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dimanche 27 juin 2021

L'inquiétude des ultra-orthodoxes

 


L’INQUIÉTUDE DES ULTRA-ORTHODOXES


Par Jacques BENILLOUCHE

Copyright © Temps et Contretemps 


           

Netanyahou entouré des chefs orthodoxes

         En raison de leur présence indispensable au sein de l’ancienne coalition, les partis religieux orthodoxes faisaient la pluie et le beau temps en imposant leurs exigences au sein d’un gouvernement indulgent à leur égard au point qu’ils étaient devenus des faiseurs de roi politiques. Les choses ont changé pour eux puisque le nouveau gouvernement a mis à l’ordre du jour des mesures plus restrictives à leur égard. Leur situation économique risque à présent de pâtir car les ministres orthodoxes avaient coutume de puiser dans les caisses de l’État de nombreux fonds pour financer leurs écoles talmudiques par le biais de subventions souvent exagérées.



Yeshiva


Le manque à gagner pèsera lourd sur leur budget et les contraindra certainement à de fortes économies, voire à la réduction du nombre d’élèves pris totalement en charge par la yeshiva. Le gouvernement veut changer la donne en imposant le service militaire pour tous sachant que les orthodoxes ne seront pas contraints de porter les armes mais pourraient occuper de nombreuses fonctions civiles : aumôneries, cours de pensée juive aux nombreux jeunes laïcs déjudaïsés, cours d’hébreu aux nouveaux immigrants, services administratifs, magasins de stockage, cuisines. Leur incorporation débloquera de nombreux combattants plus utiles sur le terrain militaire. La règle imposée reste que les jeunes doivent être traités à la même enseigne et donner 28 mois de leur vie à la nation. En contrepartie, ils apprendront la réalité du sionisme et surtout la défense du drapeau israélien que certains d’entre eux brûlent encore aujourd’hui. Ils pourront instiller plus de valeurs religieuses à tous ceux qui ont été éduqués uniquement sur la base de valeurs laïques.

Drapeau israélien brûlé


Il n’y a aucun doute que les orthodoxes vont connaitre une crise financière profonde qui les forcera à atténuer certaines de leurs positions. Avec l’arrivée depuis les pays de l’Est, et même d’Amérique du Sud, de nombreux Juifs non reconnus par le rabbinat parce que non issus d’une mère juive, les questions de mariage civil, de divorce et même d’enterrement, prennent de plus en plus d’importance cruciale. Le gouvernement veut autoriser les transports publics le jour du shabbat et faciliter le processus de conversion au judaïsme. Il envisage de faire passer les questions civiles, systématiquement bloquées par le corps orthodoxe, au-dessus des lois religieuses. Il veut reconnaître tous les courants du judaïsme sur un pied d'égalité. Selon le Ministre des Affaires de la Diaspora, Nahman Shai : «La tente juive est grande, et elle peut et doit inclure tous les courants et communautés du peuple juif».

Mais les orthodoxes n’ont pas réussi à garantir la survie du gouvernement Netanyahou bien qu’ils aient maintenu leur nombre de sièges à la Knesset. En raison de leur position intransigeante et malgré des avances de Naftali Bennett, ils ont refusé de rejoindre le nouveau gouvernement. Persuadés qu’aucun gouvernement ne serait formé, ils ne voulaient pas hypothéquer leurs liens avec le Likoud pourvoyeur de fonds. Mais ils ont même perdu le contrôle de la puissante commission parlementaire des finances, détenue pendant des années par les députés orthodoxes ashkénazes.

En prétendant que le nouveau gouvernement allait à l’encontre des valeurs juives, ils se sont mis à l’écart de la gouvernance avec peu de chances d’être réinsérés à court terme. Le chef de Shass, Arie Dehry, a été jusqu’à avertir que «la nouvelle coalition jetterait à la poubelle toutes les valeurs que le peuple juif a sanctifiées pendant des milliers d'années». Choqué par une affirmation si excessive, Naftali Bennett, accusé d’être un juif réformiste, a réagi vivement : «Les députés ultra-orthodoxes ne nous apprendront pas ce qu'est le judaïsme».

Morts de Meron


Enfin les relations du nouveau gouvernement avec les orthodoxes seront envenimées par la volonté d’enquêter sur la mort de 45 personnes écrasées lors du pèlerinage religieux en avril au mont Meron. Pour éviter tout conflit, Netanyahou avait refusé de nommer une commission d'enquête malgré la pression publique Il est certain que les orthodoxes vont connaitre une période de déstabilisation et qu’ils seront dans la tourmente pendant une longue période d’exclusion de la gouvernance. Si leurs budgets diminuent en ampleur, ils seront moins généreux et ils risquent de perdre quelques électeurs uniquement intéressés par l’aspect matériel.

5 commentaires:

Alan a dit…

Un parent qui choisi d'éduquer son enfant sans religion sera pas content de savoir qu'au sein des forces armées son choix sera mise en question

Alan Frommer

Véronique Allouche a dit…

L’opposition ne votera pas pour la prolongation de la loi contre le regroupement familial. Il est étonnant d’entendre le parti ultra-orthodoxe Shas faire part de ses raisons en déclarant que le principal était de renverser le nouveau gouvernement.
Quitte à se dédire de ses idées premières en ne changeant pas d’optique et aller l’encontre ses intérêts.

Henri OLTUSKI a dit…

On a enfin compris que la religion n' a pas sa place en politique Les partis politiques religieux doivent disparaitre de la vie politique en Israël et les écoles talmudiques sont trop nombreuses et en fin de compte on y apprend la haine de l'autre

bliahphilippe a dit…

Diable!Un peu dhumour face au drame !
Voltaire faisait-il allusion à ces ultra orthodoxes lorsqu'il s'exclamait : "Si j'étais eux, je sais bien ce que je ferais ! Une bande d'incapables, de fainéants! Sortez moi tout ça!"
Non. le philosophe visait évidemment les membres de la noblessse, du clergé, ceux qui "se sont (seulement) donnés la peine de naitre".(Beaumarchais). Mais la tentation de l'analogie certes humouristique est tentante.
Les priviléges dues à la noblesse de leur sang plus bleu ou plus rouge- c'est selon- que celui du jeune soldat contraint de subir l'appel sous les drapeaux en comparaison de ces messieurs qui passent leur vie dans des beaux draps- en clin d'oeil à Raymond Devos, pour sa célébre tyrade "il vaut mieux passer sa vie dans de beaux draps que sous les drapeaux"- touche à son terme, sans parler des subventions accordées ou plutot monnayées contre soutien politique.
Mais la politique est comme femme :"souvent femme varie". Ceux qui ont pris le risque de s'ériger en partis politiques doivent aussi l'assumer le jour venu où la bise se transforme en claque. Eh bien, Dansez maintenant!
Mais que l'auteur de cet article retienne ses larmes, lui qui les a tant aimé!
Les partis ultra orthodoxes se consoleront en prenant soutien dans les Sources :"D.ieu a donné, D.ieu a repris",ceci ajouté à l'immense sagesse à puiser dans l'Ecclésiaste en sa version version philosophique :"Il est un temps pour (se) planter, et un temps pour récolter".

Marianne ARNAUD a dit…

De l'air ! Vivement que la télévision repasse Les Aventures de Rabbi Jacob !