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lundi 4 septembre 2017

La Corée du Nord, mauvais génie de l'Iran



LA CORÉE DU NORD, MAUVAIS GÉNIE DE L’IRAN

Par Jacques BENILLOUCHE
Copyright © Temps et Contretemps

            
Défilé de missiles en Corée

          L’attention de l’opinion internationale est actuellement mobilisée par les informations en provenance de Corée du Nord. Cette dictature ne peut pas inquiéter directement Israël car d’autres pays de sa région, plus proches, sont menacés par ses progrès en matière d’expériences atomiques. En revanche, Israël est sensibilisé par la coopération de ce pays avec l’Iran. Dans l’immédiat, la question de la bombe A ou H est secondaire par rapport à la production en série du missile balistique Pukguksong-2 qui risque de se retrouver entre les mains des Gardiens iraniens de la Révolution. On en parle moins car le monde est sensibilisé par le nucléaire et pourtant il s’agit d’un fait ultra-sensible pour l’Occident, et pour Israël en particulier.


Kim Jong-Un supervise le lancement du  Pukguksong-2

            Ainsi le 20 mai, depuis sa base de Pukchang au sud du pays, la Corée a procédé au tir d’un engin balistique de moyenne portée, lequel a volé sur 500 kms, avant de terminer sa course en mer du Japon. Certes il s’agit pour l’instant d’une portée courte mais les progrès sont rapides. Les premiers à réagir ont été les Coréens du Sud qui ont parlé d’un acte «dangereux et irresponsable» tandis que le Premier ministre japonais, Shinzo Abe, qui se sent plus menacé, estime que «Pyongyang lançait un défi au monde et piétinait les efforts internationaux pour arriver à une solution pacifique». De leur côté, les forces américaines refusent d’envenimer la situation et se bornent à réitérer leur «engagement inébranlable à défendre leurs alliés dans la région».

            La nouveauté qui inquiète Israël est l’alimentation de ce nouveau missile en combustible solide qui remet en question sa stratégie de défense. Les Iraniens ne disposent pas encore de cette technologie. Les moteurs à ergol liquide ne peuvent pas être stockés dans des silos en raison de la volatilité du combustible gaz qui peut exploser à tout moment sous l’effet de la chaleur. Les missiles à combustibles liquides doivent être extraits de leurs silos, longtemps avant, pour remplir les deux réservoirs de combustible et de comburant. Non seulement cela augmente les délais de lancement mais le temps de préparation de plusieurs heures les rend vulnérables car ils sont détectés par les satellites israéliens avant leur lancement avec possibilité de les neutraliser avant toute action.
            Le Pukguksong-2, alimenté en combustible solide, utilise la technique du lancement à froid. L’engin est d’abord éjecté de son silo par une cartouche de gaz comprimé avant que son moteur principal ne s’allume. Il s’agit du même principe que les missiles balistiques emportés par les sous-marins avec la difficulté de détecter leur site de lancement. La production en série de ce missile a été décidé par Kim Jong-Un.
Hwasong-12

            Ce lancement vient après celui, le 13 mai, du missile Hwasong-12, à portée de 4.500 kms, susceptible donc d’atteindre les bases américaines implantées dans le Pacifique. Après les tests de bombes nucléaires, Pyongyang est donc en mesure de se doter d’un missile balistique intercontinental à capacité nucléaire.
            Or depuis les années 1980, la Corée du Nord est l'un des importants fournisseurs d'armes du gouvernement iranien. Les ventes d'armes nord-coréennes et de blindés (T-54/55) à l'Iran ont littéralement explosé durant la guerre Iran-Irak. Elles ont débouché par ailleurs sur une coopération nucléaire entre les deux pays, impliquant également la Syrie. Dans les années 2000, 19 missiles balistiques nord-coréens BM25 Musudan, d'une portée de 2.500 à 3.000 kms, ont été vendus à l'Iran, en échange de pétrole. En décembre 2009, une cargaison d'armes nord-coréennes contenant des lance-roquettes et des missiles sol-air avait été interceptée en Thaïlande. L'armée nord-coréenne entraînerait par ailleurs des agents iraniens avec des techniques de pointe.  
         
            Le Shahab-4 (Étoile filante-4) est un missile balistique de moyenne portée développé par l'Iran. Il est présenté par les autorités iraniennes comme un engin lanceur spatial civil, et non comme un projet militaire. Or, selon des experts occidentaux, il serait basé sur le missile soviétique SS-4 (dont il reprendrait le propulseur RD-214), largement modifié par les technologies iraniennes, ainsi que sur le missile nord-coréen Taepodong-1.
Taepodong-1

