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mercredi 14 février 2018

Opération Sinaï 2018 : éradiquer les islamistes



OPÉRATION SINAÏ 2018 : ÉRADIQUER LES ISLAMISTES

Par Jacques BENILLOUCHE
Copyright © Temps et Contretemps

            

          Pour Israël, c’est la seule bonne nouvelle sécuritaire de la semaine. Son front sud va être stabilisé par les Egyptiens pour lui permettre de consacrer son attention entièrement au nord. Gaza semble tétanisé par les manœuvres en cours et surtout par les décisions économiques de l’Autorité palestinienne qui aggravent sa situation. Depuis plusieurs années, l’armée égyptienne est ridiculisée par quelques terroristes en guenilles de Daesh qui mettent à feu et à sang le Sinaï en imposant leur loi et leurs crimes.



            Le président égyptien al Sissi a donc donné l’ordre de lancer le 9 février, à grand renfort de publicité, l’opération Sinaï 2018. Certains l’accusent d’opportunité politique à la veille d’élections présidentielles prévues en mars. Pourtant, il est pratiquement certain d’être élu après avoir découragé quelques candidats à se présenter contre lui; donc cette opération influera peu sur le résultat du scrutin. Mais il avait besoin de frapper un coup pour rehausser l’image ternie de son armée qui subit des coups au Sinaï mais aussi dans les régions du delta du Nil ainsi que dans le désert occidental frontalier avec la Libye.
Djihadistes tués

            Les premiers résultats contre l’État islamique tombent. Selon l’armée, au moins 16 djihadistes auraient été tués et 34 autres ont été arrêtés à la suite «de vastes opérations de ratissage et de raids sur tous les axes, villes et villages du nord et centre de cette région». Soixante-six repaires de terroristes ont été détruits ainsi que leurs véhicules. Les Égyptiens ont par ailleurs démantelé un laboratoire d’engins explosifs et détruit un centre d’information et de communication ainsi que des champs de pavots et de cannabis qui servaient au financement des djihadistes. 11 véhicules 4x4 et 31 motos ont par ailleurs été confisqués.

            L’opération Sinaï 2018 a pour but de rétablir le contrôle des frontières terrestres et maritimes et de décapiter Daesh qui règne en maître au Nord-Sinaï depuis 2013, faisant au moins deux mille morts de part et d'autre. En plus des troupes terrestres, l'aviation et la marine participent aux opérations. La motivation d’Al Sissi date du terrible attentat de novembre 2017, au cours duquel au moins 305 personnes, dont 27 enfants, ont été tuées dans une attaque visant une mosquée de la péninsule du Sinaï. Immédiatement après, le 29 novembre 2017, le président Abdel Fattah al-Sissi, avait alors donné trois mois à son chef d'État-major et à son ministre de l'Intérieur pour rétablir la sécurité et la stabilité au Sinaï.
            Les forces de l'ordre, appuyées par les forces spéciales et les gardes-frontières ainsi que par la police, ont mené plusieurs raids simultanés dans les villes du Sinaï pour traquer les terroristes en fuite et les éradiquer. Elles ont mis en place des points de contrôle sur les routes locales en coopération avec les forces armées. La Troisième Armée a fermé toutes les entrées et sorties de El Hasana dans le centre du Sinaï, à l'arrière de Bir al-Abd.  

            La marine a renforcé le contrôle sur le front de mer de Rafah à l'ouest d'El Arish, afin de couper les lignes d'approvisionnement pour les terroristes, tout en maintenant la sécurité des installations économiques dans la région. Des unités navales d'un porte-hélicoptères Mistral ont continué de se frayer un chemin sur la côte d'El Arish, tandis que la police et les garde-côtes ont intensifié les mesures de sécurité et les patrouilles.
            Des gardes-frontières et d'autres forces effectuent des missions pour sécuriser la navigation dans le canal de Suez et contrecarrer les tentatives de terroristes de s'échapper du Sinaï. On ignore les pertes subies par les forces de l’ordre mais elles semblent faibles pour l’instant. Les écoles du nord du Sinaï ont été fermées tandis que les universités et les autres établissements d'enseignement supérieur ont cessé les cours pendant une semaine.  
            Les unités de la marine mènent des patrouilles pour sécuriser la côte de Marsa Matrouh à Saloum le long des côtes de la Méditerranée occidentale. Par mesure préventive, les mesures de sécurité à proximité des principales institutions étatiques, des lieux de culte et des points chauds touristiques ont été renforcées. Des patrouilles de sécurité circulent dans toutes les routes pour 'éliminer les menaces.

            L'Égypte traque par ailleurs les membres du mouvement Sawaed Misr (les Bras de l'Égypte), communément appelé mouvement Hasm, nouvellement formé et ayant la même idéologie que Daesh. Ce groupe avait mené plusieurs attaques et assassinats dans la région du Caire et en particulier la tentative d'assassinat contre Ali Gomaa, ancien Grand mufti, la tentative de meurtre du juge Zakaria Abdoul Aziz Othman, et les assassinats du major Mahmoud Abdel Hamid, chef des enquêtes du commissariat de police de Tamiya, dans la province de Fayoum, d'un chef de la police à Gizeh et d'un autre dans la région de Mahmoudiyah. Dans la foulée, 14 membres des Frères musulmans ont été interceptés.
            La parlement égyptien et l'Église copte orthodoxe égyptienne, dirigée par le pape Tawadros II, ont déclaré leur solidarité et leur soutien à la «vaste bataille des forces armées qui sacrifient leurs vies pour la stabilité du pays».

            Israël trouve un intérêt certain dans ces opérations au Sinaï qui sécurisent ses frontières sud certes, mais qui affaiblissent surtout les miliciens du Hamas qui utilisent les djihadistes du Sinaï pour s’armer et se ravitailler en missiles. Il ne fait aucun doute qu’Israël et l’Égypte collaborent sur le plan sécuritaire depuis plusieurs mois pour détruire leur ennemi commun. Un signe ne trompe pas ; le traité de paix de 1979 comprend des dispositions limitant les forces militaires dans le nord du Sinaï. 

          Or Israël a renoncé à cette restriction sur l'armée égyptienne dans le Sinaï, l'augmentation du nombre de tanks est tolérée, afin que l'armée égyptienne puisse mieux combattre les milices djihadistes. Seules les frappes aériennes israéliennes dans le Sinaï sont clairement interdites par le traité.  Mais il vient d’être révélé que des drones, des hélicoptères et des avions israéliens non identifiables sont intervenus dans une campagne aérienne secrète, avec l'approbation du président Al-Sissi.
            L’opération Sinaï 2018 vient de commencer. Il est trop tôt pour en connaître les résultats définitifs car les terroristes sont bien protégés dans des grottes taillées à même la pierre. Les déloger est une opération critique et coûteuse en soldats car il faut escalader les collines, rocher par rocher. Mais l’Égypte semble vouloir utiliser les gros moyens, comme en 1973, à savoir les hélicoptères, les tanks et le napalm pour éradiquer les terroristes. Il était temps.

1 commentaire:

Marianne ARNAUD a dit…

Voici qui pourrait intéresser les lecteurs de monsieur Benillouche :

http://www.atlantico.fr/decryptage/syrie-redoutable-desordre-geopolitique-mondial-qui-emerge-ruines-encore-fumantes-etat-islamique-3306743.html