SAN REMO : LA PREMIÈRE OCCASION MANQUÉE DES PALESTINIENS
Par
Jacques BENILLOUCHE
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Il est un fait indiscutable que
les Palestiniens ont raté de multiples occasions d’obtenir un État indépendant
au Proche-Orient ; la première occasion fut celle de San Remo, le 20 avril
1920. La conférence internationale, qui s’était tenue dans cette ville d'Italie,
avait pour but de déterminer les limites précises des territoires conquis par
les Alliés. En plus de la Grande-Bretagne, de la France, de l'Italie et du Japon, les
États-Unis n'avaient participé qu'en tant qu'observateurs car ils n'avaient pas ratifié le traité de Versailles.
Déclaration Balfour |
Cette conférence
faisait suite à une précédente réunion entre ces mêmes puissances alliées,
tenue à Londres en février 1920, où il avait été décidé de placer la Palestine
sous la domination britannique. À San Remo, les Alliés ont confirmé
l'engagement contenu dans la Déclaration Balfour concernant la création d'un
foyer national juif en Palestine.
La
délégation britannique à San Remo était dirigée par le Premier ministre David
Lloyd George et le ministre des affaires étrangères Lord Curzon qui avait
remplacé Lord Balfour qui était cependant présent à la conférence en tant que
consultant pour les questions de règlement final. Les Français ont exprimé de
nombreuses réserves quant à l'inclusion de la Déclaration Balfour dans le
traité de paix mais la pression britannique eut raison de leur refus.
Haïm Weizman |
Du
côté juif, Haïm Weizmann, Nahum Sokolov et Herbert Samuel avaient assisté à la
conférence en présentant à la délégation britannique un mémorandum sur le
règlement final qui a permis d'incorporer la Déclaration Balfour dans le mandat
britannique en Palestine. La Grande-Bretagne a été rendue responsable «de la
mise en vigueur de la déclaration faite le 8 novembre 1917 par le gouvernement
britannique et adoptée par les autres puissances alliées, en faveur de
l'établissement en Palestine d'un foyer national pour le peuple juif; étant
entendu que rien ne devrait être fait qui puisse porter atteinte aux droits
civils et religieux des communautés non juives existantes en Palestine, ou aux
droits et au statut politique dont jouissent les juifs dans tout autre pays».
La
gêne des puissances alliées était telle qu’il n'y a jamais eu d'événement plus
discret dans l'histoire du conflit arabo-israélien que cette Conférence de San
Remo. Convoquée pendant une semaine seulement, dans le cadre des conférences de
paix de l'après-Première Guerre mondiale sur le nouvel ordre international, la
conférence de San Remo a nommé la Grande-Bretagne comme mandataire pour la
Palestine. Ce mandat a ensuite été
ratifié le 24 juillet 1922 par le Conseil de la Société des Nations -
l'organisation mondiale de l'après-guerre et le prédécesseur de l'ONU.
L'importance
du mandat palestinien ne peut être surestimée. Bien que ne répondant pas à la
formule sioniste proposée selon laquelle «la Palestine devrait être
reconstituée en tant que foyer national du peuple juif», elle signifiait
une reconnaissance sans réserve par le représentant officiel de la volonté de
la communauté internationale des Juifs en tant que groupe national - plutôt que
une communauté purement religieuse - et la reconnaissance de «la connexion
historique du peuple juif avec la Palestine» comme «les motifs de la
reconstitution de leur foyer national dans le pays».
Carte conférence San Remo |
Pour
la première fois était discutée l’existence d’une formule sioniste mais cette
tragédie devait durer 100 ans sans avoir vu, à ce jour, le début d’une solution acceptable
par les Arabes. Cette date de 1920 devait préfigurer le début des occasions
ratées par la direction palestinienne et ses champions internationaux qui ont
préféré rester ancrés dans le rejet de l'attachement juif millénaire à la
Palestine, et de l'existence même d'un peuple juif en dehors de son droit à un État.
Il
faudrait que cet anniversaire centenaire donne l’occasion aux pays arabes de
mettre fin à l’apatridie et aux souffrances du peuple palestinien en dialoguant avec Israël. Il est temps
que les dirigeants abandonnent définitivement leur combat pour l'éradication d'Israël et leurs intransigeances en
choisissant, comme l’Égypte et la Jordanie, la paix et la réconciliation israélo-arabe.
San Remo devrait être le point de départ d’une nouvelle ère bénéfique pour les
deux peuples, juif et palestinien. A l’heure du coronavirus, qui fragilise l’existence
même de certaines populations, cela pourrait être l’occasion d’un rassemblement
régional contre la maladie, la misère et la guerre.
1 commentaire:
Cher monsieur Benillouche,
Je n'ai pas encore lu votre article, mais peut-être que le dernier commentaire que je viens d'écrire sur "La France..." trouverait aussi bien sa place sous celui-ci ?
Je vous laisse juge.
Très cordialement,
M.A.
Mettant à profit le judicieux conseil qui m'a été prodigué ici, et devant le trouble où m'ont jetée les commentaires qui allaient dans tous les sens, j'ai voulu en savoir plus pour essayer d'y voir plus clair.
Et si tous les problèmes entre Israéliens et Palestiniens remontaient au XIXème siècle, au jour où le diplomate britannique Lord Shaftesbury, se crut autorisé, en 1853, à avancer l'idée de : UNE TERRE SANS PEUPLE POUR UN PEUPLE SANS TERRE, évoquant ainsi pour la première fois, la restauration d'un État hébreu ?
En 1895, Theodor Herzl, lui emboîtant le pas, écrit "L'État juif" (Der Judenstaat), introduisant le premier Congrès sioniste mondial à Bâle (Suisse).
Mais ce n'est qu'au lendemain de la Première Guerre mondiale, après la capitulation de la Turquie à Jérusalem, que Lord Balfour, ministre des Affaires étrangères de Grande-Bretagne, affirmera dans une lettre à Lord Lionel Walter Rothschild - éminence de la communauté juive et financeur du mouvement sioniste - le droit des Jufs à un "foyer national " en Palestine, ce qui sera confirmé par la fameuse "déclaration Balfour".
En 1920, la Conférence internationale de San Remo place la Palestine et la Mésopotamie sous mandat britannique et la Syrie et le Liban sous mandat français.
Or Jacques Attali nous apprend dans son "Dictionnaire amoureux du Judaïsme, qu'après 1933, et la prise du pouvoir par Hitler en Allemagne, alors que Martin Buber s'était installé en Palestine "où vivent maintenant 200 000 Juifs au milieu de 700 000 Arabes."
A ce stade, la question que je me pose est celle-ci : est-on autorisé à parler d'une TERRE SANS PEUPLE ?
J'espère que je vous aurai pas trop choqués et que vous serez nombreux à vouloir répondre à ma question.
Cordialement.
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