L’IRAN N’A PLUS
LES MOYENS DE SA POLITIQUE EXPANSIONNISTE
Par Jacques
BENILLOUCHE
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L'Iran du temps du Shah |
Le préambule de la Constitution de la
République iranienne précise que «la poursuite de la révolution s’exprime
dans le pays et à l’étranger», à savoir que l’Iran se donne le droit
d’intervenir dans les affaires intérieures d’autres pays. Et il ne s’en prive
pas depuis de longues années au Moyen-Orient et dans la péninsule arabique.
Cette action se justifie par un besoin de lutte «des opprimés pour la
conquête de leurs droits contre les oppresseurs». C’est le propre même des
révolutions qui se veulent universelles pour défendre les opprimés mais l’Iran
y rajoute une composante idéologique.
Téhéran a su profiter de toutes les
occasions offertes. En effet, les Etats-Unis ont
favorisé involontairement l’envol des Mollahs qui n’avaient pas encore acquis
leur diplôme révolutionnaire. Les interventions américaines en Afghanistan en
2001 et en Irak en 2003 ont neutralisé les Talibans d’une part et Saddam
Hussein d’autre part, qui étaient décrits comme les ennemis de l’Iran. C’est en
s’invitant dans ces conflits que l’Iran s’est arrogé le droit de s’infiltrer
dans les pays voisins pour y insuffler son idéologie guerrière.
Les Printemps
arabes de 2011, et surtout leurs échecs, ont fourni aux Mollahs une
occasion inespérée d’entrer dans des régions où ils n’étaient pas invités. La guerre
civile en Syrie et les actions de Daesh en Irak ont finalisé la présence
iranienne dans ces deux pays. Ensuite, les rivalités avec l’Arabie saoudite,
les troubles au Bahreïn et la guerre au Yémen ont fait le reste pour imposer la
présence iranienne dans le voisinage saoudien.
Cependant, la situation des populations
chiites au Moyen-Orient, abandonnées à un sort incertain au milieu d’un monde
sunnite hostile, ont facilité les objectifs stratégiques iraniens en s’aidant
de leur idéologie anti américaine et anti israélienne. De partout, des milices
chiites ont émergé en se recommandant de l’Iran à l’instar des milices en Irak,
du djihad islamique palestinien ou du Hamas. Le Liban, par sa structure
communautaire, est resté un pays à part car, bien avant la révolution, les
mouvements chiites libanais avaient droit de cité et disposaient même de liens
étroits avec Khomeiny qui avait profité de la faiblesse d’un État qui n’a
jamais pu résister aux pressions extérieures.
Mais aujourd’hui, la situation économique
de l’Iran compromet son ascension face aux concurrents turcs. En 1989, l’Iran
et la Turquie étaient au même niveau économique mais le pouvoir d’achat iranien
en 2018 atteint péniblement 75% de celui de la Turquie qui ne dispose pourtant d’aucune
richesse en hydrocarbures. Les nouvelles sanctions américaines ont généré de
fortes turbulences dans l’économie iranienne. Les Mollahs n’ont plus les moyens
financiers de leur ambition et encore moins ceux de l’Arabie saoudite ce qui
les contraints à puiser dans leurs réserves en se créant des difficultés
internes.
Contrairement à la propagande, la
puissance militaire de Téhéran est affaiblie et les généraux israéliens l’ont
suffisamment martelé pour justifier l’incohérence d’une éventuelle action
militaire contre l’Iran. Certes l’armée iranienne avec 350.000 soldats et
125.000 Gardiens de la révolution représente la plus forte force humaine militaire
de la région mais son équipement militaire n’est plus à la hauteur de ses
prétentions en raison de la faiblesse de ses investissements. Avec un budget
militaire de 16 milliards de dollars en 2017 contre 76 milliards pour l’Arabie
et environ 19 milliards pour Israël, selon des officines étrangères car Tsahal ne
publie aucun chiffre pour des raisons sécuritaires.