            Il en résulte que les progrès de la Corée du Nord en matière de missiles à combustible solide et de miniaturisation de ses bombes nucléaires pourraient être exploités par l’Iran. La taille des bombes nucléaires a été réduite pour leur permettre d’être incorporées dans des ogives. La Corée du Nord n'est pas vraiment en mesure d'atteindre Israël car la distance de vol est de 8.042 kms avec en temps de vol de 9 à 16 heures selon la vitesse. Mais ces mêmes missiles entre des mains iraniennes pourraient facilement atteindre Israël situé à 2.300 kms de l'Iran.
            L’accord nucléaire américano-iranien de 2015 impose aux Iraniens de conserver un caractère civil à leur programme, en échange d’une levée sur dix ans des sanctions internationales. Mais rien n’empêche l’Iran de collaborer avec la Corée du Nord pour poursuivre ensemble leurs recherches nucléaires. L’Iran pourrait aider la Corée à gonfler ses faibles stocks d’uranium et surtout de plutonium, nécessaires à la fabrication d’un missile intercontinental. En effet, la Corée ne disposerait de matière que pour une vingtaine de bombes nucléaires.  La collaboration Iran-Corée est un élément stratégique qui est à présent pris en compte par les stratèges israéliens. Mais le danger concerne tous les pays occidentaux, le Japon, la Corée du Sud et bien sûr les Etats-Unis. Il n’est pas impossible qu’ils se liguent contre un danger qui n’est plus virtuel.
Bombe H

            Mais l’information qui a ébranlé la conscience occidentale, concerne la détention de la bombe H par la Corée du Nord. Quelle différence ? La bombe H (à hydrogène) est 100 fois plus puissante que la bombe A (atomique) avec un encombrement réduit.
            La bombe A, qui a été lancée à Hiroshima et Nagasaki, a un combustible de base constitué de gros noyaux d'atomes lourds et instables, de l'uranium 235 ou du plutonium 239. Lorsqu'ils sont en quantité suffisante, la fission de l'un de ces atomes va provoquer en cascade la fission d'autres atomes, en déclenchant une réaction en chaîne qui dégage des quantités énormes d'énergie en un temps très court.
Explication simple des bombes A et H

            Dans la bombe H, l'allumage de l'explosion est provoqué par une bombe A classique. La réaction de fission initiale va servir à atteindre des températures et des pressions énormes capables de déclencher la fusion de petits noyaux d'atomes (l'hydrogène, deutérium ou tritium). La réaction nucléaire est encore plus violente que la fission. Ces bombes sont aussi appelées thermonucléaires, avec une différence de processus physique, la fusion provoquée par la fission. Seuls cinq pays disposent certainement de la bombe H : les États-Unis, la Russie, la Grande-Bretagne, la Chine et la France. La Corée du Nord pourrait l'avoir développée si l'on se fonde sur la déflagration, suite à l'essai de cette semaine, qui a été ressentie jusqu'en Chine avec une secousse mesurée à 6,3 dans une sorte de tremblement de terre.

            On ignore tout du programme nucléaire israélien qui est soumis à une censure militaire. Mais des rapports étrangers prétendent que la France a aidé Israël à fabriquer sa première bombe A et les Etats-Unis sa première bombe H. Mais tout ceci n’est que spéculation.

3 commentaires:

Paul ACH a dit…

Entre ces 2 Pays, Iran et Corée du Nord, semble s'établir une Relation autre que Diplomatique.
Kim Jong-Un, alias "Le Soleil du XXIème Siècle" dispose de missiles à longue portée.
Et si pour contrecarrer l'embargo qui touche son Pays, Kim Jong-Un vendait des missiles à l'Iran ? Ce serait grave pour Israël.

Marianne ARNAUD a dit…

Cher monsieur Benillouche,

Boris Vian, en son temps, s'était déjà intéressé à cet épineux problème. Ni vous, ni moi, n'y pouvant rien, mieux vaut en rire avant que d'avoir à en pleurer :

https://www.youtube.com/watch?v=eryzp0Pklc8

Très cordialement.

Anonyme a dit…

Je connaissais le niveau qui me laissait pantois des chercheurs Iraniens, il y a c'est vrai déjà 35 ans. (S'ils n'aimaient pas le SHAH ils n'appréciaient pas non plus les ayatollah mais ils sont restés fidèles à leur pays). Il y a une dizaine d'années des stagiaires m'ont rapporté qu'ils avaient rencontré des étudiants Nord Coréens en Chine.
Bon en réunissant tous ces bonhommes; qu'il arrivent sur le papier à mettre au point un lanceur (comburant solide, alliages, composants, câblage permettant le pilotage du moteur dans des conditions thermiques extrêmes ...) possible. Mais mettre en œuvre les procédés industriels sans aide extérieure pour ces pays, ça me laisse très dubitatif...!
Pour l'ogive thermonucléaire mis à part le principe physique je n'y connais pas grand chose, mais j'ai entendu dire que ce n'était pas la "miniaturisation" le problème le plus complexe.
En ce qui concerne la matière fissible il se peut qu'il s'en égare en Corée du Nord un peut plus que ce qu'elle est sensée produire.(Certainement simples supputations délirantes d'un vieux).