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dimanche 1 septembre 2019

La mégalocratie par Maxime TANDONNET



LA MÉGALOCRATIE

Par Maxime TANDONNET



Qualifier le régime politique français de dictature est une aberration. Les opposants politiques ne sont pas assassinés ni emprisonnés, un espace de liberté d’information et de réflexion est préservé (Figarovox, Atlantico, Marianne, Valeurs actuelles) ; le droit de manifester et de se réunir est une réalité. Quelques intellectuels s’expriment avec virulence sans être persécutés. Parler de dictature, au sens des dictatures du XXe siècle, est pure imbécillité.



Affirmer que la France est une démocratie est tout aussi absurde. Le soi-disant «pouvoir du peuple» est de fait soigneusement canalisé, comme les élections nationales de 2017 l’ont montré. De fait, grosso modo, le sauveur providentiel, élyséen, est pressenti par le pouvoir médiatique qui s’entiche d’un personnage, le valorise et lui ouvre ses émissions et ses studios plus qu’à d’autres, modèle son image dans l’opinion, fabrique ainsi le président dont l’élection conditionne par la suite, automatiquement, les législatives.
Ni dictature, ni démocratie, le régime politique français est d’un genre nouveau : la mégalocratie. Le pouvoir politique se concentre tout entier dans l’image médiatique d’un personnage, absorbant à elle seule l’essentiel de toutes les sources traditionnelles de la puissance publique : gouvernement, parlement, administration, collectivités… L’exercice de l’autorité politique consiste, non plus à mobiliser, à décider, à choisir, à fixer un cap, mais à incarner, c’est-à-dire à paraître, à communiquer, à rayonner, focaliser l’attention, à n’importe quel prix. L’omniprésence médiatique du visage élyséen n’a donc rien de fortuit ou d’accidentel : elle est l’essence même d’un système.
Le phénomène traduit l’idéologie du monde occidental, telle qu’elle s’est développée depuis la «chute du Mur», en 1989. Il donne le sentiment d’accomplir la prophétie de Francis Fukuyama, (la fin de l’histoire et le dernier homme) : les marchés doivent imposer leur suprématie par-delà les frontières, l’uniformisation des cultures, des nations et des États sur le modèle occidental et l’émergence du dernier homme, l’individu-roi, sans racine et sans culture. Dès lors, dans cette optique, le politique, au sens du choix d’un destin par les peuples perd l’essentiel de sa raison d’être. Il devient avant tout une affaire de maniement des émotions collectives, des chimères, de manipulation de la foule médiatique. La mission de l’occupant de l’Élysée, dans cette logique, est d’incarner au mieux ce dernier homme.

La mégalocratie a des avantages et des inconvénients.
Elle tend à enfermer le pays dans une bulle de rêve autour d’une légende, d’un personnage héroïque, et ainsi apaiser ses angoisses ou ses souffrances. Tel est le sens de la mythologie du combat entre le bien progressiste et la peste nationaliste. À cet égard, elle a besoin pour se maintenir de l’ennemi «d’extrême droite» qui fait partie de son essence même, à la source de sa légitimité. Comme le bien n’existe que par le mal, «En Marche» se nourrit du lepénisme au niveau national, de sa contre-présence médiatique, et des régimes dits populistes sur le plan international qui lui servent de faire-valoir (nonobstant la réalité des persécutions – la Chine ou l’Arabie Saoudite ne figurent pas au rang de ses bêtes noires).
Mais les dégâts de ce système sont aussi considérables. Le culte de l’image élyséenne devient la fin en soi du système politique, au détriment du bien commun. La réélection est son principal horizon. Le régime repose sur une formidable mystification : derrière le voile de la propagande sur la «transformation de la France», une transformation largement illusoire, les difficultés et les drames potentiels s’accumulent sans que la moindre esquisse de réponse ne leur soit apportée : dette publique, écrasement fiscal, déclin scolaire, désindustrialisation, pauvreté, chômage, communautarisme, violence quotidienne, migrations non maîtrisées… 
Pire : la mégalocratie se développe sur la crédulité des faiseurs d’opinion (experts, politistes…) l’anéantissement de l’esprit critique. Elle déchire le pays, aggrave la fracture entre les élites influentes ou dirigeantes qui globalement, jouent le jeu du conformisme, et la majorité de la population sur laquelle la mystification ne prend pas, ou inégalement : la majorité silencieuse est beaucoup plus lucide que ne le pense la classe dirigeante. D’où l’impopularité structurelle et le climat de révolte larvée, permanent, qui ronge le pays. Aujourd’hui, la question essentielle n’est pas de changer de président de la République en 2022. Beaucoup plus : il est de briser un système et de restaurer la démocratie française.

2 commentaires:

Gabriel Z-g a dit…

On a quand même eu droit à une utilisation de la force démesurée sur des manifestations, un homme s’est noyé à Nantes suite à une charge de crs, des centaines et des centaines de blessés graves. Des jugements de manifestants accélérés alors qu’on connaît la lenteur habituelle de la justice française.
Alors oui en comparaison à la Corée du Nord on peut pas appeler la France de dictature, mais ça ressemble drôlement à une forme de dictature molle.

V. Jabeau a dit…

Et maintenant le Président de la République surfe en plus sur la vague écologiste en instillant la peur du lendemain et sa capacité à y faire face avec de beaux coups de menton. On rentre dans un régime de terreur de la pensée. Oui il faut revenir à la démocratie. Mais qui en France l’incarne, quelles personnalités, quels partis, quels mouvements ?