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mardi 6 avril 2021

Impasse politique, Israël dans la m...

 


IMPASSE POLITIQUE, ISRAËL DANS LA M…


Par Jacques BENILLOUCHE

Copyright © Temps et Contretemps

La délégation du Likoud pour la consultation avec le président Rivlin

          A certains moments, il faut être vulgaire pour marquer la désapprobation face à une classe politique qui n’arrive pas à s’entendre pour résoudre le problème de la gouvernance. Il est impossible de comprendre l’inconséquence des partis qui laissent le pays sans budget et sans gouvernement stable. L’intérêt personnel transcende l’intérêt de l’État en pleine crise sanitaire, économique et sociale. Les dirigeants ont marqué, un peu dans l'urgence, leur préférence auprès du président de l’État sans donner une majorité claire. Netanyahou a obtenu 52 recommandations, Lapid 45 et Bennett 7, loin des 61 sièges exigés. Les deux partis arabes et plus étonnant encore Gideon Saar se sont abstenus.


Reuven Rivlin reçoit , Orna Barbivai, Meir Cohen et Karin Elharrar de Yesh Atid


Pour Bennett et Saar il s’agit soit d’un manque de courage évident car après avoir matraqué le premier ministre dans leur discours, ils ont choisi l’incertitude pour marquer en fait l’échec de leurs résultats, soit d’une posture calculée. Ils s’attendaient à dépasser les dix sièges, voire 15 comme au début de la campagne mais ils sont tombés dans un trou électoral qui les a laissés amers au point de punir les électeurs, et surtout le pays. Les résultats auraient pu les rendre plus pragmatiques en choisissant l’un ou l’autre des camps, mais ils ont préféré la solution honteuse du «moi ou le chaos».

            Réouven Rivlin a voulu faire les choses dans la transparence en recevant les délégations des partis face aux médias, volontairement pour montrer leur inconséquence mais il les a poussés à ne pas sortir de leur ligne prédéfinie. Dans le secret des alcôves, il aurait pu les convaincre d’agir pour le bien du pays, aurait pu arbitrer certains choix, aurait pu conseiller certaines vedettes déchues à se montrer plus nobles. Mais face à la presse, les politiques devaient se montrer inflexibles dans leurs convictions quitte à prolonger indéfiniment la crise politique. Trop de transparence tue la négociation politique. Comme dans tout choix, il fallait imposer aux partis deux options mais les leaders pouvaient difficilement se déjuger face aux caméras.

Réouven Rivlin consulte le Parti sioniste religieux 

            Ayelet Shaked est arrivée en retard au rendez-vous présidentiel. En communication avec son chef de parti Bennett qui négociait encore avec Lapid, elle a passé plus de temps dans sa voiture que dans le bureau du président, repoussant jusqu’à la dernière minute l’instant où elle devait faire part de son choix. Il en était de même du parti Nouvel espoir de Saar qui faisait le lien entre Lapid et Bennett et qui dans le doute des résultats des négociations secrètes a préféré choisir la neutralité.

            Dans une disposition optimiste, il semble que Bennett, Saar et Lapid aient préféré la stratégie de la solution du recours après un éventuel échec de Netanyahou à constituer en premier son gouvernement. Tel Zorro, ils arriveraient en sauveurs, proposant un gouvernement d’union pour résoudre une situation désespérée en faisant comprendre qu’il était temps qu’Israël sorte de la m… Il s’agit de mieux faire admettre à la population des décisions incongrues comme celle de désigner comme premier ministre un leader qui n’a obtenu que 7 sièges sur 120. Ou alors faire admettre la participation des partis arabes au gouvernement. La magouille politique est en marche.  

C’est soit cette solution bancale soit de nouvelles élections avec un milliard de dollars supplémentaires en frais de scrutin. L’opposition veut exploiter en fait le délai de 28 jours offert à Netanyahou pour peaufiner les négociations car le partage des portefeuilles est une autre quadrature du cercle sachant que Lapid exige un gouvernement resserré de 15 à 18 ministres. Par ailleurs le procès de Netanyahou, imposant trois jours par semaine de débats, viendrait à point nommé pour fragiliser le premier ministre.

            Sauf si le président Rivlin crée la surprise, l’opposition prend cependant le risque de donner au premier ministre l’occasion d’exceller dans ses combines électorales en débauchant quelques «traitres» comme il l’a fait en 2020. L’attrait d’un portefeuille ministériel rend les impétrants moins exigeants sur leurs principes. On sait que Bennett est un dirigeant fragile, conscient de ses faiblesses et de ses limites ; il pourrait sauter le pas si Netanyahou mettait le prix pour satisfaire son ambition démesurée mais non justifiée. 

        Et pour faciliter la prise de décision des dirigeants politiques, un sondage vient bien à propos pour menacer la droite car, en cas de 5ème tour, le Likoud ne recueillerait que 29 sièges contre 21 à Yaïr Lapid, un bon moyen pour préciser que le temps joue en faveur de l’opposition. Quatre semaines de plus dans l’incertitude, un délai minime face aux deux années de tergiversations politiques. Quatre semaines pour convaincre aussi Netanyahou qu’il devrait enfin passer la main en échange d’un pont d’or, la présidence de l’État. Mais il n’est pas dirigeant à accepter d’inaugurer les chrysanthèmes !

