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dimanche 25 septembre 2022

L'option de deux Etats, Israël-Palestine

 

L’OPTION DE DEUX ÉTATS, ISRAËL-PALESTINE


Par Jacques BENILLOUCHE

Copyright © Temps et Contretemps


        Dans son premier discours en tant que Premier ministre devant l'Assemblée générale des Nations Unies à New York, Yaïr Lapid a exprimé son soutien à une solution à deux États créant la colère à droite et poussant Naftali Bennett à marquer son opposition à toute solution de ce genre. «En novembre 1947, cette Assemblée générale s'est réunie et a décidé de la création d'un État juif. Seuls quelques centaines de milliers de Juifs vivaient en Israël à l'époque, dans un environnement hostile, choqués et dévastés après l'Holocauste au cours duquel six millions de nos concitoyens ont été assassinés. 75 ans plus tard, Israël est une démocratie libérale forte. Fier et prospère… C'est arrivé parce que nous avons décidé de ne pas être une victime. Nous avons choisi de ne pas nous attarder sur la douleur du passé. Mais plutôt de se concentrer sur l'espoir de l'avenir. Nous avons choisi d'investir nos énergies dans la construction d'une nation. Dans la construction d'une société heureuse, optimiste et créative. Nous n'avons pas seulement atteint la Terre Promise, nous construisons la Terre Promise».


Discours de Bar Ilan 2009

Lapid a ensuite exprimé son soutien à une solution à deux États au conflit israélo-palestinien vieux de plus d'un siècle. «Un accord avec les Palestiniens, basé sur deux États pour deux peuples, est la bonne chose pour la sécurité d'Israël, pour l'économie d'Israël et pour l'avenir de nos enfants. La paix n'est pas un compromis. C'est la décision la plus courageuse que nous puissions prendre. La paix n'est pas une faiblesse. Elle incarne en elle toute la puissance de l'esprit humain. La guerre est un abandon à tout ce qui est mauvais en nous. La paix est la victoire de tout ce qui est bon».

            Il ne s’agit pas d’une position nouvelle. Dans un discours le 14 juin 2009 à l’Université de Bar Ilan, le premier ministre avait accepté du bout des lèvres le principe de «deux États pour deux peuples». Pour la première fois depuis qu’il était au pouvoir, Benjamin Netanyahou avait prononcé les fameux mots que les faucons du Likoud et les nationalistes purs et durs de son parti ne voulaient pas entendre. Il avait bien parlé d'un «État et d'un peuple palestinien». Certes il avait posé ses conditions mais le principe était admis. Aujourd’hui on cherche à mettre un voile pudique sur ce que la droite refuse.

Dans son discours, Netanyahou avait précisé que les Palestiniens devaient d’abord reconnaître Israël en tant qu'État-nation du peuple juif et accepter que le futur État palestinien soit totalement démilitarisé, à savoir sans armée, sans moyens aériens et sans aucun lien ni avec l'Iran et ni avec le Hezbollah. Par ailleurs pour Netanyahou : «le problème des réfugiés doit être réglé hors des frontières d'Israël car leur retour va à l'encontre du maintien d'Israël comme État juif». Il n’y aura aucun partage puisque Jérusalem restera la «capitale unifiée» de l'État d'Israël. Enfin les constructions continueront dans les implantations de Cisjordanie.

            Au lieu d’accepter cette première avancée dans leur direction, pour en gagner ensuite d’autres par la politique des petits pas, les Palestiniens ont réagi négativement tandis que le Hamas estimait que «ce discours reflétait l'idéologie raciste et extrémiste de Netanyahou et faisait fi de tous les droits du peuple palestinien». Le principe des deux États a donc été définitivement enterré à la grande joie des nationalistes juifs.



