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mercredi 23 septembre 2020

L'Iran, allié putatif et catalyseur des relations israélo-arabes

 


L’IRAN, ALLIÉ PUTATIF ET CATALYSEUR DES RELATIONS ISRAÉLO-ARABES


Par Jacques BENILLOUCHE

Copyright © Temps et Contretemps

C.C.G

S’il n’existait pas une haine tenace de la part des Mollahs à l’égard d’Israël, on aurait pu croire à une certaine complicité dans le développement des normalisations israélo-arabes. Le désengagement des États-Unis du Moyen-Orient a transformé Israël en allié objectif contre l’Iran. Les pays arabes du Golfe, à l’exception du Qatar qui a quitté le CCG (Conseil de Coopération du Golfe), se sentent de plus en plus menacés par Téhéran. La question palestinienne, qui freinait l’ouverture de relations diplomatiques, a été reléguée au deuxième plan ce qui a permis à Israël, non pas de signer un accord de paix puisqu’il n’a jamais été en guerre avec les Émirats ou le Bahreïn, mais un acte de reconnaissance.


Check Qassim


Il existait des prémices à cette reconnaissance car en mai 2018, le Bahreïn avait brisé un tabou en affirmant «le droit d’Israël de se défendre», à la suite des frappes israéliennes contre des bases iraniennes en Syrie. Le petit royaume se sentait en danger depuis 2016, lorsque l’Iran l’avait menacé d'une «intifada sanglante» en tant qu’allié de l’Arabie saoudite. En cause, la déchéance de nationalité qui avait frappé le plus haut dignitaire chiite, cheikh Issa Qassim, accusé d'«encourager le confessionnalisme et de servir des intérêts étrangers». 

À l’époque, le chef des Gardiens de la révolution, Kassem Soleimani, chargé de la stratégie d’exportation de la révolution iranienne, avait estimé que «la décision déraisonnable des Khalifa (famille régnante à Bahreïn) attisera la flamme d’un mouvement révolutionnaire islamique et façonnera une rébellion dévastatrice contre les dirigeants, sous dépendance, de ce pays». Le Hezbollah avait relayé cette menace claire avec l'intention de l'appliquer au sein du royaume.

            C’est face à cette menace et au désengagement américain que l’Arabie Saoudite, opposée à l’expansionnisme iranien dans les pays arabes, s’est sentie obligée de garantir «la sécurité et la stabilité» du Bahreïn en lorgnant sur le soutien israélien. Elle savait qu’elle ne pouvait compter sur aucun soutien international après les expériences de dérapages en Irak, en Syrie et au Yémen. Le département d’État et le Quai d’Orsay s’étaient alors bornés à appeler «les responsables de la région à tout faire pour éviter l’exacerbation des tensions». Des paroles dont ne pouvaient se satisfaire les États du Golfe.

            Certes, l’Intifada sanglante prédite par Téhéran n’a pas eu lieu mais elle a exacerbé les relations entre la République islamique et les pays arabes. Cette menace iranienne a aussi poussé le Maroc à réviser sa position. Le Maroc, qui avait opéré un rapprochement avec l’Iran en 2015, après une rupture des relations diplomatiques de huit ans, avait repris ses distances. Le ministère marocain des Affaires étrangères avait pris fait et cause pour le pouvoir à Bahreïn en soulignant «le droit des autorités bahreïnies à prendre les mesures appropriées pour préserver son unité nationale».



Ligue arabe 2020


            Les membres de la Ligue arabe, qui rivalisaient naguère de surenchère anti-israélienne, ont alors fait preuve de modération étonnante en favorisant les liens israélo-arabes et en oubliant d’une certaine manière la question palestinienne. Israël ne pouvait pas trouver de meilleur allié que l’Iran. Pour Hussein Ibish, chercheur à l’Arab Gulf States Institute de Washington : «le réel intérêt de se rapprocher d’Israël est stratégique et entièrement centré autour de la question iranienne, considérée comme une menace existentielle». Le mot est lancé. Alors, comme les États-Unis ne voulaient plus aider militairement les pétromonarchies du Golfe, Israël était devenu le seul pays susceptible d’affaiblir «l’axe de la résistance» constitué de l’Iran, de la Syrie et du Hezbollah. Les pays arabes ont alors trouvé un nouveau gendarme pour les protéger.  

Mais les Israéliens ne sont pas de nature à intervenir au-delà de leurs frontières pour d’autres pays et ils axent leur défense sur leurs propres intérêts. Mais face à l’Iran, ils pourraient faire exception. Le comble reste que les Iraniens, qui ont utilisé les Palestiniens comme cheval de bataille dans leur combat contre Israël, les ont poussés vers une marginalisation que Benjamin Netanyahou a eu du mal à obtenir par sa propre politique. Ainsi on parle de moins en moins d’une solution politique à deux États qui semble pour l’instant enterrée et encore moins de l’annexion de la Cisjordanie. Les Iraniens ont réussi à  faire comprendre aux Palestiniens qu’ils sont isolés et qu’après «le coup de poignard dans le dos de la cause palestinienne», ils avaient intérêt à s’installer rapidement à la table des négociations.

            Le Hamas, qui n’a jamais été un activiste de la création d’un État palestinien, où il serait à coup sûr perdant,  se montre lui-aussi très discret à l’instar de son mentor iranien et il se borne à fustiger le «grave préjudice» à la cause palestinienne sans faire de vagues.

            Israël ne pouvait pas avoir de meilleur allié politique que les Mollahs.

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