L’Iran ne peut donc compter que sur sa
production locale encore trop faible pour renouveler son matériel périmé. Les
services de renseignements ont évalué la flotte militaire à une trentaine
d’avions en bon état de marche, datant d’ailleurs de l’époque du Shah. En
revanche, il peut compter sur son arsenal balistique avec une centaine de
lanceurs de missiles à courte portée (moins de 500 kms) et une cinquantaine de
lanceurs à portée de 2.000 kms.
Aviation saoudienne |
Cet
attirail militaire n’a rien de comparable avec les matériels de haute
technologie de l’Arabie et surtout d’Israël. Cela explique que l’Iran évite l’affrontement
direct et sous-traite son action asymétrique à des milices et des mercenaires. D’ailleurs
en Syrie, l'Iran est un tigre de papier qui se met sous la protection de l’aviation
russe ou se planque à l’intérieur de bases syriennes.
La situation diplomatique a surtout évolué
au profit d’Israël qui a été longtemps très isolé dans la région face à une
monde arabe hostile. Il a su diversifier ses alliances en s’alliant à
certains pays arabes alors que l’Iran est de plus en plus rejeté. Certes la
Chine est un partenaire de premier plan parce que sa croissance dépend de ses
besoins en hydrocarbures qu’elle monnaye en échange d’armement. Mais les
Chinois sont prudents, suffisamment pour ne pas hypothéquer leurs relations
avec les Américains. Par ailleurs, l’alliance fragile avec la Russie est de
circonstance en raison des intérêts convergeant sur la Syrie. La Russie est
suspecte en Iran et n’est pas en odeur de sainteté car c'est une puissance qui a
montré dans le passé, et vient de le montrer en Ukraine, qu’elle n’hésite pas à
s’approprier des terres, iraniennes en particulier.
La Crimée annexée par la Russie |
Le pays souffre sur le plan intérieur et
l’impopularité explose. D’ailleurs 2018 a connu des mouvements populaires de
contestation avec les slogans : «Ni Gaza ni Liban, je sacrifie ma vie
pour l’Iran!», «Laisse tomber la Syrie, occupe-toi de nos problèmes !» ou «mort
au Hezbollah !» La seule ouverture intéressée est avec l’Irak qui détient
les clefs de la sécurité de l’Iran.
Mais les Iraniens se plaignent que le
Hezbollah, à l’instigation des Gardiens de la révolution, bénéficie des
largesses du pays au détriment de la population. Les Mollahs dépensent beaucoup
pour les activités sociales au Liban et pour la construction de logements et
d’hôpitaux alors que l’Iran stagne. Le nationalisme s’effrite et cela décourage
les nationaux à s’engager dans les troupes à l’étranger ce qui nécessite
l’utilisation de mercenaires moins exigeants et plus idéologues. Les Iraniens
estiment à présent qu’il faut d’abord s’occuper de leur pays avant de gaspiller
leur argent au profit des étrangers.
Il en résulte que, si l’Iran peut se
prévaloir d’un passé illustre et d’une démographie galopante, il suscite encore
des réactions négatives des puissances régionales et internationales qui
freinent ses ambitions. Il a perdu tous ses acquis du temps du Shah au point de
le forcer à choisir la course en avant qui risque de le porter au bord du
précipice, voir de s'y engouffrer pour le pire.
2 commentaires:
Remarque d'un Persan exilé à Paris
Qu'il me soit permis de mentionner un point significatif, généralement omis, ici comme ailleurs, à savoir que dans TOUTES les manifestations de ces 13 derniers mois dans des centaines de villes d'Iran, soulèvement sans précédent par son amplitude et sa perdurance malgré la férocité de la répression, le Peuple scandait systématiquement des slogans ROYALISTES (à la gloire de la dynastie Pahlavi), aspect curieusement occulté et parfois minoré sinon nié (malgré la surabondance des preuves vidéos postées d'Iran quotidiennement), par les pseudo-experts depuis un an dans les mass media d'Occident.
Shahpour
Islamica Respublica delenda est
@Shahpour
Merci pour votre précision et votre témoignage. Nous essayons toujours de défendre la vérité qui est difficile à connaitre dans ce pays fermé. N'hésitez pas à nous informer. Vous êtes le bienvenu.
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