            Donald Trump avait lui-aussi déçu les Israéliens car il s’était dit favorable à «une solution à deux États» alors qu’il s’était montré opposé au début de son mandat : «J’aime bien la solution à deux États, je pense que c'est ce qui marche mieux, c'est mon sentiment». Il s’était dit convaincu «à 100% que les Palestiniens, qui ont gelé tout contact avec l'administration américaine depuis qu'elle a reconnu Jérusalem comme capitale d'Israël, reviendront à la table des négociations». Un plan de paix, concocté depuis de longs mois dans le plus grand secret par son gendre Jared Kushner, prévoyait deux États malgré la décision américaine de transférer son ambassade à Jérusalem.

Mais comme toujours les Palestiniens ne sont pas pragmatiques. Ils exigent plus pour ne rien avoir car le statu quo leur convient parfaitement. Alors ils posent des conditions irréalistes à savoir le retour aux frontières de 1967. Emmanuel Macron avait été lui-aussi très clair à la tribune de l’ONU : «qu’est-ce qui permettra de régler la crise entre Israël et la Palestine ? À coup sûr, pas d’initiatives unilatérales ni le fait d’ignorer les droits légitimes des Palestiniens pour obtenir une paix durable, ni de sous-estimer le droit légitime des Israéliens à leur sécurité. Il n’y a pas d’alternative crédible à la solution de deux États vivant côte à côte en paix et en sécurité avec Jérusalem pour capitale».

Netanyahou n’avait pas abandonné le principe et il avait cherché un soutien du côté de l’Égypte avec qui il existe des accords sécuritaires. Il s’était entretenu à New-York avec le président égyptien Abdel Fattah al-Sissi pour discuter «des moyens de ranimer le processus de paix». Le président égyptien avait souligné «l'importance d'une reprise des négociations entre les parties palestinienne et israélienne en vue d'une solution équitable et complète aux problèmes des Palestiniens». Mais Al-Sissi, lui-aussi, avait suivi la tendance générale puisqu’il estimait que «ce règlement devra être conforme à la solution à deux États et aux accords internationaux en vigueur».

Sameh Shoukry


Mais aujourd’hui le ministre égyptien des Affaires étrangères Sameh Shoukry a répondu à Yaïr Lapid ; «Il ne suffit pas de déclarer ses intentions. Je reconnais que le Premier ministre Lapid a publiquement indiqué son soutien à une solution à deux États. C'est quelque chose que nous avons constamment défendu dans nos discussions avec le gouvernement israélien et nos partenaires de l'Union européenne et des États-Unis, et nous espérons que la solution sera mise en œuvre. Nous reconnaissons bien sûr qu'en Israël il y a des élections à venir, et la nécessité d'attendre le processus électoral et la composition d'un nouveau gouvernement israélien. Nous espérons que ce gouvernement approuvera la solution à deux États et relancera effectivement les négociations avec l'Autorité palestinienne et les mettra en œuvre».



Ce débat n’est donc pas nouveau et Lapid a intégralement repris les propos de Donald Trump qui s'était déclaré favorable, pour la première fois, à une solution à deux États. Un État binational poserait le problème des Arabes de Cisjordanie et de leur statut avec le risque de voir Israël perdre son identité juive face à la démographie galopante palestinienne. Certes tous les partis réaffirment sans cesse la priorité sécuritaire d'Israël en posant comme condition le contrôle de la sécurité à l'ouest du Jourdain et en Cisjordanie. Pour les Américains, les Palestiniens doivent avoir les moyens de se défendre mais sans pouvoir menacer Israël, ce qui signifie que la responsabilité sécuritaire restera entre les mains de Tsahal.

