QU’ATTENDENT LES PALESTINIENS POUR CHANGER DE DIRIGEANTS
Par Jacques BENILLOUCHE
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Le comportement de Mahmoud Abbas
vis-à-vis des Etats-Unis démontre qu’il a perdu tout réalisme diplomatique et qu’il
n’est plus apte à diriger l’Autorité. Il a décidé, malgré les millions de dollars qu'il reçoit, de snober le vice-président
américain Pence en raison de la décision américaine de transférer l’ambassade
de Tel-Aviv à Jérusalem. Il reste
toujours sur le même refrain qui n’a pas bougé d’un ton. Il évolue en girouette, en fonction du vent parfois en s’appuyant sur les Américains, puis sur les pays
arabes, puis même sur l’Iran et à présent il se tourne vers l’Union européenne
pour lui demander de reconnaître l’État de Palestine.
Cette
reconnaissance ne serait d’ailleurs que symbolique parce qu’à part le drapeau
et l’hymne national, cet État ne dispose pas des trois autres attributs
fondamentaux d'un Etat : la définition précise des frontières, l’armée et la monnaie. Son
surplace politique l’a décrédibilisé auprès de son peuple résigné parce qu’il
ne voit rien venir. Il demande aux autres des actes alors que c’est à lui
d’innover. Il n’a rien offert à une population qui accepte les sacrifices
pendant que ses dirigeants se gavent.
Ainsi,
lors de la dernière réunion du Conseil national palestinien à Ramallah, il n’a
trouvé que la métaphore du football pour faire espérer une prochaine
réussite. En 2009 la Palestine s’était
classée 179ème au classement mondial de la FIFA alors qu’elle est passée à la
80ème tandis qu’Israël a pris la 98ème position «malgré tous les
efforts qu’ils ont déployés». Belle performance !
Cette
façon de faire de la politique footballistique dénote l’absence d’arguments
politiques solides pour faire avancer le processus de paix. Il oublie de préciser que les
résultats d’un match dépendent surtout d’une équipe gagnante sur le terrain. Or,
son gouvernement n’a rien fait de transcendant depuis les accords d’Oslo pour
tenter d’élaborer une stratégie gagnante ou de renouveler «l’équipe
palestinienne». Qu’il boude les Israéliens, cela pourrait se
concevoir à la rigueur, mais fermer la porte au vice-président américain est
inconscient.
Comité central de l'OLP sans jeunes |
Nous
avons à faire à des dirigeants vieillis, presque séniles de 75 à 88 ans, qui bloquent l’entrée
des jeunes au Conseil central palestinien qui pourraient favoriser le renouvellement des idées et des cadres. La même équipe stagne depuis des décennies et depuis 24 ans, les mêmes
squattent les bonnes places. S’il faut s’appuyer effectivement sur la «vieille
garde» pour bénéficier de son expérience et de ses connaissances, il
faut savoir laisser la place à la relève. Or chez les Palestiniens tout est verrouillé.
Si Netanyahou est encore le seul dinosaure présent sur la scène politique israélienne, et s’il protège par tous les moyens sa place, des cinquantenaires voire des quarantenaires se préparent à prendre le relais : Avi Gabaï, Naftali
Bennett, Ayelet Shaked, Guilad Erdan, Tsipi Hotovely, Gidéon Sar et bien d'autres encore.
On
n’entrevoit pas au plus haut niveau la prochaine génération politique
palestinienne. Mahmoud Abbas a fait le vide autour de lui pour accaparer seul
le fromage. Aucun Palestinien en exil dans les camps de réfugiés à l’étranger
n’a émergé ; pas un seul Palestinien de la diaspora, fortement diplômé et
occupant de hautes fonctions économiques ne s’est fait connaître comme si les
affaires de son peuple ne l’intéressaient pas, préférant les grandes
organisations internationales. Le plus
jeune, Saëb Erakat, 62 ans, est sur la brèche depuis 1995 et la Conférence de
Madrid mais il n’a plus d’idée et son action se sclérose.
