ISRAËL SONGE ENFIN À PEUPLER LE NÉGUEV
Par Jacques BENILLOUCHE
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Vignes sur des terres désolées du Néguev |
Au cours de
la dernière décennie, le Néguev est devenu une sorte de Silicon Valley
orientale, la vitrine technologique d’un État qui veut s’affirmer dans
l’agriculture de pointe, la robotique et la cybersécurité. C’est là qu’un procédé
de micro-irrigation a été découvert et qui permet d’irriguer aujourd’hui 80%
des terres du pays. L’État d’Israël a voulu sédentariser les Bédouins nomades, afin
de récupérer les terres les moins arides. Mais depuis l’arrivée de Benjamin
Netanyahou au pouvoir, en 2009, la politique d’Israël à l’égard des Bédouins,
s’était durcie. Les Autorités ont sommé les Bédouins de s’installer dans l’un
des sept villages reconnus, construits à leur intention dans le Néguev. Environ
165.000 Bédouins ont ainsi déjà été relocalisés. Ceux qui ont accepté que leur
maison soit rasée ont obtenu une compensation financière, les autres vivent
avec la menace permanente de voir leurs habitations, au sein de véritables bidonvilles,
détruites.
Rahat ville arabe du Néguev |
Mais les Juifs ne s’y installent pas, peut-être en
raison du climat, peut-être en raison d’un manque de transports rapides,
peut-être en raison du voisinage. On aurait pu profiter du désengagement de
Gaza en 2005 pour y réinstaller les populations juives expulsées en créant une
nouvelle ville pour absorber les 21 quartiers juifs de la bande (Atzmona,
Bedolah, Dugit, Elei Sinai, Gad Or, Gadid, Ganei Tal, Katif, Kerem Atzmona,
Kfar Darom, Kfar Yam, Morag, Netzarim, Netzer Hazani, Neveh Dekalim, Nisanit,
Pe'at Sade, Rafa Yam, Shirat Hayam, Slav, Tel Katifa). Bien sûr rien n’a été
fait pour les encourager à rester en Israël car ils devaient multiplier les
implantations en Cisjordanie. Certains réfractaires vivent encore dans des
caravanes à la limite de la frontière de Gaza.
Arabes dans le Néguev |
Le 28 décembre, Ayelet Shaked, ministre de
l’Intérieur et membre de Yamina, a planifié la création de quatre implantations
juives dans le Néguev, les premières sur un projet de 12, afin d’installer 3.000
familles. Une localité orthodoxe est même prévue. Pour rendre attractives ces
nouvelles zones, il a été planifié la mise en œuvre de projets d’infrastructure
et d’industrialisation comme l’électricité haute tension, le chemin de fer, et une
usine de phosphate. En contrepartie, le gouvernement a signé le 3 novembre 2021
un accord avec Mansour Abbas pour le développement de trois villages arabes, Rahma,
Abdah et Khashm Zana, habités par 7.000 bédouins, ainsi que la création d’une
nouvelle ville bédouine.
Ces projets, qui ont pour but d’amener à terme plus
d’un million de Juifs, s’accompagnent par le transfert d’usines militaires et
de centres de formation militaire. Tsahal a déjà évacué plusieurs bases
administratives du centre du pays, libérant ainsi de nombreux terrains pour des
logements civils. Cela implique la construction d’une autoroute Nord-Sud et
probablement d’une ligne de chemin de fer. Ces décisions ont été influencées par
l’ONG israélienne Regavim qui surveille et engage des poursuites judiciaires
contre toute construction, sans permis israélien, entreprise par des
Palestiniens ou des Bédouins en Israël et en Cisjordanie. Regavim travaille à «influencer
les régimes en Israël pour contrôler les terres du Néguev et empêcher les
étrangers de les contrôler». En fait pour cette association, il s’agit de
rendre la terre à l'État et réaliser le rêve de David Ben Gourion d'avoir 2
millions d’Israéliens travaillant dans le secteur agricole et 2 autres millions
dans le secteur industriel.
Yair Lapid, Mansour Abbas et des membres de leurs partis visitent le Néguev le 21 octobre 2021 |
Le gouvernement veut enfin rééquilibrer les
populations juives et arabes de Galilée et du Néguev, actuellement à majorité
arabe. Jusqu’alors, les gouvernements de Netanyahou avaient déversé à la Cisjordanie
des milliards de dollars au détriment de l’Israël historique dans lequel
certaines zones ont perdu leur identité juive.
Par ailleurs, ces régions à peupler ne sont pas contestées sur le plan
international et pourraient donc s’ouvrir à un développement international sans
risque de subir les foudres de BDS à l’instar de Ben et Jerry. Un grand
gisement d’emplois existe pour les Juifs et les Arabes et surtout pour les
nouveaux immigrants.
Mais cela ne se fait pas sans heurt au Néguev car
les Bédouins protestent contre le travail de boisement effectué près de la
ville Hura au Néguev par le Fonds national juif. Ils estiment qu’il s’agit de
terres utilisées par la population locale pour l'agriculture. Certes, du temps
où ils étaient nomades, les Bédouins avaient la possibilité d’utiliser tout le
Néguev pour leurs troupeaux. Mais leur sédentarisation leur impose actuellement
de réduire leur espace agricole et ils ont du mal à s’y faire.
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