        Trump avait été clair à ce sujet et la Droite israélienne l’oublie souvent. Il s'était dit convaincu que «tout plan américain respectera ce principe» sachant qu'aucun pays n'acceptera la solution des nationalistes juifs qui souhaitent un État binational. S’opposer à la création d'un État palestinien ferait perdre à Israël le soutien américain au moment où les Russes se montrent agressifs. Lapid a soulevé la question à l’ONU pour qu’elle soit débattue pendant la campagne électorale mais il était important de souligner que Netanyahou s’était déjà penché sur la question depuis 2009 et que jouer la vierge effarouchée n’est pas digne d’un dirigeant de cette stature. 
         Il faudra trouver une solution pérenne au principe de : eux chez eux et nous chez nous. Donner la nationalité israélienne aux Arabes annexés est un risque énorme pour l'identité juive d'Israël ; les ignorer en les considérant comme une minorité sans droits ouvrirait la porte à tous les excès. On ne pourra pas éluder une solution quelle qu’elle soit, sauf à mobiliser l’armée en permanence dans les territoires, à subir des attentats mortels contre des civils que nul ne peut éviter et à combattre des émeutiers en Cisjordanie.

4 commentaires:

Harry NUSSBAUM a dit…

Merci Jacques d'exprimer clairement et sans ambages ce qui doit être dit, à savoir que seule une séparation nette entre israéliens et palestiniens peut permettre à Israël de subsister et de perdurer en tant qu'état juif.
Les partisans d'un état soi-disant binational passent leur temps à s'enfoncer la tête dans le sable, dans ce sable dans lequel ils se préparent à enterrer Israël !

Véronique ALLOUCHE a dit…

Très bon article mais deux petites remarques à propos du discours de Lapid: 1)ce ne sont pas « nos concitoyens » qui ont été assassinés pendant la Shoah mais nos coreligionnaires.
2) « Nous avons choisi de ne pas nous attarder sur la douleur du passé. »
Heureusement que les rescapés s’y sont « attardés », que les témoignages sur ce passé aient pu voir le jour pour qu’à leur tour les historiens retracent cette horreur sans nom afin d’éclairer au plus près les générations futures.


frenkel david a dit…


« Il faudra trouver une solution pérenne au principe de : eux chez eux et nous chez nous. », écrivez-vous, cher Monsieur Benillouche. Mais laquelle ? En tout cas pas un État palestinien dirigé par le Hamas. Israël ne peut, faute d’être anéanti, se permettre qu’on lui tire des roquettes depuis la proche Judée Samarie et que le groupe terroriste y creuse des tunnels d’attaque. Gaza est un cas d’école. Israël a remis cette Bande à l’Autorité palestinienne en 2005, mais le Hamas s’en est emparé en 2007 en provoquant un bain de sang. Le problème avec les Palestiniens restera insoluble sans une prise de conscience internationale. L’Iran devrait être astreint, sous peine de sanctions, à ne plus financer un Hamas dont la charte prône ouvertement l’annihilation de l’État juif. A moins que la Judée Samarie (Cisjordanie) soit rendue à la Jordanie afin que ce soit elle qui y maintienne l’ordre, comme elle l'a fait lorsqu’elle a écrasé l’insurrection de septembre noir en 1970 contre le roi Hussein. Serait-ce un vœu pieux ? Pourtant, de 1949 à 1967, les Arabes que l’on nomme actuellement Palestiniens qui vivaient en Judée Samarie sous la gouvernance du Royaume Hachémite étaient bien considérés comme étant Jordaniens. Shana Tova umetouka !



frenkel david a dit…

NB Quand je parle de rendre la Judée Samarie (Cisjordanie) à la Jordanie, dans mon esprit, la zone C qui est entièrement sous gouvernance israélienne, selon les accords d'Oslo devrait également être rendue à la Jordanie. C'est l'importante minorité palestinienne qui y réside qui cause problème risquant de précipiter Israël dans un État bi-national. Selon les dits accords la zone A est entièrement sous contrôle palestinien et la zone et B est sous contrôle mixte. Les trois zones devraient donc être sous contrôle jordanien, car le Hamas s'implante déjà de petit à petit dans les zone A et B, et y prépare des actes terroristes. Certes, il sera douloureux pour les juifs résidant dans la zone C de devoir partir d'une Judée Samarie qui serait sous régime jordanien. Mais Sharon, qui fut de droite, n'en a-t-il pas fait de même avec les juifs qui résidaient à Gaza ?