La relève palestinienne |
Le
seul moyen pour les Palestiniens de réussir est d’apporter un souffle nouveau
avec des changements radicaux qui mettront au pied du mur les Occidentaux, et
bien sûr Israël. Les «anciens» doivent prendre leur retraite
pour faire évoluer la négociation dans un sens plus pragmatique et laisser des
jeunes se confronter à un Israël en pleine évolution et en pleine croissance. Les
Palestiniens, et le Hamas en particulier, doivent assimiler le fait que la
destruction par les armes d’Israël est un rêve inatteignable et qu’ils font
trop d’erreurs de jugement.
Il
est vrai que dans les premiers temps, Mahmoud Abbas avait été actif au point
même d’être accusé de traîtrise. En effet, Al Jazeera avait publié plus de 1.600
documents, jusqu’alors secrets, révélant la vérité derrière le processus de
paix arabo-israélien. Cette plus grande fuite de documents confidentiels et de
comptes-rendus de rencontres formelles et informelles, liés au conflit
israélo-palestinien, détaillait les rouages internes du processus de paix israélo-palestinien,
datant de 1999 à 2010. L’affaire des «Palestine Papers» est méconnue alors
qu’elle constitue de vraies révélations sur l’action palestinienne.
On avait beaucoup parlé des concessions d'Ehud Barak refusées par Yasser Arafat à Camp David. Mais les documents dévoilent d’importantes concessions proposées à Israël par l’autorité
palestinienne en 2008, notamment concernant les quartiers juifs de Jérusalem et
le retour des réfugiés. Les documents attestant du haut niveau de coopération
entre les forces de sécurité des deux camps amènent à suspecter l’autorité
israélienne d’avoir prévenu le camp palestinien de l’opération «plomb durci» déclenchée dans la bande de gaz en 2008.
Peu
commentés en Occident, ces documents montrant l’Autorité palestinienne sous un
jour défaitiste ont été largement commentés au Moyen-Orient. Saëb Erakat,
négociateur en chef palestinien avait été discrédité, tout comme Mahmoud Abbas et
son parti le Fatah, accusés par le Hamas concurrent de vouloir liquider la
cause. Les documents ont réfuté l’assertion faite peu avant par le gouvernement
Netanyahou selon laquelle il n’y avait dans le camp d’en face «pas de
partenaire pour la paix». Ils donnent une lumière différente sur la
volonté de Mahmoud Abbas de négocier avec Israël
pour parvenir à la paix.
Les Palestiniens ont besoin d’une
nouvelle équipe, une dream team dynamique, réactive, fertile en
idées neuves et qui serait apte à œuvrer pour développer une nouvelle stratégie,
que jamais les dirigeants actuels n’ont élaborée. Mahmoud Abbas n'est plus le chef indiscutable et respecté. Il est temps de souffler le
coup de sifflet final pour les dirigeants actuels palestiniens, pour que l’initiative
n’appartienne plus uniquement aux Israéliens.
3 commentaires:
C'est vrai ça ! Qu'attendent les Palestiniens pour suivre les conseils de monsieur Benillouche ?
Il eut été préférable de titrer :"qu'attendent les palestiniens pour changer de politique". Miser sur un dirigeant plus jeune n'est pas une garantie d'un quelconque changement en la matiére.Leur notion de "processsus de paix" n'est absolument pas la meme que celle des israéliens. Celle des israéliens consiste -en tout cas pour la gauche- à opérer un sacrifice territorial plus ou moins dramatique selon les retraits ou plutot selon les concessions supportables imaginant à tort se débarrasser des palestiniens derriére une frontiére afin qu' ils ne mettent pas les pieds en Israel -surtout dans les regions les plus riches et occidentalisées, lesquelles votent à gauche, c'est démontré. Celle des palestiniens est d'obtenir le maximum de reconnaissance, le maximum de territoires, d'arracher jerusalem au peuple juif sans jamais signer une paix exaustive qui leur interdirait en violation du Coran de ne considérer qu'il ne s'agit que d'étapes menant avec le temps et leur démographie à une victoire totale cad la reprise de TOUTE la palestine. Ce que vous appelez le "pragmatisme", chez eux s'appelle la takyeh. Les Israéliens l'ont compris aprés l'experience d'Oslo et ne votent plus à gauche....laquelle tant qu'elle ne sera pas plus réaliste n'a aucune chance de revenir au pouvoir.
Ils attendent que les Israéliens commencent...
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