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vendredi 23 décembre 2022

Ben Gvir, le héraut du néo-sionisme

 

BEN GVIR, LE HÉRAUT DU NÉO-SIONISME

Par Jacques BENILLOUCHE

copyright © Temps et Contretemps

           


       La victoire des partis israéliens d’extrême-droite a changé la donne en déplaçant le sionisme historique vers un néo-sionisme idéologique et expansionniste. Itamar Ben Gvir a hérité de l’idéologie kahaniste, inspirée du rabbin Meir Kahane dont le parti avait été interdit en Israël en 1985. Alors que l’extrême-droite ne dispose que de 14 sièges à la Knesset, elle mobilise toute l’attention des médias locaux et internationaux. Mais, l’erreur fondamentale serait de comparer cette extrême-droite sioniste à celle raciste, fasciste et antisémite des Occidentaux.


Père fondateur du sionisme d'Etat
            

       En effet le sionisme s’appuie sur trois fondements : l’existence du peuple juif, la nécessité de donner à la nation juive un État viable pour favoriser la fin de l’antisémitisme dans les pays de la Diaspora et enfin le droit de créer un foyer juif dans l’ancienne Palestine mandataire. L’État d’Israël, créé en 1948, s’est doté rapidement, contrairement aux Palestiniens, de structures et d’institutions stables et viables ce qui a permis de réaliser l'utopie rêvée un demi-siècle auparavant. Les guerres de Suez de 1956, des Six-Jours de 1967 et de Kippour de 1973, qui ont prouvé la supériorité militaire et économique israélienne sur ses voisins, ont légitimé définitivement la place d’Israël au Proche-Orient.

            Mais la Guerre de Six-jours a généré le néo-sionisme, le mouvement ultranationaliste et religieux. Au départ, il était principalement représenté dans les nouvelles implantations de Cisjordanie. Il avait revendiqué l’annexion de la Cisjordanie à Israël et l’expulsion des habitants arabes. Le rabbin Meir Kahane avait créé le parti Kach pour représenter l’expression politique du néo-sionisme qui a émergé dans les années 1970 avec comme premiers militants les habitants des implantations et quelques membres du camp national.

Rabbin Meir Kahane


            Les néo-sionistes ont condamné le sionisme laïc représenté à l’origine par le travailliste Ben Gourion parce qu’il n’était pas assez nationaliste et qu’il avait trop misé sur la collaboration avec les Arabes. Or, ils voient les Arabes israéliens comme une cinquième colonne et surtout une menace démographique pour le pays. C’est pourquoi, leur seule solution viable pour eux restait le «transfert»  de la minorité arabe hors du pays. Pour les néo-sionistes : «la faiblesse du nationalisme israélien provient du rejet de la culture et des racines juives. Seule une nouvelle coalition religieuse-nationale et orthodoxe pourrait guérir le sionisme de sa corruption morale». Ils considèrent la Terre d'Israël comme un foyer national et une promesse biblique pour le peuple juif.

Itamar Ben-Gvir, Michael Ben-Ari, Benzi Gopstein et Baruch Marzel 


            Les dernières élections ont réveillé le néo-sionisme inspiré aujourd’hui par Itamar ben Gvir et ont accentué les dimensions messianiques alors que cette idéologie s’était effritée au fil du temps. A fortiori lorsque les «nouveaux historiens» israéliens ont déconstruit, un à un, tous les mythes sur lesquels Israël s’est bâti.

            La société israélienne s’est alors trouvée confrontée à trois postures. La gauche non sioniste plaidait pour un dépassement du sionisme car Israël n’est plus menacé dans ses fondations et il devenait normal de faire émerger une société démocratique et égalitaire tournée vers ses voisin arabes. La seconde posture développée par la gauche sioniste traditionnelle consiste à se séparer des Palestiniens et à trouver un accord sur les territoires conquis en 1967. C’était l’objectif des Accords d’Oslo qui ont fondamentalement échoué, en grande partie. La troisième posture est l’héritage des sionistes révisionnistes constituée par l’aile droite belliqueuse qui refuse toute compromission avec la population arabe. Pour eux, le sionisme n’est pas dépassé et au contraire, il faut le construire sous réserve que le pays soit exclusivement juif. Ses frontières ne doivent s’inspirer que des textes de la Torah avec pour postulat la souveraineté juive sur toute la Cisjordanie. La présence d’Israéliens doit s’y enraciner et se normaliser.

