La plus vieille synagogue réformiste au Canada, le Temple Emanu-El-Beth Sholom (datant de 1882) |
Le judaïsme réformé est né au 19ème siècle, et a
donné naissance à des courants divers. Outre la réforme de la pratique
religieuse elle-même, ce qui la caractérise la plupart du temps est le
renoncement au lien organique entre religion et peuple, autrement dit au
judaïsme historique. Les Juifs réformés sont donc plutôt réservés par rapport
au sionisme. Ils se considèrent en effet comme citoyens à part entière dans
leur pays respectif, tout comme les Catholiques et les Protestants. Les uns et
les autres ont en commun la même allégeance, la même culture et la même
identité nationale, bien que pratiquant des religions différentes. La terre
d’Israël demeure bien entendu pour le judaïsme réformé le berceau du judaïsme,
mais de la même manière qu’elle est le berceau du christianisme pour les
Chrétiens.
Siège de Union libérale israélite de France, 24 rue Copernic, dans le 16e arrondissement de Paris |
La Loi du Retour [1] garantit à tout Juif le
droit d’immigrer en Israël. Elle précise que toute personne ayant au moins un
grand-parent juif ainsi que tout converti au judaïsme peut accéder sans délai à
la citoyenneté pleine et entière. Depuis un certain temps Israël reconnaissait
les conversions du judaïsme réformé à travers le monde, mais paradoxalement pas
celles réalisées par des rabbins réformés en terre d’Israël. Seules les conversions validées par le
Grand-Rabbinat d’Israël donnaient droit à l’alyah.
Au bout de 15 ans d’atermoiements, la Cour Suprême
d’Israël a fini par mettre un terme à ce paradoxe. Dans un arrêté récent, elle
invite l’État à accorder la citoyenneté aux Juifs convertis en Israël selon le
rite réformé. Il s’agit d’une décision à caractère plutôt civil que religieux,
dans ce sens que cela contribue à déterminer de manière cohérente qui est
éligible à l’alyah conformément à la Loi du Retour. Les rabbins du judaïsme
réformé disposent donc désormais de cette prérogative, tout comme les rabbins
orthodoxes, encore qu’il faille attendre que la Knesset légifère dans ce sens.
Delphine Horvilleur, rabbin réformiste |
Il s’agit d’un progrès, mais qui ne résout pas
certains problèmes d’ordre éthique. Il existe en effet des candidats à l’alyah
ayant le désir de faire partie du peuple juif et d’adopter ses traditions, mais
dont la conscience objecte à la foi religieuse et à ses rituels. Les
conversions par des rabbins réformés sont certes moins contraignantes que
celles des rabbins orthodoxes, mais il n’en reste pas moins que les libres
penseurs ne s’y résolvent qu’à contrecœur en souscrivant de manière ponctuelle
à une spiritualité fondamentalement incompatible avec la leur.
Il y aurait donc lieu de mettre en place en Israël
une formule explicitement destinée aux athées et aux agnostiques, permettant le
passage à l’identité juive – et donc donnant droit à la Loi du Retour – mais
n’impliquant pas de conversion au sens religieux du terme. Cela passerait par
une certaine connaissance de la Torah, du Talmud et d’autres grands textes de
l’épopée juive depuis l’Antiquité jusqu’à nos jours.
En plus de cela il faudrait exiger des nouveaux
immigrants un serment d’allégeance à l’esprit et à la lettre de la Déclaration
d’Indépendance de l’État d’Israël.
[1] La loi du retour votée le 5 juillet 1950 par la Knesset accorde
l’immigration à tout Juif et à sa famille proche de s’établir en Israël. Ceci à
condition que le candidat ne soit pas hostile au peuple juif, qu’il ne risque
pas de porter atteinte à la salubrité publique ni à la sécurité de l’État, et
qu’il n’ait pas un passé criminel susceptible de troubler l’ordre public.
3 commentaires:
quelques soient les réserves que l'on peut avoir sur le comportement actuel des Juifs-Américains, ils font partis du peuple juif.
Après tout, ils sont DANS l'histoire du judaïsme alors que les ultra-orthodoxes ne se rendent même pas compte de la résurrection véritablement miraculeuse d'Israël.
Article très intéressant qui cependant, ne traite pas de ces Européens juifs fuyant la Shoah, qui se sont trouvés un temps en Palestine , ont bénéficié d'un passeport israélien à partir de la création de l'État hébreu, et pourtant n'ont eu de cesse de retourner dans leur patrie européenne d'origine, aussitôt qu'ils en ont eu la possibilité.
De même qu'il serait intéressant de savoir combien de ces Juifs de la diaspora ayant accompli leur alyah en bénéficiant de la Loi de Retour, rebutés par le changement de mode de vie que cela leur a imposé, ont préféré mettre fin à leur Retour par un retour à la case départ, sans doute moins glorieux, mais plus en adéquation avec leur identité culturelle.
Il y a actuellement 7 millions de juifs, toutes tendances confondues, en Israël. Au départ de l’état, en 1948, il y en avait 800.000, quel progrès !!
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