6 commentaires:

Llib Etag a dit…

Bonjour,

Dans une logique de continuité de ce qui a été prévu il y a un an, ou les électeurs avaient clairement marqués leur volonté de renouveau politique, M. Rivlin pourrait choisir M. Gantz afin de réaliser l'alternance que M. Netanyahu avait accepter.

Les partis arabes sont entre deux feus: si ils choisissent la droite, ils trahissent l'essence de leur mouvement politique, si ils choisissent la gauche alors ils renforcent la haine de certains "intégristes".
Je crois qu'ils attendent de savoir qui va "gagner" pour se positionner; je comprend leur attitude.

Concernant les partis à 6-7-8 sièges qui veulent être roi sans jamais avoir été prince, je dirais qu'ils font un zugzwang ... c'est immature car c'est se renfermer sur sois-même, c'est une attitude court-termiste. Et ils pensent pouvoir gérer l'avenir avec une telle mentalité; quel manque d'intelligence et de clairvoyance de leur part.

Ceci dit, je trouve cette élection très interessante car elle souligne aujourd'hui les problèmes de la structure politique israélienne mais demain pourrait montrer, du moins c'est c'est mon avis, en quoi elle est bonne.

Après la pluie, il y a le soleil.

Ibrahim a dit…

Naïvement, le président Revlin pourrait-il choisir Benny Gantz comme Premier Ministre, puisqu'après tout, il devait être celui qui assume cette fonction après Netanyahu ?

Llib Etag a dit…

Bonjour,

Naïvement, M. Rivlin fait des choix épineux. Et, naïvement, c'est son pouvoir que de s'occuper du fait que le gouvernement soit formé.

Je pourrais, mais ce serait sans doute naïf, vous rédiger une note argumentée expliquant pourquoi l'actuel premier ministre devrait être évincé le plus tôt possible. Mais naïvement, je ne le ferai pas.

Donc, naïvement, opportunément, ou simplement car M. Rivlin est le président et que c'est à lui, en dernier recours, de choisir un homme, choisir dans le sens de favoriser, alors oui, rien n'est impossible.

Le bicentenaire de Napoléon m'oblige à vous informer que "l'imaginaire gouverne le monde". Parfois ... naïvement :)

Cordialement,
Bill Gates.

Yaakov NEEMAN a dit…

En attendant, la Quatrième République a trouvé chez les Hébreux un nouveau terrain de jeu... En fait, il y a une raison anthropologique à cette absence de claire majorité. Accrochez-vous pour suivre la démonstration. Si l'on considère Israël comme un organisme, c'est-à-dire un corps social doté d'un cerveau, on remarquera que l'égalité arithmétique 60/60 renvoie à l'opposition des deux hémisphères. Dans la physiologie humaine, aucun des deux cerveaux n'a la prééminence sur l'autre : ils se complètent et travaillent en bonne harmonie, se partageant les fonctions logiques et celles qui relèvent de l'intuition. Avec cette lecture, on pourrait sortir de l'impasse politique actuelle en adoptant en Israël le concept de cohabitation, où la France a démontré qu'un Président de gauche et un Premier ministre de droite pouvaient piloter ensemble le corps social. Elémentaire, mon cher Watson !

Marianne ARNAUD a dit…

@Yaakov NEEMAN

Donner les moeurs politiques françaises en exemple, à la "start-up nation" par excellence, me semble tenir d'une audacieuse naïveté !

Bien à vous.

Llib Etag a dit…

@Marianne, je crois que c'était pour nous faire sourire :)

En revanche, l'idée d'avoir un président élu par le peuple soit directement comme en France soit par de grands électeurs comme aux Etats-unis d'Amérique répond à un équilibre que je trouve important: je ne serai dire dans quel livre ... c'était joliment expliqué ... le président représente le coeur, le court-terme, du peuple alors que les députés et sénateurs, eux, représentent la raison, le long-terme et de la relation politique entre ces deux sentiments émerge une forme de cohésion pour le moyen terme. Du moins, en théorie.

En France, la cohabitation entre Mitrand et Chirac ouvrit la boite de pandore: une division telle qu'inéluctablement nous vîmes la parcellisation de l'opinion publique puis, conséquence logique, celle des partis politiques pour arriver à une forme de dictature des minorités avec un président parlant de guerre mais n'ayant jamais empoigné ni une épée ni un fusil ni même un petit petard de calibre 22 ...

C'est triste; nous avions des rois, nous eûmes un empereur, puis, avec difficulté, nous trouvâmes un modèle faisant la synthèse entre royauté et république: la cinquième république, modèle que je crois toujours pertinent.

A ce sujet, il me semble que la fédération de Russie s'est fortement inspiré de ce modèle politique, en 1993, afin de reformer sa structure ... ce qui semble avoir porté ses fruits :)

Bref. Je suis curieux de voir l'avènement du nouveau gouvernement israélien ainsi que la route qu'il va prendre ou suivre.