La création d’un État palestinien étant exclue, le problème de la présence arabe devient un dilemme, une question que les néo-sionistes repoussent d’un revers de main sans donner de solution pérenne. La loi sur l’État-nation, votée sous Netanyahou, relève d’ailleurs de la nécessité de régler l’évolution démographique. Ben Gvir utilise le même langage que le Likoud mais sans y mettre les formes puisqu'il n'a aucun complexe à affirmer ouvertement ses thèses. Lui et Bezalel Smotrich, qui s’appuyaient sur les habitants des implantations pour faire aboutir leurs choix politiques, ont été rejoints par de nombreux citadins sensibles aux thèses de l'extrême-droite. Ils ont réussi à imposer que la droite religieuse soit aux commandes. La Gauche israélienne n’a pas suffisamment pu ou su réagir pour s’opposer aux extrémistes. Elle a signé son arrêt de mort et permis à l’idéologie néo-sioniste de renaitre de ses cendres des années 1970. 

 

 

6 commentaires:

frenkel david a dit…

"C’était l’objectif des Accords d’Oslo qui ont fondamentalement échoué, en grande partie", écrivez-vous Monsieur Benillouche. Je ne suis pas d'accord : aucun juif ne réside dans les territoires sous l'Autorité palestinienne ! Ces accords ont donc été en grande partie bénéfiques pour certains. Par ailleurs, rappelons-nous que la gauche israélienne qui avait proposé par deux fois à l'A.P. de créer un État palestinien sur l’entière Judée Samarie avec Jérusalem-Est comme capitale,s'est vue rejeter ses feuilles de route qu'elle avait proposées pour régler définitivement le conflit israélo-arabo-palestinien. Même Sharon le droitiste qui avait mis fin aux colonies juives de Gaza, s'est vu être gratifier d'un groupe terroriste y régnant, et dont le but est d'annihiler Israël. Alors, voyez-vous, cher Monsieur, à force de ne pas manquer une occasion de manquer des occasions, la partie arabo-palestinienne doit assumer son intransigeance en acceptant le néo-sionisme. Et comme l'a déclaré Netanyahu dans une longue interview vidéo avec Al Arabiya English , basée à Dubaï1):« La seule paix qui tiendra est celle que nous pouvons défendre. Et celle que nous pouvons défendre est celle dans laquelle les Palestiniens ont tous les pouvoirs pour se gouverner eux-mêmes, mais aucun des pouvoirs pour menacer notre vie, ce qui signifie que la sécurité, quels que soient les arrangements politiques que nous aurons de manière réaliste, ils devront rester entre les mains d’Israël » 1) https://www.jforum.fr/la-paix-israelo-saoudienne-peut-resoudre-le-conflit-palestinien.html

Georges Kabi a dit…

Comme d'habitude, ce sont les Arabes palestiniens qui ont determine les resutats des dernieres elections legislavives israeliennes. En effet une vague d'attentats les uns plus meurtr
iers que les autres ont pousse pas mal de citoyens israeliens, pris de panique, a voter pour cet energumene neo-naze. Celui ci proposait une serie de mesures "fortes", mais deja il cherche a changer la nature du regime politique israelien. Son reve: etablir une police politique qui ferait la chasse aux "gauchistes" et a tous ses opoposants. Et les Arabes, que veut-il en faire? Rien, car il ne peut rien faire. D'ailleurs nos Arabes se trouvent tres bien en Israel et ne quittent pas le pays comme le font leurs coreligionnaires nord-africains et syriens.
En fin de compte, Ben Gvir pourra etendre son domaine prive et continuer a peupler la Cisjordanie tout en depeuplant la Galilee et le Neguev.
La seule solution actuelle du probleme est de ne rien faire, si ce n'est d'ameliorer les conditions de vie des agglomerations arabes. Le fameux "transfert" est une utopie. D'ailleurs, ce fut un Premier ministre de la gauche qui tenta de le faire et devint la risee d'Israel et du monde entier, tout en poussant a la creation du Hamas.

Sylvain.C.T a dit…

Je ne vois pas en quoi cette extrême droite est différente de l'extrême droite de tous pays raciste, fasciste et selon les cas antisémite, antimusulman ou antichrétienne

Jacques BENILLOUCHE a dit…

@ Sylvain
Les partis d’extrême-droite occidentaux défendent une doctrine raciste et antisémite. Ils ont une position plus proche de la gauche, voire de la gauche révolutionnaire ou radicale, que de la droite libérale ou de la droite conservatrice. Ils prônent souvent le terrorisme comme moyen d’expression.

Yaakov NEEMAN a dit…

Israël est peut-être en train d'amorcer un retour à ses fondamentaux bibliques. Depuis toujours, le peuple a sans cesse été tiraillé entre ceux qui voulaient suivre Moché, et ceux qui dénonçaient son pouvoir et sa vision. Rien de nouveau donc sous le soleil.

Anonyme a dit…

Il me semble que ce monsieur a jadis scandé (tout comme beaucoup de ses partisans) "mort aux arabes".
Ne me faite pas croire qu'aujourd'hui cet homme a la même considération pour les arabes que pour les juifs.
Se mouvement est raciste, il n'est pas sérieux de vouloir se le cacher.