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dimanche 22 décembre 2019

Sur l'affaire Sarah Halimi par Maxime TANDONNET



SUR L’AFFAIRE SARAH HALIMI

Par Maxime TANDONNET

            

          La Cour a donc estimé qu’il existait «des charges suffisantes contre Kobili Traoré d’avoir (…) volontairement donné la mort» à Sarah Halimi, avec la circonstance aggravante de l’antisémitisme, tout en le déclarant toutefois «irresponsable pénalement».Il paraît que nul n’a le droit de contester une décision de justice… Sans doute, quand même, a-t-on le droit de s’interroger, de poser des questions sur une décision de justice. 


          
               Le meurtrier, qui a défenestré cette dame seule, âgée et en situation de fragilité, parce qu’elle était juive – mobile antisémite – ne sera pas jugé : il est reconnu irresponsable, ayant perdu son discernement pour consommation de cannabis.
            Attention à bien me comprendre : ici, je ne critique personne, ni aucun jugement, ni aucun juge, ne m’indigne pas : je m’interroge uniquement sur cette notion de discernement et son interprétation, en tant que citoyen et homme libre, voilà tout.
            Dans le même esprit, qu’en sera-t-il d’un drogué en manque qui tue un épicier pour lui voler sa caisse : sera-t-il jugé irresponsable ? L’alcoolique qui prend le volant, en état de complète ébriété, et massacre une famille, père, mère et trois enfants, sera-t-il reconnu irresponsable ? Quid de l’alcoolique, ivre-mort, qui tue d’un coup de fusil le gendarme venu l’interpeller ? Des voyous camés au cannabis ou au crack qui violent et torturent une jeune fille dans une cave seront-ils jugés irresponsables ? Les bourreaux de Daesh, probablement drogués quand ils égorgeaient leurs prisonniers, ont-ils droit à la moindre indulgence pour ces crimes ?
            Mais il y a pire. Un livre récent, «L’extase totale» , le IIIe Reich, les Allemands et la drogue, de Norman Ohler, (la Découverte, 2016), révèle que les soldats de la Wehrmacht et les SS et les dirigeants nazis étaient lourdement drogués à la pervitine, une substance de type amphétamine qui leur donnait un sentiment d’invulnérabilité et décuplait leur cruauté. Le fait qu’ils aient été drogués, bel et bien drogués, rendus par les amphétamines encore plus barbares que de nature, doit-il susciter la moindre sensation d’indulgence envers les monstres et les tortionnaires qui ont dévasté l’Europe, provoqué l’anéantissement de 50 millions d’hommes de femmes et d’enfants, et procédé à l’extermination méthodique, à l’échelle industrielle, de six millions de Juifs dans les conditions d’une barbarie indescriptible ? Évidemment, non.
            À moins que ce jugement, et au-delà de ce cas d’espèce, ne soit le reflet subreptice de l’évolution générale du monde, sa crétinisation à travers l’oubli de l’Histoire, une indulgence lâche et coupable envers certains bourreaux, et une sinistre accoutumance au retour de la bête immonde, notamment la barbarie antisémite ?
            En tout cas, ma solidarité est totale envers tous ceux qui, comme moi, dans un climat général d’atonie, d’indifférence, de banalisation, s’interrogent, s’interrogent sur le sens de ce jugement.

2 commentaires:

Michèle Mazel a dit…

"nemo auditur propriam turpitudinem allegans" disait la sagesse romaine. « nul ne peut se prévaloir de sa propre turpitude », le terme « turpitude » signifiant ici négligence, faute, comportement illégal ou fraude.

Philippe BLIAH a dit…

On apprend (nait) à la fac de droit que la consommation de drogue ou d'alcool préalable à un délit ou un crime n'était pas -au contraire- une circonstance atténuante...Il semble que les temps ont bien changé surtout si le critére juif ou islamiste complique le dossier pénal.