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dimanche 23 mars 2014

Poutine songe à remodeler le monde



POUTINE SONGE À REMODELER LE MONDE

Par Jacques BENILLOUCHE

copyright © Temps et Contretemps

         

          Nous republions notre article du 23 mars 2014 qui, à quelques détails près, a gardé toute sa pertinence. Le temps passe mais rien ne change.
       Poutine se comporte comme Hitler, agissant à pas feutrés, bernant l’Europe et les États-Unis par une prétendue volonté de paix. Ses actions sournoises dénotent son intention bien arrêtée de reconstituer un nouvel empire à l’égal de l’URSS, à dose homéopathique pour ne pas trop inquiéter l’Occident. Il cherche à imposer son nouvel ordre qui risque d’être plus dangereux que l’ordre soviétique. 
          Il veut masquer ses intentions sous un voile démocratique en donnant une légitimité de façade à ses actes, sous couvert de référendum dont le résultat n’a rien à envier aux méthodes staliniennes. Certes la majorité des Ukrainiens de Crimée était pro-russe mais il est difficile de ne pas assimiler le résultat à un diktat juridique. Mais il avait effectivement prévenu l’opinion internationale puisque, au Parlement, il avait annoncé que : «La Crimée a toujours été une partie inséparable de la Russie ». Dont acte, rompez les rangs.



Déstabilisation des pays faibles



            Il s’agit pour lui de redessiner les frontières sur fond de déstabilisation des pays faibles et surtout désarmés. Il n’est pas impossible qu’il entre dans une nouvelle Guerre Froide avec les États-Unis car cette guerre est pour lui mobilisatrice. Les États-Unis ont fait preuve de passivité en Ukraine malgré les garanties qu’ils avaient accordées à ce pays. Une bonne leçon pour Israël qui est conforté dans sa volonté de ne dépendre d’aucun pays étranger pour sa sécurité.

Poutine garde la nostalgie de l’empire soviétique qu’il a vu tomber avec regret et qu’il veut reconstituer depuis que Barack Obama a abandonné l’Égypte, a détourné son regard de la Syrie, a offert aux Iraniens l’Irak que Georges Bush avait défendu avec conviction, a absous les Iraniens quant à leur programme nucléaire. D’ailleurs John McCain, candidat malheureux à la présidentielle de 2008, vient de s’élever contre la Maison-Blanche accusée de saper l’autorité de l’Amérique par sa politique étrangère insuffisamment musclée, quasi pacifique. Il la somme de livrer des armes à l’Ukraine.

Poutine est habile car il trouve toujours un semblant de légitimité à ses actions. Il s’appuie sur l’éviction du gouvernement légal d’Ukraine, dirigé par Viktor Ianoukovitch, pour estimer que les insurgés ont supprimé l’autorité légale dans le pays et que, de ce fait, les traités signés en 1994 deviennent caduques dès lors où, selon lui, le droit international est bafoué. Il a agi en deux temps. Il a envoyé des troupes anonymes pour faire croire à une réaction locale des pro-russes en justifiant ses actes par une volonté de protéger les minorités. Il a ensuite exploité l’alibi des fascistes ukrainiens en Crimée pour intervenir en prenant exemple sur l’intervention de l’OTAN au Kosovo. Poutine tient à sa revanche et il est persuadé qu’il l’aura.

Réveil des minorités



Mais ces méthodes brutales, qui remettent en cause les traités internationaux signés, risquent d’engendrer un chaos mondial et de réveiller les minorités dans plusieurs pays. Ainsi les gouvernements chinois successifs, d'abord de la République de Chine, puis de la République populaire de Chine, ont toujours revendiqué la souveraineté chinoise sur la région indienne de l’Arunachal Predesh qu'ils considèrent comme une partie du Tibet. Après une période de relations cordiales entre la Chine et l'Inde, la question de la frontière pourrait se raviver. Même le Tibet pourrait revendiquer son indépendance. Les Kurdes profiteraient d’exiger leur indépendance face à une Turquie affaiblie par le conflit syrien. L’Iran trouverait le prétexte d’intervenir dans certains pays arabes pour venir au secours des minorités chiites en danger selon lui. Bref l’intervention de Poutine pourrait donner à d’autres un alibi pour lancer une action d’agression suivie bien sûr par une riposte sanglante.

En refusant d’agir à chaud, Barack Obama risque d’être contraint de payer plus tard sa retenue. Sa réaction qualifiée de faiblesse, sans objectif à long terme, s’explique par une volonté de calmer le jeu politique avec la Russie pour éviter une escalade. Il garde en mémoire le fait que les États-Unis de Reagan et Bush ont agi pareillement en 1983 et en 1989 en envahissant Grenade et Panama. Il a donc choisi un risque calculé et une riposte proportionnée en appliquant des sanctions économiques et en suspendant la Russie du G8. 
Arseni Iatseniouk à Washington

Il n’est pas prêt à user de l’arme de l’OTAN pour éviter de donner des arguments à Poutine qui reste un partenaire indispensable dans les affaires internationales.  Il a affirmé qu’il n’était pas question de mener «une excursion militaire» en Ukraine. D’ailleurs il a convaincu le premier ministre ukrainien, Arseni Iatseniouk, en visite à Washington, de déclarer officiellement que son pays n’envisageait plus une adhésion à l’Alliance atlantique. La mobilisation de troupes de l’OTAN à la frontière polono-ukrainienne pourrait mener à une crise similaire à la crise des missiles de Cuba.

