guerrières d’Al-Qaeda au Sinaï ne date pas d’hier. Tsahal s’attendait à une opération audacieuse de cette ampleur puisque les djihadistes s’en sont pris à une base militaire importante et à des soldats bien équipés. L'enquête sur l'attaque commise révèle que le camion qui transportait une demi-tonne d'explosifs devait exploser dans une des localités frontalières israéliennes. Israël savait que des officiers iraniens des brigades Al-Qods basés au Liban avaient préparé minutieusement cette opération de type militaire pour attaquer des cibles égyptiennes et israéliennes. D’ailleurs les iraniens, par les propos du président du parlement, Ali Larijani, avaient menacé d’étendre le feu qui a été allumé en Syrie dans toute la région et en Israël en particulier.
Ali Larijani
Parce que la situation à Gaza et à la frontière égyptienne est télécommandée à distance par l’Iran, nul n’est capable aujourd’hui de prédire la tournure que prendra la situation, si elle devait se dramatiser. Israël ne tient pas à succomber à la provocation qui semble manifeste aujourd’hui mais sa prudence s'apparente à de la faiblesse.


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