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mardi 18 juin 2019

Le paradoxe de l'économie israélienne




Par Jacques BENILLOUCHE
Copyright © Temps et Contretemps
       
Tours Azriéli symboles de la réussite d'Israël

          Le nouveau gouvernement, qui sera issu des nouvelles élections du 17 septembre 2019, fera face au défi lié au paradoxe de l’économie israélienne. La réussite économique d’Israël est toujours un sujet qui étonne. Son économie est aujourd’hui la plus développée, la plus puissante et la plus dynamique de la région. Le PIB d’Israël, de l’ordre de 42.000 dollars en 2019, équivaut en effet au PIB cumulé de l’Égypte, du Liban, de la Jordanie, de la Palestine et de la Syrie. Le pays a depuis longtemps éradiqué le chômage et l’inflation, maintenu une croissance constante tandis qu’il bénéficie d’une côte de crédit élevée qui lui donne accès à tous les financements. 



Chômage en Israël

            Selon les statistiques officielles, depuis janvier 2019, le chômage est passé de 4,2% à 3,8% alors qu’il avait atteint 10,5% en 2000. En fait, il s’agit d’un chômage incompressible, le plus bas du monde occidental, avec une population active qui augmente de 2% par an. Certains analystes argueront que ce résultat est obtenu grâce au recours systématique à l'emploi précaire avec des bas salaires, mais le résultat est là puisque le plein emploi est réel. 
          La croissance est pratiquement stabilisée depuis de nombreux mois à 3,3% face à un taux d’inflation de 0,8%. L’excédent des comptes extérieurs augmente tous les ans en même temps que les réserves de la banque d’Israël qui s’élèvent à présent à 115 milliards de dollars soit 31,3% du PIB à la fin de l’année 2018.
Inflation

            Mais l’aspect paradoxal de l’économie israélienne est son côté négatif car le déficit du budget national ne cesse de croître avec des dépenses du gouvernement dépassant largement le montant des recettes. Le déficit public est passé de 1,9% en 2017 à 3,3% en 2018. Il devrait atteindre l’an prochain au moins 4%, soit environ 60 milliards de shekels (16,7 milliards de dollars) alors qu’Israël ciblait un déficit de 40 milliards de shekels (11 milliards de dollars). Le gouvernement dépense donc trop, surtout en période pré-électorale où il doit satisfaire des exigences politiques. Et simultanément la dette publique qui était de 60,5% du PIB a progressé pour atteindre 61,2%.  


Si le gouvernement ne réduit pas ses dépenses, alors la cote de crédit d'Israël pourrait être menacée et sa note pourrait être abaissée. L’agence de notation Standard & Poor attend que le prochain gouvernement adopte des politiques pour maîtriser le budget et ramener le déficit à son objectif prédéterminé avant de maintenir la note AA+ au pays. De son côté Moody's a lancé un avertissement pour que le gouvernement baisse les dépenses en réduisant son budget ou en augmentant les  recettes par une augmentation des impôts.
            Les nouveaux gouvernants en Israël, sauf choc inattendu, auront une année 2019 qui ne verra pas beaucoup de changement. L’incertitude portera sur la gestion du déficit public qui risque de croître avec les promesses électorales. Pour cela, ils compteront d’abord sur l’innovation technologique sachant qu’Israël consacre l’équivalent de 4,3% de son PIB à la recherche contre 2,2% pour la France. Ils compteront aussi sur la production de gaz puisque Léviathan commencera à produire à fin 2019 tandis que Karish et Tanin entreront en service les années suivantes, et ce pendant plusieurs décennies.  
Le gouvernement devra lancer un vaste programme de modernisation des infrastructures, notamment dans les transports et la filière énergétique. Il existe de grosses lacunes dans les infrastructures de transports en commun qui ont pris beaucoup de retard au point de freiner le développement économique du pays. Les ministres ont favorisé le transport individuel plutôt que le transport de masse, ce qui a entraîné un engorgement du réseau routier avec des bouchons presque permanents aux heures de pointe, avec peu d'espace pour construire de nouvelles routes de dégagement.
Métro Tel-Aviv

            Alors tout nouveau gouvernement devra tailler dans les accords de coalition très coûteux. Le ministre des Finances, Moshe Kahlon, qui n’avait pas voulu prendre de mesures pendant la précédente campagne électorale vient de proposer en urgence des coupes budgétaires pour réduire le déficit croissant. Il envisage une coupe de 3,25 milliards de shekels qui vient en plus d’une baisse de 1,15 milliard de shekels alloués aux budgets de la Défense et de l’Éducation.
En plus de ces baisses budgétaires, le ministère propose une augmentation des taxes sur les voitures hybrides et d’autres sur les carburants industriels pour générer un revenu de 450 millions de shekels. Une ponction de 150 millions de shekels sur les fonds du loto national (Mifal Hapayis) est à l’ordre du jour. En effet, en janvier, le Trésor avait prévu une baisse des rentrées fiscales de l’ordre de 10 milliards de shekels. Enfin le problème de la hausse du coût de la vie, qui a atteint des sommets, reste entier.
Le nouveau ministre des finances n’aura pas une tâche de tout repos. Il devra prendre des mesures draconiennes qui risquent de ne pas cadrer avec les exigences des membres de la coalition qui ont aiguisé les appétits de leurs électeurs. La campagne va apporter chaque jour son lot de nouvelles promesses, parfois démagogiques, faites par des partis qui chercheront à séduire leurs électeurs au détriment de l’intérêt économique du pays.


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