Un boulevard pour les Russes

Les États-Unis et l’Occident ont imposé des sanctions qui paraissent symboliques, une sorte de baroud d’honneur. Certes les sanctions ont montré leur efficacité en Iran et elles pourraient gêner les échanges internationaux avec la Russie. Mais les mesures sont du domaine de l’homéopathie, sans portée stratégique.
Le ministre français de la défense et des généraux

Ainsi la France suspend une partie de sa coopération militaire avec la Russie en supprimant les exercices conjoints, les escales des navires de guerre, mais aussi les différents échanges entre États-majors. En revanche, la France refuse de suspendre la vente de ses armes à la Russie. Il en va ainsi du Vladivostok, le porte-hélicoptères de type Mistral vendu à Moscou en 2011 dont le premier exemplaire doit normalement être livré en octobre après un feu vert gouvernemental français. Les Allemands devraient boycotter l’achat de gaz et pétrole russes mais ne le font pas. L’Occident, avec l’aide du FMI,  doit fournir l’argent dont l’Ukraine a besoin pour que son économie ne s’écroule pas et pour prouver qu’il est pour le respect des frontières internationales.
Chars russes en Ossétie en 2008

Poutine sent qu’il peut agir impunément et, par petites doses, il retaille le contour des nouvelles frontières. Hier en 2008, l’armée russe neutralisa l’armée géorgienne pour occuper et annexer l'Abkhazie et de l'Ossétie du Sud sous prétexte de venir en aide aux séparatistes. Les pays occidentaux avaient alors dénoncé une occupation de fait. Aujourd’hui Poutine a mis la main sur la Crimée. Demain probablement il cherchera à s’approprier une partie de l’Ukraine puisque déjà un groupe prorusse d'environ 200 hommes non armés a envahi le 22 mars la base ukrainienne aérienne à Novofedorivka, dans l'ouest de la Crimée.
Anders Fogh Rasmussen


Il poursuit son objectif de replacer la Russie au-devant de la scène internationale en créant sa sphère d’influence. L’adhésion accélérée à l’Union Européenne de l'Ukraine, la Géorgie et la Moldavie pourrait signifier un coup d’arrêt aux prétentions russes. Pour le secrétaire général de l'Otan, Anders Fogh Rasmussen, l'intervention de Moscou en Crimée participe d'une «stratégie globale» de la Russie. L’ex-premier ministre danois dit craindre que le président russe n'aille «au-delà de la Crimée» et n'intervienne dans les régions orientales de l'Ukraine. Après la crise des Balkans dans les années 90 et la Géorgie en 2008, la crise ukrainienne représente, selon lui, «la plus grave menace à la sécurité et à la stabilité de l'Europe depuis la fin de la Guerre froide».

3 commentaires:

Anonyme a dit…

Ce n'est pas à un Juif du 21e siècle qu'on va apprendre que ce monde est tout sauf un long fleuve tranquille. Le clash ukrainien est une promenade de santé comparé à la Yougo. Moscou s'est fâchée tout rouge à l'installation d'un gouvernement anti-russe à Kiev. Les U.S. auraient aussi très mal pris des ennemis de Washington à Ottawa. Nous aurions dû un peu plus tôt nous faire à l'idée que la Russie se remet debout après s'être évaporée en 89. On s'est comporté comme si elle n'existait pas en soutenant les bandéristes de Maidan. Poutine a riposté en envoyant une claque. C'est pas poli mais l'Ouest, est-ce qu'il l'a été poli? Je reviens de deux semaines en Ukraine. À Lvov, j'ai visité la syna où j'ai trouvé trois gardiens (chemachs) pas juifs. Je m'en suis étonné. Ils m'ont répondu en se marrant: Vous avez déjà vu des juifs travailler? Pas loin de la syna, un monument à Bandera trois fois haut comme l'arc de triomphe. Les troupes SS de Bandera ont massacré plus de 100 000 juifs, rappelle la plaque sur le mur de la syna. Choisissons nos amis.

Michel LEVY a dit…

Merci pour votre article lumineux.
Un aspect supplémentaire est la reprise en main des chrétiens d'Orient par la Russie.
Une campagne sponsorisée très fortement exige le droit des palestinien à se rendre au Saint Sépulcre
( AED : Aide à l'Eglise en Détresse · Publication suggérée
Aidez les Chrétiens à accéder au Saint Sépulcre. Signez la Pétition ! )
La Russie par le biais des églises orthodoxes reprend la lutte antisémite et antisioniste traditionnelle, cela entre dans son projet global de reconquête du Proche orient en chassant les islamistes pour redonner du poids à l'église "grecque".

Avraham NATAF a dit…

Les Macchabées dans leur lutte contre le royaume Greco-Syrien avaient trouvé un allié lointain, Rome qui devient un voisin, puis un intervenant dans les conflits à l’intérieur du Royaume de Judée, pour établir un protectorat et forcer les Juifs à l'Exil parce qu’ils résistaient à Rome. L'allié américain ne rassure pas.